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De Rouen à Ningbo : plus de trois décennies de passion chinoise

2024-01-23 14:45:00 Source:Dialogue Chine-France Auteur:VINCENT LEMARCHAND*
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Vincent Lemarchand observe des élèves pratiquer la calligraphie à l’école primaire centrale de Chongshou, à Cixi (Zhejiang), le 28 avril 2018.  

Longtemps après l’établissement de relations diplomatiques entre la Chine et la France, la Chine est restée terra incognita pour une grande partie des Français. 

Ma première rencontre avec la Chine remonte à 1983, à l’occasion de la présence du pays en tant qu’invitée d’honneur de la Foire de Rouen. Une importante délégation officielle menée par Ren Jianxin, qui devait devenir plus tard président de la Cour suprême de Chine, avait séjourné à Rouen pendant environ deux semaines. Souhaitant établir des relations de jumelage avec une ville chinoise, nous avons demandé à M. Ren de nous conseiller sur le choix d’une ville chinoise ayant des similitudes avec Rouen, à savoir une ville ancienne, un port et si possible, la capitale de sa région. 

Les étapes du jumelage Rouen-Ningbo  

La partie chinoise nous a donc proposé la ville de Ningbo (Zhejiang). En 1987, une délégation officielle, dont je faisais partie, s’y est rendue pour des contacts préliminaires avec la municipalité. La rédaction d’un projet d’accord avait nécessité un délai important. C’était mon premier voyage en Chine et je n’imaginais pas que je me rendrais plus de 50 fois dans ce pays, qui est à ce jour le pays que j’ai le plus visité. 

Ma première impression de Ningbo, c’est celle d’une foule circulant à vélo occupant presque toutes les rues et portant presque exclusivement des costumes à « col Mao », comme on les désignait en Europe. Notre voyage s’est ensuite poursuivi à Hangzhou avec la découverte du magnifique site du Lac de l’Ouest, encore peu visité par les touristes. Je garde en mémoire la vision d’un musicien amateur jouant du erhu face au lac dans la brume matinale. Notre périple nous a ensuite conduits à Beijing pour des contacts officiels, et bien sûr nous avons visité la Cité interdite et la Grande Muraille. 

 

Vincent Lemarchand au marché de Gulou à Ningbo  

Quelques mois plus tard, le maire de Ningbo a été accueilli à Rouen pour découvrir notre ville et en 1990, à l’occasion d’un voyage officiel en Chine, le maire de Rouen Jean Lecanuet, alors président de la Commission des Affaires étrangères du Sénat, a signé l’accord officiel de jumelage des deux villes en présence d’une importante délégation de Rouen. 

À partir de ce moment-là, les échanges se sont multipliés avec l’accueil de délégations chinoises à Rouen et des visites de délégations rouennaises à Ningbo. Les échanges limités au départ aux délégations officielles se sont par la suite étendus aux secteurs de l’éducation, de la santé, de l’économie, de la culture et de la gestion urbaine. Me rendant environ trois fois par an à Ningbo, j’ai été le témoin de l’extraordinaire modernisation de la ville ainsi que de son embellissement. 

Des souvenirs plein la tête  

Tous ces échanges ont également été l’occasion de rencontres entre citoyens des deux villes. Ils se sont transformés avec le temps en relations amicales. J’ai en mémoire de très nombreux souvenirs de ces rencontres, comme ces jeunes pionniers qui ont accompagné notre délégation à la gare à l’occasion de la signature officielle du jumelage entre les deux villes. Il y a aussi eu des airs d’opéra français chantés lors du banquet par le directeur du Bureau des Affaires étrangères, qui m’a fait redécouvrir Romain Rolland, écrivain français Prix Nobel de littérature en 1915. 

Dans les premières années, alors que j’étais encore responsable des relations internationales de la Chambre de Commerce et d’Industrie de Rouen, plusieurs sessions de découverte de la France (organisation administrative, présentation économique, visites d’entreprises) ont été organisées à l’intention du « centre de formation des cadres » de Ningbo. Plus d’une centaine de cadres appartenant à divers services ont bénéficié de ces sessions de deux semaines très riches en échanges. 

Les séjours de médecins de Ningbo accueillis pour des stages de quatre à six semaines au CHU de Rouen ont été également l’occasion de rencontres amicales après les phases de travail. Et dans le domaine de la gastronomie, passion partagée par les Français et les Chinois, la venue à Rouen de cuisiniers chinois lors d’un festival gastronomique a permis aux Rouennais de découvrir quelques spécialités de Ningbo, dont les fameux tangyuan. En 2019 j’ai même accompagné à Ningbo un formateur de l’Institut national de la boulangerie/pâtisserie situé à Rouen pour des « master classes » auprès d’écoles professionnelles. 

 

Une délégation économique et commerciale de Ningbo se rend à Rouen, en mars 2023.  

Photographe amateur, j’ai eu l’occasion d’exposer à trois reprises les clichés pris lors de différents séjours à Ningbo. Lors d’une conférence à l’Université du 3e âge sur la photographie, j’ai eu la surprise de retrouver dans la salle un couple que j’avais photographié à son insu dans un parc de la ville. Nous sommes devenus amis et je les ai rencontrés plusieurs fois par la suite. 

J’ai été nommé citoyen d’honneur de Ningbo. Le Musée Ningbo Bang où se trouve une section consacrée aux citoyens d’honneur a organisé en 2018 une exposition intitulée « Trois décennies d’amitié entre Vincent Lemarchand et Ningbo ». J’ai également un souvenir très fort du mariage de notre correspondant francophone qui a épousé une jeune fille de Ningbo ayant effectué une partie de ses études en France. À plusieurs reprises présent à Ningbo au moment de mon anniversaire, j’ai eu la surprise d’être invité par des amis chinois pour un repas d’anniversaire où le gâteau avec les traditionnelles bougies en France était accompagné d’un bol de nouilles où l’on recherche la nouille la plus longue, une tradition chinoise et signe de longévité. 

Un message aux Français 

Je profite de la célébration du 60e anniversaire de l’établissement de relations diplomatiques entre la France et la Chine pour dire aux Français de ne pas hésiter à aller en Chine et ensuite, à y retourner régulièrement. Le pays évolue très rapidement et on y découvre un pays fier de son ancienne culture et de ses réalisations modernes. On y fait des expériences gastronomiques inoubliables et surtout, on rencontre ses habitants. 

Je recommande tout spécialement les parcs publics, lieux de convivialité où l’on peut écouter des musiciens et des chanteurs amateurs, s’initier au taiji et au mah-jong, et danser avec des Chinois. Il faut être aussi curieux que les Chinois le sont, se faire des amis et entretenir des relations régulières avec eux. Et surtout, il faut laisser de côté les préjugés que l’on peut avoir sur le pays car les médias occidentaux ont une fâcheuse tendance à présenter la Chine sous un aspect négatif. 

Enfin un message pour les jeunes générations. Il faut vous rencontrer. 

J’ai constaté que les jeunes avaient moins de préjugés sur les étrangers et je me souviens de beaux rendez-vous comme celui avec une jeune équipe de joueurs de badminton de Ningbo venue participer à un tournoi à Rouen et que j’avais ensuite accompagnée à Paris. Nous avons aussi été accueillis à Ningbo pour une série de concerts dans des grands théâtres du jeune orchestre symphonique du Conservatoire de musique de Rouen. 

Il y a de nombreux étudiants chinois en France et je rencontre assez régulièrement des jeunes originaires du Zhejiang à Rouen. Le nombre d’étudiants français en Chine est bien moindre alors qu’il existe en Chine des universités prestigieuses. Il me semble que cette situation devrait être rééquilibrée. 

Depuis quelques mois, les obstacles aux déplacements entre les deux pays ont disparu et nous avons accueilli ces derniers temps plusieurs délégations chinoises désireuses de reprendre contact avec leurs partenaires français et européens. J’ai effectué récemment un voyage à Ningbo afin de renouer des relations avec de nombreux organismes. J’ai pu observer qu’elles n’avaient pas été endommagées par plusieurs années de crise sanitaire. Profitons donc de cet anniversaire pour reprendre et intensifier nos échanges. L’annonce récente de l’exemption de visa pour les séjours en Chine inférieurs à 15 jours est une incitation supplémentaire. 

Quant à moi, je vais continuer à œuvrer pour renforcer les relations amicales entre citoyens des deux villes et des deux pays afin de toujours mériter le titre de « Lei Feng français » qui m’avait été donné par les membres d’une délégation de Ningbo particulièrement satisfaite de l’accueil qui lui avait été réservée (j’ai compris après l’honneur qui m’était fait et la responsabilité que cela impliquait) !  

 

*VINCENT LEMARCHAND est président du Comité de jumelage Rouen-Ningbo. 

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