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L’ivresse du succès

2022-05-30 16:02:00 Source:La Chine au présent Auteur:SUDESHNA SARKAR*
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Lorsque les Chinois célèbrent la Fête du Printemps, une période de réunions familiales et de festins, l’Afrique du Sud célèbre quant à elle la naissance de son industrie viticole. C’est un heureux hasard car l’industrie du vin sud-africain peut profiter du marché chinois en plein essor, qui croît d’autant plus pendant la plus importante fête du pays.

Le 2 février, les vignerons sud-africains ont porté un toast au 363e anniversaire de leur industrie, la seule au monde à avoir un anniversaire officiel. L’histoire du premier vin fabriqué en Afrique du Sud se trouve dans le journal de Johan Anthoniszoon van Riebeeck, un employé de la Compagnie néerlandaise des Indes orientales, arrivé en 1652 pour prendre ses fonctions.

On lui attribue la création d’un vignoble de cépage noir (vin rouge) dans l’actuelle ville du Cap. Il écrit dans son journal le 2 février 1659 : « Aujourd’hui, Dieu soit loué, le vin a été fait pour la première fois à partir de raisins du Cap ».

La France, en revanche, a commencé à produire du vin au Ve siècle avant JC. Il n’est donc pas étonnant que le vin français ait dominé le marché chinois en bouteilles importées jusqu’en 2015, représentant 42 % du volume total et 46 % de la valeur totale.

Cependant, un rival qui a commencé à produire du vin bien plus tard – vers le XIXe siècle – a rattrapé son retard : l’Australie.

En 2019, les marques de vin australien ont conquis plus de 35 % du marché chinois, reléguant le vin français à la deuxième place avec environ 29 %. Les observateurs du marché ont attribué cela à l’accord de libre-échange sino-australien entré en vigueur en décembre 2015, à la réduction des tarifs, à la proximité des deux pays et à l’augmentation du nombre d’étudiants et de touristes chinois en Australie.

Pourtant, cette année, la part de marché du vin sud-africain en Chine était inférieure à 1 %.

Une déchéance salutaire

Les choses ont commencé à changer radicalement en 2020. Les relations bilatérales sino-australiennes se sont détériorées et la Chine a commencé à imposer des droits de douane sur une gamme de produits australiens allant de l’orge aux produits miniers. Une enquête antidumping a également été menée sur le vin australien à la suite d’une plainte. Les droits de douane, de 107 à 212 % sur le vin australien établis à partir du 26 mars 2021, ont été portés à 116 à 218 %, une mesure qui restera en place pendant cinq ans. Alors que les entreprises viticoles australiennes ont perdu près de 94 % du marché chinois par rapport à 2019, le vin sud-africain a connu une augmentation de plus de 100 % la même année. Plus spectaculaire encore, en 2020, la hausse était de près de 190 %, selon les données du Wines of South Africa (WoSA), une organisation à but non lucratif promouvant l’exportation du vin sud-africain.

L’opportunité créée par les restrictions sur le vin australien a été salvatrice pour l’industrie vinicole sud-africaine qui a subi les confinements et quatre périodes d’interdiction des ventes intérieures durant la pandémie, entraînant la perte de 21 000 emplois jusqu’en octobre 2020, selon le WoSA.

Alors que les viticulteurs sud-africains placent leurs espoirs sur le marché chinois, Marcus Ford, responsable du marché Asie chez WoSA, reste optimiste quant à l’avenir même si la Chine et l’Australie décident de se réconcilier. « Il y a encore un énorme potentiel pour les entreprises viticoles sud-africaines de se développer en Chine, indépendamment de tout problème géopolitique », a-t-il déclaré. Et d’ajouter, « Notre stratégie est de travailler à la fois avec les producteurs en Afrique du Sud et les importateurs ici [en Chine] pour pousser et promouvoir l’industrie. Nous avons triplé nos parts de marché au cours des 18 derniers mois, c’est évidemment très encourageant ».

Le WoSA gère plusieurs programmes en Chine tout au long de l’année pour sensibiliser les consommateurs chinois au vin sud-africain et présenter davantage de viticulteurs. Malgré la pandémie et les restrictions de voyage, leur tournée annuelle s’est poursuivie l’an dernier, amenant 36 producteurs de vins et plus de 350 types de vin à Beijing, Shanghai, Shenzhen, Chengdu et Xiamen à l’automne. Le WoSa a également participé à des expositions majeures telles que l’Exportation internationale des importations de Chine (CIIE) à Shanghai.

 

Julian Johnsen 

 

Des challenges à tous les étages

M. Ford affirme que les deux périodes importantes pour les ventes en Chine sont la Fête de la Mi-Automne, en septembre, et le Nouvel An lunaire vers la fin janvier et le début février. Cependant, « étant donné qu’il existe encore des restrictions concernant les grands rassemblements, je pense que les ventes seront quelque peu modérées », a-t-il partagé.

L’arrivée de Julian Johnsen dans le monde viticole fait date. Originaire du Hampshire en Angleterre, il décide de se lancer dans la viticulture après des études d’agriculture à l’Université Royal Agricultural de Gloucestershire et achète sa première ferme dans le Cap-Occidental en 1990, l’année où Nelson Mandela est libéré après 27 ans d’emprisonnement.

Aujourd’hui, M. Johnsen est à la recherche d’un partenariat pour ses vins Vondeling afin de se développer en Chine. L’année dernière, Vondeling a expédié environ 10 000 bouteilles de son Muscat de Fontagne et environ 5 000 bouteilles de Pinot noir.

M. Johnsen pense que le vin sud-africain doit être davantage promu auprès des consommateurs chinois, car sa valeur n’est pas bien appréhendée. « Le vin sud-africain a le meilleur rapport qualité-prix, en particulier chez les producteurs les mieux notés », s’enthousiasme-t-il. « Nous devons mieux nous exporter en Chine et amener les consommateurs à essayer notre vin. Ce qui nous aiderait, c’est si nous pouvions attirer davantage de touristes chinois à venir visiter l’Afrique du Sud ».

Pour M. Ford également, trouver des partenaires fiables reste une gageure. « Le principal défi en Chine est que [le marché du vin chinois] est toujours en développement et qu’il n’a que 10 ans de recul », a-t-il indiqué. « Cela signifie qu’il y a beaucoup de nouveaux importateurs qui travaillent avec du vin et qui ont très peu d’expérience. Étant donné que le vin est un produit plutôt complexe, trouver un importateur ou un partenaire fiable, compétent et expérimenté est toujours très difficile ».

De belles perspectives

Malgré les différents challenges, il pense que le potentiel du marché du vin en Chine est énorme compte tenu de la forte croissance du PIB chinois, qui s’élevait à 8,1 % en 2021. Avec « davantage de personnes gagnant suffisamment d’argent pour se permettre d’acheter du vin plus régulièrement, l’industrie continuera de croître », explique-t-il.

M. Ford pense qu’au cours des dernières années, le marché s’est consolidé : « En 2016, il y avait près de 12 000 importateurs. Aujourd’hui, ils ne sont plus que 5 500. Cela indique que ceux [qui] ont survécu sont plus sérieux, plus professionnels, ce qui est de bon augure pour l’avenir. Il faut être patient car il faut du temps et des investissements pour créer des marques ici. Pour les producteurs et les importateurs qui ont de l’appétit, l’avenir est prometteur ».

En attendant, il a plusieurs suggestions sur la façon d’améliorer les exportations sud-africaines. Comme il l’a souligné sur le projet ChinAfrica, les accords de libre-échange avec les principaux pays consommateurs réduiraient les coûts.

Les plateformes d’e-commerce sont également l’un des meilleurs moyens de promotion auprès des acheteurs chinois. « Exploiter la puissance du commerce électronique alors que la classe moyenne chinoise continue de se développer peut améliorer la visibilité de nos produits et accroître nos ventes », a-t-il fait part.

 

*SUDESHNA SARKAR est une journaliste et rédactrice basée à Beijing. Ancienne commentatrice d’une émission régionale de Deutsche Welle Radio, elle suit le développement, la culture et les relations internationales de la Chine.

 

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