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Des pommes chinoises ou du raisin français ?

2019-12-31 17:29:00 Source:La Chine au présent Auteur:MENG MAN
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法语词典

Anna, une française en master à l’Université de médecine traditionnelle chinoise du Heilongjiang, pratique le tai chi devant la statue de Li Shizhen, célèbre médecin de la Chine ancienne.

Donner une définition de la culture et de la civilisation est chose complexe, et bien qu’il soit difficile de la faire en une seule phrase, la réalité quotidienne peut nettement simplifier l’explication. Par exemple, avec le héros de la chanson de geste La Chanson de Roland : j’avais moins de dix ans quand je l’ai lue pour la première fois. La raison pour laquelle j’avais acheté ce livre, c’est parce que Mulan, une héroïne que tout le monde connaît en Chine, était mise en poèmes dans La Ballade de Mulan. À cette époque, je pensais que La Chanson de Roland était l’équivalent français de La Ballade de Mulan, mais après avoir lu ce livre, je me suis rendu compte que les deux œuvres étaient complètement différentes et chaque laisse m’avait remplie d’étonnement.

La Chanson de Roland commence ainsi : « Le roi Charles, notre empereur, le Grand, sept ans tout pleins, est resté dans l’Espagne : jusqu’à la mer il a conquis la terre hautaine. Plus un château qui devant lui résiste. » Je me disais : ne devrait-il pas être assis dans la Salle du trône d’or ? Pourquoi menait-il son armée à la guerre ? Il a quitté son royaume sept ans. Qui administrait les affaires intérieures ? Était-ce l’Espagne qui avait intimidé la France en premier ? Pourquoi Charles était-il allé en Espagne pour se battre ? Mais malgré ces nombreuses questions qui me laissaient perplexe, la lecture de La Chanson de Roland m’avait profondément émue : la loyauté, la fierté, le courage de Roland ! Il ne ressemblait pas beaucoup à Mulan, mais plutôt à un autre héros chinois, Guan Yu. Même l’épée Durandal dans les mains de Roland me faisait penser immédiatement à la lame en croissant de lune du Dragon vert de Guan Yu.

Guan Yu mourut également défait. Après sa mort, les Chinois l’appelèrent Seigneur Guan et lui construisirent de nombreux temples. N’est-ce pas identique aux sentiments des Français à l’égard de Roland ? Basée sur différents modes de vie et de production et différentes expériences historiques, la culture nationale de chaque pays est différente. En tant qu’enfant chinois, j’avais une façon de penser chinoise : si notre nation de paysans se bat, c’est qu’elle y est contrainte et forcée : notre empereur ressemble plus à un lettré qu’à un général et si notre héroïne Mulan est apparue, c’est parce que « le père n’a pas de fils adulte, et Mulan n’a pas de frère aîné », c’est-à-dire que c’est par amour pour sa famille et non pour les honneurs. C’est très différent de la nation française. Cependant, sur la base de différentes cultures nationales, la civilisation humaine présente de grands points communs. Que nous soyons Chinois ou Français, nous attachons tous de la valeur à la loyauté et au courage, et plaçons les valeurs au-dessus de nos intérêts, sinon, comment aurais-je pu être émue par Roland et comment les Français pourraient-ils s’inspirer de Confucius ?

Préserver et transmettre la culture traditionnelle

Que signifient en fin de compte pour nous les différentes traditions culturelles ? Comment devrions-nous finalement considérer nos propres traditions culturelles ? Confucius est appelé un saint en Chine et, quel que soit le pays dans le monde, Confucius symbolise en premier lieu la culture chinoise. Confucius a-t-il créé la culture chinoise ? Non. Confucius lui-même avait déclaré : « Que les rites des Zhou sont beaux ! Moi, j’observe les rites des Zhou. » Pour Confucius, la culture de la dynastie des Zhou (environ XIe siècle-256 av. J.-C.) était merveilleuse. Le plus important pour lui était de protéger et de transmettre la culture des Zhou.

Qu’est-ce que la culture des Zhou ? En un mot, c’est la « civilisation », et en deux mots, ce sont « les rites et la musique ». Il s’agit en réalité de l’ordre et de l’harmonie. Bien que Confucius ait vécu durant une époque troublée, il croyait malgré tout que l’ordre et l’harmonie étaient les éléments les plus nécessaires de la société. Afin de permettre à davantage de gens de comprendre les rites et la musique, il enfreignit l’interdit de la dynastie des Zhou qui voulait que seuls les enfants des nobles soient éduqués. Il créa des écoles privées et forma un grand nombre de disciples, permettant à ceux qui voulaient étudier de le faire.

« Chacun, peu importe qui il est, peut être éduqué. » C’est une sentence que l’on trouve dans les Entretiens de Confucius et qui fait de Confucius le plus grand éducateur de l’histoire chinoise. En outre, afin de permettre à chacun de comprendre pourquoi l’ordre des rites et de la musique devait être respecté, il proposa également la notion de base de « bienveillance », qui fait référence à l’amour du prochain, une empathie qui permet de se mettre à la place d’autrui. Parce qu’il y a l’amour de son prochain, les rites et la musique peuvent passer de normes externes à une recherche intérieure, ce qui a également fait de Confucius le plus grand penseur de la Chine ancienne. En fait, parmi les penseurs de l’époque contemporaine de Confucius, il semblait être le plus conservateur, mais c’était aussi celui qui est allé le plus loin.

Depuis lors, il a eu une influence profonde sur les Chinois. Par exemple, lorsqu’ils sont en contact avec des cultures différentes, ils parleront d’« harmonie dans la différence » et diront : « Ne faites pas à autrui ce que vous ne voudriez pas qu’on vous fasse. » Ce sont des propos qu’avait tenus Confucius. Pourquoi Confucius, qui semble le plus conservateur, va-t-il le plus loin? Parce qu’il respecte le plus ce qui est à la racine. Confucius et ses contemporains ont tous grandi sur le grand arbre de la culture des Zhou. Si les racines de cet arbre sont arrachées, il ne peut que s’effondrer. Comme Confucius, chérissez ce grand arbre et préservez-le, cherchez avec soin les branches les plus dignes de ce grand arbre et soignez-le pour qu’il s’élève vers le soleil, afin que ce grand arbre puisse grandir davantage et devenir plus luxuriant, et enfin porter des fruits.

Statue de Confucius devant le temple de Confucius de Deyang

Respecter la différence, apprécier la richesse des saveurs

Je vis dans le Nord de la Chine depuis l’enfance et le fruit le plus consommé est la pomme. Et en France, vu que le vin est si réputé, j’ai toujours eu l’impression qu’il y avait du raisin partout. Le goût des raisins est bien sûr différent de celui des pommes, mais ils ont tous deux en commun le fait d’être des fruits sucrés et juteux. Ce sont également les fruits que nous aimons le plus sincèrement. Au fil des ans, nous avons amélioré nos variétés d’arbres fruitiers : les pommes chinoises sont de plus en plus sucrées et les raisins français sont sans cesse meilleurs. Nous n’avons pas besoin de cultiver des raisins aromatisés à la pomme ou des pommes aromatisées au raisin, mais si vous mettez ces deux fruits ou plus dans une assiette de fruits en même temps, c’est vraiment une joie. N’est-ce pas vrai pour la culture ? La Chine a des traditions culturelles chinoises et la France des traditions culturelles françaises. Nous valorisons notre propre culture et apprécions la culture des autres. Je pense que le sens le plus important de la communication n’est pas que vous deveniez moi ou que je devienne vous, mais que vous et moi, nous nous connaissions, nous nous comprenions et nous nous apprécions mutuellement. Mangez vos propres fruits et goûtez les fruits des autres pour apprécier la richesse des saveurs.

 

MENG MAN est professeure à l’Institut de culture et d’histoire de l’Université centrale des ethnies.

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