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Des objets déterrés
à Sanxingdui ont été présentés
en 1996 au British Museum de Londres.
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Les vestiges archéologiques qui ont été
déterrés dans les deux fosses avaient été
partiellement brisés ou détruits ; certains avaient
été brûlés volontairement. « Au
cours des fouilles, il y a eu des découvertes extraordinaires,
mais la plupart des objets étaient en fragments plus ou moins
petits. Après dinnombrables tentatives, nous avons
réussi à assembler les fragments pour reconstituer
lobjet dorigine, et les résultats nous ont causé
une grande surprise », a déclaré M. Chen Dean.
Ces vestiges semblent avoir fait découvrir une civilisation
distincte, fort différente de celle de la Chine du Centre.
Certains objets quon y a trouvés ne manquent pas de
nous en convaincre.
Posée sur un socle de 80 cm et coiffée dune
couronne de 10 cm, une statue de 1,72 m (2,62 m au total) est considérée
par tous comme la plus haute statue de bronze trouvée en
Chine à ce jour. Cette statue est habillée des vêtements
luxueux et a un maintien noble. Qui représente-t-elle donc?
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Arbre en bronze
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Par ailleurs, un arbre sacré en bronze, haut de 3,95 m,
est également une pièce extraordinaire. Cet arbre
est composé de trois parties : le socle, larbre comme
tel et un dragon enroulé autour. Larbre est subdivisé
en trois sections, et au-dessus de chacune delles est placé
un disque en pierre très ajouré. Chaque section comprend
trois branches : une à droite, une à gauche et une
autre en arrière. Un oiseau se tient sur chaque branche.
Larbre présente donc neuf oiseaux. La manière
dont cet arbre est façonné montre bien que la civilisation
cinq fois millénaire de Sanxingdui avait la notion des chiffres.
Les milieux scientifiques du monde estiment toujours que ce sont
les Maya qui auraient trouvé en premier le concept du «
zéro ». Mais ces gens de Sanxingdui, qui nont
pas de descendance connue et qui ont vécu avant les Maya,
doù ont-ils tiré leur notion des chiffres? Dans
lhistoire mondiale de larchéologie, cet arbre
en bronze, si grand et si complexe, peut être considéré
comme un objet précieux hors pair.
On y a également déterré des masques géants
en bronze. À gauche et à droite du masque, ainsi quau
centre du front, des trous carrés avaient été
forés. Ces trous nont pas été moulés,
mais percés. Quel instrument de cette époque était
donc en mesure de percer un trou dans le bronze, alors que, même
aujourdhui, on doit utiliser des outils en alliage assez dur?
Parmi les objets anciens, les plus remarquables sont les bronzes
avec yeux exorbités en forme de losange. Ces yeux sont répartis
en deux et en quatre, ce qui correspond à la plus vieille
méthode mathématique de division en parts égales
dans le monde. À quoi servent ces yeux si nombreux? Rien
quà imaginer que tellement dyeux vous regardent
de tous côtés donnent froid dans le dos!
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Restauration de l'arbre en
bronze
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Les vestiges de Sanxingdui ont mis au jour bon nombre dobjets
en or, tels que sceptres, masques, ornements à motif de tigre
et tablettes, de même que feuilles de bambou recouvertes dor.
Le moment du début de lutilisation dobjets en
or nest pas noté clairement dans les livres anciens.
Selon le Classique des monts et des rivières
le classique chinois le plus ancien , durant la dynastie des
Xia (env. XXIe siècle au XVe siècle av. J.-C.), on
connaissait les caractéristiques de lor. Selon LEncyclopédie
de Chine, dans le tome sur larchéologie, les objets
dor et dargent ont connu une apparition très
tardive; avant la dynastie des Han (206 av. J.-C 220 apr.
J.-C.), ils étaient très rares, alors que durant les
Tang (618-907), on en trouvait beaucoup. Pourtant, les objets en
or de Sanxingdui sont tous recouverts de feuilles dor. Les
savants estiment que les gens dalors connaissaient très
bien la ductilité de lor. Mais qui donc leur avait
appris à fabriquer des objets en or? Lavaient-ils appris
par eux-mêmes?
Leur technologie pour le jade est également fantastique
: les figures géométriques sur les tablettes, les
trous circulaires réguliers et les motifs aux formes bizarres
nont pas pu être sculptés et polis à la
machine. Il y a également deux jades dun mètre
de diamètre et qui sont coupés horizontalement. Leur
tolérance dhorizontalité est inférieure
à un micron. Il y a des milliers dannées, les
instruments de précision permettant de tailler ces jades
nexistaient pas, de sorte que la haute précision de
la coupe est vraiment incroyable. Malheureusement, les livres dhistoire
nen ont fait aucune mention.
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Fouilles dans la zone des
tombeaux dans les vestiges de Jinsha
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Autrefois, les ethnies qui habitaient la région du Sichuan,
étaient communément appelées Shu. Aux yeux
des Han de la Chine du Centre, les Shu ne formaient quune
ethnie de peu dimportance. En raison des difficultés
de communication et du petit nombre de registres historiques, la
culture des Shu a toujours conservé son mystère. À
lépoque des Wei et des Jin (de 220 à 420), le
livre Histoire de lÉtat Huayang, à propos
de lhistoire du pays de Shu relate peu dhistoires et
de légendes sur les Shu. On dit que, avant la dynastie des
Qin (221207 av. J.-C.), le pays de Shu nétait
pas une dynastie unique et continue; il était gouverné
par les chefs des ethnies Canchong, Baiguan, Yufu et Kaiming.
Les vestiges de Sanxingdui semblent déclarer au monde quil
existait alors une brillante civilisation ancienne. On ne sait toutefois
pas sils peuvent confirmer les légendes historiques
sur le pays de Shu.
M. Chen Xiandan déclare : « Nous avons lu les caractères
écrits de gauche à droite sur le sceptre dor;
ce sont les trois caractères Yu, Fu et Wang
(roi Yufu). Cela veut dire que le propriétaire du sceptre
dor devait être le roi Yufu. »
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Pendentif en jade
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On doute encore que le bronze avec il en forme de pilier,
mis au jour à Sanxingdui, représente le visage du
roi Canchong. M. Sun Hua, vice-directeur de lInstitut de muséologie
et darchéologie de luniversité de Beijing,
déclare : « Dans les documents historiques, il y a
des mentions concernant les yeux convexes de Canchong, mais comme
on na pas vu lobjet comme tel, on ne comprend pas la
signification de ces yeux. Quand nous voyons ce bronze, nous lassocions
immédiatement avec ce qui est écrit dans les documents
historiques. »
Selon les découvertes effectuées dans deux fosses
de Sanxingdui, les experts ont conclu que ces deux fosses remonteraient
à 1 500 ans av. J.-C. Daprès le nombre dobjets
en bronze et la richesse des vestiges, les archéologues croient
quil y avait là une ville de grande envergure.
Dans les années 1980 et 1990, on a trouvé les murs
denceinte est, ouest et sud de Sanxingdui, alors que la rivière
Yazi forme un écran naturel qui protège le nord de
la cité. Le territoire entouré par les murs de Sanxingdui
couvre plus de 3 km2. Une si grande cité était chose
rare à cette époque en Chine. M. Sun poursuit : «
Étant donné la grande surface délimitée
par les murs, une population nombreuse y vivait certainement. Les
ruines comprennent les murs denceinte, le siège du
palais, lemplacement du temple, des tombeaux à lextérieur
de la ville, des habitations et des ateliers dartisanat. Cest
lemplacement dune cité entière. »
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Tête en bronze
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On a trouvé successivement huit emplacements dans la plaine
de Chengdu : le village de Baodun, à Xinjin; le village de
Mangcheng, à Dujiangyan; le village de Shuanghe et le village
de Zizhu, à Chongzhou; le village de Gucheng, à Pixian;
le village de Yufu, à Wenjiang; de même que les villages
de Yandiao et Gaoshan, à Dayi. Après avoir prospecté
le terrain et effectué des fouilles, on a confirmé
que ces emplacements appartiennent au royaume de Sanxingdui et quils
ont donc la même origine culturelle que ce royaume.
En 2001, au village de Jinsha, situé dans les environs de
Chengdu, on a trouvé un vaste emplacement de la fin de la
dynastie des Shang et de lépoque des Printemps et Automnes
(770 476 av. J.-C.). Une grande quantité de bronzes,
de jades, de pierres et dor y ont été déterrés,
et ceux-ci fournissent des indices importants pour la recherche
sur la culture de Sanxingdui.
M. Duan Yu, directeur de lInstitut dhistoire de lAcadémie
des sciences sociales de la province du Sichuan, déclare
: « La culture de Sanxingdui comprend les emplacements de
Baodun, découverts en première étape, et ceux
de Jinsha, en deuxième étape, et leur culture montre
un processus dévolution continu. Cela témoigne
de la continuité de la culture des Shu et démontre
nettement quelle est différente de la culture de la
Chine du Centre. »
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Tablette en jade
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Quétait donc le royaume de Sanxingdui, il y a 3 000
ans?
M. Zhao Dianzeng, ex-directeur de lInstitut darchéologie
de la province du Sichuan, déclare : « En un sens,
Sanxingdui était comme La Mecque : un centre de pèlerinage.
Les gens des environs, dont ceux de la Chine du Centre, du Yunnan
et du Guizhou, voire les Vietnamiens et les Thaïlandais, y
venaient jadis. »
M. Duan estime que le royaume de Sanxingdui était un pays
théocratique. La grande envergure de la cité montre
que la vie sociale et la structure politique y avaient dépassé
le simple niveau de la tribu. La cité avait déjà
un pouvoir centralisé qui gouvernait une population nombreuse
et qui disposait dabondantes ressources naturelles et de quantité
de biens sociaux. Le noyau centralisateur était un groupe
de gouvernants théocratiques qui maîtrisaient les pouvoirs
politique, économique, religieux et militaire. Dans lentourage
du groupe dominant, il y avait les subordonnés. Lensemble
de la classe dominante se caractérisait par une structure
hiérarchique. Les armes en jade et en pierre déterrées
et les statues en bronze en uniforme militaire confirment que le
royaume de Shu avait édifié une force militaire permanente.
Les experts chinois et étrangers estiment généralement
que la statue en bronze avec couronne, habillée de vêtements
luxueux et à lair noble, symbolise un roi ou un magicien.
De nombreuses têtes sculptées à lair martial
représentent probablement soit des chefs de tribu ou des
sorciers, soit la scène de sacrifices ou de grandes réunions
dalliance.
Dans ce royaume théocratique, de grands sacrifices religieux
avaient-ils lieu à date fixe? Et ces sacrifices, quelle envergure
avaient-ils?
Dans les temples, trois grandes statues de dieux se trouvent au
centre. Ces dieux ont un visage humain et un corps doiseau,
des yeux saillants en cylindre et de grandes oreilles ouvertes;
cest comme sils pouvaient regarder et écouter
de tous les côtés. Sous les trois statues de dieux,
on trouve une grande statue en bronze, à visage humain, lair
noble et saint, avec une couronne sur la tête, les pieds sur
lautel et les mains portant des instruments de musique. Derrière
cette statue, les gens portent des instruments pour les rites; ils
sont debout ou à genoux et semblent se prosterner avec ferveur.
M. Sun Hua déclare : « On a beaucoup dhypothèses
sur ces statues de dieux et sur les masques. Par exemple, pour les
masques, certains estiment quon les tenait à deux mains
dans les danses sacrificielles. Dautres estiment que les masques
étaient utilisés comme les totems des Indiens. Je
pense que, de toute façon, ils avaient pour fonction démouvoir
les gens. On ne pourra répondre aux questions quau
moment où plus de découvertes archéologiques
auront été faites. »
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