JUIN 2005

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Le seul mensuel multilingue d'intérêt général en Chine, publié en français, anglais, espagnol, allemand, arabe et chinois.

 

Poèmes choisis de Lisa Carducci

 

 

Lisa Carducci travaille pour Beijing Information. Née au Canada, elle a publié plus de trente livres (poésie, roman, nouvelle, essai) dont vingt-trois sur la Chine ou inspirés par la Chine où elle vit depuis 1991. Sa plus récente parution est Wo ai ni (Je t’aime), un recueil de 41 nouvelles d’amour chinoises aux éditions Adage (Canada). Précédemment a paru Ben mo dao zhi, chez Wenxue Chubanshe de l’Anhui (Chine), la version chinoise du roman Le Rideau jaune, publié en 2001chez Humanitas (Canada). Elle a aussi signé entre autres Propos d’une étrangère en Chine et Talking About China (Éditions en langues étrangères, Beijing), Grand comme le monde (en huit langues, China Intercontinental Press), Correspondance de Beijing 1991-1997 (XYZ, Canada), etc., pour ne parler que des œuvres en prose.

 

LE RIDEAU*

Deux femmes se tiennent debout devant toi. Deux femmes qui t’aiment.

Celle que tu as détachée de toi sait que l’autre t’aime. La seconde l’ignore.

Pourquoi fallait-il que cela soit?

À cause d’un rideau, jaune, la seule intimité dans un dortoir partagé en six.

À cause d’un rideau, une femme est allée vers toi.

Ou aima-t-elle ton rideau à cause de son amour encore inconnu?

Tout est arrivé, le possible et l’impossible. Tu l’as aimée aussi. Malgré.

Vous ne pouviez y croire, à  cause des pièges et des embûches.

Ni l’un ni l’autre, à cause d’eux, de tout.

Puis tu as osé le lui dire.

Puis tu as osé ne plus vouloir l’aimer.

Tu as réussi à le lui faire croire.

Elle n’a jamais posé la question. Tu lui avais appris à se taire.

À sauvegarder les illusions utiles.

Elle t’a proposé la simple amitié. Tu as accepté. Sans interrogations.

Enfin, tu as rencontré un amour possible. Elle a compris car elle savait déjà.

Il le fallait. Comme pour le rideau jaune.

Tu doses la peine et les ménagements.

Un rideau cache toujours quelque chose. Tu l’as enfoui dans un sac.

Le lui as donné enfin.

Maintenant, elle cherche ce qu’elle pourrait bien cacher derrière.

Tout est si clair.

*(1994. Ce texte était une étude préparatoire au roman Le Rideau jaune.)

 

CANARDS MANDARINS                (inédit)

Toi pirate, toi chamane

Prophète et totem

Entre tes mains suis porcelaine

M’épouse ton visage de jade

Canards mandarins

Enroulés dans draps de sable

Que nous emporte le vent

Que nous importe le vent