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Un nouveau souffle pour les relations Chine-UE

2021-02-02 15:57:00 Source:La Chine au présent Auteur:AUGUSTO SOTO
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L’année 2020 s’est achevée avec l’annonce de l’accord d’investissements Chine-UE, à l’issue d’une visioconférence entre le président chinois Xi Jinping et les dirigeants européens. Cet accord, qui met fin à sept années de patientes négociations, constitue un message important : à savoir que des puissances qui sont à la fois deux grandes civilisations et deux grands marchés sont capables de dialoguer, de négocier et de se comprendre, pour construire ensemble un destin partagé, plus prévisible et qui apportera plus de bénéfices mutuels. Il s’agit d’un événement remarquable qui survient alors que les États-Unis, pays qui a tant influencé l’ordre politique et commercial mondial après la Seconde Guerre mondiale, sont en proie à une polarisation extrême et présentent des symptômes palpables d’épuisement. Les scènes chaotiques que l’on a observées récemment à Washington sont les symptômes d’une Amérique fracturée, plus imprévisible que jamais. Dans un tel contexte, l’indépendance politique et commerciale semble plus que jamais nécessaire sur la scène internationale.

 

Les principaux aspects de l’accord d’investissement
 
L’accord d’investissement Chine-UE comporte plusieurs aspects importants.

 

Le point essentiel est qu’il permettra aux deux parties de bénéficier d’un meilleur accès au marché de l’autre et apportera des garanties institutionnelles plus importantes qui amélioreront l’environnement commercial pour les entreprises. D’une part, la Chine et l’Europe, en tant que forces, marchés et civilisations majeurs du monde, doivent faire preuve d’un sens des responsabilités et adopter des mesures actives pour contribuer à la paix et au progrès dans le monde en 2021, comme l’a déclaré le président Xi Jinping. D’autre part, comme l’a souligné Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, l’accord garantira une plus grande transparence dans l’octroi des subventions publiques, créera un meilleur accès aux marchés, mettra fin au transfert obligatoire de technologies européennes et permettra de lutter contre les pratiques de distorsion de marché, tandis que la Chine bénéficiera d’un meilleur accès au marché européen, notamment dans le domaine des énergies renouvelables. L’accord contribuera à rééquilibrer les relations en matière de commerce et d’investissement, avec notamment d’importantes dispositions sur le développement durable, le climat, l’environnement et les normes du travail. Il ne faut pas perdre de vue que cet accord s’inscrit dans l’esprit du libre-échange et du multilatéralisme.
 

 

La chancelière allemande Angela Merkel, qui joue un rôle essentiel dans l’interaction entre l’UE et la Chine, a souligné que cet accord devrait contribuer à une reprise de l’économie mondiale favorable aux pays de l’UE qui devront faire face, au sortir de la pandémie, à une récession économique. Rappelons qu’en l’espace de 15 ans, la chancelière allemande a effectué 12 visites officielles en Chine et a également rencontré les principaux dirigeants chinois à l’occasion de divers événements mondiaux. Elle est probablement la dirigeante européenne qui a le plus favorisé l’intérêt général de l’UE dans sa politique étrangère ces dernières années.

 

Dans le domaine des investissements et du commerce, Jörg Wuttke, président de la Chambre de commerce de l’UE en Chine, s’est également montré très favorable à l’accord. Il a souligné ses aspects positifs dans les domaines de l’assurance, de la finance et de l’industrie manufacturière, et a rappelé combien il est vital pour l’UE d’éviter le découplage promu par Washington depuis quatre ans (tant sur le plan commercial qu’en matière de chaîne d’approvisionnement). Enfin, il a rappelé que la Chine assurerait 30 % de la croissance mondiale au cours de la prochaine décennie (comme cela a déjà été le cas au cours de la dernière décennie).

 

Quels arguments face aux critiques ?

 

L’accord a été conclu malgré certaines critiques, notamment aux États-Unis où Jake Sullivan, conseiller à la sécurité nationale du futur président Biden, s’est permis de mettre en garde l’UE. « L’administration Biden-Harris accueillera favorablement des consultations rapides avec nos partenaires européens sur nos inquiétudes communes concernant les pratiques économiques de la Chine », a-t-il déclaré.

 

Pour plusieurs raisons, ces déclarations sont à prendre avec précaution. Ces dernières années, comme toujours, Washington a signé plusieurs accords commerciaux sans consulter l’UE, qui est pourtant son alliée depuis des décennies. S’il est clair qu’avec l’arrivée de Biden, le slogan de Trump « l’Amérique d’abord » sera remplacé par un slogan internationaliste, il serait cependant très naïf de supposer que Washington fera passer les intérêts des autres pays avant les siens. Il s’agit là d’une question de pure logique. De plus, Washington a perdu du pouvoir sur la scène internationale et tôt ou tard, probablement au cours de cette décennie, il sera remplacé par un pays dont les indicateurs de puissance économique sont meilleurs.
 
Le 7 novembre 2020, un visiteur découvre le submersible SM300-3, présenté par la Finlande à la 3e CIIE.

 

Trois éléments semblent avoir pesé sur la décision prise à Beijing et à Bruxelles. D’abord, cet accord était en négociation depuis près de huit ans, il n’a donc jamais été question de prendre en compte l’opinion de Biden. Par ailleurs, si celui-ci a été élu avec une large majorité, une grande partie de l’électorat reste fidèle à Trump, ce qui signifie que Biden (bien qu’il ait la majorité au Sénat et à la Chambre des représentants) devra tenir compte des équilibres internes lorsqu’il se projettera sur la scène internationale. Enfin, il n’est pas déraisonnable d’imaginer que dans quatre ans, un nouveau président américain, semblable à Trump, tentera lui aussi de saper les intérêts de la Chine et de l’UE.

 

Les dirigeants européens, en contact étroit avec leurs homologues chinois, ont su capter le sens de l’histoire grâce à de nombreuses consultations.

 

Dans le contexte chaotique que nous connaissons, que peut-on attendre aujourd’hui des États-Unis, un pays « profondément endommagé », qui connaît une aggravation de ses divisions politiques internes, comme l’a récemment résumé l’analyste américain Ian Bremmer ? Et à la lumière des derniers événements survenus au Capitole à Washington, que peut-on attendre d’un pays qui vient de subir, selon les propos de Stefan Kornelius, ancien correspondant du prestigieux quotidien allemand Süddeutsche Zeitung dans la capitale américaine, un « coup d’État » ? Il est probable que les fractures sociopolitiques que l’on constate actuellement persisteront et affecteront les orientations de la politique étrangère américaine.

 

De façon tout à fait cohérente, l’UE et la Chine ont donc choisi d’anticiper les événements en suivant leur propre rythme, sans que celui-ci ne soit exclusif pour autant, et en persévérant dans leur autonomie stratégique, sans tenir compte des critiques au sujet de leur rapprochement. En outre, elles ont développé une vision pragmatique orientée à la fois sur le court et le long terme et qui repose sur un dialogue constructif. Une raison plus que suffisante pour que l’accord d’investissement Chine-UE fasse date dans l’histoire. Beijing et Bruxelles ont su faire preuve de sagesse au bon moment.

 

*AUGUSTO SOTO est directeur du projet Dialogue avec la Chine.

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