DENG NAN
Dans un pays surpeuplé comme la Chine,
où les assises économiques étaient
médiocres, la construction économique
davant 1978 avait connu des succès
et des échecs. La réforme et louverture
introduites cette année-là ont
finalement placé la Chine sur la voie
dun développement durable, rapide
et sain.
Des résultats économiques reconnus
du monde entier
Encouragés par la réforme introduite
dans les régions rurales en 1978, les
paysans chinois ont manifesté un puissant
dynamisme. En cinq ans seulement, la productivité
agricole a considérablement augmenté
et fait disparaître la pénurie
persistante des principaux produits agricoles,
notamment les céréales, le porc
et le coton. Les Chinois ont pu dès lors
manger à leur faim. Puis, au fur et à
mesure de la mise en place de léconomie
de marché et dune série
de réformes menées auprès
des entreprises, et avec ladhésion
de Chine à lOMC, léconomie
chinoise a connu un développement rapide
qui a été considéré
comme un « miracle » par la communauté
mondiale.
En effet, de 1978 en 2007, le rythme moyen
de croissance du PIB a atteint 9,8 %, un pourcentage
supérieur à celui des États-Unis,
du Japon, de Singapour et de la Corée
du Sud pendant leur période de décollage
économique, et trois fois plus important
que le niveau mondial pendant la même
période. Le PIB de la Chine représente
maintenant 6 % du PIB mondial et occupe la 4e
place en importance. Depuis 2006, la contribution
de la Chine à la croissance des échanges
commerciaux mondiaux occupe la première
place dans le monde, ayant dépassé
celle de lAllemagne et des États-Unis.
Déjà devenue locomotive de léconomie
mondiale, la Chine y joue un rôle de plus
en plus important.
Une amélioration sensible du niveau
de vie des Chinois
En 1978, le revenu disponible par habitant
était de 343 yuans dans les villes et
de 134 yuans dans les campagnes. Cette année-là,
le nombre de personnes du milieu rural vivant
sous le seuil de pauvreté était
de 250 millions. Augmenter les revenus de son
peuple et éliminer la pauvreté
étaient alors la priorité de développement
de la Chine.
En 2007, le revenu disponible par habitant
a atteint 13 786 yuans dans les villes, tandis
quil était de 4 140 yuans dans
les campagnes. En trois décennies, le
revenu disponible par habitant sest multiplié
par 39 dans les villes et par 30 dans les campagnes.
En 2007, le nombre de personnes vivant dans
une extrême pauvreté était
inférieur à 15 millions. Dans
les campagnes, les habitants à faible
revenu nétaient plus que 28 millions.
En sappuyant sur ses propres efforts,
la Chine a résolu le problème
de la subsistance dune population de 1,3
milliard dhabitants.
Importance accordée au développement
durable
Au début des années 1990, la
Chine a réalisé que son mode de
développement dépendant de la
surconsommation des ressources naturelles nétait
pas viable. Dès lors, le pays sest
fixé lobjectif de sengager
dans la voie du développement durable.
En 1991, la Conférence ministérielle
des pays en développement sur lenvironnement
et le développement, qui sest tenue
à Beijing, a donné lieu à
la publication de la Déclaration de Beijing.
En 1992, la Chine a signé des documents
tels que la Déclaration de Rio sur lenvironnement
et le développement et lAgenda
21. LAgenda 21 de Chine, examiné
et ratifié par le gouvernement chinois
en 1994, a été le premier document
du genre à léchelon national.
En mars 1996, le développement durable
est devenu lune des deux stratégies
nationales du développement économique
et social fixées par lAssemblée
populaire nationale. Lors de la troisième
session plénière du Comité
central issu du XVIe Congrès du Parti
communiste chinois, le gouvernement chinois
a alors non seulement établi de grandes
lignes directrices à léchelon
national, mais il a aussi entamé des
actions concrètes à léchelon
régional. Jusquà maintenant,
des zones dessai ont été
créées à travers la Chine.
Le développement de la Chine a contribué
à un développement durable dans
le monde
En accélérant lintégration
de la Chine dans léconomie mondiale,
la politique douverture facilite la circulation
et lutilisation des ressources disponibles
dans le monde.
Depuis les années 1990, la Chine est
devenue lun des principaux pays importateurs
de matières premières, notamment
le pétrole et le minerai de fer. Dun
côté, les pays exportateurs de
ces ressources en tirent des profits, et de
lautre, les matières premières
importées par la Chine assurent un développement
accru des industries manufacturières
nationales. Avec lafflux aux quatre coins
du monde des produits manufacturés labellisés
Made in China, ces ressources naturelles sont
revenues dans le marché international.
La croissance de léconomie chinoise
et de son commerce extérieur a donc renforcé
le dynamisme de léconomie mondiale.
Daprès le Report on Ecological
Footprint in China, publié par le WWF
(World Wildlife Fund) et le CCICED (China Council
for International Cooperation on Environment
and Development), la consommation de la Chine
en ressources naturelles a doublé depuis
les années 1960, alors que les ressources
environnementales par habitant noccupent
que 1,6 ha, niveau de beaucoup inférieur
à la moyenne mondiale de 2,2 ha et à
celle de 10,9 ha pour les habitants des États-Unis.
Ces chiffres montrent que le mode de vie des
Chinois a en quelque sorte atténué
la pression sur lenvironnement mondial.
La politique de protection de lenvironnement
appliquée en Chine a contribué
à la protection de lenvironnement
mondial. En 2006, la Chine avait déjà
édicté 9 lois sur la protection
de lenvironnement, 15 lois sur les ressources
naturelles et 50 règlements administratifs
sur ces sujets. La part des dépenses
en protection de lenvironnement dans le
PIB est passée de 0,5 %, au début
de la réforme et de louverture,
à 1,3 % aujourd'hui. Pour reconvertir
des champs en forêts, lÉtat
a investi 430 milliards de yuans. Cela montre
bien la volonté du gouvernement chinois
de protéger lenvironnement.
Perspectives : de nombreux défis à
relever
Depuis 30 ans, la Chine a connu un processus
de développement accéléré
équivalant à un siècle
et même plus de développement dans
les pays développés. Cependant,
il reste de nombreux problèmes à
résoudre. Ceux-ci touchent trois domaines.
1. La pression exercée sur lenvironnement
Au début de la réforme et de
louverture, satisfaire les besoins élémentaires
de la vie du peuple était la priorité
du gouvernement chinois. La formation dun
système complet dindustries modernes
sest effectuée par la mise en valeur
des ressources naturelles et en sacrifiant partiellement
lécologie, à un moment où
la population était nombreuse et où
léconomie était sous-développée
et le niveau technique faible.
Au cours de ces 30 ans, calculé à
prix constants, le PIB de la Chine sest
multiplié par onze, alors que la consommation
énergétique ne sest multipliée
que par 3,4 et la consommation deau na
augmenté que de 30 %. En 1978, la consommation
énergétique par tranche de 10
000 yuans du PIB était de 15,68 t de
charbon standard; en 2006, ce chiffre était
descendu à 5,06 t. En 1980, on avait
utilisé 1 187,3 t deau pour réaliser
chaque tranche de 10 000 yuans du PIB, et en
2006, on nen a utilisé que 70,6
t.
Malgré cette nette amélioration
de lefficacité dutilisation
des ressources naturelles, cette efficacité
est encore loin dêtre comparable
à celle des pays développés.
Les études montrent que, pour ce qui
est de lefficacité dutilisation
des ressources naturelles, dans un classement
de 59 pays, la Chine se trouve au 6e rang de
la fin. Pour réaliser chaque tranche
de 10 000 yuans du PIB, la consommation énergétique
de la Chine est de 3 à 11 fois plus élevée
que dans les pays développés.
Pourtant, le pays est confronté à
une pénurie de ressources stratégiques.
Par exemple, les ressources énergétiques
et minières comme le pétrole et
le minerai de fer sont insuffisantes en Chine.
Selon des statistiques, en 2006, la Chine a
importé 47 % du pétrole et 50
% du minerai de fer dont elle avait besoin.
La dépendance excessive envers létranger
pose un défi à la sécurité
de léconomie chinoise. Par conséquent,
lédification dune société
peu énergivore et respectueuse de lenvironnement
est nécessaire pour atténuer la
pénurie de ressources et la pression
exercée sur lenvironnement.
Avec laugmentation de la puissance économique,
les problèmes environnementaux saggravent
en Chine. La pollution sétend des
villes vers les campagnes, des régions
développées vers les régions
sous-développées. Le Communiqué
sur létat de lenvironnement
de la Chine en 2007, publié en juin dernier
par le ministère chinois de la Protection
de lenvironnement, révèle
que la qualité de 50,1 % des 407 coupes
longitudinales et transversales des 197 cours
deau chinois est de catégorie IV
ou V et même inférieure. Létat
des sept principaux réseaux fluviaux
chinois sannonce critique : le fleuve
Jaune et la rivière Huaihe sont moyennement
pollués, alors que le fleuve Liaohe et
le fleuve Haihe sont gravement pollués.
En dépit dune diminution de lémission
des polluants, la protection de lenvironnement
reste un problème sérieux.
Globalement, plusieurs facteurs expliquent
la détérioration de lenvironnement
en Chine : la population nombreuse, la forte
consommation dénergie pour résoudre
le problème de la survie et du développement,
le faible niveau des techniques, la capacité
limitée de gestion et la faible efficacité
dutilisation des ressources. La Chine
se trouve en phase dindustrialisation.
Les expériences des autres pays ont montré
que la consommation dénergie et
la pollution de lenvironnement sont inévitables
au cours de cette période. Pendant les
deux dernières décennies, les
industries manufacturières se sont concentrées
en Chine, ce qui en a fait latelier du
monde. La Chine a sacrifié son environnement
non seulement pour la survie de son peuple,
mais aussi pour le développement du reste
du monde. Il nous faut maintenir le développement
économique sans faire payer un prix aussi
élevé à lenvironnement.
2. Le déséquilibre économique
et social sest accentué
Comme la Chine se trouve dans le processus
de transition de son modèle économique,
le déséquilibre du développement
économique et social entre les villes
et les campagnes et entre les différentes
régions, de même que les injustices
engendrées par ce déséquilibre
ont été accentuées.
Pour différentes raisons, notamment
la transition du modèle économique
et la disparité régionale sur
le plan des infrastructures économiques,
les ressources ont convergé vers les
villes et vers la région de lEst.
Ce processus a accéléré
le développement urbain, en particulier
dans la région de lEst, et il a
permis dy accumuler de grandes richesses.
Toutefois, en contrepartie, il a élargi
davantage lécart entre les villes
et les campagnes, et entre les différentes
régions.
Selon certaines statistiques, en 1978, la part
des régions de lEst, du Centre
et de lOuest, au sein du PIB total, occupait
respectivement 52,4 %, 30,7 % et 16,9 %, alors
quen 2006, ces chiffres étaient
de 61,8 %, 25,3 % et 12,9 %. En 1978, le ratio
du PIB par habitant de ces trois régions
était de 1,75 : 1,17 : 1, tandis quen
2006, il était de 2,48 : 1,28 : 1. Lécart
inter-régional est donc devenu de plus
en plus important.
Le fossé entre les riches et les pauvres
sélargit et attire une plus grande
attention de la société. De plus
en plus de Chinois riches se classent dans la
liste Forbes des plus grandes fortunes du monde,
alors que le pays compte encore plus de 20 millions
de personnes pauvres. Certains problèmes,
comme la flambée des prix de limmobilier,
les coûts très élevés
des soins médicaux, le prix élevé
de léducation et les inégalités
daccès aux ressources éducatives,
forment un obstacle au développement
durable de la Chine.
Ces injustices sociales causées par
le développement ne seront résolues
que par un développement accru. Léquité
sociale que nous cherchons est celle qui repose
sur une augmentation progressive du niveau de
vie des habitants, un développement économique
et social durable et une harmonie des relations
entre individus. La troisième session
plénière du Comité central
issu du XVIIe Congrès du PCC, qui sest
clôturée en octobre dernier, a
encore une fois mis laccent sur lédification
dune nouvelle campagne socialiste et dun
nouveau cadre de développement intégré
des villes et des campagnes. Cela a pour objectif
de résoudre complètement les problèmes
de lagriculture, de la campagne et des
paysans, afin de combler lécart
entre les villes et les campagnes. Ce processus
exige du temps et un développement économique
avancé.
3. Contrôler les risques, un défi
Les calamités naturelles et la fréquence
daccidents dans la production lancent
un défi au contrôle des risques.
La diversité du relief, les structures
géographiques spéciales et lenvironnement
géologique complexe expliquent la plupart
des catastrophes naturelles survenues en Chine.
Les inondations de 1998, la tempête de
neige et le séisme de Wenchuan de 2008
ont provoqué des dégâts
évalués à des centaines
de milliards de yuans et causé de nombreuses
pertes de vie.
Actuellement en phase dindustrialisation
qui est soutenue par lindustrie lourde,
lindustrie chimique et les mines, la Chine
connaît nombre de catastrophes minières
et environnementales. Les entreprises se trouvent
à un stade primaire de développement
et ne sont pas à la hauteur de leur responsabilité
sociale. La course aux profits et le mépris
des règles de sécurité
causent souvent des accidents meurtriers. Laffaire
du lait frelaté Sanlu en est un exemple.
La Société chinoise pour le développement
durable va mener des études sur les résultats
et les problèmes enregistrés au
cours des trois dernières décennies,
et sur les points chauds du développement
durable actuel. De plus, elle va effectuer des
consultations pour élaborer les orientations
gouvernementales stratégiques et apporter
ainsi sa contribution au développement
durable et prospère de la société
et de léconomie chinoises.
Mme Deng Nan est la fille de Deng Xiaoping.
Diplômée en 1970 du Département
de physique de luniversité de Beijing,
elle est membre du Comité central du
XVIIe Congrès du Parti communiste chinois
et de la Xe Conférence consultative politique
du peuple chinois (CCPPC). Au cours de sa carrière,
elle a occupé les postes suivants : assistante
chercheuse à lInstitut de lautomatisation
et à lInstitut des semi-conducteurs
de lAcadémie des sciences de Chine;
vice-directrice chargée des politiques
et directrice chargée du développement
social à la Commission dÉtat
pour les sciences et les techniques; vice-présidente
de cette même Commission; et vice-ministre
de la Science et de la Technologie. Elle est
maintenant première vice-présidente
de lAssociation chinoise pour la science
et technologie et présidente de la Société
chinoise pour le développement durable.
La Société chinoise pour le développement
durable, fondée le 14 janvier 1992, est
sous la gouverne du Centre de gestion de lAgenda
21 de Chine. Cest une organisation à
but non lucratif composée dexperts,
de chercheurs, de fonctionnaires et dentrepreneurs
soucieux des problèmes de développement
durable, dont ceux de la population, des ressources
naturelles et de lenvironnement. Elle
publie une revue bilingue (anglais-chinois),
le Chinese Journal of Population Resources and
Environment. Depuis 2004, la Société
est devenue une ONG des États consultants
du Conseil économique et social (ECOSOC)
des Nations Unies et elle est associée
au Département de linformation
publique de lONU.
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