Des pièces d’un Airbus transportées par un porte-conteneurs arrivent à Tianjin, le 6 mars 2024. 

Pour attirer davantage les investissements étrangers, le Rapport d’activité du gouvernement 2024 prévoit de continuer à réduire la liste négative d’accès au marché pour les investissements étrangers, d’encourager les entreprises à capitaux étrangers à réinvestir en Chine, de traiter les entreprises étrangères comme les entreprises locales et de garantir de meilleurs services aux investisseurs étrangers. Ces politiques visent à attirer davantage d’investissements étrangers et offrent de nouvelles opportunités sur un marché chinois plus ouvert.

La Chine et l’Europe sont réciproquement d’importants partenaires commerciaux et d’investissement. Les trains de fret Chine-Europe ont permis de créer une chaîne de production et d’approvisionnement stable, en reliant la Chine à 25 pays d’Europe. À la fin du mois de février 2024, plus de 85 000 convois avaient circulé sur les lignes. Quelles opportunités le marché chinois peut offrir aux entreprises européennes ? Pour répondre à cette question, lors des « Deux Sessions » de l’Assemblée populaire nationale (APN) et du Comité national de la Conférence consultative politique du Peuple chinois (CCPPC), Lu Shaye, membre du Comité national de la CCPPC et ambassadeur de Chine en France, a donné une interview exclusive à La Chine au présent.

Un taux de bénéfices élevé

Le capital est toujours à la recherche du bénéfice. C’est ce qui explique l’attrait du marché chinois pour les capitaux étrangers, attirés par un taux de rendement supérieur.

« Les entreprises françaises restent très optimistes quant au marché chinois. Elles savent qu’elles peuvent gagner encore et réaliser des bénéfices en investissant en Chine », déclare M. Lu. Selon l’Administration nationale des Changes, ces cinq dernières années, le taux de rendement des investissements étrangers a atteint 9,1 % en Chine, contre environ 3 % en Europe et aux États-Unis, et entre 4 % et 8 % dans les économies émergentes.

Face à l’affirmation des médias étrangers selon laquelle « un grand nombre de capitaux étrangers quittent la Chine », M. Lu parle de « l’arbre qui cache la forêt » pour décrire leur manque d’objectivité. La Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement note, dans son Rapport sur l’investissement dans le monde 2023, que la dynamique mondiale des investissements directs étrangers (IDE) en 2023 s’est globalement affaiblie. La Chine a connu une baisse des entrées des IDE de 6 %, mais il convient de noter que les États-Unis, principaux bénéficiaires des IDE, ont vu leurs entrées d’IDE diminuées de 3 %, les IDE dans les pays en développement ont chuté de 9 % sur un an, ceux de l’ASEAN, considérée comme le moteur de croissance des IDE, de 16 %, et les flux entrants vers le reste de l’UE, à l’exception du Luxembourg et des Pays-Bas, ont même diminué de 23 %.

M. Lu indique que malgré les grands titres des médias occidentaux, un certain nombre d’entreprises multinationales dotées d’une vision stratégique ne se sont pas retirées, mais ont au contraire accéléré le rythme de leurs investissements en Chine.

En 2023, les nouveaux investissements étrangers en Chine ont augmenté de 39,7 % sur un an. Rien qu’en janvier 2024, 4 588 nouvelles entreprises à capitaux étrangers se sont installées en Chine, soit une augmentation de 74,4 % en glissement annuel. « Cela reflète que la plupart des entreprises étrangères sont optimistes quant aux perspectives du marché chinois à long terme et restent confiantes dans leurs investissements en Chine », souligne M. Lu.

Un train de fret Chine-Europe transportant des porcelaines et des peintures destinées aux échanges sino-français part de Yiwu (Zhejiang) pour Paris le 1er mars 2024.

Un système manufacturier complet

Le marché chinois, avec ses avantages uniques, est une destination attrayante pour les investissements étrangers.

Historiquement, les industries européennes dépendaient du pétrole et du gaz à bas prix fournis par la Russie. Avant le conflit russo-ukrainien, l’Europe dépendait du gaz russe à hauteur de 45 % et l’Allemagne à 55 %. Cependant, après le déclenchement du conflit, les coûts énergétiques industriels européens ont grimpé en flèche, obligeant l’Europe à acheter du gaz aux États-Unis à un prix quatre fois plus élevé. Quant à l’Allemagne, puissance manufacturière énergivore, il ne lui reste que l’option de la délocalisation.

« Les États-Unis ont accordé un grand nombre de subventions pour attirer ces entreprises européennes. Mais à cause de l’exode de ses industries manufacturières il y a des décennies, les États-Unis n’ont plus la base des chaînes industrielles. Sans une chaîne industrielle solide en amont et en aval pour la soutenir, le développement de l’industrie manufacturière est une chimère », fait savoir M. Lu.

En revanche, la Chine possède le système manufacturier le plus complet au monde. Selon l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), la part de la Chine dans la production manufacturière totale est trois fois supérieure à celle des États-Unis, six fois supérieure à celle du Japon et neuf fois supérieure à celle de l’Allemagne.

Le Rapport d’activité du gouvernement 2024 propose de continuer à assouplir l’accès aux marchés étrangers et d’annuler complètement les restrictions d’accès aux industries manufacturières pour les investissements étrangers.

M. Lu explique que cela reflète l’attitude positive du gouvernement chinois et sa ferme détermination à s’ouvrir au monde extérieur. Cela signifie que le marché chinois de l’industrie manufacturière sera plus ouvert, offrant plus d’opportunités aux entreprises étrangères.

« Tant que nous ferons du bon travail de notre côté et que nous continuerons à construire un environnement d’affaires de premier ordre orienté vers le marché, l’État de droit et l’international, la Chine continuera à être le choix des investisseurs étrangers », confie M. Lu.

Un marché chinois concurrentiel

Valdis Dombrovskis, vice-président exécutif de la Commission européenne, a récemment souligné le déséquilibre des relations commerciales entre la Chine et l’Europe, mettant en avant l’énorme excédent commercial de la Chine, et une ouverture du marché chinois qui ne correspond pas à celle de l’UE.

Cependant, M. Lu voit les choses différemment. Pour lui, la Chine n’est pas seulement un « marché », mais aussi un « terrain de jeu » pour les entreprises chinoises et étrangères. « Dans un marché concurrentiel comme celui de la Chine, les entreprises étrangères doivent faire face à la concurrence. Si elles évitent la concurrence, elles sont vouées à l’échec », déclare M. Lu.

Il a également souligné que l’UE a pris de nombreuses mesures protectionnistes contre la Chine ces dernières années en matière d’investissement et de commerce.

Récemment, l’Europe a exprimé son intention de « mettre en œuvre des restrictions commerciales à l’encontre des importations de produits solaires de la Chine », affirmant qu’un grand nombre de panneaux solaires chinois « écrasait » les fabricants locaux.

M. Lu a rétorqué que les panneaux solaires et les équipements éoliens chinois favorisent la transition énergétique, la lutte contre le changement climatique dans le monde entier et la fourniture de nouveaux produits à faible coût. « Selon l’objectif de la COP28, d’ici à 2035, la capacité mondiale installée d’énergie renouvelable devrait être triplée par rapport à 2020. Je suis convaincu que l’Europe ne sera pas en mesure d’atteindre cet objectif si elle ne coopère pas avec la Chine. »

Face à la pression à la baisse sur l’économie mondiale et aux graves défis posés par les conflits géopolitiques, M. Lu souligne que la mondialisation économique est une tendance irréversible. « Qu’il s’agisse de la Chine, de la France ou de l’Europe, les difficultés doivent être surmontées à travers la consultation et le dialogue, et toutes les parties doivent résister conjointement au découplage et à la rupture des chaînes. »