
Les Shui
Il
y a plus de 347 000 personnes appartenant à l’ethnie shui en Chine,
et la majorité d’entre elles habitent au cours supérieur des rivières
Longjiang et Duliu qui serpentent dans les plaines et les vallons,
parsemés de forêts, de la province du Guizhou. Les Shui vivent
en communautés compactes dans les districts autonomes shui Sandu,
Libo et Dushan. Certains autres habitent dans la partie nord de
la région autonome zhuang du Guangxi.
Les
régions des Shui sont des terres d’abondance en riz et en poissons.
Le blé, le colza, la ramie poussent à côté de nombreux agrumes
et autres. Les forêts sont source de bois et d’herbes médicinales.
Les rivières sont très poissonneuses.
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Jeune
fille shui |
Le
langage des Shui appartient à la branche zhuang-dong de la famille
des langues sino-tibétaines. Les Shui avaient aussi une écriture
archaïque. Certains de leur mots étaient des pictogrammes, alors
que d’autres ressemblaient à des caractères chinois écrits à l’envers.
Sauf pour des motifs religieux, alors qu’on retrouve
encore ces anciens mots, les Shui emploient le chinois
dans la vie courante. Les Shui ont une littérature orale et un
art très riches. Leur littérature comprend de la poésie, des légendes,
des contes et des fables. Parmi les différentes formes, la poésie,
qui comprend de longs poèmes narratifs et des ballades, est habituellement
la plus proéminente. Les histoires et les fables en prose font
l’éloge de la diligence, de la bravoure, de la sagesse et de l’amour
des Shui, et elles font la satire de la cupidité des seigneurs
féodaux. Les contes des Shui, au contenu riche et aux intrigues
vivantes, sont habituellement très romantiques. Leurs chants,
qui sont habituellement chantés a capella, se regroupent en deux
catégories : les grands chants, que l’on entonne lors des
travaux, et les chants à boire que l’on chante lors des fêtes
et des funérailles. Les Shui sont de bons danseurs. La danse Lusheng
et la danse du Tambour en cuivre sont les danses les plus populaires
lors des occasions joyeuses. Les instruments de musique traditionnels
comprennent les tambours, le lusheng,
le huqin et le suona. Les Shui
aiment l’artisanat—broderies, batik, papier découpé et gravure
sur bois.
Histoire
Les
Shui sont probablement des descendants des Luoyue, une des premières
tribus qui ont vécu le long de la côte du Sud-Est de la Chine
avant la dynastie des Han (206 av. J.-C.- 24 apr. J.-C.). Ils
ont adopté leur nom actuel à la fin de la dynastie des Ming (1368-1644).
Durant la dynastie des Song (960-1279), des villages se sont édifiés
et on a commencé à cultiver le riz. À la fin des Song, les Shui
sont entrés dans la première étape du féodalisme. Les nobles,
portant le nom de Meng, mirent sur en place un système féodal
sur le cours supérieur de la Longjiang. Les Yuan (1271-1368) établirent
des gouvernements locaux d’échelon préfectoral pour tenter d’apaiser
les groupes ethniques. Durant les Ming, les communautés shui connurent
une bonne prospérité économique. L’introduction d’outils de ferme
efficaces a permis un élargissement des surfaces de rizières.
La culture sur brûlis a cédé la place à une agriculture plus avancée,
caractérisée par le recours à l’irrigation et aux animaux de trait,
de sorte que le rendement de la production céréalière a augmenté
de beaucoup. Les Ming ont poursuivi la tradition de nommer des
chefs héréditaires. Sous ce système, les Shui versaient des taxes
à ces chefs et effectuaient la corvée à leur intention. De 1640
à 1860, l’économie des Shui a continué à se développer et certains
Shui ont quitté leur activité de culture pour devenir artisans.
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On
tient à maîtriser l’emploi des caractères chinois. |
Après
la Révolution de 1911, le capitalisme a gagné du terrain dans
la région. Dans ce qui est actuellement le district autonome shui
de Sandu, on a ouvert des mines et des usines de traitement du
fer, du mercure et de l’antimoine. Toutefois, par la suite, ces
entreprises furent reprises par le Guomindang ou elles tombèrent
en faillite. Les gros seigneurs terriens annexèrent de grandes
surfaces de terres cultivées. Les fermiers furent privées de 60
à 70 % de leurs récoltes. Après 1949, la croissance de la production
a repris et la réforme terrienne s’est effectuée dans le respect
des coutumes des Shui. Des terres publiques furent réservées à
l’usage des courses de chevaux. En 1957, le district autonome
shui de Sandu fut fondé.
Alors
qu’auparavant seulement 13 % des terres cultivées étaient irriguées,
il y a maintenant des milliers d’installations de conservation
d’eau servant à l’irrigation. Les industries actuelles touchent
les produits chimiques, la houille, les mines, la machinerie agricole,
le moulage, le raffinage du sucre, la fabrication du vin, la céramique
et l’artisanat (bambou, argent, fabrication du papier, textiles).
Autrefois, seulement 17 km de routes traversaient le district.
Maintenant, les routes sillonnent partout la région des Shui.
Les lignes de chemin de fer Hunan-Guizhou et Guizhou-Guangxi ont
facilité encore plus le transport des produits entre les communautés
shui et les autres régions, ce qui a renforcé les liens et encouragé
l’enrichissement.
Us
et coutumes
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On
joue du tambour pour marquer le Nouvel An. |
Habillement. Les Shui se vêtent habituellement
en noir et bleu, mais les jeunes filles se parent de couleurs
vives. Toutefois, en vieillissant, elles fonceront de plus en
plus la couleur de leurs vêtements jusqu'à ne porter que du noir
et du bleu. Les hommes portent de longues tuniques de couleur
foncée et des turbans noirs; les femmes portent une blouse sans
col, un pantalon noir et un tablier, et toutes ces pièces sont
brodées. Elles portent habituellement leurs cheveux en chignon,
sous un turban blanc ou d’un bleu tirant sur le noir. Au dos,
certaines femmes portent un genre de poche décorée de riches motifs.
Celle-ci est appelée beishan et sert à transporter leur bébé. Lors des fêtes, les femmes
mettent une jupe, se parent de boucles d’oreilles, de colliers
et de bracelets en argent.
Alimentation. Le régime des Shui est constitué
de riz et de poisson, auquel ils ajoutent du maïs, de l’orge,
du blé et des patates. Un type de boisson fabriquée à partir de
riz est servi aux invités ou offert aux ancêtres lors des cérémonies
sacrificielles.
Habitation. La maison shui est bâtie de plain-pied
ou sur pilotis, avec le rez-de-chaussée réservé aux animaux domestiques.
Mariage et funérailles. Les Shui sont
monogames et contractent librement des mariages à l’extérieur
de leur ethnie. Les jeunes ont la liberté de choisir leur partenaire
et cette coutume a cours depuis des siècles. Cette liberté avait
disparu avec la montée de l’économie féodale, et les enfants des
riches familles terriennes ne pouvaient épouser que des enfants
de familles riches et les mariages étaient arrangés par les parents.
Le jour du mariage, la famille du fiancé envoyait des célibataires
à la famille de la future mariée. Celle-ci avançait vers la maison
de son mari sous un parasol et retournait à la maison familiale,
le même jour, ou le jour suivant. Règle générale, la fiancée ne
cohabitait pas avec son mari avant le sixième mois du mariage.
Aujourd’hui, les mariages arrangés et l’extorsion de grosses sommes
ont cessé d’avoir cours. De nos jours, les jeunes profitent de
la foire au village pour se rencontrer et trouver leur conjoint.
Ils se parent de leurs plus beaux atours et s’y rendent en groupes
d’amis. Les garçons semblent se promener sans but précis dans
le marché, mais, en réalité, ils évaluent entre eux quelle est
la fille qui méritera leurs approches. Lorsque la décision est
prise, les garçons offriront leurs respects à une fille et commenceront
la conversation. Après une brève introduction, ils encourageront
le garçon qui avait choisi cette fille à se déclarer. À maintes
reprises, le groupe incitera les deux à former un couple. Le garçon
semblera courir vers la fille, alors que celle-ci feindra de s’enfuir.
Tous riront de bon cœur. Par la suite, le processus se déroulera
de manière simple et directe. Si les deux personnes se plaisent,
la fille acquiescera d’un signe de tête. Les fréquentations dureront
de quelques mois à quelque deux ans. Puis, un jour de bon augure
sera choisi pour le mariage. Le jour de la cérémonie, les gens
chantent mais ne dansent pas. Les compétitions de chant durent
toute la nuit.
Les
funérailles shui étaient extrêmement élaborées. On tuait du bétail
en offrande aux morts. On chantait, dansait et présentait des
spectacles d’opéras locaux jusqu’à ce qu’on trouve un jour de
bon augure pour enterrer le cadavre. Aujourd’hui, la procédure
est beaucoup simplifiée. Toutefois, les Shui croient toujours
à une préparation hâtive des funérailles pour alléger le fardeau
de la génération qui suit, de sorte que l’on voit souvent des
cerceuils rangés sous les granges bâties sur pilotis.
Religion. Les Shui sont polythéistes. Autrefois,
un chaman récitait des prières et des animaux étaient abattus
pour être offerts aux esprits du mal lorsque quelqu’un tombait
malade ou mourait, ou lorsque quelque chose de malheureux se produisait.
Le catholicisme qui fit son apparition dans la région durant la
dynastie des Qing (1644-1911) gagna peu de fidèles.
Calendrier. Les Shui ont un calendrier original
qui prend le neuvième mois lunaire comme début de l’année. Durant
les dix derniers jours de ce mois, se célèbre la fête de la Citrouille.
La nuit de cette fête, les gens n’ont pas le droit de manger de
viande. À la place, ils s’assoient autour du four et mangent de
la citrouille, parfois du poisson. Après, ils sortent de la maison
et tirent des coups de fusil. Cette fête se célèbre pour commémorer
un ancêtre des Shui qui se serait tué en tombant, alors qu’il
allait chercher une citrouille à l’étage. La fête Duan est célébrée
après la récolte d’automne, au début du onzième mois lunaire.
Vêtus de leurs plus beaux atours, les Shui se rassemblent alors
dans leur village pour assister
à des courses de chevaux et à des jeux, et ils festoient pendant des
jours.