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Pourquoi l’Occident a tant de mal à comprendre le PCC

2021-06-25 15:18:00 Source:La Chine au présent Auteur:MARTIN JACQUES
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Le 8 juin 2021, de nombreuses personnes ont fait la queue pour visiter le Mémorial du premier Congrès du PCC, à Shanghai. 

  

Le Parti communiste chinois (PCC) ne ressemble à aucun autre parti dans le monde. Il nous oblige à repenser l’idée même de ce qu’est un parti politique. Il s’agit d’un phénomène intrinsèque à la Chine. C’est inéluctablement chinois. Si le PCC a connu un tel succès, c’est parce qu’il a su trouver le moyen, au cours de ses 100 ans d’existence, de combiner sa grande capacité à mener des réformes avec un profond enracinement dans la société et la culture chinoises. 

L’Occident n’a jamais réussi à saisir la nature du PCC. Cette ignorance a atteint de nouveaux sommets après 2016. Le monde occidental a commencé à établir un rapprochement entre le PCC et l’ancien Parti communiste de l’Union soviétique (PCUS). Pourtant, ils ont très peu de choses en commun. Pourquoi seraient-ils similaires d’ailleurs ? La Russie pourrait difficilement être plus différente de la Chine. Le PCUS fut un échec historique : a contrario, on peut dire que le PCC est le parti politique qui a le mieux réussi au monde au cours du siècle dernier. Il est impossible de comprendre le PCC du point de vue du marxisme traditionnel ; bien avant 1949, le marxisme du PCC a été hautement sinisé. De plus, le PCC est enraciné dans le confucianisme et profondément influencé par ce courant de pensée. Façonné par la civilisation chinoise (dont il est bien sûr un produit), il se révèle aussi complexe que celle-ci. 

L’Occident croit dur comme fer qu’un système avec le PCC au pouvoir n’est pas viable, parce qu’il est incapable d’entreprendre des réformes. L’histoire chinoise ne corrobore pas cette idée. En effet, plus que tout autre parti au monde, le PCC a fait preuve d’une remarquable aptitude à réformer le système. La transition engagée de Mao Zedong à Deng Xiaoping en est peut-être l’illustration la plus parlante. Deng Xiaoping a introduit deux réformes de fond : il a fait du marché l’une des parties intégrantes du socialisme à la chinoise, aux côtés de l’État et de la planification ; et il a intégré la Chine dans l’économie mondiale. Seul un parti doté d’une grande confiance en lui et profondément enraciné dans la société pouvait mener à bien un changement aussi profond. Cela rappelle aussi l’indispensable pragmatisme qui anime le PCC. « Rechercher la vérité à partir des faits » : telle est la maxime au cœur de sa philosophie et tel a été le principe sous-jacent au temps de la réforme. Et ces caractéristiques sont d’autant plus vraies aujourd’hui. Le professionnalisme, l’expérimentalisme et la méthode scientifique constituent la marque de fabrique de la gouvernance chinoise. 

En Occident, le débat sur la gouvernance s’articule massivement autour du principe de démocratie électorale. La compétence de l’État est reléguée au second plan. En Chine, c’est tout l’inverse : la compétence de l’État est jugée primordiale. L’importance accordée à la méritocratie, aussi bien autrefois qu’aujourd’hui, y est clairement pour quelque chose. Pour atteindre des sommets, le PCC doit présenter un très haut niveau d’instruction et une expérience des plus vastes dans la gestion d’une économie et d’une société modernes. Voici deux exemples qui, à eux seuls, suffisent à illustrer l’extraordinaire compétence de la gouvernance chinoise : premièrement, l’essor économique qu’a connu la Chine ces 40 dernières années, en réalisant la transformation économique la plus remarquable de l’histoire moderne ; deuxièmement, la manière dont la Chine a réussi à maîtriser l’épidémie de COVID-19 sur son territoire, en accomplissant ainsi un triomphe en matière de gouvernance. 

La Chine ne s’est jamais considérée comme un modèle que les autres doivent suivre. Elle reconnaît depuis longtemps que son histoire, sa culture et sa taille même la rendent unique. La Chine n’a jamais exigé ou attendu d’autres pays qu’ils lui ressemblent. À la différence des États-Unis, du Royaume-Uni et de l’ex-Union soviétique, le PCC n’a jamais estimé que son système politique doive être considéré comme un modèle pour les autres. Et l’émergence de la Chine ne changera pas la donne. À plus long terme, il faudrait s’attendre à voir émerger une tendance différente : à mesure que la Chine gagnera en importance et en influence en s’imposant naturellement comme référence, d’autres pays chercheront inévitablement à s’inspirer de ses réalisations, que ce soit, par exemple, dans les domaines de la politique économique, la gestion des pandémies, l’innovation technologique, la compétence du gouvernement ou la lutte contre le changement climatique. 

Le PCC s’est fixé pour objectif de construire « un grand pays socialiste beau, moderne, prospère, puissant, démocratique, harmonieux et hautement civilisé » vers le milieu du siècle. Il lui reste donc encore près de trois décennies pour y parvenir. On ne peut que supposer où en sera la Chine et quel niveau elle aura atteint ici-là. Elle sera probablement devenue, sans conteste, la première économie au monde. Le niveau de vie en Chine (encore bien en deçà de celui enregistré aux États-Unis pour le moment) sera nettement rehaussé. Les temps de trajet interurbains et intra-urbains seront, quant à eux, considérablement réduits. La grande majorité de la population sera composée de citoyens nés après l’an 2000, n’ayant jamais connu cette époque où la Chine était encore pauvre et peuplée pour moitié de ruraux. Ces jeunes auront à coup sûr des attentes profondément distinctes. Pour gouverner et diriger ce pays d’un genre très différent, le PCC devra continuer d’évoluer et de se réinventer constamment. Et le fait qu’il conjugue son pragmatisme à la grande tradition chinoise consistant à penser sur le long terme l’aidera dans cette tâche. Mais une chose est sûre : sur la base de ses réalisations, de sa capacité de gouvernance et de sa faculté à changer, le PCC restera le dirigeant et l’architecte de la Chine.  

  

*MARTIN JACQUES est professeur invité à l’Institut des relations internationales modernes de l’Université Tsinghua et chercheur à l’Institut de Chine de l’Université Fudan. 

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