Le 11 février 2019, une réception pour le Nouvel An chinois est organisée à l’hôtel de ville de Paris
en présence de la maire de Paris Anne Hidalgo et de l’ambassadeur de Chine en France Zhai Jun.
S.E.M. ZHAI JUN*
L’année 2019 est une année particulièrement importante pour les relations sino-françaises.
Ce 17 mars, il y aura exactement 100 ans que 89 jeunes étudiants chinois embarquaient à Shanghai sur un paquebot à destination de la France, inaugurant ainsi officiellement le célèbre mouvement travail-études en France.
Au cours de la décennie suivante, ce sont plus de 4 000 jeunes chinois qui, dans leur sillage, ont traversé les mers pour se rendre en France pour y étudier les sciences et les technologies de pointe, en quête de vérités utiles au salut de leur pays et de leur peuple. Après leur retour en Chine, certains d’entre eux sont devenus les figures de proue de la révolution chinoise et des fondateurs de la Chine nouvelle. D’autres sont devenus des bâtisseurs dans l’éducation, les sciences, la culture et les arts chinois modernes. Ces étudiants-travailleurs partis en France ont marqué le premier effort de la Chine pour appréhender le monde dans toute son ampleur. Ce qui constituait son premier pas significatif vers sa modernisation.
Depuis 100 ans, ce mouvement a conservé une coloration profondément sentimentale dans la relation qui unit nos deux peuples. Pour de nombreux Chinois, la France est le berceau de la Renaissance et de l’Humanisme qu’on retrouve dans les œuvres traduites par Fu Lei. Mais plus encore, c’est le pays qui a nourri la pensée révolutionnaire de Zhou Enlai, de Deng Xiaoping, et qui a forgé leurs visions du Communisme.
Depuis un siècle, ce mouvement Travail-études en France occupe une place éminente dans l’histoire de la relation sino-française. Lors de sa première visite d’état en 2014, le président Xi Jinping s’est rendu à l’Institut franco-chinois de Lyon, puis, en septembre de la même année, la ville de Montargis a baptisé la place de sa gare « Place Deng Xiaoping » pour honorer le 110e anniversaire de sa naissance.
L’année 2019 marque également le 55e anniversaire de l’établissement des relations diplomatiques sino-françaises. Le 27 janvier 1964, le président Mao Zedong et le général de Gaulle, inspirés par leur haute clairvoyance, ont pris la décision historique de nouer des relations diplomatiques au niveau d’ambassadeur entre nos deux pays, faisant de la France la première puissance occidentale à reconnaître la Chine nouvelle. Dans le contexte de guerre froide et de confrontation des blocs qui prévalait alors, cette décision a ouvert une nouvelle page dans nos relations, et elle a modifié le cours de l’évolution de l’échiquier international en même temps.
En 55 ans, ces relations ont évolué d’un partenariat global, vers un partenariat stratégique global, puis vers un partenariat stratégique global étroit et durable tourné vers l’avenir. De par leur caractère stratégique, mondial et moderne, ces relations ont toujours été à l’avant-garde des relations entre la Chine et l’Occident.
Sur le plan politique, constamment empreints d’un respect mutuel et soucieux de développer leurs convergences, nos deux pays ont toujours inscrit leur relation bilatérale dans une perspective stratégique et de long terme, conférant ainsi à leur coopération un caractère exemplaire pour des pays aux réalités, aux cultures et aux systèmes sociaux si dissemblables.
Lors de la visite en Chine effectuée par le président Macron en début d’année 2018, nos deux chefs d’état ont publié la Déclaration conjointe sino-française. Celle-ci réaffirmait clairement une série de principes fondamentaux, dont le respect mutuel de la souveraineté, de l’intégrité territoriale, des intérêts vitaux et des modes de développement choisis, poursuivant ainsi l’excellente tradition de nos relations bilatérales.
Sur le plan économique, l’aspect stratégique de notre coopération est également unique. La France a été la première puissance occidentale à développer avec la Chine une coopération aussi stratégique et aussi ouverte. La première centrale nucléaire de Chine, située à la baie de Daya, a été construite avec la France. Tout récemment, à l’occasion de la grande cérémonie de célébration du 40e anniversaire de la politique de réforme et d’ouverture, Alain Mérieux, président de la Fondation Mérieux, qui a participé à la création du laboratoire P4, a été l’un des dix étrangers à être décoré de la médaille de l’Amitié pour la réforme de la Chine. En étant le premier à être monté sur scène pour la recevoir, il est devenu le symbole de l’excellence et de l’exemplarité de la coopération sino-française.
En matière d’échanges humains, jamais nos relations culturelles, nos échanges humains et notre coopération décentralisée n’ont été aussi denses. En 2018, la France a accueilli 2,3 millions de touristes chinois, battant ainsi un nouveau record. En moyenne, un Chinois sur quatre visitant l’Europe s’est rendu en France. La France accueille 46 000 étudiants chinois et plus de 10 000 Français étudient en Chine. 110 000 Français étudient le mandarin et il existe plus de 100 jumelages entre nos provinces, nos régions et nos villes.
Mais notre monde traverse aujourd’hui des mutations comme rarement dans son histoire. Parallèlement à la rapide multipolarisation, à la mondialisation de l’économie, à l’arrivée du numérique et à la multiplicité des cultures, on voit surgir d’innombrables défis tels que l’unilatéralisme, le protectionnisme, le terrorisme, le changement climatique alimentant un environnement international encore plus incertain et instable. Dans ce contexte, en tant que membres permanents du Conseil de sécurité des Nations Unies et ardents défenseurs du multilatéralisme, il est plus important que jamais que nos relations bilatérales soient solides et ambitieuses.
Celui qui reste fidèle à son dessein initial l’accomplira.
À l’heure où nous célébrons le centenaire du mouvement Travail-études et le 55e anniversaire de nos relations diplomatiques, nous devons nous rappeler le chemin parcouru ensemble pour développer plus avant nos relations, mais aussi puiser dans l’histoire inspiration et motivation, afin d’unir nos efforts pour offrir à nos peuples et au monde entier un avenir meilleur.
En premier lieu, renforçons notre confiance politique mutuelle et notre coordination stratégique. Il convient d’intensifier nos échanges à haut niveau afin de développer notre amitié et notre confiance réciproques. Nous pouvons également renforcer notre coordination et notre coopération sur des dossiers tels que le climat, le nucléaire iranien, le terrorisme et le développement de l’Afrique. Nous pouvons harmoniser nos positions sur la réforme de l’OMC, sur la libéralisation et la facilitation du commerce et des investissements. Nous pouvons fédérer nos convergences et parler d’une même voix sur la défense d’un ordre mondial multilatéral et d’une économie internationale ouverte pour insuffler de la positivité à la gouvernance mondiale de notre époque.
En second lieu, approfondissons notre coopération économique et commerciale. Nous devons pour cela approfondir et élargir notre coopération dans les domaines stratégiques traditionnels tels que le nucléaire civil, l’aéronautique et le spatial. Tâchons d’identifier une série de nouveaux projets structurants et emblématiques. Travaillons sur l’adéquation de nos stratégies de développement. Explorons activement les pistes de coopération, notamment en matière de coopération agricole intégrale, d’énergie, d’industries de pointe, de PME, d’intelligence artificielle et de big data. Mobilisons nos autorités décentralisées, nos entreprises, nos think-tanks, nos sociétés civiles. Engageons-nous ensemble dans la création des Nouvelles routes de la soie et traçons-en, ensemble, les perspectives de la coopération sino-européenne.
Enfin, approfondissons notre coopération en matière d’échanges humains. Explorons l’immense potentiel de coopération bilatéral, notamment en sciences et technologies (en sciences fondamentales, en sciences de l’environnement, en recherche océanographique), en matière d’éducation et d’enseignement (échanges de jeunes, formation professionnelle), en matière d’art et de culture (création et innovation), en matière de santé (prévention des épidémies et des maladies émergentes) et en matière de sports (coopération olympique et économie des sports d’hiver).
L’amitié sino-française s’est construite sur un socle maintenant centenaire. Nos deux pays partagent une vision commune hautement stratégique et sont liés par des intérêts toujours plus étroits. Voici pourquoi je suis confiant et profondément optimiste pour l’avenir de nos relations.
*S.E.M. ZHAI JUN est ambassadeur de Chine en France.
