Bao Zheng, un fonctionnaire intègre
HUO JIANYING
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Le visage peint de Bao Zheng dans l’opéra de
Pékin. |
AUJOURD’HUI, si un juge reçoit le titre de « Duc
Bao moderne », c’est que sa grandeur morale et ses brillants exploits
ont mérité l’estime de la population et que sa réputation est
reconnue par la société.
Originaire de Hefei, province de l’Anhui, le duc Bao
(999-1062) avait Zheng comme nom et Xiren pour prénom,
tandis que duc Bao était le titre qu’on lui avait conféré. Bao
Zheng a été sous-préfet,
préfet et haut fonctionnaire du gouvernement central de la dynastie
des Song (960-1279).
À titre de fonctionnaire, Bao Zheng a toujours préconisé
que les fonctionnaires doivent administrer avec rigueur, diminuer
la corvée et alléger tous les impôts. Ainsi, il jouissait d’une
grande popularité. Lorsqu’il administrait la justice, ce fonctionnaire
probe et renommé faisait preuve de perspicacité et d’équité. On
peut consulter des livres historiques qui ont été écrits sur cette
époque.
Depuis un millénaire, on n’a jamais oublié ce personnage
représentatif des juges intègres. Sa réputation se propageant,
son image brillante n’a eu de cesse d’apparaître à l’écran des
cinémas et de la télévision, et ses actes exemplaires sont adaptés
au théâtre. En réalité, toutes ces représentations typiques et
artistiques sont teintées de romanesque et de mythologie, y compris
les récits de ses prouesses qui circulent parmi les masses. Bao
Zheng cristallise la grandeur morale et les exploits brillants
des fonctionnaires intègres. Voilà des récits remarquables qui
méritent d’être connus et dont les subtilités sont à discuter.
Dans la société féodale, les fonctionnaires intègres
et les fonctionnaires corrompus occupaient communément la place
dominante. En comparaison avec ces derniers, les fonctionnaires
intègres sauvegardèrent, dans une certaine mesure, les intérêts
du peuple. C’est pourquoi l’on aimait, respectait et vénérait
tellement Bao Zheng.
On peut consulter, dans un document historique, une
affaire civile remarquable jugée par Bao Zheng, alors qu’il était
sous-préfet de Tianchang, province de l’Anhui.
Un matin, un paysan s’aperçut que la langue de son buffle
de labour avait été coupée par quelqu’un et que son buffle était
couché par terre. Il se rendit donc au tribunal du district pour
demander au juge Bao Zheng d’enquêter sur les causes de cet incident.
Bao Zheng lui dit : « Reste tranquille, rentre
chez toi, tue ton buffle et attends avec patience une bonne nouvelle. »
En vertu de la loi, tuer un buffle de labour était une infraction
à la règle.
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Mémorial du duc Bao, construit à Hefei (Anhui),
sa région natale. |
Au deuxième jour, un homme vint au tribunal et dénonça
ce paysan qui avait tué son buffle de labour. Après avoir compris
ce qui se passait, Bao Zheng montra soudain un visage fermé et
s’écria : « Tu as coupé la langue de son buffle et tu
le dénonces quand même, qu’est-ce que tu crois ? » Cet
homme ne put qu’avouer son crime, soit d’avoir accusé un innocent.
Bien des livres ont enregistré des exemples de l’application
rigoureuse et à la lettre de la loi par Bao Zheng. Lorsque ce
dernier était préfet, il avait sommé des eunuques et des hommes
influents de démolir leurs bâtiments non réglementaires qui avaient
été construits dans la tranchée anti-crues, et il a mis des fonctionnaires
stupides en accusation.
Pour sauvegarder l’intérêt du peuple, placer un espoir
immense dans une société de droit et implanter l’égalité devant
la loi, on a eu recours au théâtre pour exalter ce personnage
droit et insensible aux flatteries. D’après des légendes, Bao
Zheng aurait été considéré comme un être divin et un personnage
ayant une capacité surhumaine. Pour enquêter sur les causes et
trouver les coupables, il aurait pu aller et venir entre le monde
et les enfers.
Dans des opéras traditionnels chinois mettant en scène
des cas complexes, les adversaires de Bao Zheng étaient souvent
la famille impériale et des dignitaires protégés par le pouvoir
impérial et la loi féodale. Ces derniers appartenaient à la classe
privilégiée, les masses et les tribunaux ne pouvant rien pour
remédier à leurs crimes. C’est ainsi que le rôle de Bao Zheng
est considéré comme l’incarnation de la justice et de la force
servant à exprimer la
colère des masses populaires et son audace à mépriser la loi féodale.
Guillotiner le prince Zhao (frère de
l’empereur), Guillotiner Chen Shimei (gendre de l’empereur),
Décapiter par la ruse Lu Zhailang (membre de la famille
impériale) sont des opéras qui font l’éloge de Bao Zheng. Pour
appliquer la loi à l’égard des malfaiteurs, pour défendre la dignité
de la loi et rendre justice aux victimes, cet homme a brisé toutes
les résistances au risque de sa vie.
Guillotiner le Juge de l’enfer et
Guillotiner Bao Mian (neveu de Bao Zheng) punissaient les
fonctionnaires corrompus qui avaient violé la loi à leur profit.
Briser un char impérial et Battre
une robe impériale dirigeaient immédiatement le fer sur
le dominateur supérieur. Dans la société féodale, on n’avait pas
le droit de tuer l’empereur et l’impératrice, briser leur char
et battre leur robe dépassaient même les limites.
Au théâtre, les propos de Bao Zheng qui parlaient de
punir les malfaiteurs faisaient l’écho des clameurs de la population
et n’étaient pas l’opinion des mandarins de la cour impériale.
Dans l’histoire de la Chine, il y a Hai Rui (de la dynastie des Ming) et Yu Chenglong
(de la dynastie des Qing) qui ont aussi été des fonctionnaires
intègres. Ceux-ci étaient fidèles à la cour impériale, assidus,
droits et insensibles aux flatteries, et leur administration a
été intègre. Ils faisaient l’objet de l’amour et du respect du
peuple et étaient dans les bonnes grâces de l’empereur. Sans aucun
doute, l’administration des fonctionnaires intègres a été utile
pour la stabilité sociale, le développement économique et la consolidation
du pouvoir.
Zhao Guangyi (939-997), l’empereur Taizong de la dynastie
des Song a écrit une inscription de seize caractères chinois sur
une stèle, et il l’a distribuée à chaque district et au tribunal
pour sensibiliser leurs fonctionnaires. Cette inscription dit
« Le traitement d’un fonctionnaire représente des ressources
issues de la sueur du peuple (impôts et produit des exactions) ;
le peuple peut être facilement maltraité, mais la justice divine
ne le tolérera pas. »
Cet avertissement a été en usage jusqu’à la dynastie
des Ming, après avoir été transformé de stèle en portique. Se
dressant hors du tribunal, ce portique était facilement visible
par les fonctionnaires. Aujourd’hui, on peut voir un tel
portique à Baoding, province du Hebei et à Huozhou, province
du Shanxi.