Les Yao
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Jeune
fille yao. |
Les
quelque 2,13 millions de Yao vivent dans des communautés montagneuses
disséminées dans 130 districts du Sud de la Chine. Environ 70
% de ceux-ci vivent dans la région autonome zhuang du Guangxi,
les autres vivent dans les provinces du Hunan, du Yunnan, du Guangdong,
du Guizhou et du Jiangxi.
Dans
l’histoire, les Yao ont porté au moins trente noms différents
qui étaient basés sur leurs modes de production, leur style de
vie, leurs vêtements et leurs parures. Le nom Yao a été adopté
officiellement après la fondation de la République populaire de
Chine en 1949.
Environ
50 % des Yao parlent une langue appartenant à la famille des langues
sino-tibétaines, d’autres utilisent les langues miao ou dong.
Vu les contacts étroits qu’ont entretenus les Yao avec les Han
et les Zhuang, ils parlent aussi les langues chinoise et zhuang.
Les anciens de cette ethnie gardaient des registres des affaires
importantes en gravant des entailles sur du bois ou des languettes
de bambou. Avec l’arrivée des Han dans les régions yao, ce groupe
ethnique se mit à utiliser les caractères chinois.
La
plupart des Yao vivent dans des vallées de montagnes au climat
humide où la végétation est abondante. Nombreuses espèces d’arbres,
champignons, bambous, miel, patates, jute, herbes médicinales,
animaux sauvages tels que singes, chevreuils, civette, ours, sangliers
font partie des ressources naturelles qui forment l’environnement
des Yao.
Histoire
Appelés
les « tribus sauvages Wuling » il y a quelque 2 000
ans, les ancêtres des Yao vivaient autour de Changsha, la capitale
actuelle de la province du Hunan. Deux ou trois siècles plus tard,
on les appelait « Moyao ». Un des poètes les plus renommés
de l’ancienne Chine, Du Fu (712-770), a jadis écrit : « Les
Moyao tirent les oies sauvages avec des arcs en bois de
mûrier. » Au fil du temps, les histoires sur les Yao sont
devenues de plus en plus nombreuses, ce qui montre les liens accrus
entre les Yao et les Han. Durant la dynastie des Song (960-1279),
l’agriculture et l’artisanat se sont développés beaucoup dans
les régions des Yao, tels que les couteaux en fer forgé, les tissus
teints en indigo et les métiers à tisser. À ce moment-là, les
Yao du Hunan faisaient de l’élevage et utilisaient des outils
de ferme en fer, dans des champs qu’ils louaient aux seigneurs
han.
Durant
les Ming et les Qing (1368-1911), les troupeaux et les outils
en fer se répandirent parmi les Yao du Guangxi et du Guangdong
qui cultivaient le riz et d’autres types de cultures dans des
champs en terrasses. Ils creusaient des fossés pour l’irrigation
et des canaux pour utiliser l’eau des sources. De plus, ils chassaient,
ramassaient les herbes médicinales, faisaient du charbon et tissaient.
Avant 1949, l’économie des Yao se composait de trois types :
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Instrument
de musique typique fait de cornes de bufle. |
Le
premier type et le plus courant, ayant l’agriculture et la sylviculture
comme base, se concentrait dans les endroits dotés de bonnes conditions
naturelles et fortement influencés par les Han. Dans ces endroits,
les méthodes de culture et les relations sociales ressemblaient
beaucoup à celles des Han et des Zhuang.
Le
deuxième type était centré sur la sylviculture. Quelques seigneurs
monopolisaient les forêts et les champs en terrasses, alors que
les paysans devaient payer des taxes élevées, quoi qu’ils fassent :
chasse, pêche, construction, collecte de fruits sauvages, etc.
Par exemple, lorsque les pauvres paysans mettaient en valeur des
terres en friche, ils devaient planter des jeunes arbres entre
leurs cultures. Dès que ces jeunes arbres avaient grandi, les
paysans devaient payer une taxe aux seigneurs sur ces arbres.
Une telle situation a conduit bien des Yao à errer de lieux en
lieux.
Le
troisième type, pratiqué par un petit nombre de Yao, consistait
dans la méthode primitive de culture sur brûlis. Bien que la plupart
des terres eussent été possédées par les Han et les Zhuang, les
paysans yao en possédaient quelques-unes. Dans ces cas, la terre
appartenait aux anciennes communes, chacune formée de moins de
20 familles qui descendaient d’un même ancêtre.
Les
Yao pratiquaient une forme intéressante de coopération primitive
appelée « chanter en creusant », forme encore en vigueur
dans la région autonome zhuang du Guangxi d’aujourd’hui. À la
période du labour, vingt ou trente ménages travaillaient ensemble
pour un ménage, jusqu’à ce que tous les travaux des champs soient
terminés. Pendant que le groupe travaillait, un jeune homme se
tenait debout dans les champs, frappait un tambour et dirigeait
le chant. Tout le monde chantait.
Aujourd’hui
la chasse reste une partie importante de la vie des Yao. D’une
part, cette activité leur fournit une grande variété de nourriture,
et d’autre part, cela empêche que leurs cultures et leurs forêts
soient trop endommagées par les animaux sauvages. Après la chasse,
on divise en parts égales entre les chasseurs. Certaines portions
sont données aux enfants, portés sur le dos des plus vieux, mais
le chasseur qui a capturé l’animal reçoit une double portion.
On garde également des
portions pour les plus âgés du village.
Pendant
près d’un millénaire avant ce siècle, la plupart des Yao furent
dirigés par des chefs héréditaires. Le chef obéissait au gouvernement
central qui était toujours dominé par des Han ou d’autres grandes
ethnies. Après la prise du pouvoir du Guomindang, au début du
siècle dernier, celui-ci maintint le système en place, ce qui
signifie que les chefs yao gouvernèrent en divisant pour mieux
régner. Les conflits furent nombreux et la paix n’a pu revenir
que lorsque les Yao purent obtenir l’égalité avec les autres ethnies.
Les
Yao ont cependant une longue tradition révolutionnaire. Dès la
dynastie des Han, ils ont lutté contre le pouvoir impérial féodal.
Durant les Tang et les Song, ils ont fomenté de nombreuses rébellions.
De 1316 à 1331, ils ont instigué plus de 40 soulèvements. La révolte
la plus importante a commencé en 1371 et a duré un siècle. Les
Ming, effrayés, durent envoyer trois armées pour mater les rebelles. La célèbre révolte des Taiping eut l’appui
des Yao, et plusieurs d’entre eux furent renommés pour leur bravoure. Les Yao ont aussi joué un rôle
actif dans la fondation de la République populaire. Le district
autonome de Bama était la base de la 7e armée rouge,
sous le commandement de Deng Xiaoping. En 1951, le premier district
autonome yao fut fondé à Longsheng, et de 1952
à 1963, huit autres furent fondés.
Us
et coutumes
Les
Yao ont un style de vie si unique que les différentes communautés
sont relativement différentes les unes des autres.
Habillement. Selon L’Histoire de la dynastie
des Han postérieurs (25-220), les anciens Yao « aimaient
les vêtements multicolores ». Plus tard, dans certains registres
historiques on peut lire que les Yao « marchaient pieds nus
et étaient vêtus de manière colorée ».
Aujourd’hui,
les costumes yao gardent leur diversité. Les hommes portent une
veste boutonnée au milieu ou à gauche et habituellement cintrée.
Certains hommes préfèrent porter un pantalon qui est tellement
long qu’il frôle pratiquement le sol. Certains autres préfèrent
un pantalon aux genoux. Le costume des hommes est habituellement
bleu ou noir, mais dans certains endroits, ils portent un pantalon
blanc aux genoux. Les hommes yao du district de Liannan du Guandong
coiffent leurs cheveux en chignon, qu’ils enveloppent ensuite
d’un tissu rouge. Ils y piquent ensuite de nombreuses plumes de
faisan.
L’habillement
des femmes est plus varié. Certaines femmes portent des vestes
sans col, des ceintures en tissu et des jupes longues ou courtes;
certaines choisissent des vestes qui tombent jusqu’aux genoux
et boutonnées au milieu, des ceintures avec deux pendants et un
pantalon long ou court; certaines brodent le col, les manches
et le bas du pantalon de motifs. En plus des médailles d’argent
qui décorent leur veste, les femmes yao portent des bracelets,
des boucles d’oreille, des colliers et des broches à cheveux en
argent.
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Les
Yao aiment l’alcool guadan. |
Alimentation. Le riz, le maïs, les patates et les
taros forment l’alimentation de base. Les légumes comprennent
les poivrons, les citrouilles et le soya. Les boissons alcooliques
et le tabac sont particulièrement prisés. Dans le nord du Guangxi,
une nécessité courante est le thé à l’huile. Les feuilles de thé
sont frites dans l’huile, puis bouillies en une soupe épaisse
et salée qui est mêlée avec du riz ou du soja. Ce thé est servi
comme collation en certaines occasions. Les oiseaux marinés constituent
un autre mets favori. Les oiseaux évidés sont enduits de sel et
de farine de riz, puis salés et déposés dans des pots bien scellés.
On marine également d’autres types de viande de cette manière
pour en faire des plats particulièrement raffinés. De nombreux
Yao considèrent comme tabou de manger de la viande de chien. S’ils
le font, ils cuisent la viande à l’extérieur de la maison.
Habitation. Une maison yao typique est formée
d’une structure en bois et en bambou et comporte habituellement
trois pièces, la pièce centrale au milieu, les chambres à coucher
des deux côtés. Certaines maisons, bâties sur des versants montagneux,
ont deux étages, l’étage supérieur étant occupé par la salle principale
et les chambres à coucher, l’étage inférieur par l’étable. Dans
les familles qui possèdent des installations sanitaires bâties
à proximité de leur maison, le bain quotidien est une tradition,
même durant les froids de l’hiver.
Mariage. Les Yao ont des coutumes matrimoniales
surprenantes. La cour se fait surtout en exécutant des chants en chœur, et les jeunes choisissent
eux-mêmes leur amoureux et se marient avec le consentement de
leurs parents. Cependant, selon la coutume, la famille du fiancé
doit payer une somme importante et offrir du porc en dot à la
famille de la fiancée. Les hommes qui ne peuvent se permettre d’offrir
ces cadeaux doivent vivre et travailler dans la famille de la
fiancée et on les considère souvent de manière hautaine.
Dans
les anciennes familles yao, les frères de la mère avaient leur
mot à dire dans les affaires familiales et jouissaient d’une foule
de privilèges. Dans certains districts de la région autonome zhuang
du Guangxi, les filles des sœurs du père étaient obligées d’épouser
les fils de leurs oncles maternels. Si d’autres partenaires de
mariage étaient proposés, la dot devait être payée aux frères
de la mère. On considère ces coutumes comme un héritage d’une
société matrilinéaire.
Fêtes. Il y a environ une fête par mois
dans les communautés yao. Bien que les coutumes varient d’endroit
en endroit, il y a des célébrations communes : Fête du printemps,
Fête du dieu de la Terre, fête Danu, fête Shuawang. La fête Danu,
célébrée dans le district autonome yao de Duan du Guangxi, commémore
les anciennes batailles. La fête Shuawang se tient tous les trois
ou cinq ans, durant le dixième mois du calendrier lunaire, et
elle offre aux jeunes une occasion en or de se courtiser.
Religion. Les Yao vénèrent une foule de dieux
et leurs ancêtres. Leur croyance en Panhu, l’esprit du chien,
est un vestige du totémisme. Les communautés yao avaient l’habitude
de tenir des rituels très élaborés pour réciter des prières et
offrir des sacrifices aux ancêtres et aux dieux. Dans certaines
communautés, on organisait une cérémonie solennelle, lorsqu’un
garçon atteignait l’âge adulte. Selon la légende, lors de la cérémonie,
le garçon avait à sauter d’une plate-forme de trois mètres de
haut, grimper sur une perche à laquelle
étaient attachés des couteaux bien aiguisés, marcher sur
des briques chaudes et tremper une main nue dans de l’huile bouillante.
Ce n’est qu’après avoir subi ces tests qu’il pouvait se marier
et prendre part aux activités sociales. Maintenant, grâce à leurs
meilleures connaissances scientifiques et culturelles, les Yao
se sont débarrassés des coutumes irrationnelles, tout en préservant
les plus saines.
Littérature
et tradition orale.
Les Yao ont une littérature orale très riche. Le chant forme une
partie indispensable de leur vie. Certains chants folkloriques
sont des chansons d’amour, d’autres relatent l’histoire des Yao,
racontent des légendes sur la création du ciel et de la terre
ou des histoires humoristiques. Dans plusieurs cas, ces chants
ont été légués de génération en génération. À part les
tambours, les gongs et le suona (un instrument à vent), le tambour
à la taille, un autre instrument traditionnel des Yao, est typique
à cette ethnie.
Habiletés
particulières.
Les Yao sont des experts en broderie, en teinture et en tissage.
Durant la dynastie des Han, ils tissaient des vêtements à partir
de l’écorce d’arbre, et ils les teignaient avec des graines de
semence d’herbe. Durant les Song, ils ont développé des motifs
délicats, teints sur du tissu blanc avec de l’indigo et de la
cire d’abeille.