SEPTEMBRE 2005

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Le seul mensuel multilingue d'intérêt général en Chine, publié en français, anglais, espagnol, allemand, arabe et chinois.

 

La commercialisation à la chinoise

TANG YUANKAI 

Les  réalisateurs de la cinquième génération de la fin des années 1980, qui étaient si manifestement indifférents au marché, constituent maintenant, fort ironiquement, avec les réalisateurs de la sixième génération fraîchement sortis de leur période contestataire, l’épine dorsale du cinéma commercial chinois.

Affiche publicitaire du film Hero.

On dit que les dernières générations de cinéastes chinois ont progressé peu à peu et ont adopté un nouveau rôle à cause de la pression de l’économie de marché. Par exemple, Zhang Yimou est devenu un géant de l’industrie quand son film Hero a battu des records au box-office avec des recettes de quelques centaines de millions de yuans.

« On n’avait pas besoin d’épargner l’argent, car on ne tenait jamais compte de la question du coût de production », a dit Zhu Dexiong, ex-vice directeur du Studio cinématographique de Beijing, en évoquant les débuts du cinéma en RPC.  Selon la présentation de Wu Tianming, ex-directeur du Studio de Xi’an : « Avant les années 1980, sous le système de l’économie planifiée, l’État avait le droit absolu sur la production et la vente des films. Le Bureau du cinéma relevant du ministère de la Culture assignait le quota de production annuel, le Bureau de la culture d’échelon provincial déterminait le plan de production annuel , et naturellement, on ne se faisait pas de soucis concernant la vente du film. » Wu Tianming travaillait au Studio de Xi’an en 1960, et en 1983, il a promu la réforme du système en tant que directeur, ce qui a grandement aidé des réalisateurs comme Zhang Yimou.

                       

Dans les années 1960 et 1970, les membres d’une équipe de tournage avaient un salaire fixe ainsi qu’un subside de quelques jiao (10 jiao= 1 yuan) par soirée. Les conditions de travail étaient loin d’être médiocres. Le soutien venait de toutes parts. Bon nombre de vétérans se souviennent du tournage de Soldats du peuple et de son réalisateur qui avait demandé deux tanks au conseiller militaire, alors que ceux-ci n’avaient pas été inscrits au budget. À 7 heures le lendemain matin, deux tanks étaient transportés par train spécial, en dépit de toute absence de mention au budget du film.

Le film est depuis toujours un divertissement populaire, et il occupe une place irremplaçable dans le cœur des gens. En 1979, le marché du film du pays a créé un record sans précédent : chaque personne avait visionné 28 films en un an, en dépit du peu de films projetés, ce qui se traduisait en 29,3 milliards de cinéphiles. Néanmoins, depuis une décennie, les recettes au box-office ont chuté de quelques centaines milliards de yuans à quelques dizaines milliards. Cela est dû en grande partie aux films étrangers. L’exode des spectateurs reflète également bon nombre de problèmes, dont la faiblesse du système de tournage, de financement et de distribution des films.

La réforme du cinéma chinois a commencé par la réforme du système de distribution, et le  coût commence à être une donnée non négligeable pour les studios d’État. En 1993, la Société de distribution et de projection du film de Chine a aboli le monopole de l’État sur l’achat et le marketing des films chinois. Les studios peuvent ainsi négocier directement le droit de distribution et la répartition des profits avec les compagnies locale. Les studios commencent la réforme du système intérieur. Le film peut recevoir des investissements autres que ceux de l’État, entre autres provenant de Hongkong et de l’étranger.

Depuis la dernière décennie, le cinéma chinois a connu de grands changements sur le plan des politiques : les entreprises privées ont acquis le même statut que les studios d’État. Le président de la compagnie Huayi  Brothers Film, Wang Zhongjun, a déclaré : « La plus grande différence entre un studio d’État et un studio indépendant se traduit par son terrain et sa localisation, ainsi que par ses avoirs accumulés au cours des décennies. Pour le reste, les deux sont semblables. » 

« Actuellement, le marché du film chinois est exploité de manière variée.  Certaines entreprises imitent le mode opérationnel de Hollywood, alors que d’autres explorent les voies du système à la chinoise qu’elles connaissent déjà. Par exemple, le film Shanghai Dreams a été primé au Festival de Cannes avant même de faire son entrée dans le marché intérieur, et les films du réalisateur non conformiste Zhang Yimou sont maintenant de l’or au box-office»,   estime Wang Zhongjun. Celui-ci conclut en disant :  « L’ouverture de l’industrie cinématographique dans le vrai sens du terme a accru son potentiel de façon marquée. »

Le réalisateur Chen Kaige, qui travaille actuellement à son nouveau film The promise, a exprimé également : « Nous avons pleine confiance dans l’industrie du film chinois, pour la simple et bonne raison que ses produits sont très aimés du public; le cinéma ne peut pas mourir.»