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15 jours en Chine

2019-01-03 14:09:00 Source:La Chine au présent Auteur:MARIE-FRANÇOISE BUFFET
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法语词典
L’auteure admire l’esprit facétieux de la statue de bronze.
 
 
MARIE-FRANÇOISE BUFFET*
 
 
Mon amie Marie et moi-même souhaitions nous rendre en Chine depuis longtemps. Seule Marie avait déjà visité cette terre lointaine, une expérience qui datait de 25 ans. Or mon fils travaille à Beijing depuis un an, une excellente raison pour mettre notre projet de voyage à exécution et partir faire une incursion de 15 jours à Beijing, Pingyao et Xi’an.

 

Premières impressions

 

En dépit des nuages cotonneux qui masquent le sol, depuis le lever du jour, nous guettons par le hublot les bribes de paysage qui pourraient apparaître. Mais rien, jusqu’au moment où nous attaquons la descente sur Beijing. Soudain émerge dans la brume matinale un monde de hautes tours, de formes et de couleurs variées. Elles semblent organisées pour constituer des unités d’importance variables posées sur des espaces verts. Nombreuses sont celles dont les fenêtres encore sans vitres ressemblent à des regards profonds tournés vers l’avenir de cette périphérie urbaine. D’autres tours, achevées, capturent les rayons du soleil levant et les redistribuent dans un étincellement qui apporte force et vie tout alentour.

 

Notre première impression est double. D’une part l’aspect conquérant de la verticalité minérale des immeubles semble renvoyer au modèle classique de la ville américaine. Mais en même temps nous avons un doute car nous sommes surprises par la présence systématique d’espaces verts dans chaque ensemble. À notre grand étonnement, ces pigments de verts variés ne sont parfois que les bâches de protection des sols. Ils sont comme un écho affaibli aux verts naturels des espaces reboisés et des nombreuses pépinières qui s’imposent dans une campagne caractérisée, à cette saison des moissons, par l’ocre-jaune des champs de céréales. D’autre part, dans l’espace rural subsistent çà et là des groupes de bâtiments bas et gris qui contrastent avec les unités agricoles aux toits bleu vif et les petits immeubles de trois ou cinq étages. La campagne semble gagnée par une évolution autonome, qui vise à adapter la société rurale à une réorganisation des terroirs pensée comme nécessaire et inévitable.

 

Notre seconde impression est d’être en face d’un développement puissant. Alain Peyrefitte a écrit en 1973 un essai intitulé Quand la Chine s’éveillera… le monde tremblera. Ce réveil est dépassé depuis un certain temps et le dragon chinois avance aujourd’hui à grand pas et sous des formes multiples.

 

Tout le monde pense connaître la Chine, un pays vaste, facile à situer sur un planisphère et peuplé de plus d’un milliard d’habitants. Mais nous n’avions pas réellement intégré ce que cela représentait dans la vie quotidienne ! Nos repères se construisent à partir de ce que nous connaissons. Marie s’est rendue à l’évidence que 25 ans après son premier voyage elle ne reconnaissait rien ou presque ! Si les parcs à vélos jaunes correspondaient bien à ses souvenirs, elle a aussi reconnu la locomotive de son voyage … devenue une pièce de musée à l’entrée d’un parc public où mon fils nous avait emmenées ! Pour moi, le rapport d’échelle entre l’Europe et la Chine était resté à l’état théorique. Deux jours de repérage et d’expérimentation des transports urbains en métro et en bus ont conduit au réajustement rapide des représentations spatiales et réalités du terrain à parcourir.

 

Vient enfin notre première journée pour la visite des sites impériaux. En ce début de mois de juin, une chaleur caniculaire pèse sur Beijing. Mais, surprise ! Alors que la pollution est régulièrement évoquée, nous respirions tout à fait bien et les Chinois qui nous entouraient aussi. Immergées que nous sommes dans la foule avec notre guide francophone, les chaussures de marche confortables et légères deviennent une évidence. En fin de journée, nous étions enchantées par la découverte de ces lieux qui donnaient vie à ce que nous avions appris sur la civilisation chinoise ancienne.
 
 
Cour de l’hôtel traditionnel à Xi’an où l’auteure a logé.

 

La vie en Chine : scènes de rues et les gens

 

L’un de nos premiers étonnements a été de voir très peu les vieux Pékinois. C’est notre guide qui nous a fourni la réponse : « Ah ! À Beijing, vous les verrez souvent au temple du Ciel. » Et en effet, ils étaient là, sous la grande galerie. Les hommes jouaient aux cartes, les femmes tricotaient en bavardant. Dans le jardin des groupes d’enfants s’exerçaient à dessiner un arbre vénérable et magnifique sous la conduite d’un maître. Nous avons eu le sentiment que la solidarité entre les générations est un élément important dans l’équilibre social. Dans la zone résidentielle de Beiwan, où nous étions logées, lorsque nous sortions vers  

 

19 h pour aller dîner, nous franchissions un canal et nous empruntions une rue bordée de petites boutiques. Chaque soir, sur le pas de porte de l’une d’elles, assis à côté de sa mère, derrière une petite table, un garçon d’environ sept ou huit ans, faisait ses devoirs et il y avait assis autour d’eux un groupe de personnes plus âgées qui discutait avec l’enfant penché sur son cahier, sans doute des grands parents, des voisins ou des amis. Scène de rue qui nous a frappées parce qu’elle illustrait bien cette solidarité.

La gastronomie n’est pas un vain mot en Chine et elle a été malgré tout notre second étonnement. Que ce soit dans le petit marché de la zone résidentielle de Beiwan et plus encore dans les supermarchés, nous avons été frappées par la variété, l’abondance et la qualité des produits alimentaires proposés. Même observation pour les restaurants : nous parlons encore du repas gastronomique de raviolis au restaurant Defachang à Xi’an, de l’excellente cuisine de l’auberge Jingsheng, où nous avons suscité la curiosité discrète et souriante des serveuses et des cuisinières, sans oublier le canard laqué dégusté à Beijing. Si dans la plupart des cas nous étions accompagnées, nous avons aussi voulu expérimenter seules la découverte de petits restaurants. Par gestes, avec l’aide des menus illustrés, des traducteurs sur smartphones et avec quelques fous rires franco-chinois, nous avons surmonté les difficultés de communication et toujours bien dîné.

 

Troisièmement, la qualité des relations humaines. Les parcs et jardins sont nombreux à Beijing. Ce sont des lieux attractifs et calmes, que les Pékinois et les touristes fréquentent volontiers. Les arbres majestueux et les massifs fleuris constituent un havre de paix contre lequel se brise la rumeur de la ville. Dans le parc Linglong, au détour d’une allée, attirées par de la musique, nous avons rejoint un public de promeneurs qui écoutaient des chanteurs participant à une forme de karaoké champêtre. Ce contraste entre l’activité d’une grande métropole et des espaces préservés, nous l’avons retrouvé lors de notre errance dans un hutong de Beijing. Ses ruelles calmes en ce début de dimanche après-midi, avec les vélos et petits engins motorisés appuyés aux murs, évoquaient un vieux village chinois dans la ville. À Beijing comme à Xi’an et Pingyao, nous avons toujours reçu une aide affable, patiente, souriante et efficace ! Lors de notre visite au Groupe international de publication de Chine, nous avons échangé librement avec des Chinoises sur nos impressions de touristes. Bien sûr, à la rédaction de La Chine au présent, tout le monde parle français ! Presque toutes avaient séjourné en Europe et dans la majorité des cas, en France, en Belgique ou en Suisse. Nous avons été sensibles au contact facile et direct qui s’est établi grâce à leur hospitalité, leur curiosité et leur humour.
 
 
L’auteure (à gauche) et son amie dans une rue commerçante à Pingyao
(PHOTOS FOURNIES PAR MARIE-FRANÇOISE BUFFET) 

 

25 ans après

 

Que de changements 25 ans après ! La Chine de 1993 s’est estompée… Aujourd’hui on pourrait dire qu’une personne équivaut à un smartphone. Dans les rames confortables du métro flambant neuf, et climatisées, chacun a les yeux rivés sur son smartphone…que l’on retrouve dans les supermarchés, les centres commerciaux et les restaurants pour régler des emplettes ou des prestations. Il semblerait que cet objet est devenu un élément incontournable de la vie quotidienne … Mais la monnaie papier circule encore dans les restaurants, dans les échoppes et sur les marchés, et partout où les acteurs sont d’accord pour faire une transaction commerciale.

 

Au départ de la gare de Beijing, le TGV Fuxing, ultra confortable qui glisse sans bruit, sans vibrations, nous permet d’avoir une vue dégagée sur les régions que nous traversons : de Beijing à Pingyao, puis à Xi’an. Nous avons eu sous les yeux les différentes étapes de l’évolution des campagnes chinoises : au premier plan, près des voies, encore quelques villages traditionnels, constructions de plain-pied qui prenaient de la place au sol, au second plan, des immeubles de quatre ou cinq étages qui ont été construits sans doute dans les années 1990-2000, et sur la ligne d’horizon, des groupes de tours neuves ou en construction, entre 15 et 20 étages au moins.

 

D’une façon générale, le patrimoine est présent partout et c’est tant mieux car seuls les lieux historiques permettent à Marie de retrouver ses souvenirs. Question changement, l’expérience de dormir sur un kang (lit de briques chauffé par-dessous) dans une demeure ancienne transformée en hôtel nous a permis de donner une réalité aux descriptions faites par Mo Yan dans La dure loi du karma !

 

Changements mais aussi découvertes. En particulier celle du yaodong, une maison-grotte, dans le lœss et de l’évolution d’une famille qui fabrique des copies des guerriers en terre cuite, des statuettes pour les touristes et des guerriers grandeur nature ! La découverte des processus de fabrication actuelle nous a conduites à travers les rangs d’une armée de réserve et des fours chauds jusqu’à l’ancien habitat troglodyte composé de deux pièces qui sert actuellement de réserve. La famille avait migré dans une maison moderne et avait commencé la construction d’un hôtel destiné à l’accueil des touristes. Autres temps, autres projets. Il nous semble que la Chine se situe dans une perspective de tourisme durable.

 

Voilà, 15 jours dans le nord de la Chine, c’est peu et pourtant nous avons vu et expérimenté tant de choses. L’avion du retour a été l’occasion d’apercevoir une dernière fois la grande muraille, les piémonts des montagnes du nord et les zones désertiques. Et toutes ces images se sont combinées à tout ce que nous avions vu au cours de notre périple. Touristes, nous étions, touristes, nous demeurons…Mais avec une étincelle nouvelle dans nos yeux. Quand nos amis nous ont demandé : « Alors, la Chine ? », nous avons raconté, montré les photographies, et lorsque nous nous sommes enfin arrêtées, l’un d’entre eux s’est exclamé : « Continuez, continuez à nous faire rêver. »

 

*MARIE-FRANÇOISE BUFFET est une lectrice fidèle de La Chine au présent.

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