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LI YUYING
Oui, la politesse existe encore!

Y a-t-il une courtoisie à la française? Cet article tend à le laisser croire, même s’il en souligne aussi quelques accrocs

LA France a donné naissance à de nombreux gens de lettres remarquables et à des artistes de réputation mondiale, et on estime que la nation française a un niveau culturel élevé. De plus, les Français ont la réputation d’être si raffinés et courtois qu’on dit que c’est un pays de gentlemen. Mes expériences ont confirmé que cette réputation n’est pas surfaite.

 

Les femmes d’abord!

Les Françaises me semblent être les femmes les plus heureuses du monde, car elles jouissent presque partout d’un traitement de faveur de la part des hommes.

C'est notre B.A. de la journée !

À table, ils les aident à déplacer leur chaise pour qu’elles s’assoient; au moment de monter en voiture, ils leur ouvrent la portière; dans le métro, s’il existe une place vide et qu’une femme est debout, aucun homme ne s’y précipite, même si le wagon est vraiment bondé... J’ai moi-même vécu ces expériences et m’en suis trouvée fort aise.

À Paris, j’ai souvent assisté à une scène que je trouvais tellement attendrissante qu’elle reste encore gravée dans ma mémoire. Pour entrer ou sortir du métro, il y a de nombreuses marches à descendre et à gravir. Quand une femme avec un bébé dans une poussette s’y arrêtait, il y avait souvent un homme, tantôt jeune tantôt d’un certain âge, qui venait l’aider. « Dans l’ensemble, les femmes françaises ont belle allure », estiment souvent certains; à mon avis, ce sont les hommes qui leur donnent cette élégance.

La politesse, une foule de petites choses

En France, dans un lieu public, que ce soit dans le métro, à l’université ou au supermarché, les personnes qui passent une porte la tiennent toujours ouverte pour la personne qui suit. Durant mon séjour en France, j’ai profité de cette bonne habitude que, d’ailleurs, m’avait apprise ma mère. À mon retour en Chine, en entrant dans un lieu public, j’ai été frappée en plein visage par le rideau en bandes de plastique que l’on suspend souvent au linteau des portes, en été comme en hiver à Beijing. En effet, je suivais quelqu’un et je ne pensais pas avoir à écarter ces bandes pour entrer, sûre que la personne qui me précédait les tiendrait pour moi... comme en France !

Tenir votre droite

Heureusement qu'il y a la gauche pour les gens pressés !

Dans des endroits publics français, particulièrement au-dessus des tapis roulants, on trouve souvent l’indication: Tenir votre droite. Au moment de prendre des tapis ou escaliers roulants, j’ai constaté que les gens, dans leur immense majorité, se tenaient spontanément à droite, laissant l’espace à gauche à ceux qui, pressés, veulent marcher plus vite. Et il en est de même dans d’autres pays européens que j’ai visités. En Chine, cela ne semble pas être toujours le cas. Un jour, à Beijing, j’ai assisté à une enquête réalisée par une station de télévision sur le comportement des gens dans un escalier roulant. Durant le tournage, sauf pour une personne, qui était seule, toutes les autres l’ont pris en se tenant côte à côte. Dans les grands magasins de Beijing, je suis toujours attentive à observer les gens qui se trouvent dans cette situation; ils se tiennent côte à côte, même s’il y a une indication et une ligne dessinée au milieu de l’escalier. Si la télévision a réalisé une telle émission, c’est sûrement qu’il y avait nécessité d’attirer l’attention des gens sur ce sujet.

Pardon

Dans les lieux publics à espace limité comme le métro ou l’autobus, en Chine, il est courant de voir les gens se bousculer, mais c’est très rare en France. Lorsqu’une personne sent qu’une autre la touche ou que les deux sont sur le point de se heurter, les deux s’empressent presque en même temps de dire Pardon, comme si elles craignaient de retarder l’autre, ne serait-ce que de quelques secondes. Tout le monde faisant ainsi, il est facile d’imaginer que l’environnement social est naturellement plus harmonieux. Dans une telle ambiance, les conflits ne semblent pas trouver de raison d’exister. J’estime que c’est une façon de se déplacer sans heurt. Même dans le métro que je prenais tous les jours, l’ambiance était calme : certains lisaient; d’autres faisaient des mots croisés; d’autres encore somnolaient. S’il y avait des gens qui parlaient, ils le faisaient à voix basse. De temps en temps, des musiciens venaient exécuter quelques morceaux, et avant de commencer, ils n’oubliaient pas non plus de dire Pardon, comme pour faire oublier qu’ils dérangeraient peut-être certaines personnes…

Ainsi, j’ai trouvé que les Français avec qui j’ai eu des contacts, que ce soient des inconnus ou des amis, étaient courtois et paisibles. Je me sentais bien dans cette ambiance, et j’avais l’impression de devenir mille fois plus affable qu’avant.

Le calme… plat?

Qui a dit que c'est monotone dans le TGV ?

Le métro me semblait donc bien calme, mais je supposais que l’ambiance dans le train devait être différente. Avant de prendre le TGV pour Bordeaux, j’espérais faire la connaissance d’amis français avec lesquels je pourrais au moins bavarder durant le trajet. J’avais aussi apporté des aliments à grignoter, un peu aussi pour tuer le temps. On en apporte souvent quand on prend un train en Chine. Comme j’ai été surprise de découvrir que c’était encore plus calme dans le train que dans le métro! Les wagons n’étaient pas pleins, et avant même que le train ne démarre, chacun s’affairait déjà aux mêmes activités que dans le métro : lecture, mots croisés, repos ou travail sur ordinateur. Heureusement, cette fois-là, mon mari m’accompagnait; autrement, je me serais sentie bien seule!

Par ailleurs, il nous a semblé ne pas pouvoir bavarder comme bon nous semblait, craignant de déranger les autres; et c’est sans parler de sortir mes aliments à grignoter. De temps à autre, une charmante petite fille faisait le va-et-vient dans le couloir, mais sa maman ne cessait de la rappeler doucement à l’ordre et l’emmenait dans l’espace entre les deux wagons. Quant à moi, j’espérais toujours qu’elle continue son petit manège, sinon tout le trajet allait être vraiment monotone!

Pour moi, prendre le train fait aussi partie d’un voyage, et comme je vivais seule à Paris, j’avais besoin de sentir de l’animation. Je ne pouvais donc pas m’empêcher de penser aux voyages par train en Chine. C’est vrai que les wagons y sont souvent bondés et qu’ils ne sont pas aussi confortables que le TGV français. Mais tout le monde a l’impression d’être au sein d’une famille, puisqu’on y vit un voisinage assez rapproché avec les personnes du même compartiment. En Chine, personne ne s’étonne de voir des inconnus se parler à bâtons rompus, et il est tout à fait normal de se faire de véritables amis durant un voyage en train. Il y a même des gens qui y ont trouvé leur conjoint. Exagéré, croyez-vous? Pas du tout!

Priorité aux piétons

Dans les rues de Paris et d’autres villes de France, j’ai souvent remarqué que les conducteurs cèdent le passage aux piétons. J’ai même vu des conducteurs faire signe de traverser la rue à des piétons qui hésitaient à le faire. D’ailleurs, tous les véhicules s’arrêtent aux feux rouges, et donner la préséance aux autres est également chose courante entre conducteurs. À Paris, je ne craignais pas de traverser la rue; par contre, à Beijing, la situation est loin d’être pareille. Chaque fois que je veux traverser la rue, je dois faire preuve d’une grande prudence, même en empruntant un passage pour piétons, car il est possible qu’une voiture arrive en trombe. Les conducteurs sont très souvent pressés et facilement impatients; les conflits entre conducteurs se produisent fréquemment. Heureusement, tous, des autorités jusqu’au grand public, ont réalisé la gravité de ces problèmes, et des règlements stricts ont été mis en vigueur. Reste à les respecter et à les faire respecter…

Mes sources d’étonnement

Certes, même en France, tout n’est pas que du bonheur dans les espaces publics. Dans les rues de Paris, on doit faire très attention en marchant, parce qu’il y a des excréments de chien un peu partout. Il est évident que les maîtres n’ont pas bien accompli leur tâche. Par contre, ce qui est frappant, c’est que dans Paris, au petit matin, on peut entendre l’eau couler dans la rue pour la nettoyer.

Sur un autre plan, alors que j’étais contente d’entendre rarement klaxonner, le bruit assourdissant des motos me cassait les oreilles. À Paris, je n’aimais pas ces engins qui semblaient rouler plus vite que le vent et gronder plus fort que le tonnerre!

Finalement, bien que les Français témoignent de beaucoup d’égards envers les autres, à plusieurs reprises, j’ai vu des gens se moucher avec grand bruit en public; j’ai encore moins compris pourquoi ce geste était accepté au cours d’un repas. Je me suis renseignée auprès d’un Chinois résidant en France depuis des années, et celui-ci m’a confié que les gens trouvent cette action tout à fait normale, puisqu’ils utilisent toujours un mouchoir pour se couvrir le nez.

On récolte ce qu’on a semé

Gronder plus fort que le tonnere, voilà ce qui est excitant !

La Chine est un pays où règne l’étiquette, mais ses règles ne sont pas toujours les mêmes que celles que j’ai observées en France. Par rapport aux Occidentaux, les Chinois sont plus réservés et expriment peu leurs sentiments. Par exemple, lorsqu’un Occidental reçoit un cadeau, il l’ouvre tout de suite et il n’est pas avare de mots pour traduire son appréciation et ses remerciements. Pour sa part, très souvent, le Chinois dit poliment : « Je vous ai fait faire des dépenses », avant d’accepter le cadeau, et il ouvre rarement le cadeau sur-le-champ. Toutefois, en raison des échanges fréquents avec le monde extérieur, cette façon de faire est en train de changer.

Le Chinois dit simplement Merci pour exprimer ses remerciements alors que, selon mes observations, les Français font souvent suivre leur Merci de certains souhaits, comme Bonne journée. La première fois que j’ai acheté des tickets de métro à Paris, après avoir remercié, j’ai rapidement tourné les talons pour m’en aller, mais quelle ne fut pas ma surprise d’entendre dire Au revoir par la receveuse ! Dès lors, j’ai retenu que, selon la courtoisie française, il faut aussi dire Au revoir à un commis, en plus de le remercier, même si on sait que c’est la seule fois qu’on sera en contact avec lui.

Des Occidentaux venus en Chine disent souvent que les Chinois leur ont accordé un traitement spécial. Exactement! Pour les Chinois qui sont des gens hospitaliers, toute personne venue de l’extérieur est considérée comme un invité, et il est donc normal de l’accueillir de façon spéciale. Cela ne semble toutefois pas être le cas en France : quand j’y vivais, jamais je ne me suis sentie traitée différemment; j’étais comme tous les autres.

En somme, selon les traditions, les coutumes, le niveau d’éducation et bien d’autres facteurs, la manière de manifester sa courtoisie peut varier. Et dans n’importe quelle société, il existe des gens polis et impolis. L’expression chinoise Zhonggua Degua, Zhongdou Dedou (Si on a semé du melon, on récolte du melon; et si on a semé du soja, on récolte du soja) trouve son écho dans l’expression On récolte ce qu’on a semé. Sous cet aspect, si on traite les autres avec courtoisie, on sera aussi également traité de la sorte. En bref, si chaque individu fait des efforts pour se montrer courtois, cela contribuera, sans aucun doute, à l’édification d’une société harmonieuse, que ce soit en France ou en Chine.

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Éditeur : Édition La Chine au présent