Accueil>Focus sur la Chine

Nancy Pelosi et le monde réel

2022-09-02 12:06:00 Source:La Chine au présent Auteur:WILLIAM JONES*
【Fermer】 【Imprimer】 GrandMoyenPetit
法语词典

Des manifestants se rassemblent devant le bâtiment fédéral de San Francisco pour protester contre la visite de Nancy Pelosi à Taiwan, le 1er août.

 

Dans l’ancienne mythologie grecque, le péché d’hubris, c’est-à-dire d’orgueil, constituait la plus grande tare des êtres humains, menant souvent à leur destruction. Lorsqu’Icare et son père Dédale essayèrent de s’échapper du labyrinthe sur l’île où ils avaient été emprisonnés par Minos, le roi de Crète, ils utilisèrent des ailes conçues par Dédale, faites de cire et de plumes. Dédale avait mis en garde son fils de ne pas voler trop près de l’eau pour que les vagues ne mouillent pas ses ailes, ni trop haut pour que le soleil ne fasse pas fondre la cire. Hélas, grisé par sa nouvelle capacité, Icare se mit à voler de plus en plus haut et, comme l’avait averti son père, ses ailes fondirent et il fut précipité dans la mer.

La présidente de la Chambre des représentants des États-Unis, Nancy Pelosi, a été mise en garde par le Pentagone sur le fait que, étant donné le degré élevé des tensions entre les États-Unis et la Chine, et les inquiétudes claires du côté chinois vis-à-vis des entorses faites par les États-Unis au principe d’une seule Chine, cette visite risquait d’engendrer une forte réaction chinoise et faisait courir le risque d’un possible conflit militaire. De plus, le gouvernement chinois avait clairement averti à de nombreuses reprises, qu’une telle visite provoquerait une réponse forte. Après tout, Nancy Pelosi n’est pas un simple membre du Congrès. En tant que présidente de la Chambre des représentants, c’est un membre du gouvernement des États-Unis, un gouvernement qui a accepté dans trois communiqués conjoints avec la Chine de ne pas établir de « relations officielles » avec Taiwan, incluant la réalisation de visites officielles.

Aveuglée par sa propre hubris, dans une carrière soutenue par le lobby taïwanais, Nancy Pelosi a décidé de maintenir cette visite et au diable les conséquences ! Celles-ci se sont traduites par la mobilisation des forces de l’Armée populaire de libération (APL), qui ont encerclé l’île de Taiwan et réalisé des exercices à tirs réels pendant quatre jours. De plus, la Chine a interrompu la plupart des discussions politiques importantes avec les États-Unis, incluant leurs relations militaires stratégiques bilatérales, lesquelles avaient été laborieusement rétablies sous l’administration Biden.

Malheureusement, Nancy Pelosi n’est pas seule dans son hubris. Les membres du Congrès qui l’ont accompagnée dans son voyage sont également les porteurs de cette « tare funeste », de même que la majorité du Congrès qui tente de faire passer la Loi sur Taiwan, laquelle enfreint de façon flagrante le principe d’une seule Chine. Considérer Taiwan comme un « allié important hors OTAN », comme l’envisage cette loi, serait quelque chose approchant le casus belli pour la Chine. Cette loi traiterait Taiwan de façon similaire à la façon dont les États-Unis traitent l’Ukraine, en l’armant jusqu’aux dents et en lui apportant une formation militaire. Cette hubris est en réalité devenue une sorte de dilemme national, qui se manifeste dans la notion hasardeuse de « l’exceptionnalisme américain », plus connue sous le nom de politique de « l’Amérique d’abord ».

Il s’agit là d’un fantasme. La réalité est apparue avec la démonstration de force de la Chine au cours de ses récentes manœuvres, au cours desquelles elle a montré qu’elle pouvait littéralement « couper Taiwan du monde extérieur ». Cette réalité se manifeste également dans les forts soutiens que la Chine a reçus de la part de la communauté internationale, avec plus de 170 nations, un grand nombre d’institutions internationales et le secrétaire général des Nations Unies António Guterres réaffirmant leur soutien au principe d’une seule Chine. La « réprimande » ridicule des actions de la Chine par le G7 a même été traitée comme un vulgaire « bout de papier » par le ministère chinois des Affaires étrangères, étant donné le fait que 181 nations ont accepté le principe d’une seule Chine. Le G7 n’est plus considéré comme une sorte d’« organe de gouvernance » de la communauté mondiale, comme pouvaient autrefois se l’imaginer ses membres. Cette époque est révolue.

Même Nancy Pelosi a réalisé qu’elle avait dépassé les limites et « volé trop près du Soleil ». Elle a essayé de minimiser l’importance de sa visite en affirmant qu’elle n’avait rien fait de contraire au principe d’une seule Chine et en lui rendant hommage, mais elle a également cité la Loi sur les relations avec Taiwan adoptée par le Congrès en contradiction flagrante des dispositions des trois communiqués conjoints, ainsi que les soi-disant « Six assurances » se référant aux six principes clés des affaires étrangères concernant les relations entre les États-Unis et Taiwan, lesquelles ont été à l’origine proposées par Taiwan il y a plusieurs décennies. L’île a ainsi reçu « l’assurance » que les États-Unis n’abandonneraient pas complètement Taiwan et qu’ils ne feraient pas pression sur le Guomindang pour qu’il négocie avec Beijing. En 2016, ces « assurances informelles » ont été formulées en « résolutions non contraignantes » par la Chambre des représentants et le Sénat, simplement pour envoyer un « message » à Beijing. Ni l’une ni l’autre de ces assurances n’a été acceptée par la Chine comme affectant la relation sino-américaine basée sur les trois communiqués conjoints sino-américains.

Le livre blanc La question de Taiwan et la réunification de la Chine dans la nouvelle ère

 

Nancy Pelosi a également affirmé qu’elle n’avait pas reçu de « message clair » de la part du Pentagone de ne pas se rendre à Taiwan, alors même qu’il y a clairement eu des discussions sur ce sujet et que le président Biden a reconnu publiquement les préoccupations du Pentagone concernant cette visite. Nancy Pelosi a sans aucun doute « brûlé les ponts » avec le Pentagone, qui doit désormais œuvrer à restaurer la communication avec Beijing. Elle a également rapproché le monde d’un conflit militaire dans la région Asie-Pacifique. Si les États-Unis devaient « venir à la défense » de Taiwan par des actions militaires, alors tout serait possible et nous pourrions faire face à un possible conflit nucléaire, dans lequel il n’y aurait pas de gagnant. Ces questions sont bien connues des décideurs du Pentagone, mais semblent être ignorées allègrement par un certain nombre de membres du Congrès non vétérans.

La visite à Taiwan de la présidente de la Chambre des représentants en dépit des objections fermes et répétées des représentants chinois à différents niveaux, incluant un appel téléphonique entre le président Joe Biden et le président Xi Jinping, a gravement sapé la confiance qui existait précédemment entre les deux nations. Celle-ci survient en outre à la suite d’un ensemble d’actions par le Congrès et par l’administration Biden, qui entrent en contradiction avec leur soutien affiché au principe d’une seule Chine. Reconstruire cette confiance ne sera pas chose facile.

Dans le livre blanc publié le 10 août par le Bureau des affaires taïwanaises et du Bureau de l’information du Conseil des affaires d’état La Question de Taiwan et la réunification de la Chine dans la nouvelle ère, la Chine souligne l’importance de la réunification avec Taiwan comme un élément essentiel du renouveau de la Chine. Elle affirme également de façon univoque la détermination de la Chine à déjouer toute mesure visant à séparer Taiwan de la partie continentale de la Chine, soulignant le rôle clé de certaines forces aux États-Unis qui font tout leur possible pour fomenter une telle séparation.

La restauration de cette confiance dépend désormais des actions des États-Unis. Le maintien pressenti des droits de douane sur les marchandises chinoises par Joe Biden, alors que son Secrétaire du Trésor lui a conseillé de les réduire pour lutter contre l’inflation, risquerait d’ajouter de l’huile sur le feu allumé par Nancy Pelosi. Il s’agit également d’une mauvaise nouvelle pour les Américains, qui finiront par payer ces droits de douane, lorsqu’ils achèteront leurs produits alimentaires ou pharmaceutiques. Plus grave encore, les relations sino-américaines continueront d’être glaciales et l’administration Biden en paiera probablement le prix lors des prochaines élections au Congrès.

Le président Biden se serait apparemment entretenu avec des historiens américains pour discuter des raisons pour lesquelles nos démocraties dysfonctionnelles semblent s’est entièrement effondrées. Je ne pense pas que ces individus auront été suffisamment honnêtes avec M. Biden pour lui dire que ses actions — et ses inactions — ont peut-être bien contribué à ce problème. L’alimentation d’un conflit continu en Ukraine et la poursuite d’une guerre commerciale avec la Chine n’ont rien apporté de bon aux Américains, dont les besoins continuent d’être insatisfaits et les intérêts ignorés. Diviser le monde en deux camps opposés ne peut que nous appauvrir tous. Est-il surprenant que le monde respecte encore — de peur — la puissance brute des États-Unis, mais a perdu tout respect pour ses soi-disant « valeurs » ? Ou qu’il soutienne de plus en plus la notion proposée par la Chine de « communauté de destin pour l’humanité » ? Pour les États-Unis, l’essor de la Chine est considéré comme une menace à « l’hégémonie américaine ». Aux yeux du reste du monde, la Chine est toutefois considérée comme un pays qui a tiré plus de 800 millions de personnes de la pauvreté, apportant un espoir brillant pour l’humanité. L’Amérique a perdu dans sa recherche de puissance mondiale, tandis que la Chine a gagné par son engagement en faveur du développement de l’humanité. Les manœuvres militaires achevées récemment autour de Taiwan devraient être attribuées aux mesures provocatrices de la présidente de la Chambre des représentants des États-Unis, et non à de quelconques « intentions sinistres » de la part de Beijing, comme aimeraient le faire croire les opposants à la Chine.  

 
*WILLIAM JONES est membre de l’Institut Chongyang pour les études financières affilié à l’Université Renmin de Chine et ancien correspondant à la Maison-Blanche pour le magazine d’information américain Executive Intelligence Review.
 
Partager:

Copyright © 1998 - 2016

今日中国杂志版权所有 | 京ICP备10041721号-4

京ICP备10041721号-4