DÉCEMBRE 2005

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Le seul mensuel multilingue d'intérêt général en Chine, publié en français, anglais, espagnol, allemand, arabe et chinois.

 

La ville ancienne de Pingyao


Fondée au XIVe siècle, Pingyao est l’exemple d'une ville chinoise traditionnelle des Han dans un état de conservation exceptionnel. Son tissu urbain montre l'évolution des styles architecturaux et de l'urbanisme dans la Chine impériale durant plus de cinq siècles. Les imposants bâtiments liés aux opérations bancaires y sont d'un intérêt particulier; ils étaient en effet la raison pour laquelle Pingyao était le centre principal de toute la Chine aux XIXe et début XXe siècles -Comité du patrimoine mondial, Unesco. Ce site a été inscrit en 1997 au patrimoine culturel mondial.

Pingyao est une ville ayant une histoire de 2 700 ans. Elle est située au centre de la province du Shanxi, à 90 km au sud de la ville de Taiyuan, la capitale provinciale. La ville a été édifiée de 827 à 782 av. J.-C., alors gardée militairement par Yin Jifu de la dynastie des Zhou de l’Ouest. Depuis le « système de la province et du district », appliqué par l’empereur Qin en 221 av. J.-C., la ville a toujours été le siège du district. En dépit des nombreux événements et incidents, elle est restée à peu près intacte, comme il y a 600 ans, sous les dynasties des Ming et des Qing. C’est la seule ville de cette époque en bon état de conservation en Chine. Près de 4 000 maisons traditionnelles à cour carrée de gens ordinaires, dont 400 pratiquement intactes, ont pu y être conservées. De plus, il y a quelques maisons que l’on affectionne encore davantage, dont certaines de la dynastie des Ming et même de rares exemples de la dynastie des Yuan (1279-1368). Ces habitations sont typiques de la Chine du Nord et de la province du Shanxi et présentent les caractéristiques suivantes :

1. Combinaison parfaite de l’habitation troglodytique et de la maison à cour carrée;

2. Disposition en rectangle avec un espace clos, mais raffiné;

3.Toit plat pour la plupart;

4. Cour imposante dans l’ensemble, mais élégante à l’intérieur;

5. Respect strict des principes de la géomancie chinoise de même que d'autres coutumes.

Survie de la ville ancienne

La manière dont la ville a survécu si parfaitement et est parvenue à gagner la reconnaissance du patrimoine mondial est une histoire tout à fait saisissante. Après la chute de la dynastie des Qing, le centre économique de la Chine s’est déplacé vers l'est, et la ville a alors sombré dans l’oubli. Jusqu'en 1949 et les années suivantes, peu de nouveaux bâtiments avaient été ajoutés. Cependant, à partir de 1981, toute la nation cherchait un développement économique rapide et la ville était également prête pour un réaménagement. Le plan était de se débarrasser de certains bâtiments anciens, tels que la tour de la Ville, pour céder la place à des rues et avenues larges. Par hasard, la proposition de réaménagement et d’expansion a été lue par le Pr Ruan Yisan du Collège de planification de l'architecture de l'université Tongji. Il a immédiatement signalé que Pingyao était une ville ancienne ayant une histoire et une culture qui devaient demeurer intactes et être préservées. Les projets de réaménagement et d'expansion ont donc été déplacés vers un nouvel emplacement, et la vieille ville a survécu. D’où le dicton selon lequel la ville a profité d’un « arrêt de mise à mort! »

En 1986, le Conseil des affaires d’État a déclaré la ville comme ville historique et culturelle d’échelon national, et en décembre 1997, l'Unesco l'a inscrite sur la liste du patrimoine mondial. Selon son évaluation, « la ville ancienne de Pingyao est un exemple exceptionnel d'une ville chinoise des Han des dynasties des Ming et des Qing (1368-1911) ayant gardé toutes ses caractéristiques à un degré exceptionnel, et ce faisant, a fourni une image remarquablement complète du développement culturel, social, économique et religieux pendant l'une des périodes les plus cruciales de l'histoire chinoise. »

Panorama de la ville

Pingyao est également surnommée la Ville tortue parce qu’elle en épouse un peu la forme. Elle couvre 2,25 km2 et est encerclée par un mur d’enceinte de plus de 600 ans qui la surplombe entièrement. Ce mur, fabriqué de briques ultralarges, est en bon état de conservation, et une tour de guet monte la garde à chacun de ses quatre coins.

Le centre de Pingyao est la tour de la Ville. Pingyao se compose de quatre rues principales, huit rues transversales et de 72 ruelles Youyan, selon le modèle des huit diagrammes. Sa rue Nandajie est l'axe le long duquel sont arrangés de façon symétrique le temple du Dieu de la ville, et juste en face, l’ancien bureau de district; puis, on trouve le temple de Confucius et le temple Wudao, ainsi que des temples taoïstes et des temples bouddhiques. C’est une concrétisation parfaite des rituels chinois, ancêtres à gauche et terre à droite, symétrie des temples et des tombeaux et harmonie de la littérature et du militaire. L’intersection des rues de l'Ouest (Xi), de l'Est (Dong), du Nord (Bei), et du Sud (Nan) avec la rue du Bureau de district forment le quartier commerçant de la ville. Cette disposition urbaine reflète non seulement l'idéologie de « gouverné par l'homme et par Dieu » et l’« intégration du confucianisme, du taoïsme, et du bouddhisme », mais également la prospérité des affaires commerciales.

Les maisons anciennes de la ville ont toutes une cour carrée. Elles sont construites en brique bleue et leur toit est en tuiles grises; elles sont alignées symétriquement sur un axe dont la division est évidente entre le principal et le subalterne, l’extérieur grandiose et l'intérieur élégant.

Le mur d’enceinte de la ville ancienne. Il a été construit sous le règne du roi Xuan (827-782 av. J.-C.) des Zhou de l’Ouest. Tel qu’on le voit aujourd'hui, ce mur de terre battue est protégée à l’extérieur par des briques; il est caractéristique des murs d’enceinte des villes durant les Ming. Il mesure 6 km de long et environ 10 m de haut; il a 8 à 12 m d’épaisseur dans le bas et 2,5 à 6 m au sommet. Il a une porte à l'ouest et une autre à l'est, mais en a deux au sud et deux au nord. Cette structure a valu à la ville son surnom de « Ville tortue », et chacune des six portes a une signification symbolique : la tête, la queue et les quatre pattes. Une douve encercle l’extérieur du mur d’enceinte, et la seule façon d’y entrer ou d’en sortir était par le pont-levis à chaque porte. Ce mur a été construit solidement et scientifiquement, et très souvent dans sa longue histoire, il a réussi à bloquer les envahisseurs, les rebelles ou les bandits. Dans les temps modernes, Pingyao était le centre financier le plus développé de la Chine, et de nombreux marchands fortunés s’y étaient rassemblés. Leurs richesses ont survécu aux innombrables désastres grâce au solide mur d’enceinte et à ses gardiens courageux. En 1977, la ville a été menacée par une inondation due à la rupture d'un réservoir, et encore là, le solide mur d’enceinte de la ville a gardé l'eau à l’extérieur; les ancêtres qui ont construit ce mur ne s’attendaient sûrement pas à ce qu'il assure une protection aussi parfaite contre une inondation.

La rue commerçante des dynasties des Ming et des Qing. On fait ici référence à la rue Nandajie, le centre et l’âme de la ville, ainsi que le berceau des marchands du Shanxi. Tout le long de cette rue de 450 m étaient rassemblés 78 magasins ou sociétés, pour la plupart des banques de traite et des marchands connus à la grandeur du pays depuis des générations. De nos jours, sur cette rue, on trouve principalement des antiquaires, des auberges ou des restaurants.

La tour de la Ville. C’est l’architecture la plus exceptionnelle traversant la rue Nandajie : 18,5 m de haut, trois corniches, un pignon et un toit retroussé en tuiles vernissées colorées. On ne sait pas quand la tour a été construite, mais cela fait une éternité que le mur d’enceinte et la tour de la Ville sont les symboles de Pingyao. Le « Puits doré près de la tour de la Ville » est toujours l’un des huit sites principaux. De ses marches de brique jusqu’à ses portiques, la vue est vraiment spectaculaire.

L’exposition d'articles utilisés par les banquiers de traite. Dans une maison de la rue Nandajie, on a exposé des meubles et d’autres articles des riches banques de traite, allant des lits, tabourets et miroirs aux livres, peintures, et autres articles moins essentiels. Il n'est pas difficile de concevoir leur luxe.

La nourriture traditionnelle de Pingyao. Le magasin de médecine chinoise traditionnelle Yunjincheng, au milieu de la rue Nandajie, est le seul marchand d’aliments traditionnels de Pingyao. Dans les dynasties des Ming et des Qing, l'économie commerciale de Pingyao était très vigoureuse. Quand les marchands allaient à l’extérieur, ils apportaient leur nourriture traditionnelle et rapportaient à la maison la nourriture d'élite des autres régions. Par conséquent, la nourriture locale traditionnelle de Pingyao est imprégnée des caractéristiques de celles d’autres régions. Elle maintient toutefois ses propres caractéristiques, particulièrement celle d’une nourriture à base de farine de grains entiers.

Le Musée de l'art de la laque. Installé dans l'ancien magasin Yonglong, c'est le premier musée de la sorte en Chine. Il fournit une introduction complète et systématique des variétés et du développement des articles de laque à Pingyao.

Le Musée Tianjixiang. C'est l'ancien magasin de soies Tianjixiang, renommé pour ses cours et ses meubles de luxe. Les objets exposés se concentrent sur les meubles en bois des dynasties des Ming et des Qing, en plus des porcelaines anciennes, des calligraphies et des peintures.

Les banques de traite et les maisons de change. Durant les dynasties des Ming et des Qing, les marchands du Shanxi ont connu leur apogée. Ainsi, durant le règne de l’empereur Qianlong (1736-1795), il y avait plus de 100 magasins de sel tenus à Yangzhou (Jiangsu) par les marchands du Shanxi, ce qui constituait un capital de pas moins de 70 à 80 millions de taels d'argent, alors que le Trésor national était d’environ 70 millions durant cette période prospère. Par conséquent, les marchands du Shanxi étaient vraiment aussi riches que l'empire.

Berceau des banques de traite de la province du Shanxi, Pingyao regroupait la plupart d'entre elles. De ce fait, la ville a joué un rôle important dans le développement financier de la Chine. Vers la fin du XIXe siècle, cette ville s'était hissée au rang des villes les plus avancées de Chine sur le plan financier, et pour une fois, gouvernant même les finances de la nation. C'est pourquoi les gens considèrent souvent Pingyao et ses districts voisins – Qixian et Taigu – comme le « Wall Street de la Chine ». La banque de traite la plus réputée de Pingyao est Rishengchang, l’ancêtre des banques chinoises. C'était au départ la teinturerie de la famille Li, du village de Dapu, à Pingyao. En 1823, elle s’est transformée en banque de traite, effectuant des opérations bancaires de remise. Durant ses plus de 100 ans d’exploitation, elle a eu des succursales dans 35 villes du pays, de même qu'un certain nombre outre-mer.

Rishengchang. Le nom de cette banque suggère : « la prospérité à chaque lever de soleil ». Son siège, un bâtiment typique du Shanxi, est situé au sud de la rue Xidajie et occupe 1 400 m2 dans une série de cours renfermant 21 bâtiments. La partie avant de la cour centrale comprend le comptoir de service, la salle de correspondance et la salle de comptabilité. Pour sa part, la partie arrière sert à l’accueil, comme résidence des invités; un couloir sépare et relie les deux parties. Dans la cour est, on trouve la résidence des commis et des domestiques, la cuisine et les entrepôts. Le bâtiment abrite maintenant le Musée des banques de traite, et il est meublé comme il l’était en ce temps-là, ce qui fournit un témoignage réaliste et concret des banques du Shanxi à Pingyao.

Baichuantong. Par ce nom, la banque prétendait que ses services couvraient autant que cent vallées. Ouverte en 1860 par trois familles Qu du district de Qixian, la banque est située au 109 de la rue Nandajie. Ses affaires ont cessé en 1918, alors qu’elle a été frappée par une crise financière. Plus tard, Rishengchang a acheté la maison et y a ouvert une succursale. La banque couvre plus de 1 000 m2 avec ses 72 salles. Le bâtiment abrite maintenant le Musée des meubles des hommes riches de la province du Shanxi et expose des meubles anciens en bois, des porcelaines et des antiquités, de même que des calligraphies et des peintures. Ce sont tous des témoignages de la vie de luxe de ces marchands du Shanxi.

Le temple du Dieu de la ville. Ce temple est situé sur la rue du même nom et fait face à l’ancien Bureau de district. Cet arrangement de « dieu de la Ville à gauche et ancien Bureau de district à droite » se conforme au concept traditionnel de « cogouvernance par l'homme et Dieu ». D'abord construit durant la dynastie des Ming, ce temple a été endommagé et reconstruit encore et encore, et sa version actuelle est une reconstruction de la dynastie des Qing dans le style de cette époque. Il couvre plus de 7 300 m2. Le temple est bien connu pour son excellente décoration vernissée, de même que pour ses peintures murales et sculptures sur bois de la dynastie des Qing.

L’ancien Bureau de district. C'est le plus grand et le plus imposant complexe de bâtiments de la ville ancienne; il occupe 20 000 m2 et est l’un des très rares vestiges intacts d’un ancien bureau de gouvernement en Chine. Sa date de construction est incertaine, mais on croit que le Bureau se trouve ici depuis la fondation du district. Les visiteurs ne peuvent rater de visiter ce bâtiment, parce qu’il offre une bonne occasion de comprendre la structure et les méthodes de travail d'un gouvernement local dans la Chine ancienne.

Le Temple de Confucius. Ce temple de la littérature se trouve au sud du temple du Dieu de la ville et est composé de trois groupes de bâtiments. Son style est sans contredit celui de la dynastie des Song, et c'est le seul prototype de son genre en bon état de conservation parmi les temples de Confucius en Chine.

Les cours carrées traditionnelles. Les maisons traditionnelles des gens ordinaires sont un constituant important de la ville. Il y en a actuellement 3 797, dont plus de 400 sont bien préservées. Durant les Ming et les Qing, comme beaucoup de marchands du Shanxi étaient très riches, la première chose importante qu'ils désiraient faire était de revenir chez eux pour construire une maison ou un temple afin d'honorer leurs ancêtres ou faire un don à leur ville natale. Par conséquent, ils ne s’inquiétaient jamais de l'argent à dépenser pour leur maison familiale. Ainsi, ces maisons ont été construites de façon tellement minutieuse, durable et pratique, que les gens locaux y vivent encore. Les maisons traditionnelles de Pingyao remontent pour la plupart à cette époque.

L’ancienne maison de la famille Ji. Située sur la rue Zhanmadao, cette maison est également appelée la tour Qifeng (tour du Perchoir du phénix). Les Ji étaient une famille noble de Pingyao, et le résident actuel de la maison est le 22e descendant de la famille. La maison a été construite durant la dynastie des Yuan (1279-1368). Des spécialistes avaient été invités pour la concevoir en conformité avec les cinq éléments et les huit diagrammes. Les différents styles des dynasties des Yuan, des Ming, et des Qing peuvent être observés dans la maison actuelle.

Le temple Shuanglin et le temple Zhenguo. Les deux temples sont situés en dehors de la ville de Pingyao. Le premier est célèbre comme la « maison des figurines d'argile peintes ». Pour sa part, le temple Zhenguo est réputé pour sa salle en bois de 10 000 bouddhas qui a survécu des millénaires et tient toujours le coup. C’est une merveille de l'architecture chinoise antique.

Le temple taoïste Qingxu. C'est le plus grand temple taoïste à Pingyao. Il a été construit en 657. Le petit-fils de Wang Chongyang, fondateur de la secte taoïste Quanzhen (Réalité totale) a été autrefois le maître du temple, et les fidèles y affluent toujours aujourd’hui. Le temple est maintenant le Musée du district. Y sont exposées des reliques culturelles et des œuvres d'art de Pingyao des 3 000 dernières années. Parmi les objets exposés,la vingtaine de statues en bois de la dynastie des Ming sont particulièrement précieuses pour l'étude de la sculpture sur bois de la Chine ancienne et du développement du taoïsme.