AVRIL  2003

 

Paris a partagé la joie du Nouvel An chinois

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Le seul mensuel multilingue d'intérêt général en Chine, publié en français, anglais, espagnol, allemand, arabe et chinois.

 

 

L'œuvre du chirurgien québécois Jean Couture inspire un documentaire sur la rencontre des médecines occidentale et chinoise

Sous la plume de Jean Haman, le magazine de l'université Laval présente l'histoire de cet homme qui vient d'inspirer un documentaire.
C'est après avoir pris sa retraite que le médecin québécois Jean Couture découvre une nouvelle passion: la coopération internationale. Il ouvre un programme de lutte contre le cancer en Chine avec la création de l'Unité d'oncologie Bethune-Laval. Un film présente l'approche préconisée, favorisant la rencontre de deux cultures médicales.
Lorsque Jean Couture s'est rendu dans ce pays pour la première fois au début des années 1990, il a été sidéré par ce qu'il y a découvert. " Dans environ 70 % des cas, les gens se présentaient à l'hôpital avec un cancer tellement avancé qu'on ne pouvait plus rien pour eux. Je revivais là-bas les mêmes frustrations que j'avais connues ici quand j'ai commencé à pratiquer la médecine en 1954. Il fallait aider les Chinois à combler rapidement ce retard d'un demi-siècle. "

Diplômé de la Faculté de médecine en 1949, professeur depuis 1954, directeur du Département de chirurgie de 1981 à 1989 et professeur émérite toujours actif, Jean Couture n'est pas tombé dans la coopération internationale quand il était petit. Il lui a fallu attendre l'heure de la retraite pour découvrir cette passion qu'il qualifie de " la chose la plus extraordinaire qui soit arrivée dans ma carrière ". En 1987, deux chercheurs chinois en séjour à Québec lui suggèrent de créer un programme de stages entre l'Université Laval et un hôpital de Changchun affilié à l'Université Norman Bethune, dans la province du Jilin. Petit à petit, l'idée fait son chemin. En 1990, Jean Couture convainc l'ACDI d'investir 500 000 $ dans la création, à Changchun, d'une unité d'oncologie semblable à celle de l'hôpital du Saint-Sacrement.
La première phase de ce projet consistait à former du personnel capable d'utiliser les connaissances de la médecine moderne pour soigner les cancéreux. Le chirurgien persuade alors une vingtaine de personnes de l'hôpital du Saint-Sacrement, de l'Hôtel-Dieu de Québec et de l'hôpital Laval, dont plusieurs professeurs de la Faculté de médecine, de participer à la formation de stagiaires. Au cours des années qui suivent, ils accueillent et forment 45 médecins, infirmières et épidémiologistes chinois qui retournent ensuite pratiquer à l'Unité d'oncologie Bethune-Laval de Changchun. L'appellation de cette unité associe le nom de l'Université à celui du grand médecin canadien Norman Bethune, qui s'est rendu en Chine pendant la révolution pour soigner des blessés et former des médecins.
Par la suite, Jean Couture supervise la mise sur pied d'un programme de soins palliatifs, comprenant une " salle de sollicitude affectueuse ", qui permet aux patients de " vivre avec dignité les derniers jours de leur vie et de quitter ce monde dans une ambiance sereine ". Puis, en collaboration avec la Société canadienne du cancer, l'Unité a lancé une campagne de prévention contre le cancer qui met en vedette Mark Rowswell, un humoriste canadien qui fait un tabac en Chine. En dix ans, l'Unité d'oncologie Bethune-Laval a traité des milliers de Chinois atteints de cancer. Pour le bien des malades, la médecine occidentale a ainsi mis le pied dans un hôpital où prévaut la médecine traditionnelle chinoise. Le cinéaste Edgar Soldevilla est allé voir comment les médecines occidentale et chinoise cohabitent dans ce corps étranger qui se développe au sein d'un organisme chinois. Dans son documentaire de 52 minutes, intitulé Dans l'esprit de Norman Bethune, le cinéaste aborde la question de la déshumanisation des soins dans la médecine occidentale et du risque d'évacuer la spécificité de la médecine chinoise - les soins de l'âme - du traitement des malades.
Par le biais des témoignages de Jean Couture, de son collègue chinois Liu Guoqin, d'anthropologues médicaux - dont Serge Genest, de l'Université Laval -, de patients et du personnel de l'Unité oncologique, Edgar Soldevilla montre comment l'approche préconisée à l'Unité d'oncologie Bethune-Laval favorise une rencontre féconde des deux cultures médicales. Dans les dernières secondes du documentaire, Jean Couture compare le modèle développé à l'Unité d'oncologie Bethune-Laval à " une goutte d'eau qui pourrait faire boule de neige ". Le modèle a déjà été repris dans deux autres villes chinoises et il est question de l'exporter vers d'autres régions de ce pays.