
L’équipe « Les amis de la faune de l’Himalaya » travaille dans des conditions difficiles en altitude.
Surnommé « le toit du monde » et « le château d’eau de l’Asie », le plateau Qinghai-Xizang abrite un écosystème unique en raison de son altitude moyenne dépassant 4 000 m. Ce milieu exceptionnel permet non seulement la reproduction d’espèces rares, mais influence également le climat en Asie, voire dans le monde.
Depuis de nombreuses années, « Les amis de la faune de l’Himalaya », une équipe dirigée par Zhang Lina, immortalisent la faune sur le plateau Qinghai-Xizang pour promouvoir la protection environnementale et le développement durable, tout en présentant au monde les pratiques chinoises de conservation écologique.

Zhang Lina (g.) et l’une de ses coéquipières en tenue ghillie
Unis dans la diversité
Au départ, Mme Zhang et ses partenaires se sont consacrés à la documentation de la culture tibétaine. Ce n’est qu’à une occasion du tournage dans la prairie de Qiangtang, dans le nord du Xizang, que leur carrière a pris un tournant décisif.
« Nous avons vu de nos propres yeux des troupeaux d’antilopes tibétaines migrer librement, et des gardes locaux protéger cette terre et ces créatures avec une sobriété admirable », se souvient Mme Zhang. Elle a été profondément émue par la vitalité des animaux sauvages et par les actions résolues des protecteurs. « Nous avons réalisé que protéger ces vies en les documentant serait une mission plus urgente », confie-t-elle.
Cette équipe est composée d’une dizaine de membres, dont l’âge moyen est de 35 ans et la majorité est des femmes. Dans le cadre du travail de terrain exigeant, certaines qualités attribuées aux femmes se révèlent particulièrement utiles. « Pour observer les antilopes tibétaines qui élèvent leurs petits ou les grues à cou noir en période d’incubation, il faut rester longtemps accroupi en silence pour saisir les moments les plus subtils. Ce travail exige une patience et une concentration exceptionnelles », explique-t-elle.
Au sein de l’équipe se trouvent des Han, des Tibétains, des Mongols, des Yi et des Mandchous, chacun apportant des atouts spécifiques. Les Mongols, par exemple, possèdent une connaissance approfondie des écosystèmes des prairies, tandis que les Tibétains facilitent la communication avec les communautés locales.
Leurs parcours variés, allant de la sociologie à l’anthropologie en passant par les sciences environnementales, permettent à l’équipe de mener un travail intégrant recherche, vulgarisation et action communautaire.

La moto est un moyen de transport écologique et pratique pour travailler en pleine nature.
De la documentation à la mobilisation
Le travail de l’équipe s’articule autour de trois axes : la documentation et la recherche, l’éducation à la nature, et la collecte d’histoire orale. Zhang Lina supervise la documentation et la recherche, tandis que Yang Xu, cofondatrice de l’équipe, coordonne l’éducation et la collecte des savoirs locaux.
La documentation et la recherche constituent le cœur de l’activité. Ces dernières années, l’équipe a parcouru plusieurs réserves naturelles nationales notamment Qiangtang, Selincuo et le bassin du cours moyen du Yarlung Zangbo. Elle suit à long terme l’état de survie d’espèces emblématiques et observe des phénomènes globaux comme la fonte des glaciers et les changements des prairies.
« Pour filmer sans déranger les animaux, nous installons des tentes de camouflage et y restons un ou deux jours jusqu’à ce que les animaux s’habituent à notre présence », explique-t-elle. L’équipe utilise également des drones silencieux modifiés et des caméras infrarouges pour la surveillance nocturne.
Ces images ont une valeur scientifique et pédagogique. L’équipe produit du matériel multilingue pour sensibiliser le public aux écosystèmes de haute altitude et aux méthodes scientifiques de gestion des conflits homme-faune. Elles fournissent aussi des échantillons pour la recherche scientifique et des références pour la formulation de politiques de conservation et la création de parcs nationaux. « Nous sommes convaincus que la valeur de ces données ne fera que croître pour l’étude des transformations écologiques sur le plateau », confie Mme Zhang.
L’éducation à la nature est une initiative tournée vers l’avenir. Des cours et ateliers pratiques destinés aux jeunes, au personnel des réserves naturelles et aux visiteurs diffusent connaissances et principes en matière de conservation et encouragent l’engagement citoyen.
Le projet « Histoire orale des gardiens du plateau Qinghai-Xizang » vise à préserver le savoir local. L’équipe a interviewé plus de 500 personnes, notamment des gardes, des chercheurs et des bergers, dont l’expérience transmise de génération en génération complète la science moderne. « Les bergers locaux sont capables d’identifier les espèces sauvages et d’évaluer leur distance grâce aux cris. Ces connaissances fondées sur les observations à long terme fournissent une référence précieuse pour comprendre les changements dans les écosystèmes locaux », note Mme Zhang.

Des cours de vulgarisation destinés aux élèves au Musée du Xizang (PHOTOS FOURNIES PAR ZHANG LINA)
Les échos à l’échelle mondiale
L’équipe est motivée malgré le travail exigeant et risqué sur un tel terrain. « Parfois, c’est simplement la curiosité de comprendre pourquoi une petite fleur peut pousser en altitude », remarque Mme Zhang. Ce sont cette passion et cette curiosité qui leur permettent de surmonter les difficultés.
La persévérance a porté ses fruits. L’équipe a produit plusieurs documentaires tels que Au bord du Yarlung Zangbo, Animaux extraordinaires du Xizang ou Les créatures de Qiangtang, capturant des moments rares comme la reproduction des antilopes tibétaines ou l’élevage des jeunes grues à cou noir, tout en respectant l’éthique écologique.
Leurs œuvres ont été présentées à l’international, comme la deuxième phase de la 15e Conférence des Parties (COP15) à la Convention des Nations unies sur la diversité biologique à Montréal ou dans le cadre du Programme Information pour tous de l’UNESCO « IFAP 2024 au Xizang », suscitant un vif intérêt.
Mme Zhang constate que ce qui touche le plus ses pairs internationaux n’est pas la technique, mais la manière dont les films incarnent l’harmonie entre l’homme et la nature.
Elle raconte qu’un garde tibétain est resté deux heures immobile dans le vent glacial afin de ne pas déranger un troupeau d’antilopes tibétaines en migration. « Ce geste ne relève pas d’une contrainte extérieure, mais d’un profond respect de la vie, enraciné dans la culture locale. »
Grâce à ces images et récits authentiques, le plateau Qinghai-Xizang illustre au monde l’exemplarité et la vitalité des pratiques de conservation écologique chinoises.