Les jumelles Huanlili et Yuandudu fêtent leur premier anniversaire au ZooParc de Beauval, le 18 juillet 2022.
Récemment, plusieurs dirigeants européens tels que Pedro Sanchez, le Premier ministre espagnol, Emmanuel Macron, le président français, et Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne, ont effectué une visite en Chine. Certains pensent que ces visites font montre du réchauffement des relations sino-européennes. Et quels étaient donc leurs buts ?
Sortir de la crise économique
Après l’éclatement de la crise ukrainienne en février 2022, l’UE a imposé des sanctions massives à la Russie, ayant porté atteinte non seulement à cette dernière, mais aussi à elle-même. Les pays européens font face à de nombreux défis : la crise énergétique, une hausse de l’inflation, une détérioration de la situation financière et la stagnation économique. Selon les statistiques de l’Eurostat, l’UE pourrait faire face à une pénurie de 27 milliards de mètres cubes de gaz naturel en 2023, ce qui représenterait 6,8 % de sa demande. Suite à l’escalade de la crise ukrainienne, la Réserve fédérale américaine a relevé ses taux d’intérêt et l’inflation s’est intensifiée dans les pays européens. En septembre 2022, le taux d’inflation en Allemagne a dépassé 10 %, battant un nouveau record. En 2022, l’indice des prix à la consommation en France a augmenté de 5,2 %, une hausse bien supérieure à celle de 2021. Actuellement, beaucoup de pays européens se trouvent dans une situation de stagnation économique. Pour donner une nouvelle impulsion à la reprise économique, les gouvernements des pays européens ont fourni un soutien financier considérable, ce qui provoque une détérioration de la situation financière publique et met en danger la soutenabilité de la dette publique. D’après les prévisions établies par la Commission européenne, la croissance économique ne devrait être que de 0,3 % dans les pays de l’UE et de la zone euro en 2023.
En août 2022, le président américain Joe Biden a promulgué la loi sur la réduction de l’inflation de 2022, qui est entrée en vigueur le 2 janvier de cette année. Cette loi invitera un grand nombre d’entreprises européennes éminentes à investir aux États-Unis et donc à réduire les investissements dans leurs pays.
Dans ce contexte, l’UE et ses pays membres se tournent vers la Chine pour obtenir plus de commandes et résoudre leurs difficultés économiques. Par exemple, lors de la visite d’Emmanuel Macron en Chine, le président français était accompagné des dirigeants d’EDF, d’Alstom, de Veolia et d’Airbus.
Le premier A321 produit par la chaîne d’assemblage final d’Airbus à Tianjin, le 9 novembre 2022
Parvenir à l’autonomie stratégique
La crise ukrainienne a eu un impact négatif important sur la sécurité et la défense en Europe, ce qui la pousse à renforcer ses liens avec l’OTAN et donc à accentuer sa dépendance à l’égard des États-Unis. L’UE, qui marche sur les pas des États-Unis, a imposé des sanctions massives contre la Russie et soutient énergiquement l’Ukraine. Résultat : les États-Unis ont le dernier mot sur la situation de sécurité en Europe et l’autonomie stratégique européenne est devenue une expression vide de sens.
Les pays membres de l’UE sont très divisés sur la crise ukrainienne. Les pays nordiques et certains pays d’Europe de l’Est considèrent la Russie comme la plus grande menace de sécurité et ils préconisent de vaincre la Russie. D’autres pays européens, notamment la France, l’Allemagne, l’Italie et la Hongrie, estiment que cette option n’est pas réaliste, et espèrent ramener la paix et résoudre la crise par la voie des négociations.
Ces derniers jours, de grandes manifestations ont eu lieu dans plusieurs villes de France, d’Allemagne, d’Italie, d’Autriche et de Grèce, appelant à cesser de fournir des armes à l’Ukraine et à aboutir à des pourparlers entre la Russie et l’Ukraine. Certains pays ont même proposé de sortir de l’OTAN. Sous la pression de l’opinion publique, certains dirigeants de pays européens espèrent également résoudre ce conflit par les négociations. En février 2023, la Chine a publié le document intitulé Position de la Chine sur le règlement politique de la crise ukrainienne. Le président chinois Xi Jinping a visité la Russie du 20 mars au 22 mars et a mené de longues discussions avec son homologue russe Vladimir Poutine. La Chine cherche également à communiquer activement avec l’Ukraine. Tout cela a fait réaliser aux dirigeants européens que la Chine pourrait être la seule puissance capable de jouer le rôle de médiateur dans la crise ukrainienne, ce qui explique en partie leurs visites en Chine.
Collaborer à la gouvernance mondiale
La persistance de la crise ukrainienne affecte également le niveau de vie de la population européenne et provoque des grèves dans de nombreux pays. En France, le gouvernement a passé en force la réforme des retraites, suscitant huit grèves nationales en deux mois. Les grèves perdurent depuis déjà trois mois en France et les manifestants ont appelé à la démission d’Emmanuel Macron. Le président français est confronté à une forte pression sociale.
Avec l’escalade de la crise ukrainienne, cinq millions de réfugiés ukrainiens ont afflué en Europe, exerçant une pression économique importante sur les pays européens. De plus, un grand nombre de réfugiés et de migrants provenant d’Afrique et d’Asie de l’Ouest sont venus en Europe, aggravant la crise migratoire du continent et provoquant de plus en plus de mouvements de protestation dans des pays tels que la France, l’Allemagne, l’Italie et la Grèce. La crise migratoire et les perturbations sociales aggravent l’instabilité européenne.
Par conséquent, des dirigeants européens ont visité la Chine pour échanger des opinions et renforcer la coopération bilatérale dans de nombreux domaines. La Chine est le deuxième partenaire commercial de l’UE. Les deux parties sont économiquement complémentaires et leurs relations sont mutuellement bénéfiques. Elles partagent des intérêts communs en matière de changement climatique, de gouvernance mondiale, de multipolarisation du monde, de non-prolifération des armes nucléaires et de prévention de la course aux armements. Cependant, après que l’Europe a qualifié la Chine de « rival systémique » en 2019, les relations sino-européennes ont connu des bas. La crise ukrainienne a un impact considérable sur l’économie, la sécurité, la société et la politique des pays européens. Dans ce contexte, l’UE a besoin de l’aide et de la coopération de la Chine, qui insiste toujours sur le développement tous azimuts des relations sino-européennes et le renforcement du partenariat stratégique global Chine-UE. Quand les pays européens étaient touchés par la crise de la dette et ont rencontré des difficultés, la Chine leur a toujours apporté son aide. Les visites récentes de dirigeants européens montrent que l’UE veut améliorer ses relations avec la Chine, renforcer la coopération économique bilatérale dans plusieurs domaines et jouer un rôle avec la Chine dans la résolution de la crise ukrainienne.
*ZHANG LIHUA est directeur du Centre de recherche des relations sino-européennes de la Faculté des sciences sociales de l’Université de Tsinghua.
