Thomas Karlsson pose avec les participants de Spark Club, un club de débats et d’éloquence.
Il est 4 h du matin et le vibreur de sa smartwatch Amazfit tire Thomas Karlsson de son sommeil. Il se réveille, verse deux yuans sur une application de son smartphone pour un programme caritatif, part pour sa marche matinale de 6 km, puis prépare le petit-déjeuner pour la famille avant de monter sur l’estrade pour donner des cours à 8 h.
M. Karlsson, enseignant suédois à l’Université Union de Beijing (UUB), vit en Chine depuis plus de 16 ans. En 1997, il a commencé à apprendre le chinois à l’Université de Lund en Suède. À l’époque, les téléphones portables et l’Internet n’étaient pas encore très répandus. Il se servait des manuels, des dictionnaires volumineux et des cassettes audio pour apprendre le chinois. « C’était alors un véritable défi », se souvient-il. Il passait des heures à consulter le dictionnaire pour déchiffrer un article d’une page en chinois.
« La Chine n’était pas la deuxième économie mondiale, et l’apprentissage du chinois n’était pas synonyme de récompenses commerciales ou d’opportunités d’emploi », remarque-t-il. Cependant, il pouvait ressentir le potentiel énorme de la Chine. En 2006, grâce à son excellent résultat au test officiel d’aptitude à la langue chinoise, il a obtenu une bourse pour un programme d’été de cinq semaines à l’Université des langues et cultures de Beijing. Il pouvait enfin visiter la Cité interdite et le Palais d’été, dont il avait tant entendu parler. Il ne savait pas que ce court séjour le conduirait à vivre à Beijing pendant près de deux décennies.
Poursuivre son rêve
Après avoir terminé son programme d’études, M. Karlsson a travaillé à Beijing en tant qu’analyste de marché. En 2008, l’année où Beijing a organisé les Jeux olympiques d’été, il s’est marié, puis l’année suivante, il a commencé à enseigner la gestion d’entreprise à l’UUB. « L’enseignement s’est avéré être ma véritable vocation », constate-t-il.
Témoin des changements considérables qu’a connus la Chine, M. Karlsson mène une vie hors de l’ordinaire à Beijing. Le pays lui a offert de nombreuses possibilités d’épanouissement personnel. « Si je n’étais pas venu à Beijing, je n’aurais jamais eu la chance d’enseigner les disciplines que je pratique et de rencontrer tant d’étudiants d’horizons différents », souligne-t-il. Aujourd’hui, grâce au haut débit et à la 5G, il peut communiquer avec les étudiants dans les universités partenaires de l’UUB en Russie, au Monténégro ou au Mexique, tout en prenant le métro.
Malgré ses journées de cours chargées, M. Karlsson a postulé pour une bourse à temps plein à l’Université d’économie et de commerce international. En 2022, il a obtenu son doctorat en économie. « J’étais particulièrement intéressé par la technologie de la blockchain, et je sais que la Chine devient rapidement le leader des applications de blockchain en dehors de l’espace de crypto-monnaie. J’ai donc rédigé ma thèse dans ce domaine », explique-t-il. Il avait 44 ans à l’époque. « Il est toujours temps de poursuivre ses rêves, sauf si l’on décide d’abandonner. Relever des défis apparemment impossibles et aider ceux qui vous entourent rend la vie colorée. »
Thomas Karlsson donne un cours.
Inspirer les jeunes
Répondre à la demande croissante en entrepreneuriat de ses étudiants, c’est ce qui pousse M. Karlsson à aller de l’avant. En tant que responsable d’un programme de commerce international à l’UUB, il passe des heures à concevoir des cours de commerce et d’économie. Il forme également les étudiants à effectuer des compétitions de simulation commerciale.
L’idée vient de GLO-BUS, un jeu de simulation commerciale en ligne créé par deux professeurs américains de l’Université d’Alabama. Dans ce jeu, les étudiants gèrent virtuellement une entreprise multinationale qui produit des marchandises destinées au marché mondial. Ils doivent planifier la production, le marketing et le financement et prendre des décisions pour l’entreprise, en concurrence directe avec d’autres équipes dans le monde. Par rapport aux cours traditionnels en classe, ces jeux de simulation sont plus pratiques et permettent aux étudiants de résoudre des problèmes réels. En tant qu’enseignant, M. Karlsson modifie son approche pédagogique, passant d’un cours magistral à un coaching plus pratique, et la récompense est de voir les étudiants avoir plus confiance en eux et développer leurs capacités entrepreneuriales.
Le gouvernement chinois encourage la création d’entreprises et l’innovation. M. Karlsson encourage également ses étudiants à créer leur propre entreprise. Il en résulte des idées créatives qui se concrétisent par le développement de nouvelles marques. Le gâteau Iris en est un exemple. M. Karlsson considère qu’il est le produit de démarrage le plus réussi de l’incubateur de l’UUB. Il propose des gâteaux d’anniversaire au design artistique, commercialisés exclusivement sur WeChat, pour réduire les coûts de publicité.
M. Karlsson donne des conseils à ses étudiants sur la conception de leur modèle d’entreprise, l’établissement d’une base de données des clients fidèles et la réalisation d’études de marché pour connaître les préférences des clients. Tous ces efforts visent à les rendre plus compétitifs.
Le gouvernement chinois comprend qu’outre la créativité et la volonté de prendre des risques, les jeunes entrepreneurs ont également besoin d’un système de soutien avec des politiques favorables. Pour ce faire, des incubateurs de start-up ont été mis en place dans des universités et des grappes d’innovation au niveau de la ville. À mesure que les infrastructures de l’entrepreneuriat se développent et s’améliorent, le nombre de jeunes qui osent créer leur propre entreprise et veulent réaliser leurs rêves augmentera.
Thomas Karlsson et sa famille
L’essence de l’esprit chinois
Au plus fort de la pandémie en 2020, M. Karlsson a rencontré un groupe de donneurs de sang bénévoles, dont certains l’avaient fait des centaines de fois. Leur expérience et le besoin urgent de sang à l’époque l’ont incité à devenir un donneur régulier. Selon lui, de tels actes de philanthropie, terre à terre et souvent passés sous silence, sont l’essence de l’esprit chinois.
« La société chinoise rend le don si facile et si gratifiant », note-t-il. En appuyant simplement sur une touche de son smartphone tous les matins, il peut participer aux initiatives de collecte de fonds en ligne du géant technologique Tencent visant à aider les personnes dans le besoin. Il peut contribuer à la plantation d’arbres dans les déserts de Mongolie intérieure et du Xinjiang et à la préservation des océans en effectuant de petites tâches quotidiennes, comme la collecte de points d’énergie verte sur la plateforme de paiement mobile Alipay. « Ce sont tous de bons moyens pour participer au bien-être public et aux actions caritatives. »
Il sort son smartphone et partage ses « petites fleurs rouges » sur une application de bienfaisance de Tencent. Fondé en 2018, ce programme visait à l’origine à enregistrer le comportement des utilisateurs dans ce domaine, afin que chaque bonne action, la plus infime soit-elle, puisse être enregistrée et encouragée. En faisant don d’une « petite fleur rouge », vous pouvez contribuer à des projets caritatifs qui comprennent la protection de la biodiversité, la prise en charge des personnes âgées dans les zones rurales et l’aide aux enfants des zones rurales à visiter des musées. Les donateurs décident du programme à soutenir en fonction de leurs propres intérêts.
« La bienfaisance en ligne est une innovation du gouvernement et des entreprises chinoises, ce qui a profondément changé notre façon de contribuer aux bonnes œuvres », explique M. Karlsson. Les Chinois attachent de l’importance aux bonnes actions quotidiennes qui peuvent servir d’exemple à la société.
M. Karlsson souligne que les économistes se concentrent souvent sur le rôle du gouvernement dans l’allocation des ressources, mais oublient parfois le rôle crucial du gouvernement dans la définition des bonnes « règles du jeu » et dans l’orientation des marchés par des mesures incitatives. Le gouvernement chinois encourage les entreprises à contribuer au bien-être social et à la protection de l’environnement. M. Karlsson estime que la conception d’un tel système mérite d’être apprise.
Aujourd’hui, la numérisation et l’intelligence artificielle sont des tendances essentielles du développement technologique. L’importance de la population chinoise représente une base solide pour le développement de la numérisation. En tant que nouveau phénomène, la bienfaisance numérique démontre de plus en plus sa vitalité et son attrait. Le gouvernement accorde une grande importance à son intégration dans l’édification de la civilisation écologique, promouvant ainsi la transformation verte, qui est sans précédent.
La philosophie de M. Karlsson est simple : améliorer la vie de tous. Pour y parvenir, l’esprit chinois, la sagesse chinoise et les solutions chinoises sont essentiels. « Cette belle planète qui est la nôtre nécessite la participation de tous pour la protéger », conclut-il.