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L’art des échanges entre les musées chinois et français

2019-12-31 16:19:00 Source:La Chine au présent Auteur:SHAN JIXIANG
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Le Louvre

Il y a plus de 30 ans, au moment où j’ai eu l’occasion de partir étudier en Europe, j’ai choisi Paris. Moi qui ai grandi à Beijing, capitale antique de la culture orientale, et qui, à l’époque, étudiait l’architecture, j’avais une affection toute particulière pour l’esthétique élégante du paysage urbain parisien. Il y a maintenant plus de 10 ans, j’ai pris part aux activités organisées dans le cadre de l’Année de la Chine en France. Une nuit, depuis un bateau-mouche sur la Seine, j’ai pu voir la tour Eiffel s’illuminer en rouge, la couleur caractéristique de la Chine. J’ai été profondément touché par cette scène symbolisant la profonde amitié qui unit la Chine et la France. C’est un moment qui restera gravé dans ma mémoire.

Au moment où le monde a accédé à l’époque moderne, à l’Est, un grand pays uni, basé sur la civilisation chinoise, avait une influence qui rayonnait jusque dans les régions environnantes. Au cours de la même période, à l’Ouest, les lumières de la France brillaient peu à peu et éclaireraient bientôt toute l’Europe. En vue de décrire de manière vivante ce chapitre historique, lors des Années croisées Chine-France qui ont eu lieu entre 2003 et 2005, le Château de Versailles a d’abord accueilli en 2004 l’exposition intitulée « Kangxi, empereur de Chine (1622-1722), la Cité interdite à Versailles ». Les ministres de la Culture des deux pays ont coupé le ruban pour le vernissage de l’exposition. Le Château de Versailles a ensuite présenté en 2005, à la Cité interdite et au Musée de Shanghai, une exposition baptisée « Louis XIV, le Roi-Soleil, trésors du Château de Versailles », qui a été dévoilée par les premiers ministres chinois et français. Ces deux expositions phares resteront à jamais inscrites dans les annales des échanges amicaux entre la Chine et la France.

 

L’opéra Turandot, présenté à Paris le 28 mai 2005, a été très remarqué en France. Zhang Yimou, metteur en scène de ce spectacle, se tient devant une réplique du palais Taihe, un bâtiment de la Cité interdite, au Stade de France, qui peut accueillir 80 000 personnes.

Transmission du patrimoine culturel

Le Musée du Palais impérial (le Palais impérial étant appelé aussi la Cité interdite) et le Musée du Louvre, qui jouissent d’une renommée mondiale, sont deux établissements possédant un style différent, mais une histoire similaire. À l’échelle de la planète, ils comptent parmi les musées qui accueillent chaque année le plus grand nombre de visiteurs. En avril 2008, l’exposition « Napoléon et le Louvre » s’est tenue au Musée du Palais impérial, marquant le premier résultat concret suite à la signature d’un accord de coopération entre les deux institutions. En septembre 2011, une exposition ayant pour thème « La Cité interdite au Louvre-Empereurs de Chine et rois de France » s’est ouverte dans l’enceinte du Musée du Louvre, afin d’y présenter quelques-uns des trésors hébergés d’ordinaire au Musée du Palais impérial. Cette exposition était placée sous le haut patronage des chefs d’État chinois et français, une solide preuve de l’estime qu’accordent les deux pays aux échanges culturels bilatéraux.

Cette présentation d’objets anciens dans les musées chinois et français a déclenché une vague d’échanges culturels, et favorisé les interactions et le dialogue entre les deux pays. Les musées, fortement ouverts sur le monde, sont tels des centres du multiculturalisme. Approfondir les échanges et la coopération avec les établissements connexes est pour eux un moyen idéal d’étendre leur influence internationale, tout en faisant rayonner les diverses cultures régionales. Ce faisant, ils jouent également un rôle de moteur dans le respect et la préservation des diversités culturelles, en plus de contribuer au progrès social et au développement pacifique du monde. Les relations sino-françaises affichent toujours une forte vitalité sous l’effet des échanges culturels, et leur avenir s’annonce encore plus prometteur.

En juin 2019, « Au-delà des frontières : Cartier – Exposition d’artisanat et de restauration du Musée du Palais impérial » a ouvert ses portes dans la galerie de la porte du Méridien du musée. Articulée autour de trois thèmes, cette exposition établissait un parallèle entre des ustensiles, bijoux, montres et horloges venus de Chine et d’Occident, dans l’objectif de faire ressortir les interactions entre la culture et l’art des deux régions, lesquels se sont mutuellement inspirés et enrichis. Dans le même temps, six vieilles horloges occidentales, restaurées ces dernières années par le musée, ont été mises en vitrine. En complément, un documentaire détaillant le processus de restauration était diffusé et des démonstrations en direct étaient effectuées par des restaurateurs des deux parties, ce qui a permis aux visiteurs d’être véritablement transportés dans cet univers d’ingéniosité artisanale.

Le patrimoine culturel doit se transmettre en permanence pour que sa valeur se réalise pleinement. Depuis quelques années, le Musée du Palais impérial et le réseau des musées français mènent des échanges et une coopération culturels plus vastes, plus approfondis et plus pragmatiques, qui se matérialisent à travers une série d’expositions majeures. Ils collaborent notamment dans la recherche sur les collections, la restauration d’objets anciens, l’éducation du public et la formation du personnel, les échanges académiques, la créativité culturelle, de même que les technologies numériques. Parallèlement, le Conseil international des musées et l’Institut international pour la conservation des œuvres historiques et artistiques (IIC), deux organisations internationales qui font autorité dans le secteur, ont choisi de fonder leur seul et unique établissement de formation au Musée du Palais impérial. Ces six dernières années, le centre de formation de l’IIC a formé 350 élèves originaires de 72 pays, tout en mobilisant davantage les effectifs des musées français dans l’enseignement et la formation.

En outre, en janvier 2015, le Musée du Palais impérial et l’École du Louvre ont conclu un mémorandum de coopération, prévoyant des échanges et une coopération plus poussés dans divers domaines. Ils se sont engagés à former de futurs professionnels et responsables de musées et autres établissements préservant le patrimoine culturel, où que ce soit dans le monde, tout en tenant compte de leur mission de transmettre la culture à un large public. Comme premier projet de coopération, ils ont mis en place en 2017 un stage de formation sino-français en gestion des musées au Musée du Palais impérial. Grâce aux explications d’experts français, les stagiaires ont pu découvrir les divers modèles opérationnels des musées français et s’inspirer des expériences de ces musées en matière de conception, planification et gestion des expositions.

Enrichissement mutuel des civilisations

Les échanges et l’enrichissement mutuel entre les civilisations représentent un processus dans lequel différentes civilisations communiquent entre elles, s’inspirent mutuellement et s’abonnissent l’une l’autre. Les musées, qui mettent en avant les fruits de la civilisation humaine, constituent une vitrine de la culture nationale et un vecteur d’échanges culturels internationaux. Ils jouent ainsi un rôle majeur dans l’accroissement du soft power national et l’attractivité d’une région ou d’un pays. Le Musée du Palais impérial et le Musée du Château de Versailles, deux résidences de monarques reconverties en musées, ont tenu ensemble de grandes expositions thématiques couvrant de nombreux domaines (entre autres la peinture, les objets d’art, la décoration intérieure, l’architecture, l’aménagement des jardins, la littérature et la musique), dans le but de démontrer à quel point la culture chinoise a servi de source d’inspiration aux artistes français. Dans le même temps, des objets raffinés (tels que des instruments scientifiques, des horloges et des livres), hérités de la cour française ou apportés par des missionnaires et émissaires, ont également été présentés par le Musée du Palais impérial au travers d’expositions, afin de retracer les grands événements diplomatiques et artistiques entre la Chine et la France au XVIIIe siècle.

Le Musée du Palais impérial abrite une vaste collection d’œuvres en émail qui ont été réalisées en Occident ou sous l’influence de l’Occident. L’émail français en particulier a fait des émules aux XVIIe et XVIIIe siècles sous la dynastie des Qing (1644-1911). Forts de ce constat, l’Institut de recherche du Palais impérial et le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) ont développé leurs coopérations et recherches, afin d’analyser l’origine des matières premières et les techniques derrière ces émaux anciens conservés au musée, sans oublier les échanges et interactions entre l’art chinois et européen de l’émail. L’objectif consiste à clarifier le processus de transmission et d’évolution de ce savoir-faire dans le Palais impérial chinois, depuis son apparition en Chine jusqu’à son adaptation locale. Cette étude de cas aide à mieux comprendre comment les sciences et technologies modernes ont été introduites en Chine via la Route maritime de la Soie, avant d’être assimilées, maîtrisées et adaptées sur le territoire local.

En 2013, le président Xi Jinping a proposé de construire conjointement la Ceinture économique de la Route de la Soie et la Route maritime de la Soie du XXIe siècle. La Chine et la France, plaques tournantes commerciales et nœuds culturels reliant l’Est et l’Ouest, ont été témoins de scènes historiques où les marchandises échangées étaient transportées par caravanes, par bateaux ou à dos de chameaux. L’ancienne Route de la Soie a non seulement contribué aux échanges commerciaux, mais aussi et surtout, à l’apprentissage réciproque entre les civilisations. L’ancienne Route de la Soie ainsi que les nouvelles ont rapproché étroitement les deux civilisations, qui ont entretenu des contacts et ont appris l’une de l’autre. L’esprit de la Route de la Soie, qui perdure depuis des milliers d’années en créant un pont entre passé et présent, constitue un symbole des échanges amicaux entre les deux pays. L’amitié sino-française, quant à elle, s’est renforcée au fil du temps et des épreuves.

Coexistence des cultures orientale et occidentale

La France, riche de sa civilisation millénaire, a établi une culture somptueuse, fait des découvertes scientifiques brillantes, créé de nombreux courants artistiques et façonné des pensées philosophiques passionnantes, qui tous s’inscrivent parmi les trésors de la civilisation humaine depuis des siècles et des siècles. La France a toujours été à la pointe pour ce qui est de la protection du patrimoine culturel et la construction de musées, Les innombrables vestiges culturels et bâtiments historiques disséminés aux quatre coins du pays font d’ailleurs la fierté des Français. Pour l’ancien premier ministre français Jean-Pierre Raffarin, « la culture chinoise est l’autre pôle de l’expérience humaine ». Comme il l’a déclaré un jour, les pensées occidentales et chinoises entretiennent une relation à l’image du yin et du yang, se complétant de façon créative. Il est d’avis que leurs différences, qui se manifestent à bien des égards, nous poussent à réfléchir, tout en stimulant notre intérêt, notre curiosité et notre respect les uns envers les autres.

La Cité interdite, qui abrite le Musée du Palais impérial, est aujourd’hui le complexe de palais antiques en bois le plus vaste et le mieux préservé au monde. Son modèle architectural reflète la philosophie et l’esthétique traditionnelles chinoises. Le bâtiment le plus important est le palais Taihe (Harmonie suprême), là où l’empereur gérait les affaires politiques. L’« harmonie » est un principe au fondement de la civilisation chinoise. La culture chinoise prône en effet l’harmonie entre l’homme et la nature, entre les membres de la société, ainsi qu’entre le corps et l’esprit. Ce n’est qu’en maintenant l’harmonie dans toutes ces dimensions que nous pourrons garantir la prospérité du pays et le bonheur du peuple, tout en évoluant dans un monde pacifique.

 

SHAN JIXIANG est ancien directeur du Musée du Palais impérial.

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