Le développement de la Chine est une bonne opportunité pour l’Union européenne, pas un défi, ni une « menace » comme certains peuvent le clamer, a indiqué mardi à Beijing le ministre chinois du Commerce, Wang Wentao, appelant les deux parties à renforcer la communication et à promouvoir une concurrence saine.
Ces remarques surviennent dans un contexte d’incertitudes politiques persistantes entre la Chine et l’UE, notamment avec les questions concernant la provocation de la Lituanie sur la question de Taiwan, alors que le besoin pour les deux parties de trouver des points communs pour travailler ensemble est plus fort que jamais à l’aube d’une complexité croissante du monde, soulignée par le conflit russo-ukrainien actuel.
« Il existe des différences dans les relations bilatérales, mais la coopération entre la Chine et l’Europe est plus forte que la concurrence. Les deux parties ne sont pas rivales, mais partenaires », a précisé le ministre au cours d’une conférence de presse, exprimant ses attentes pour une coopération approfondie dans divers domaines, notamment dans l’avancement de la ratification et de l’entrée en vigueur de l’Accord global sur les investissements (AGI) entre l’Union européenne et la Chine, suspendu par le Parlement européen.
Cette déclaration de Wang Wentao survient alors que le vice-président exécutif de la Commission européenne et commissaire européen au commerce, Valdis Dombrovskis, a annoncé que l’UE organiserait le 1er avril un sommet avec la Chine, afin de désamorcer les tensions. « Il est clair que certains de ces sujets doivent être abordés au plus haut niveau politique, afin de voir dans quelle mesure nous pouvons aligner et améliorer notre coopération », a-t-il laissé entendre.
Le rapprochement des discussions entre la Chine et l’UE représente une « mesure brise-glace » importante, qui répond aux besoins des deux parties, notamment dans un contexte mondial particulièrement complexe.
« Ce sommet prochain entre la Chine et l’UE devrait constituer une opportunité majeure pour briser la glace sur l’accord d’investissement sino-européen », note Yan Shiqiang, un chercheur associé de l’Académie du commerce international et de la coopération économique (CAITEC).
Selon lui, cette rencontre devrait permettre d’apaiser les tensions bilatérales. Si tout se passe bien, l’AGI pourrait être rectifié. Cependant, « étant donné la situation complexe à laquelle est confrontée le monde, divers obstacles et incertitudes risquent toujours d’entraver le processus ».
« Le Sommet Chine-UE est un maillon important pour maintenir la stabilité de la coopération bilatérale. [...] Les dirigeants européens devraient saisir cette opportunité pour échanger leurs points de vue avec la Chine », remarque Zhao Junjie, un chercheur de l’Institut des études européennes affilié à l’Académie des sciences sociales de Chine (ASSC).
Malgré la complexité de la situation, la coopération économique et commerciale entre la Chine et l’UE a maintenu un développement rapide.
En 2021, le commerce bilatéral a dépassé les 800 milliards de dollars (719 milliards d’euros), un niveau record. La Chine reste le plus grand partenaire commercial de l’UE et l’UE est le deuxième plus grand partenaire commercial de la Chine.
L’année dernière, l’accord sur les indications géographiques entre la Chine et l’UE est entré en vigueur. Le nombre de trains de fret entre la Chine et l’Europe a atteint les 15 000, soit une augmentation de 22 % en glissement annuel.
Selon les spécialistes, étant donné le large consensus stratégique et les intérêts communs partagés par la Chine et l’UE, les deux parties devraient renforcer la communication. Il s’agirait d’une issue gagnant-gagnant, mais cela constituerait également une contribution importante à la relance économique mondiale.
Un exemple récent est la signature le 14 février dernier de la liste du quatrième cycle de projets de démonstration pour la coopération sur les marchés tiers entre la Chine et la France (laquelle occupe actuellement la présidence du Conseil de l’UE), pour un montant total de plus de 1,7 milliard de dollars.
Alors que le Sommet Chine-UE à venir survient à un moment critique et suscite de grandes attentes, les spécialistes suggèrent qu’il faut toutefois éviter d’avoir de trop grands espoirs sur l’obtention de résultats en une seule rencontre.
« L’une des conditions préalables est que l’Europe accomplisse son indépendance stratégique et ne suive pas tout le temps les Etats-Unis, voire ne devienne "complice" des Etats-Unis pour contenir la Chine », souligne Zhao Junjie.
Au cours de ces deux dernières années, certains politiciens européens − y compris au sein du Parlement − se sont exprimés de façon répétée contre la Chine, suivant de près la pression exercée par les Etats-Unis à son encontre, ce qui a engendré un manque de confiance mutuelle entre la Chine et l’UE.
« Même si la coopération économique et commerciale n’a pas suivi cette tendance et continue d’atteindre des niveaux records, elle n’avance que sur une jambe. L’aspect politique reste une jambe courte et cette situation n’est pas stable », signale Zhao Junjie.