Métro, boulot, J.O.
ALEXIS
VANNIER
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La
première rame de métro de Shanghai—la ligne des Perles. |
Sur les 180 milliards de
RMB qui devraient être affectés aux infrastructures et à la protection
de l'environnement à Beijing d'ici 2008, la moitié servira à l'amélioration
des conditions de transports, dont une part importante à l'extension
du réseau métropolitain de la capitale. Alstom, aujourd'hui leader
sur ce marché en Chine, suit de très près ce dossier.
Le métro pékinois : il est bien difficile de
s'y perdre ! Avec ses deux lignes, la ligne 1, percée est-ouest
et longue de 23 km, dont les travaux ont débuté dès les années
60, et la ligne 2 – la ligne circulaire dont les stations offrent
un succédané souterrain des portes qui gardaient autrefois la
capitale chinoise, le métro pékinois a le mérite de la simplicité.
Mais ces 73 km de lignes, transportant en moyenne
un million de personnes par jour, ne suffisent plus à une métropole
de 14 millions d'habitants aux ambitions olympiques, dont les
boulevards de plus en plus larges sont saturés par un flot toujours
plus important de voitures. D'où l'ambitieux plan qui vise à quadriller
la ville de 13 lignes de métro supplémentaires portant le total
à plus de 400 km dans un futur qui reste à préciser. Ce qui est
sûr aujourd'hui, c'est que la ligne 13, ligne aérienne qui reliera
Xizhimen à Dongzhimen, en faisant une boucle vers le Nord, est
déjà en construction et sera complètement en service en janvier
prochain. Des travaux ont également commencé, à proximité du temple
des Lamas, sur la future ligne 5, axe Nord-Sud. Un « appendice »
à cette ligne devrait permettre de desservir la future Verdure
olympique. Près d'un kilomètre de tunnel a été creusé, mais le
chantier est pour l'instant suspendu. On parle beaucoup également
d'un autre axe Nord-Sud, la ligne 4, plus à l'ouest de la ligne
5, qui aurait le mérite de traverser des zones très peuplées de
la ville. Enfin, une liaison ferroviaire devrait relier Dongzhimen
à l'aéroport, mais là les autorités hésitent encore sur la forme
qu'elle pourrait prendre : train classique, type RER rapide, ou
bien la technologie à suspension magnétique, futuriste mais chère.
Il semble bien que la capitale chinoise attend de voir comment
fonctionnera ce type de train à Shanghai, actuellement en construction,
avant de se décider.
Voilà de quoi intéresser au plus haut point les plus
grands groupes mondiaux de matériel ferroviaire et notamment les
Trois Grands, parmi lesquels, le français Alstom, qui présente
déjà de solides références en Chine.
Alstom
est dans la course
Reprenons l'histoire des métros chinois : le premier
à avoir été construit fut donc celui de Beijing employant une
technologie 100 % chinoise. Puis, dans les années 90, Shanghai
s'est dotée de deux lignes et Guangzhou, d'une ligne, totalement
importées de l'étranger, d'Allemagne pour être plus précis. Fin
1998, s’achève la première manche de la construction des métros
chinois et force est de constater que le champion français est
mené en Chine, 3 à 0.
Mais pour la deuxième manche, changement des règles du jeu : les contrats
– globaux jusqu'alors – sont désormais découpés en lots : matériel
roulant, signalisation, génie civil, électrification, tickets,
escalators, etc. Et surtout s'ajoute une exigence de localisation
: 70 % du matériel doit être fabriqué sur place. Alstom se lance
à fond dans la bataille, ouvre deux joint-ventures en 1998 à Shanghai,
dans la construction mécanique et le matériel électrique, puis
une autre en 1999 à Qingdao avec la compagnie nationale de chemins
de fer chinois pour fabriquer des amortisseurs, qui s'ajoutent
à la joint-venture ouverte, dès 1986, pour la signalisation (la
CASCO à Shanghai). L'entreprise propose également sa technologie
la plus moderne : voitures avec caisse en aluminium et chaînes
de traction électriques VVVF, ce qui se fait de mieux au monde.
Et on assiste à un véritable renversement de situation: pour le
matériel roulant, Alstom remporte le contrat pour la ligne 3 –
dite ligne des Perles – à Shanghai (28 rames de 6 voitures, soit
205 millions d'euros), puis celui pour une ligne dans le quartier
de Xin Min, toujours à Shanghai (152 voitures) et très récemment
le contrat pour le matériel roulant du futur métro de Nanjing
: 20 trains de 6 voitures (montant du contrat : environ 160 millions
d'euros). Résultat des courses après quatre ans : Alstom, trois
contrats, tandis que ses concurrents, le canadien Bombardier n'en
a signé que deux et l'allemand Siemens, un seul. Bref, Alstom
a repris la tête de la course, détenant désormais 50 % du marché
en Chine, grâce à une politique de localisation très forte et
à un matériel extrêmement moderne. « La première rame pour
la ligne 3 à Shanghai est actuellement à l'essai et devrait bientôt
entrer en service, explique Olivier de Lapeyrière, directeur du
développement chez Alstom à Beijing. Je pense que les Shanghaïens
vont être étonnés : ils vont découvrir un métro comme il n'en
roule pas encore en Chine, extrêmement moderne et confortable,
et très beau avec un design à la française. » De solides
références donc, avant d'aborder la compétition olympique pékinoise,
d'autant que les trains français seront les premiers de cette
nouvelle génération à rouler en Chine.
Mais le cas de la capitale reste très particulier
et les résultats incertains. Ainsi, pour l'extension de la ligne
1 en 1999 ou pour la future ligne 13, ce sont des métros de fabrication
maison qui ont été choisis, employant une technologie ancienne
de caisses en acier, couplée à des chaînes de traction japonaises
pour lesquelles le taux de localisation n'est que de 50 %, exception
à la règle des 70 % énoncée en 1998. Et personne ne sait pour
l'instant quelles seront les règles qui seront appliquées pour
les trois autres lignes – 4, 5 et desserte de l'aéroport – qui
intéressent les étrangers. Mais Olivier de Lapeyrière se veut
confiant : « Il devrait y avoir trois lignes à construire
or, vu les délais très courts (il faut en général cinq ans pour
construire une ligne) et qu'il y a trois grands compétiteurs mondiaux,
on peut espérer une ligne par groupe. » À une condition cependant,
que là encore, les fonds soient réunis pour financer ces nouvelles
lignes. Il semble bien que ce soit là une préoccupation majeure
de la municipalité.