Lhomme-orchestre du
Cercle francophone de Yantai
LOUISE CADIEUX
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M. Humbert reçoit la
médaille de lAmitié des mains de Mme la
ministre Wu Yi. |
M.
Michel Humbert, cest le dynamisme personnifié. Dans
une réunion sociale, il se déplace de façon
joviale entre les différents groupes et distribue inlassablement
sa carte de visite. Alors quà son âge, bien des
gens songent à la retraite, lui, il agit comme conseiller
principal du Conseil de développement des investissements
de la ville de Yantai, province du Shandong, et cest avec
la fougue dun débutant quil fait connaître
« sa » ville. Cependant, cest en tant que président
fondateur du Cercle francophone de Yantai que nous avons voulu mieux
connaître ce Français qui a fait de la Chine son pays
dadoption.
Comment vous est venue lidée de fonder le Cercle
francophone de Yantai ?
Disons dabord que cela fait une bonne dizaine dannées
quil y a un environnement francophone à Yantai. Au
début, il ny avait quun petit groupe formé
de gens daffaires français et de leur famille, et le
groupe se rencontrait pour socialiser. Puis, dans le cadre de mon
travail, jai fait la promotion de Yantai en France, et de
plus en plus dentreprises sont venues sy implanter.
Ainsi, un plus grand nombre de familles sont arrivées. Jai
alors pensé créer un réseau amical, mais un
peu plus officiel, entre ces gens. Actuellement, il y a environ
une centaine de francophones et de francophiles de Yantai qui font
partie du Cercle : des gens daffaires, des professeurs et
des étudiants. Et il ny a pas que la France qui soit
représentée; on trouve des gens dhorizons aussi
divers que la Kabylie, le Québec, la Norvège, lItalie,
etc.
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Un moment de détente
sur la plage |
Lors dune réunion
du Cercle francophone |
Des Chinois y participent-ils?
Bien sûr. À Yantai, il y a de nombreux Chinois qui
parlent le français, car on compte 60 entreprises françaises
de différents secteurs qui en emploient. Dailleurs,
au Conseil de développement des investissements, nous avons
même un département français, et je puis vous
dire que les deux Chinois qui travaillent avec moi parlent et écrivent
parfaitement le français. Il nest pas rare de rencontrer
des Chinois qui aiment la littérature française et
qui connaissent bien les auteurs classiques. Et, vous savez, mes
collègues vont en France chaque année...
Quelles sont les principales activités de ce Cercle?
Règle générale, nous nous réunissons
chaque mois dans un excellent restaurant français de Yantai
pour échanger et... bien manger. On organise aussi des sorties.
Par ailleurs, ce restaurant a une bibliothèque de livres,
de journaux et de revues en français que je mets gratuitement
à la disposition de tous. Le Cercle est donc un point de
ralliement qui permet léchange dinformations
et favorise lamitié. Nous entretenons également
des liens avec les Alliances françaises de Jinan et Qingdao,
au Shandong, et avec celle de Dalian, au Liaoning.
Y-a-t-il des gens qui vous secondent?
Oui, en quelque sorte. Par exemple, Mme Gao Jumin enseigne le français
à 300 étudiants de luniversité Ludong,
et elle le fait depuis 19 ans. Ma femme Chantal agit également
comme professeur bénévole et donne des cours de français.
On peut donc dire quon assure lavenir du français
à Yantai.
Ne peut-on pas comparer Wuhan -- considérée souvent
comme le cur de la présence française en Chine
-- à Yantai pour ce qui est du dynamisme de cette présence?
Je dirais que, à Wuhan, les gens sont davantage axés
sur les affaires. À Yantai, la vie culturelle est plus vivante.
Par exemple, nous cherchons à nouer des contacts avec le
monde de la calligraphie et de la peinture, car le Cercle est un
moyen de mieux saisir les deux cultures : la française et
la chinoise. Aussi, dans la ville, nous avons deux galeries qui
ont accueilli des peintres français : M. Colliard, un peintre
figuratif qui a exposé en 2005, et Mme Moulin, qui fait de
la peinture abstraite et qui a exposé en 2007.
À part le Cercle, Yantai a-t-elle dautres liens
avec le monde francophone?
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Vue de la ville
de Yantai où travaille M. Humbert |
Ah ça oui! En éducation, Yantai est jumelée
avec Quimper et la Cornouaille, ainsi quavec Angers et lAnjou.
Penglai, qui relève de la compétence administrative
de Yantai, est pour sa part jumelée avec la ville de Saumur.
Ainsi, il y a des échanges détudiants avec lISUGA
(Université spécialisée sur lAsie) de
Quimper et lUniversité catholique dAngers. Maintenant,
quatre étudiants bretons sont à Yantai. Par ailleurs,
sans compter les nombreux CV de Français que je reçois
régulièrement, au gouvernement, nous recevons de deux
à trois visiteurs et délégations de France
chaque semaine. Ces gens viennent à Yantai pour y investir,
faire de la recherche, trouver des fournisseurs, vendre ou faire
du tourisme; les viticulteurs français sintéressent
beaucoup à Yantai, car nous sommes lune des régions
viticoles de la Chine. Il ne faut pas oublier lHôpital
Yantaishan, fondé par les Jésuites, et toujours connu
localement sous le nom de lHôpital de France. Ce dernier
est en relation avec lHôpital G. Pompidou de Paris.
A-t-on reconnu tout le travail que vous faites pour la promotion
du français?
Oui. En 2006, jai eu lhonneur de recevoir, des mains
de Son Excellence lambassadeur de France en Chine, la médaille
dargent de lAcadémie française pour le
rayonnement de la langue et de la littérature françaises.
Cest une belle récompense pour mes efforts de promotion
du français en Chine.
Je ne voudrais pas blesser votre modestie, mais je crois que la
Chine a également reconnu la qualité exceptionnelle
de votre travail...
En effet. Jai reçu la médaille de lAmitié,
une récompense déchelon national, la plus haute
distinction quun expert étranger puisse recevoir en
Chine. Jai aussi le titre de citoyen honoraire de Yantai.
Comme vous pouvez le constater, je suis privilégié...
Avez-vous des plans de développement pour le Cercle francophone?
Il y a toujours de nouveaux investisseurs à Yantai, et moi,
je suis toujours à laffût des nouveaux Français
ou francophones.
Avez-vous une relève?
Malheureusement, pas vraiment. Beaucoup de membres du Cercle ne
sont que quelques années à Yantai, alors que moi,
jy habite en permanence.
Pour terminer, pourriez-vous nous dire ce qui vous lie à
la Chine?
La Chine est un pays en devenir. Cest intéressant
de vivre cette expérience de lintérieur. Cela
fait vingt ans que je travaille en Asie, et rien ni personne ne
me rattache à une vie en France. En Chine, je sens que jai
vraiment quelque chose à faire.
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