MAI 2005

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Le seul mensuel multilingue d'intérêt général en Chine, publié en français, anglais, espagnol, allemand, arabe et chinois.

 

 

 

II. Faits passés et commentaires

 

L’art peut-il engendrer la confusion?

En janvier dernier, la démonstration « Cape bleue » d’un artiste français sur la Grande Muraille a suscité des réactions bien diverses.« Cette démonstration peut-elle être comparée aux créations des artistes chinois? », s’est demandé la presse locale.

C'est une grande cape imperméable bleue sans impression. Rien d'extraordinaire à première vue. Pourtant, la magie artistique surgit lorsque douze personnes se glissent sous le vêtement déplié, la cape bleue émerge alors...

La forme ressemble à un épiphylle en fleur, tandis que les personnes sous la cape bleue paradant au tronçon Jinshanling de la Grande Muraille, au nord de Beijing, expriment la paix sur cette ancienne forteresse qui a autrefois repoussé les invasions.

Toutefois, la « fleur » se fane momentanément quand les artistes arrêtent de bouger.

« C'est mon monument éphémère vivant : un monument de paix et d'harmonie », déclare Nicola L., l’artiste français de 65 ans qui a dirigé la représentation, avec la participation volontaire de douze Chinois. « Ce que j'essaie de dire, c'est que des gens avec des cultures différentes et nés dans différents pays peuvent fumer le calumet de paix ensemble; Français ou Chinois, nous vivons tous sur la même planète. »

Un concept inspirant

L'idée que se fait cet artiste conceptuel de l’art du mouvement est bien loin de ce que peut comprendre Yu Lichun, un jeune vendeur de 29 ans à la Grande Muraille, qui a davantage l'habitude de regarder les monuments sous forme de statues concrètes, visibles et inébranlables, et érigées en mémoire d'un personnage illustre ou d'un événement.

« De l'art, ça? Je ne vois pas! » dit-il de la représentation. Pourtant, il apprécie le spectacle : « Il doit faire chaud à l'intérieur de cet immense imperméable », remarque-t-il.

Amusé par la remarque de Lu, Ling Fei, directeur de l'Association de promotion des cultures occidentale et orientale, basée à Paris, qui a co-organisé l'événement, estime que l'objectif était de donner au public chinois une idée de ce que peut être l'art conceptuel français. « Cet art n'est pas fixe, comme la peinture et la sculpture, explique-t-il, il souhaite véhiculer une idée ou un concept au spectateur qui rejette la création ou l’appréciation d’un objet d’art traditionnel comme une marchandise précieuse. »

Nicola veut diffuser son idée de la paix et de l'harmonie. Un des participants chinois admire la grande cape bleue, se voulant une association de calme et de paix, face à la Grande Muraille, un vestige de protection guerrière, les deux néanmoins en harmonie en dépit de leur contraste.

Zhang Dong, un artiste de 40 ans qui travaille dans l'art du spectacle en Chine depuis des décennies, y décèle autre chose : « L’art du spectacle, qui a émergé en Occident dans les années 1960, est l’expression créatrice d'un artiste qui a différentes significations selon les spectateurs », dit-il.  Ainsi, la forme dépend de la présentation de l’artiste. La première fois que la Cape bleue a été présentée, c’était en France, en 1961, par un homme qui avait sauté d’une tour en étirant les bras dans un geste symbolique de paix.

Ayant commencé sa carrière d'artiste en utilisant des habits géants dès 1969, Nicola a commencé sa série Cape bleue en juillet 2000 et a effectué une tournée avec ce numéro dans de nombreux endroits du monde, dont La Havane, Venise, Genève, Los Angeles; et toujours, des gens de l’endroit ont pris part volontairement à sa création.

Dans tous les lieux, Nicola demande aux participants les mêmes questions : Quels sont les grandes personnalités de l'année, les événements les plus marquants? « En faisant cela, dit-il, je veux savoir ce que les gens pensent dans les différents pays que je traverse, je veux savoir ce qui se passe dans le monde.»

Et les créations chinoises?


Zhang Dong observe que les artistes chinois qui pratiquent cette forme d’art qui ne s’est pas vraiment épanouie avant les années 1980, mettent trop l’accent sur les problèmes qu’ils rencontrent. Les artistes sont des êtres sensibles et leurs peines sont incarnées dans leurs œuvres. En d’autres mots, ils se servent de l’art pour exprimer leur douleur. Selon Zhang, beaucoup ont même cessé de pratiquer ce type d’art.  Parfois encore, leurs œuvres sont trop graphiques ou trop obscènes. Une fois, un homme avait enduit son corps de miel et s’était promené nu pendant deux heures dans des toilettes publiques en attendant que des mouches se collent à son corps. D’autres embauchent des gens pour qu’ils les frappent jusqu’à ce que le sang coule, et d’autres encore brûlent leur numéro d’identité dans leur dos. Chen Lusheng, un artiste de peinture traditionnelle chinoise de l’Institut chinois de recherche artistique, qualifie cette conduite d’« extrémiste et de non artistique ». Selon le critique d’art Ding Mu : « D’autres artistes modernes ont l’intention d’illustrer leur rébellion de manière excentrique; dans ce contexte, leurs œuvres cherchent davantage à attirer l’attention sur leur propre personne. » Selon un sondage effectué par Internet, 47,4 % des participants ont qualifié ce type de comportement comme une mauvaise conception de l’art. Pour sa part, Zhang Dong espère que la Cape bleue soit une source d’inspiration pour les artistes. Ce type d’art ne doit pas être sensationnel, mais esthétique et plaisant.

Vive la différence française!

 

En mars, la créativité française a été vraiment à l’honneur. En plus du couturier Christian Lacroix qui a amorcé sa tournée en Chine dans un nouveau blitz de couleurs et de styles, s’est tenue la rétrospective de la Cinémathèque française. Celle-ci regroupait 41 films français classiques et contemporains et a été présentée à Beijing à la Cinémathèque chinoise.

En effet, en 2005, la Cinémathèque française a répondu à l'invitation des cinémathèques de Beijing, Shanghai et Hongkong, et présente depuis janvier dans ces trois villes une sélection d'une quarantaine de films classiques du cinéma français. « La Cinémathèque chinoise tient beaucoup à cet échange cinématographique sino-français. Depuis environ 20 ans, notre cinémathèque introduit sans cesse des films au public chinois, et j'espère que cette manifestation sera couronnée de succès », a déclaré Chen Jingliang, directeur de la Cinémathèque chinoise, lors de la cérémonie d'ouverture de cet événement.

L'ouverture de cette rétrospective à Beijing a attiré beaucoup de cinéphiles chinois, avec la projection de Jacquot de Nantes d'Agnès Varda, âgée de 82 ans, qui était venue spécialement pour l’occasion.

« Cette rétrospective est pour nous l'occasion de présenter au public chinois l'extraordinaire diversité de la création cinématographique française en une quarantaine d'œuvres qui vont des débuts du cinéma jusqu'à nos jours », a indiqué Philippe Guelluy, ambassadeur de France en Chine. « Par cette rétrospective, nous voulons également, au-delà de l'aspect esthétique, démontrer le caractère indispensable pour le patrimoine mondial d'une création diversifiée, autonome et accessible à différentes sensibilités, qui soit le réel exemple de ce que la diversité culturelle doit être dans les faits », a conclu l'ambassadeur. (Xinhuanet)

Lors de louverture de la rétrospective