Chen
Hualan, de jeune fille pauvre à vétérinaire
indispensable
YAN WEIJUAN
En 2004, la grippe aviaire
s'est pointée dans quelques pays asiatiques. La Chine, avec
sa population nombreuse et sa très vaste superficie, affronte
donc un défi particulièrement important. Chen Hualan,
directrice du Laboratoire national de référence pour
la grippe aviaire, et son équipe mènent une lutte
particulièrement courageuse contre cette ennemie.
EN Chine, pratiquement tout le monde connaît
maintenant Chen Hualan. Pourtant, elle s'était consacrée
à la recherche vétérinaire depuis une dizaine
d'années, sans attirer l'attention. Or, ces deux dernières
années, la grippe aviaire a déjà causé
des perturbations économiques et sociales et le monde frémit
juste à en entendre parler; Chen Hualan et ses recherches
ont donc commencé à faire la manchette à la
télévision et dans les journaux. Elle a obtenu de
nombreuses distinctions, notamment : le titre de la Jeune scientifique
de Chine, décerné conjointement par la Fédération
nationale des femmes de Chine, l'Oréal et l'Unesco (Chine);
et celui de Femme chinoise de l'année 2005, conféré
par la Maison d'édition Femmes de Chine. Mais en dépit
de ces honneurs, Mme Chen reste très calme : " Ce qui
attire l'attention de la population, c'est la grippe aviaire, pas
moi. De plus, je n'attache pas d'importance à la réputation.
Ce qui est primordial pour moi, c'est de mener à bien mon
travail. " L'histoire de Chen Hualan, c'est la transformation
de Cendrillon en une belle princesse.
Une vétérinaire compétente
et indispensable
En Chine, Mme Chen est la personne la mieux qualifiée pour
parler de la grippe aviaire. En tant que directrice du Laboratoire
national de référence sur la grippe aviaire, relevant
de l'Institut de recherche vétérinaire de Harbin,
elle est la première personne informée du développement
de la maladie : quelle région est affectée, quelle
mutation le virus a subie, quel virus est le plus convenable pour
produire un vaccin, etc. Des animaux suspects sont envoyés
très fréquemment à ce laboratoire pour un examen
minutieux. Pour trouver une réponse précise à
toutes les questions qui surgissent, elle et son équipe travaillent
pratiquement jour et nuit... Par conséquent, chaque jour,
ils sont en contact avec des virus contagieux, alors que tout le
monde tente d'éviter les virus le plus possible.
À ce jour, Mme Chen a déjà réussi à
fabriquer des vaccins contre les souches H5N1 et H5N2, mais ces
vaccins ne s'appliquent qu'aux animaux; elle en a d'ailleurs transféré
les technologies à neuf sociétés chinoises
de médicaments vétérinaires. En 2004, quand
la Chine et ses pays voisins ont détecté la grippe
aviaire, le gouvernement chinois a tout de suite délimité
des zones de protection de 3 km et des zones de surveillance de
7 km à l'intérieur desquelles toutes les volailles
sont tuées ou vaccinées contre les virus. Grâce
à ces mesures, la Chine a réussi à contrôler
la propagation de la grippe aviaire et à éviter des
pertes économiques de dizaines de milliards de yuans.
En plus de poursuivre des recherches en Chine, Mme Chen participe
aussi à de nombreuses conférences internationales
qui lui permettent de suivre de près le développement
international de la recherche sur la grippe aviaire et de présenter
au monde la situation et les mesures prises en Chine. Ses recherches
ont à la fois reçu beaucoup d'attention et été
très appréciées, tant de l'Organisation mondiale
de la santé que de l'Organisation mondiale de la santé
animale. Au mois de mai 2004, elle et son équipe ont réussi
à mettre au point un nouveau vaccin contre la souche H5N1.
Ce vaccin est particulièrement efficace et utilisé
à grande échelle dans le monde sur les oiseaux sauvages
et domestiques.
Former des personnes qualifiées dans
des conditions difficiles
Pendant longtemps, les conditions de vie de Chen Hualan n'ont pas
été des plus agréables. Née dans un
petit village du Gansu, elle a eu une enfance difficile. Ses parents
étaient paysans et devaient élever six enfants avec
leurs faibles revenus tirés de l'agriculture. En tant que
cadette de cette famille, Chen Hualan suivait au quotidien l'exemple
de ses aînés: comprendre les difficultés de
ses parents, ne jamais se plaindre des conditions difficiles, mais
bien étudier.
De l'école primaire à l'université, elle s'est
toujours classée parmi les meilleurs. Selon le Pr Chen Huaitao
de l'Université agricole du Gansu, Chen Hualan a toujours
manifesté les qualités requises pour devenir une bonne
scientifique. Entre autres, elle est très intelligente, travaille
d'arrache-pied et porte une attention particulière à
l'efficacité du travail. Elle est capable d'accomplir son
travail plus rapidement que les autres, mais avec une efficacité
plus élevée.
De 1999 à 2001, Chen Hualan a étudié aux États-Unis
et a réussi à décrocher un diplôme du
Center for Disease Control and Prevention, un centre qui fait autorité
dans le domaine médical. En raison de son excellent dossier
scolaire, les autorités de ce centre ont invité Mme
Chen à rester, en lui promettant un salaire élevé
et des conditions avantageuses pour y faire de la recherche. Toutefois,
après réflexion, elle a décidé de revenir
en Chine. " Aux États-Unis, dit-elle, je peux mener
une vie confortable et obtenir de prétendus succès
qui n'existent que dans le domaine de la recherche, c'est-à-dire,
publier des articles dans des revues célèbres. Je
ne serais qu'une infime partie du système scientifique des
États-Unis. Or, en Chine, je suis indispensable dans ce domaine.
On m'offre plus de latitude pour mettre mes idées et mes
talents en valeur. "
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L'Institut de recherche
vétérinaire de Harbin |
Maintenant, l'argent n'est plus un problème pour elle. Toutefois,
Chen Hualan affronte encore des difficultés dans sa vie quotidienne.
En Chine, on dit souvent qu'on ne peut pas avoir le beurre et l'argent
du beurre. Puisqu'elle se consacre entièrement à son
travail, elle n'a pas beaucoup de temps pour s'occuper de sa famille.
Par exemple, le jour où son fils a dû subir une appendicectomie,
elle venait juste de recevoir l'ordre de partir en mission. Dans
la vie quotidienne, elle n'a pas non plus beaucoup de temps à
consacrer à son fils, de sorte qu'elle en éprouve
toujours des remords. Même chose pour son mari : depuis l'apparition
de la grippe aviaire, elle reste souvent plus de 16 heures par jour
au laboratoire; des loisirs simples que partagent d'autres couples
deviennent donc pour elle de folles espérances. Elle n'a
même pas le temps de préparer les repas familiaux;
c'est une aide ménagère qui s'occupe de la routine
domestique.
En dépit des difficultés de sa vie quotidienne, Chen
Hualan garde toujours sa bonne humeur. Alors qu'un journaliste lui
demandait ce qu'elle aimerait faire avec les 100 000 yuans que l'Oréal
venait de lui donner en récompense, elle a d'abord remonté
ses lunettes et a déclaré en souriant " N'espérez
pas des paroles nobles et héroïques de ma part. Ce que
je veux, c'est faire des achats : entre autres, m'acheter des bottes
de cuir [
] Aujourd'hui, j'ai gagné 100 000 yuans, je
vous invite à boire et à manger... "
Mme Chen comprend bien ses responsabilités dans un grand
pays comme la Chine qui vit sous la menace de la grippe aviaire.
Bien souvent, elle dit à son équipe qu'il ne faut
jamais se reposer sur ses lauriers parce que les virus mutent de
jour en jour.
Jusqu'à maintenant, elle a su traverser les difficultés
et déploie toujours des efforts inlassables pour se perfectionner.
Les gens de son village d'origine lèvent tous le pouce en
signe d'admiration : " Chen Hualan est un phénix qui
s'est envolé de notre village. " Elle est un exemple
pour les jeunes. L'apparence et un environnement de vie agréable
ne sont pas les choses les plus importantes; l'important, c'est
de se consacrer sans relâche à son travail.
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