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Les sombres perspectives d’emploi des diplômés universitaires

LIU QIONG

Autrefois enfants gâtés de la société, les diplômés universitaires doivent aujourd’hui affronter des difficultés d’insertion dans le marché du travail, un phénomène qui leur était jusqu’à tout récemment inconnu. Et la crise financière mondiale est bien loin d’arranger les choses...

EN sortant du Gymnase no 2 de l’université de Beijing, Che Xinglai, la mine dépitée, confie : « Je n’ai rien obtenu. » Doctorant en physique de l’université Tsinghua, le jeune Che va être diplômé en juillet prochain. Comme la plupart des autres étudiants de son groupe, il a commencé dès le début de ce semestre à visiter fréquemment les forums de recrutement dans les campus de Beijing.

Il espère trouver un poste de professeur d’université à Beijing. Contrairement à beaucoup d’autres, il a cependant déjà trouvé un emploi dans une université de Qinhuangdao (province du Hebei). Le problème, c’est que sa copine travaille à Beijing, et que, bien sûr, il espère trouver un emploi dans la même ville qu’elle. Il continue donc de se rendre dans les forums de recrutement. « Auparavant, pour les titulaires de doctorat de notre université, ce n’était pas difficile de trouver un bon travail, mais cette année, la situation a complètement changé. Je veux travailler dans une université, mais à Beijing, il y en a moins qu’auparavant qui recrutent, et cette année, certaines annulent même leur projet de recrutement », déclare-t-il. Dans cette crise de l’emploi, Che Xinglai croit qu’il faut cependant « ne jamais abandonner ».

La demande excède l’offre

Sous l’influence de la crise financière internationale, la situation des entreprises est beaucoup plus sombre que celle des universités qui ont toujours été considérées comme des tours d’ivoire. À la fin de 2008, beaucoup d’entreprises ont annulé ou ralenti leur recrutement dans les campus. Des sociétés immobilières comme R&F Properties, Evergrande Real Estate Group et Mayland

Lynch Foundation ne recrutent pas pour 2009. La Banque de construction de Chine, l’une des quatre grandes banques du pays, qui offrait auparavant beaucoup de postes, a aussi interrompu son recrutement. De plus, cette année, aucune société de portefeuille ne recrute dans les campus.

Au début de l’année dernière, alors que la situation économique de la société E Fund Management était bonne, son département des ressources humaines recrutait même aux États-Unis, sans regarder à la dépense. Cependant, à la fin de l’année, à la suite de la baisse de son rendement, cette société a aussi ralenti son recrutement dans les campus du pays. D’ailleurs, des entreprises réputées comme CITIC Securities et China Jianyin Investment Securities ont complètement cessé d’embaucher.

À cause de l’impact de la crise financière internationale, les secteurs de la fabrication et ceux liés au commerce extérieur ont aussi sombré dans le marasme. Dès le début de cette année, les régions où les entreprises non étatiques prospèrent, comme le delta du Yangtsé et le delta du fleuve Zhujiang (rivière des Perles), ont subi divers types de choc. Ces entreprises qui avaient embauché 34,2 % des diplômés chinois en 2007 sont confrontées à une situation difficile. Pour ceux de 2009, c’est loin d’être une bonne nouvelle.

Au forum de recrutement auquel Che Xinglai a participé, Mme Huo Jingying a reçu plus de quatre-vingts curriculum vitæ. Cette dame est directrice du département des ressources humaines de la société de technologies Zhiwei à Wuxi (province du Jiangsu). C’est la deuxième fois qu’elle fait du recrutement pour son entreprise. Cette année, les diplômés ne se préoccupent ni de l’endroit où le poste est offert et ni du salaire. « À travers les médias, les étudiants ont déjà pris conscience de l’influence de la crise financière internationale sur le marché chinois de l’emploi et donc de leur situation difficile », exprime Mme Huo. Selon un sondage sur les attentes salariales des diplômés, organisé récemment par le site Tencent et auquel 20 000 personnes ont participé, les titulaires de licence s’attendent à recevoir un salaire de 1 000 à 2 000 yuans par mois.

Le même jour où se tenait le forum de recrutement avait lieu à l’université de Beijing le Forum sur la crise financière, l’expansion de la demande intérieure et la stratégie de l’économie chinoise. M. Zhou Qifeng, recteur de cette université, y a exprimé son inquiétude : « Sous l’influence de la crise financière, de concert avec les diplômés, nous devons affronter la pression de l’emploi et prendre des mesures pour les aider. »

Selon les données du ministère chinois des Ressources humaines et de la Sécurité sociale en 2009, il y aura plus de 6 millions de nouveaux diplômés. En ajoutant les 4,8 millions de diplômés des deux dernières années qui n’ont toujours pas trouvé de travail, on arrive à un total de plus de 10 millions de diplômés qui sont en attente d’emploi. À cause de cette crise financière, une pénurie d’emplois est à prévoir.

Un emploi stable : la nouvelle demande des diplômés

Depuis dix ans, les universités chinoises ont augmenté leur quota d’admission, ce qui a causé une pression directe sur le marché de l’emploi. Durant cette période, la situation de l’emploi a été difficile quasiment tous les ans. Selon des données officielles, en 2006, le nombre de diplômés était cinq fois plus important qu’en 1999. En 2009, le problème est différent, puisque c’est la première fois que la Chine affronte une crise financière mondiale depuis les 30 ans de la réforme et de l’ouverture.

Alors qu’elles attiraient autrefois les diplômés, les entreprises étrangères ont commencé à réduire leur personnel et à diminuer les salaires. Un plus grand nombre d’étudiants cherchent maintenant un emploi de fonctionnaire. Tang Yuan, étudiante au département des finances de l’Université du peuple de Chine, exprime : « Maintenant, le secteur financier est en pleine tourmente. Bien que les salaires et les avantages sociaux des fonctionnaires ne soient pas très bons, un poste au gouvernement est plus stable que les autres. » Cette jeune femme a participé à l’examen d’embauche du ministère des Finances et à celui de la Banque populaire de Chine.

La SARL Shanghai Foreign Service a publié son rapport sur la situation de l’emploi des diplômés de 2008. Ce rapport souligne la nouvelle tendance de l’emploi : trouver un travail stable est la priorité. En 2008, plus de 1,04 million de personnes ont passé l’examen d’inscription pour devenir fonctionnaires, mais seulement 13 566 l’ont réussi; le taux d’élimination a donc été de 98,7 %. On peut dire qu’en moyenne, 78 personnes se font concurrence pour le même poste; en 2008, c’était 60. L’année 2009 est considérée par les internautes comme celle où la concurrence sera la plus acharnée.
Au même forum de recrutement, Mme Li Junkai occupait le premier stand près de la porte. Cette femme n’est pas représentante d’une entreprise : elle est vice-directrice du Centre d’emploi de l’université de Beijing. Selon elle, les diplômés doivent changer d’attitude par rapport au marché de l’emploi qui est sous l’influence de la crise financière internationale. Auparavant, les services gouvernementaux et autres services publics attiraient déjà beaucoup de diplômés, mais depuis la crise financière, ils sont encore plus populaires. Toutefois, si tous les diplômés se bousculent dans une même voie, cela engendrera une concurrence malsaine. Pour éviter ce problème, les diplômés peuvent choisir de poursuivre leurs études. Le Centre d’emploi de l’université de Beijing fournit toujours des services de consultation et des cours pour aider les étudiants à élargir leurs perspectives d’emploi.


Ne pas être aveugle, ni trop pessimiste

Mme Li ajoute : « Il faut que les étudiants aient une conscience objective de la situation de l’emploi pour transformer cette pression en force. Il leur faut donc réduire leur attente et améliorer leur capacité professionnelle. En faisant preuve de diligence, ils peuvent mieux trouver un bon travail. »

Selon elle, il ne faut être ni aveugle, ni trop pessimiste. Chacun peut trouver la voie qui lui convient pour décrocher un bon poste. Étant donné le besoin stratégique de l’ensemble du pays, des secteurs importants augmenteront leur offre d’emploi. Toujours selon Mme Li : « China Telecom, China Mobile et des projets d’avions gros porteurs de la Société d’aviation commerciale de Chine vont augmenter leur nombre de postes à combler. »

D’ailleurs, pour l’instant, l’économie chinoise est toujours en bonne posture; il est possible que de grandes entreprises étrangères continuent d’accroître leurs investissements dans le marché chinois et d’élargir leur plan de recrutement. De même, certains domaines qui sont moins influencés que d’autres par la crise financière ou qui n’en ont pas subi l’influence, notamment ceux des biens de grande consommation et des services professionnels, recrutent quand même encore beaucoup d’employés.

Selon Mme Li, les indices fondamentaux de l’économie chinoise n’ont pas changé et le pays profite d’une grande capacité de croissance économique, ce qui constitue une garantie d’emploi pour les étudiants. D’ailleurs, le gouvernement a lancé des mesures pour faire augmenter la demande intérieure; dans les deux prochaines années, il y investira 4 000 milliards de yuans. Bien que les effets à long terme restent à envisager, c’est une bonne nouvelle pour le marché de l’emploi.

À la fin de 2008, pour fixer les principaux points économiques de 2009, le PCC a organisé la Conférence centrale sur le travail économique. Au cours de cette conférence, on a annoncé une série de politiques pour faire face au défi de l’emploi. On y a déclaré : « Il faut des politiques positives et actives pour augmenter le nombre de postes et stabiliser le marché de l’emploi. »

L’année dernière, lors d’une rencontre avec des étudiants de l’Université de l'aéronautique et de l’aérospatiale de Beijing, le premier ministre Wen Jiabao a déclaré que le gouvernement allait lancer des politiques en matière d’emploi : encourager les grandes entreprises, en particulier les entreprises innovatrices, à recruter plus de diplômés; encourager les instituts de recherche scientifique et les universités à attirer des étudiants grâce à leurs programmes en technologies; guider les étudiants à choisir de travailler à la base et inciter les étudiants à continuer leurs études ou à participer à des formations.

Comme politique importante d’encouragement à l’emploi, de novembre 2008 à juin prochain, plus de dix ministères, y compris ceux de l’Éducation, des Chemins de fer et du Commerce, organisent conjointement treize forums de recrutement par Internet. M. Zhang Xiaojian, vice-ministre des Ressources humaines et de la Sécurité sociale, déclare : « Cette année, on va employer deux modes de recrutement : les forums et le recrutement par Internet. En même temps, on va lancer des activités pour réaliser le plein-emploi : consultations professionnelles sur les campus, consultations en matière de politiques d’emploi, service d’encouragement des étudiants à fonder une entreprise, et finalement, aide aux étudiants pauvres et aux diplômés de la région sinistrée du Sichuan. »

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