Signature d’un accord entre Envision Energy, société de solutions d’énergie renouvelable basée en Chine, et le développeur italien d’énergie renouvelable FERA Australia, pour un projet hybride éolien-stockage de 1 500 MWh, le 17 juillet 2025
Dans la situation actuelle, où la gouvernance climatique mondiale entre dans une période critique et la coopération multilatérale est sous pression, la collaboration sino-européenne en matière de climat fait preuve de résilience et met en avant ses atouts spécifiques, grâce à une quête commune de pragmatisme et de résultats tangibles.
Cette orientation pragmatique se reflète dans le récent consensus politique entre la Chine et l’Union européenne (UE) : une déclaration commune sur le changement climatique à l’issue du 25e Sommet Chine-UE en juillet. Les deux parties y affirment leur volonté d’accélérer le déploiement mondial des énergies renouvelables, afin qu’elles soient accessibles, abordables et bénéfiques pour tous les pays, y compris les pays en développement. Il ne s’agit pas seulement d’une vision, mais aussi d’une méthodologie. Cela marque la transition, pour les deux principales économies et émetteurs de carbone mondiaux, d’une « déclaration d’objectifs » vers une « pratique concrète », afin de combler le fossé considérable entre engagements mondiaux actuels et actions réelles de réduction des émissions.
La concrétisation des objectifs
La Chine et l’UE s’engagent à construire un processus intégré reliant politiques macroéconomiques et pratiques microéconomiques, afin de transformer la volonté politique en coopération tangible.
La coordination approfondie des politiques climatiques entre les deux parties constitue la pierre angulaire de leur coopération. Avant la COP30, il est nécessaire de soumettre des contributions déterminées au niveau national (CDN) couvrant l’ensemble des secteurs et des gaz à effet de serre à l’horizon 2035. Cela élargira le champ d’application à des domaines tels que l’agriculture, les transports, la construction et la consommation, exigeant plus de précision et de coordination dans la conception et la mise en œuvre de politiques.
Dans ce contexte, la Chine et l’UE ont réalisé des avancées notables en matière de coordination des politiques. Par exemple, la Common Ground Taxonomy, publiée conjointement, permet d’évaluer la conformité des objectifs environnementaux, facilitant ainsi la mobilisation des flux transfrontaliers de financements verts.
Sur le plan technologique, la complémentarité entre la Chine et l’UE en matière de technologies vertes constitue une base solide pour leur coopération. L’UE possède une expérience riche en R&D, en élaboration de normes et en commercialisation des technologies de pointe. La Chine dispose d’avantages en matière de transformation technologique, de production à grande échelle et de maîtrise des coûts grâce à sa chaîne industrielle complète et à son vaste marché intérieur.
Prenons l’exemple du photovoltaïque et de l’éolien. La Chine représente respectivement 80 % et 60 % de la production mondiale, tandis que l’Europe dispose d’un marché de consommation écologique mature, de mécanismes de tarification du carbone et d’une forte demande d’installations d’énergies renouvelables avec un taux de croissance annuel moyen de plus de 10 %. Ce modèle « technologie/marché européen + fabrication/chaîne d’approvisionnement chinoise » permettra de transformer des innovations dans les énergies propres en produits accessibles à l’échelle mondiale. L’approfondissement de la coopération sino-européenne favorisera la libre circulation et l’application généralisée de technologies et de produits verts, accélérant la transformation énergétique mondiale.
Pylônes à Laibin (Guangxi), le 10 juillet 2025
Les biens publics accessibles à l’échelle mondiale
L’efficacité des actions climatiques se mesure non seulement à l’ampleur des réductions d’émissions, mais aussi aux bénéfices universels qu’elles génèrent, notamment en matière de développement durable, de lutte contre la pauvreté énergétique et de promotion d’une transition juste.
La Chine et l’UE sont convenues, dans leur déclaration commune, d’assumer un rôle de leadership pour promouvoir une transition juste à l’échelle mondiale dans le cadre du développement durable et de l’éradication de la pauvreté. Celle-ci vise, d’une part, à aider les économies en développement à accéder à des énergies propres abordables, et, d’autre part, à soutenir les industries et les communautés affectées par la transition afin que les bénéfices écologiques soient partagés plus largement.
Le développement vert de la Chine en fournit un exemple concret. Au cours de la dernière décennie, grâce à l’innovation technologique, à la production à grande échelle et à la concurrence sur le marché, le coût actualisé de l’énergie des panneaux photovoltaïques et des éoliennes terrestres en Chine a chuté respectivement de plus de 80 % et 50 %. Cela a non seulement soutenu la croissance rapide de la capacité installée d’énergie renouvelable du pays, mais aussi modifié la structure des coûts des énergies propres à l’échelle mondiale. Selon les données du Programme des Nations unies pour l’environnement, le coût des nouvelles centrales photovoltaïques et éoliennes terrestres est nettement inférieur à celui des centrales à combustibles fossiles.
Cette baisse significative permet à de nombreux pays en développement d’Afrique, d’Asie du Sud-Est et d’Amérique latine, confrontés depuis longtemps à des pénuries d’énergie, d’accéder directement à l’électricité verte et de réduire leur dépendance à l’égard de procédés industriels à forte intensité de carbone. Ces avancées deviennent ainsi un levier essentiel pour leur développement durable.
Le tramway à hydrogène « Qingchun » circule à Changchun (Jilin), le 4 juin 2025.
La stabilité dans un paysage mondial incertain
La publication de la déclaration commune Chine-UE intervient à un moment critique pour la gouvernance climatique mondiale : l’objectif de 1,5 °C fixé par l’Accord de Paris fait face à de graves menaces, et l’écart reste immense entre les engagements annoncés et les actions nécessaires pour l’atteindre. Parallèlement, les tensions géopolitiques et le recul des politiques climatiques dans certains pays jettent une ombre sur la coopération mondiale en matière de climat.
Dans ce contexte, la décision de la Chine et de l’UE de réaffirmer et d’approfondir leur coopération climatique envoie un signal de stabilité indispensable pour le calendrier climatique mondial. À l’avenir, leur coopération devrait s’étendre à des domaines clés de la décarbonisation profonde, notamment le stockage d’énergie, l’hydrogène, les réseaux intelligents, les technologies de capture, d’utilisation et de stockage du carbone. La logique est claire : il faut coopérer et innover afin de réduire le coût des technologies vertes et bâtir conjointement un écosystème mondial partagé, inclusif et durable.
Le changement climatique est un défi planétaire qu’aucun pays ne peut relever seul. La coopération sino-européenne illustre la nécessité de se concentrer sur les actions concrètes. Lorsque des technologies propres seront accessibles, abordables et bénéfiques pour tous les pays, un avenir plus durable, prospère et juste deviendra possible.
*ZHAI YONGPING est conseiller principal du département de stratégies de Tencent et ancien expert en chef des énergies de la Banque asiatique de développement.