OCTOBRE  2002

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Le seul mensuel multilingue d'intérêt général en Chine, publié en français, anglais, espagnol, allemand, arabe et chinois.

 

 

Métro, boulot, J.O.

ALEXIS VANNIER

La première rame de métro de Shanghai—la ligne des Perles.

Sur les 180 milliards de RMB qui devraient être affectés aux infrastructures et à la protection de l'environnement à Beijing d'ici 2008, la moitié servira à l'amélioration des conditions de transports, dont une part importante à l'extension du réseau métropolitain de la capitale. Alstom, aujourd'hui leader sur ce marché en Chine, suit de très près ce dossier.

Le métro pékinois : il est bien difficile de s'y perdre ! Avec ses deux lignes, la ligne 1, percée est-ouest et longue de 23 km, dont les travaux ont débuté dès les années 60, et la ligne 2 – la ligne circulaire dont les stations offrent un succédané souterrain des portes qui gardaient autrefois la capitale chinoise, le métro pékinois a le mérite de la simplicité.

Mais ces 73 km de lignes, transportant en moyenne un million de personnes par jour, ne suffisent plus à une métropole de 14 millions d'habitants aux ambitions olympiques, dont les boulevards de plus en plus larges sont saturés par un flot toujours plus important de voitures. D'où l'ambitieux plan qui vise à quadriller la ville de 13 lignes de métro supplémentaires portant le total à plus de 400 km dans un futur qui reste à préciser. Ce qui est sûr aujourd'hui, c'est que la ligne 13, ligne aérienne qui reliera Xizhimen à Dongzhimen, en faisant une boucle vers le Nord, est déjà en construction et sera complètement en service en janvier prochain. Des travaux ont également commencé, à proximité du temple des Lamas, sur la future ligne 5, axe Nord-Sud. Un « appendice » à cette ligne devrait permettre de desservir la future Verdure olympique. Près d'un kilomètre de tunnel a été creusé, mais le chantier est pour l'instant suspendu. On parle beaucoup également d'un autre axe Nord-Sud, la ligne 4, plus à l'ouest de la ligne 5, qui aurait le mérite de traverser des zones très peuplées de la ville. Enfin, une liaison ferroviaire devrait relier Dongzhimen à l'aéroport, mais là les autorités hésitent encore sur la forme qu'elle pourrait prendre : train classique, type RER rapide, ou bien la technologie à suspension magnétique, futuriste mais chère. Il semble bien que la capitale chinoise attend de voir comment fonctionnera ce type de train à Shanghai, actuellement en construction, avant de se décider.

Voilà de quoi intéresser au plus haut point les plus grands groupes mondiaux de matériel ferroviaire et notamment les Trois Grands, parmi lesquels, le français Alstom, qui présente déjà de solides références en Chine.

Alstom est dans la course

Reprenons l'histoire des métros chinois : le premier à avoir été construit fut donc celui de Beijing employant une technologie 100 % chinoise. Puis, dans les années 90, Shanghai s'est dotée de deux lignes et Guangzhou, d'une ligne, totalement importées de l'étranger, d'Allemagne pour être plus précis. Fin 1998, s’achève la première manche de la construction des métros chinois et force est de constater que le champion français est mené en Chine, 3 à 0.

Mais pour la deuxième manche, changement des règles du jeu : les contrats – globaux jusqu'alors – sont désormais découpés en lots : matériel roulant, signalisation, génie civil, électrification, tickets, escalators, etc. Et surtout s'ajoute une exigence de localisation : 70 % du matériel doit être fabriqué sur place. Alstom se lance à fond dans la bataille, ouvre deux joint-ventures en 1998 à Shanghai, dans la construction mécanique et le matériel électrique, puis une autre en 1999 à Qingdao avec la compagnie nationale de chemins de fer chinois pour fabriquer des amortisseurs, qui s'ajoutent à la joint-venture ouverte, dès 1986, pour la signalisation (la CASCO à Shanghai). L'entreprise propose également sa technologie la plus moderne : voitures avec caisse en aluminium et chaînes de traction électriques VVVF, ce qui se fait de mieux au monde. Et on assiste à un véritable renversement de situation: pour le matériel roulant, Alstom remporte le contrat pour la ligne 3 – dite ligne des Perles – à Shanghai (28 rames de 6 voitures, soit 205 millions d'euros), puis celui pour une ligne dans le quartier de Xin Min, toujours à Shanghai (152 voitures) et très récemment le contrat pour le matériel roulant du futur métro de Nanjing : 20 trains de 6 voitures (montant du contrat : environ 160 millions d'euros). Résultat des courses après quatre ans : Alstom, trois contrats, tandis que ses concurrents, le canadien Bombardier n'en a signé que deux et l'allemand Siemens, un seul. Bref, Alstom a repris la tête de la course, détenant désormais 50 % du marché en Chine, grâce à une politique de localisation très forte et à un matériel extrêmement moderne. « La première rame pour la ligne 3 à Shanghai est actuellement à l'essai et devrait bientôt entrer en service, explique Olivier de Lapeyrière, directeur du développement chez Alstom à Beijing. Je pense que les Shanghaïens vont être étonnés : ils vont découvrir un métro comme il n'en roule pas encore en Chine, extrêmement moderne et confortable, et très beau avec un design à la française. » De solides références donc, avant d'aborder la compétition olympique pékinoise, d'autant que les trains français seront les premiers de cette nouvelle génération à rouler en Chine.

Mais le cas de la capitale reste très particulier et les résultats incertains. Ainsi, pour l'extension de la ligne 1 en 1999 ou pour la future ligne 13, ce sont des métros de fabrication maison qui ont été choisis, employant une technologie ancienne de caisses en acier, couplée à des chaînes de traction japonaises pour lesquelles le taux de localisation n'est que de 50 %, exception à la règle des 70 % énoncée en 1998. Et personne ne sait pour l'instant quelles seront les règles qui seront appliquées pour les trois autres lignes – 4, 5 et desserte de l'aéroport – qui intéressent les étrangers. Mais Olivier de Lapeyrière se veut confiant : « Il devrait y avoir trois lignes à construire or, vu les délais très courts (il faut en général cinq ans pour construire une ligne) et qu'il y a trois grands compétiteurs mondiaux, on peut espérer une ligne par groupe. » À une condition cependant, que là encore, les fonds soient réunis pour financer ces nouvelles lignes. Il semble bien que ce soit là une préoccupation majeure de la municipalité.