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Chine-UE : à la croisée des chemins

2025-07-31 11:22:00 Source: La Chine au présent Auteur: JIN LING*
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La Chine et l’UE doivent traduire leur consensus stratégique en actions coordonnées pour jouer leur rôle de stabilisateur dans la paix et le développement mondiaux.

 

Le premier train de fret Chine-Europe Jinhua-Turkmenbashi-Baku quitte la gare du Sud de Jinhua (Zhejiang), le 18 juin 2025.

Depuis un demi-siècle, la coopération et le développement sont au cœur des relations sino-européennes. Aujourd’hui, ce partenariat est confronté à l’escalade des tensions géopolitiques, à la montée du protectionnisme et aux pratiques hégémoniques.

Faut-il céder à la loi du plus fort ou bâtir ensemble un ordre multilatéral ? Choisir la confrontation ou œuvrer pour un avenir de paix et de prospérité ? Ces questions, emblématiques de notre époque, représentent aussi un défi historique que la Chine et l’Europe doivent affronter avec détermination.

La Chine a clairement souligné que le maintien d’un partenariat, le renforcement de la confiance stratégique, le respect des intérêts fondamentaux de chacun et la gestion des divergences sont à la fois des leçons précieuses tirées de 50 ans de relations fructueuses, mais aussi la base indispensable de leur avenir.

Cependant, une réalité s’impose : malgré l’attitude inébranlable de la Chine sur cette question, l’UE a adopté dès 2019 une posture fondée sur le triptyque « partenaire, concurrent et rival systémique ». Ces dernières années, sous l’effet conjugué de la pandémie de COVID-19 et des tensions géopolitiques, la perception de la Chine par l’UE a évolué vers les deux dernières catégories, fragilisant ainsi la confiance mutuelle.

Dans ce contexte, l’UE a accentué sa stratégie de « dérisquage » à l’égard de la Chine, en déployant une série de mesures protectionnistes : multiplication des barrières commerciales, durcissement du contrôle sur les investissements étrangers, et mise en œuvre du Règlement sur les subventions étrangères ainsi que de l’instrument relatif aux marchés publics internationaux. Ces mesures, de plus en plus politisées, s’éloignent du principe gagnant-gagnant qui a longtemps guidé leur coopération.

À l’heure des bouleversements mondiaux, les relations sino-européennes, parmi les plus importantes au monde, se trouvent à un tournant décisif. En tant que piliers de l’ordre mondial, la Chine et l’UE ne peuvent ignorer les mutations en cours. Seule une adaptation mutuelle, fondée sur un dialogue sincère, leur permettra d’assumer pleinement leur rôle historique pour un avenir stable et prospère.

Stand de Haier, fabricant chinois d’appareils électroménagers, au Salon international de l’électronique grand public de Berlin, le 6 septembre 2024

Confrontation ou coopération ?

La confiance stratégique mutuelle représente le fondement essentiel de toute coopération durable. C’est sur cette base que la Chine et l’Europe sont en mesure de surmonter leurs différends pour œuvrer de concert. Dans le contexte international actuel, le défi majeur pour les relations sino-européennes réside dans leur capacité à dissiper les malentendus avant de rebâtir et de consolider la confiance stratégique mutuelle.

Face aux multiples crises, l’UE a développé une anxiété stratégique croissante ces dernières années. Sa conception des relations internationales évolue sensiblement : la logique de coopération gagnant-gagnant cède progressivement le pas à une dynamique de rivalité et d’affrontement marquée par des calculs géopolitiques. Ce changement a sans aucun doute accentué le décalage de perception stratégique entre les deux parties.

D’un côté, la Chine et l’UE partagent un consensus stratégique indéniable sur des enjeux mondiaux tels que le maintien de la paix régionale, l’attachement au multilatéralisme et la lutte contre le changement climatique. Il s’agit du plus grand terrain d’entente de leur coopération. De l’autre, l’UE tend à adopter une lecture de plus en plus géopolitique de la Chine, associant leurs relations à des tiers comme la Russie ou les États-Unis. Cette approche alimente une méfiance stratégique croissante envers la Chine et compromet un principe fondamental longtemps défendu dans les relations bilatérales : l’absence de contradictions géostratégiques majeures.

Il est préoccupant de constater le retour de l’unilatéralisme et du protectionnisme, syndrome du basculement du pendule politique mondial, qui ébranle profondément les règles et l’ordre internationaux établis. Dans ce contexte, la Chine et l’Europe, deux forces parmi les plus importantes et les plus stables dans le paysage mondial actuel, ont la responsabilité et le devoir de dépasser l’étroite vision géopolitique à somme nulle. Les deux parties doivent transformer leur consensus stratégique en actions concrètes et coordonnées, assumer pleinement leur rôle de stabilisateur du système international et œuvrer de concert pour la paix et le développement mondiaux.

Avant-première du film d’animation chinois Ne zha 2 à Londres, le 14 mars 2025

Complémentarité ou concurrence ?

La coopération économique sino-européenne incarne un modèle exemplaire de relation gagnant-gagnant. Les succès de la réforme et de l’ouverture de la Chine ont bénéficié des capitaux et des technologies européennes, tandis que le vaste marché chinois et les possibilités de développement continu qu’il recèle sont devenus un moteur pour la croissance et l’emploi en Europe. Cette synergie a forgé une interdépendance économique profonde.

Malgré les incertitudes introduites par la stratégie européenne de « dérisquage », la coopération commerciale sino-européenne démontre une résilience remarquable. Les deux parties restent réciproquement leur deuxième partenaire commercial, confirmant que toute tentative de fragmentation artificielle des chaînes d’approvisionnement contre les lois du marché est condamnée à échouer.

Néanmoins, ce partenariat traverse une mutation profonde : le schéma traditionnel de complémentarité verticale évolue vers une relation plus complexe mêlant coopération et compétition horizontale ; l’homogénéité croissante des échanges, notamment dans les secteurs émergents comme l’économie verte et l’économie numérique, accentue cette dynamique ; l’innovation et la compétitivité accrue de la Chine créent des défis inédits pour certaines industries européennes.

Face à ces transformations, la sagesse commande de rejeter les réflexes protectionnistes du « dérisquage », voie sans issue vers un scénario perdant-perdant. Seul un dialogue constructif, guidé par l’objectif partagé d’un développement de haute qualité, permettra d’élaborer un nouveau paradigme mutuellement bénéfique.

Et si les différences rendaient plus forts ?

La Chine et l’Europe, issues d’héritages culturels, de systèmes sociaux et de trajectoires de développement radicalement différents, connaissent naturellement des désaccords. Ces différences ne conduisent pas nécessairement à la confrontation et ne justifient en aucun cas une qualification de « rival systémique ».

Tout pays choisit son système politique selon ses impératifs historiques et sa logique contextuelle, contribuant ainsi à la diversité qui enrichit notre monde. L’histoire enseigne qu’il n’existe aucun modèle institutionnel universellement applicable et que toute tentative d’imposer ou de reproduire mécaniquement un système étranger est vouée à l’échec.

L’intégration européenne elle-même illustre le principe d’« unité dans la diversité », fondé sur l’inclusion, le compromis et la prise en compte équilibrée des intérêts multiples. Cette approche devrait également s’appliquer aux relations avec le monde extérieur. Comme le démontre leur parcours commun, la Chine et l’Europe ne peuvent préserver des relations stables et fructueuses qu’en adoptant une vision objective, en respectant leurs différences institutionnelles et en transcendant les clivages idéologiques.

Face à un monde toujours plus diversifié où chaque pays trace sa propre voie de développement, la Chine et l’Europe ont l’obligation plus que jamais d’adhérer au principe de respect mutuel. Elles doivent cultiver l’art de trouver un terrain d’entente par-delà les divergences, conjurer ensemble les risques d’une nouvelle guerre froide alimentée par les antagonismes idéologiques, et coopérer à l’édification d’un ordre international ouvert, pluraliste et mutuellement avantageux.

À l’aube de ce chapitre décisif, les deux parties doivent unir leurs efforts pour élever leur partenariat à un niveau supérieur d’intérêts partagés et de responsabilités communes, consolider leur orientation de développement autour d’objectifs concertés, approfondir leur coopération pragmatique grâce à une confiance stratégique renforcée, créer une prospérité mutuelle par des mécanismes gagnant-gagnant, et œuvrer ensemble à réformer l’ordre international pour le rendre plus juste, équitable et rationnel.

 

*JIN LING est directrice du Centre de gouvernance mondiale relevant de l’Institut des études internationales de Chine.

 

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