Wang
Qiuyang : la première Chinoise à
se
rendre à pied au pôle Nord
HE
LING
Wang Qiuyang a l'étoffe
des exploratrices. L'expédition au pôle Nord à
laquelle elle a participé à partir d'Oslo, n'était
pas sa première et ne sera pas non plus sa dernière...
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Wang Qiuyang, à
son retour du pôle Sud |
Wang Qiuyang est présidente de la SARL d'investissement
Jindian. Née dans une famille de militaires, elle est diplômée
du département de l'information de l'Université des
médias de Chine et elle a travaillé huit ans dans
l'armée, où elle était chargée de la
réalisation artistique au département de la culture
de la région militaire de Nanjing. D'après son caractère
- grâce et douceur -, il est difficile de croire que cette
femme soit forte et ait un tempérament inflexible. Elle aime
bien voyager et explorer. En 1998, elle est allée au pôle
Sud, en exploratrice. En 2000, elle a visité l'ouest de la
France en train et sac au dos. En 2003, elle a conduit pendant 50
jours jusqu'au Tibet et dans la zone désertique de Lop Nur
du Xinjiang. Après ce périple, elle a fait don de
10 millions de yuans à Ngari du Tibet pour y construire quatre
écoles Espoir, et elle a publié son livre Zai Lu Sheng
(Sur la route). En 2004, le magazine Women of China lui a conféré
le titre de l'une des dix personnes de Chine les plus influentes
au pays et à l'étranger. Du 10 au 22 février
2005, elle a conquis le Kilimandjaro, le premier sommet de l'Afrique,
d' une altitude de 5 895 m. Du 13 avril au 2 mai 2005, elle a exploré
le pôle Nord. C'est la première Chinoise à être
arrivée à pied au pôle Nord à partir
d'Oslo. Du 19 au 24 juillet 2005, elle a conquis le pic Qizi au
Tibet, à 6 206 m d'altitude.
Vivre dans une famille de militaires
Son père était commandant adjoint d'un corps d'armée.
Dans son enfance, puisqu'elle suivait la troupe de près,
Wang Qiuyang a toujours vécu à la montagne ou à
la campagne. Peut-être est-ce la génétique paternelle
qui a joué un rôle, mais à cette époque,
Wang agissait comme un garçon : elle grimpait facilement
un mur, ce qui lui a permis, un jour, d'aider un voisin à
forcer une porte dont il avait perdu la clé. Bien qu' elle
eût été une fille, les enfants de son âge,
la considérait comme leur roi. À 17 ans, elle a vu
pour la première fois une femme monter à vélo
et naviguer, ce qui différait complètement de l'environnement
dans lequel elle avait vécu depuis son enfance.
Pour elle, l'argent n'est qu'une série de chiffres
À l'époque où elle vivait à la montagne,
Wang songeait à être géologue. Après
la nouvelle de la découverte du tombeau des Han à
Mawangdui, elle a voulu être archéologue, et par la
suite, elle espérait travailler dans le domaine de l'électricité.
Pour que ses rêves se précisent, il faut attendre
que Wang fasse la connaissance de Zhang Baoquan et qu'il devienne
son mari. C'est lui qui a fait prendre un nouveau départ
à cette femme. " Certains citadins se sentent souvent
perdus par la vie urbaine et s'ennuient tout le temps. Mon mari
dit que je crains les mégalopoles. Pourtant, j'ai besoin
de la grande ville, c'est elle qui peut m'aider à réussir.
" À Beijing, elle a fait construire quantité
d'immeubles et y a fait installer une piscine et un centre de gymnastique.
Elle n'aime pas se promener dans la rue, ni acheter des vêtements.
Chaque année, elle en achète à deux reprises
: à l'automne et au printemps. Bien qu'elle n'aime pas courir
les magasins, elle aime collectionner les voitures. Pour aller au
Tibet, elle avait préparé deux jeeps : une Rover et
uneHummer.
Partir à la conquête du Tibet
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Au moment du départ
de Wang Qiuyang pour le pôle Sud, elle et son mari se
séparent dans une étreinte. |
Wang Qiuyang ne sait pas monter à vélo, mais elle
maîtrise bien la conduite des véhicules automobiles.
D'après son mari, Wang est une grande voyageuse. Une fois
devenue adulte et en mesure de voyager, elle a choisi le Tibet.
" J'aime bien le Tibet, j'y ai la sensation de retourner dans
mon pays natal ", confirme-t-elle. " Elle est comme une
carte géographique vivante du Tibet; sur cette carte, elle
voyage tout le temps ", dit Son mari, à la blague.
Il la comprend bien et surtout, au mépris de toutes conventions,
apprécie beaucoup son caractère. Chaque année,
il contibue à arranger une période pour la laisser
voyager.
Pour se rendre au Tibet, elle avait préparé un équipement
complet de centaines d'objets, y compris la jeep Rover achetée
spécialement pour cette aventure. Ce voyage a usé
cinq pneus. Dans le coffre arrière, il y avait également
une cuisinière à gaz et des ustensiles, ce qui lui
a permis de cuisiner dans la zone désertique, même
dans le Lop Nur du Xinjiang. Elle dit : " Cela doit être
un plaisir de manger en voyage, par exemple, un morceau de viande
de buf séchée tout en conduisant à 140
km à l'heure. "
Wang Qiuyang croit qu'elle a été une Tibétaine
dans une vie antérieure. " Je m'adapte bien à
la vie tibétaine, j'adore le thé au beurre et j'aime
manger de la viande. Je peux manger un gigot de mouton entier pendant
une journée. J'ai une grosse natte de cheveux et la peau
bronzée par le soleil. " Partout au Tibet, personne
ne peut prétendre que cette femme ne soit pas Tibétaine.
Au Tibet, devant d'anciens moulins à prière abîmés
par le temps, des poutres inclinées et des pans de mur écroulés,
elle tente toujours d'éclaircir le mystère de la disparition
de l'ancien royaume de Guge où habitaient une centaine de
milliers de personnes. " La vue change tous les jours quand
on conduit au Tibet; c'est sans doute ce qui fascine tant le voyageur.
" En effet, on doit franchir de nombreuses montagnes différentes
les unes des autres, et cela satisfait pleinement la passion de
la conquête. Sur un haut plateau, à une altitude moyenne
de 4 500 m, quel que soit l'endroit où l'on veut aller, on
peut dire descendre. La plupart des sentiers montagneux zigzaguent,
quelques chauffeurs audacieux dévalent parfois à toute
vitesse une pente raide. Une fois, j'ai suivi l'exemple de ces chauffeurs
pour descendre la montagne. Le châssis de ma Rover rasait
pratiquement le sol, et après avoir glissé, moi et
ma jeep sommes descendues saines et sauves au pied de la montagne;
je ne savais même pas comment je l'avais conduite.
Explorer le pôle Nord
Le 19 avril 2005, depuis Oslo, en Norvège, après
cinq difficiles journées de marche, l'équipe d'exploration
Asustek " 7+2 " est arrivée au pôle Nord.
Wang Qiuyang, la seule femme de l'équipe, a accompli une
tâche remarquable. " Avant de partir, le pôle Nord
me séduisait, j'étais remplie d'espoir et je n'ai
pas beaucoup pensé aux difficultés et au danger. Les
moniteurs m'avaient demandé d'intensifier chaque jour mes
exercices, ce qui m'a fait découvrir que, pour atteindre
un but, il faut déployer des efforts sans arrêt. Au
moment où j'ai signé mon contrat avec la compagnie
d'expédition, j'ai senti que je le faisais réellement
au risque de ma vie. "
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Les photos prises par l'équipe
d'expédition au pôle Nord sont présentées
à Beijing. |
Et puis, un jour, l'équipe d'expédition s'est mise
en route. C'était une période de dégel; dans
l'océan Arctique, la glace se fissurait en gros morceaux,
ce qui rendait instable la surface de glace au moment de la marée
montante. Pour traverser, il fallait faire des détours. Dans
ce cas, le trajet a été plus long, et le parcours,
plus difficile, que ceux des équipes précédentes.
Le premier jour, l'équipe a marché pendant cinq heures.
La partie des longs cheveux de Wang qui était restée
à découvert ressemblait à des glaçons.
Entre les grosses plaques de glace, il y avait des cours d'eau.
Avant cette expédition, quatre équipiers français
y étaient tombés. Cette fois, l'expédition
a eu la chance de réussir.
Par la suite, tout le monde a tenté d'accélérer
la cadence tout en tirant des traîneaux de 30 kg et en avançant
difficilement. Chaque jour, il fallait marcher huit à dix
heures pour accomplir l'expédition avant le dégel
des plaques de glace. Pour se nourrir, les membres avaient de la
viande grasse qu'ils cuisaient dans une grande casserole avec des
nouilles en y ajoutant du fromage. Comme Wang Qiuyang était
la seule femme de l'expédition, ses coéquipiers lui
ont accordé une attention particulière. Elle était
chargée seulement de porter les matelas, les ustensiles et
les autres choses légères. Elle a confié au
journaliste : " Pour accomplir une expédition, la constitution
physique des hommes et des femmes est nettement différente
: l'endurance de la femme est plus grande que celle de l'homme.
La limite de mouvement demande que l'on s'entraide. Il faut bien
s'occuper de soi. Le plus important, c'est de ne pas donner de soucis
aux autres. "
En route, Wang Yongfeng, le chef d'équipe, l'a beaucoup
aidée. Au troisième jour, Wang Qiuyang a eu mal aux
pieds. Ceux-ci étaient très enflés; il les
a donc enveloppés soigneusement avec de la gaze et l'a encouragée
à marcher pas à pas en lui disant : " En ce moment,
tout le monde a mal aux pieds et a froid ", ce qui a soulagé
un peu sa douleur. Un jour, quelqu'un a découvert des traces
de pattes d'ours. C'était très dangereux, parce que
c'était la période d'hibernation. Le guide a sorti
son fusil, les autres, tout excités, ont pris des photos
de ces traces. Avant de s'endormir, Wang Qiuyang écrivait
quotidiennement son journal à l'aide de son portable et y
archivait les photos qu'elle avait prises en route.
Son espoir : voyager sa vie durant
En 1998, elle a quitté son enfant, qui n'avait alors qu'un
an et demi, pour aller au pôle Sud. Elle a monté à
bord d'un brise-glace russe qui a traversé le courant circumpolaire
antarctique, une région de dérive due aux vents d'Ouest.
" Quand le bateau luttait contre le vent dans l'océan,
j'ai eu tellement peur que je pensais mourir. À ce moment-là,
je jurais de ne plus jamais m'embarquer dans des aventures. Toutefois,
après avoir foulé le sol du pôle Sud et avoir
vu les manchots danser entre les blocs de glace, je me suis dit
que je voulais revenir.
En France, Wang Qiuyang a voyagé sac au dos. Elle et sa
compagne ont pris le train pour traverser des villages et voyager
un peu au hasard. La prochaine destination était toujours
un petit bourg ou un village inconnu. Leurs pieds semblaient suivre
leur pensée pour partir à la découverte de
ce beau pays. Sa compagne de route était alors une amie qu'elle
connaissait depuis plus de dix ans. En chemin, elles ont parlé
la plupart du temps de faire un voyage autour du monde, quand elles
auront plus de 80 ans.
" J'espère pouvoir toujours voyager, marcher et marcher.
Quand je serai vieille, ou même après ma mort, il y
aura quelqu'un qui connaîtra Wang Qiuyang, décédée
quelques jours auparavant, dans un quelconque lieu d'un certain
pays ".
Sa prochaine destination est le désert du Sahara. Elle
veut le traverser et aller le plus loin possible. De ville en village,
des hautes montagnes aux pôles, ses rêves se réaliseront
les uns après les autres.
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