08/ 2005

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Le seul mensuel multilingue d'intérêt général en Chine, publié en français, anglais, espagnol, allemand, arabe et chinois.

 

Chaque mois à partir de ce numéro, vous pourrez découvrir avec nous les splendeurs des sites chinois du patrimoine mondial de l’Unesco. À ce jour, ces 29 sites couvrent dix catégories, allant des palais, autels et temples, mausolées, ouvrages militaires de défense, cités antiques et villages anciens, aux jardins classiques, bâtiments religieux et sites primitifs, jusqu’aux montagnes, fleuves et ouvrages anciens d’ingénierie. À travers ce patrimoine, c’est la caractéristique essentielle de la civilisation chinoise qui s’offre dans toute son intégrité : une combinaison parfaite entre culture et nature. -N.D.L.R.

Le complexe de bâtiments anciens du mont Wudang

Les palais et temples qui constituent le cœur de ce complexe de bâtiments séculaires et religieux forment une réalisation architecturale et artistique exemplaire de l'époque des dynasties chinoises des Yuan (1279-1368), Ming (1368-1644) et Qing (1644-1911). Les flancs du mont Wudang et ses vallées panoramiques abritent ce site qui fut construit en tant qu'ensemble organisé pendant la dynastie des Ming et qui comporte également des bâtiments taoïstes datant du VIIe siècle. L'ensemble représente l'apogée de l'architecture et de l'art chinois sur une période d'environ un millénaire. Ce site a été inscrit au patrimoine culturel en 1994.

-Comité du patrimoine, Unesco

 
  Le pic Tianzhu sous la neige.

Le mont Wudang, aussi appelé mont Taihe de l’Harmonie Suprême est un site taoïste bien connu en Chine. Il se dresse à Danjiangkou, ville de Shiyan, province du Hubei; le vaste réservoir de Danjiangkou est situé devant lui, et derrière, la réserve forestière de Shennongjia vient s’y fondre. Le point le plus haut est le pic Tianzhu (Pilier du Ciel) qui culmine à 1 612 m au-dessus du niveau de la mer. Soixante-douze sommets, 36 falaises, 24 vallées, des grottes, des étangs, des sources, des puits et des terrasses forment un panorama grandiose qui vaut le détour.

Un mont féerique parsemé de temples impériaux

Les origines du taoïsme, religion indigène de la Chine, remontent à Lao Zi et à Zhuang Zi, avant la dynastie des Qin (221-207 av. J.-C.), mais c’est surtout à partir de la dynastie des Tang (618-907) que la plupart des empereurs s’efforcèrent de soutenir le taoïsme, centré au mont Wudang. Durant les Ming, ce mont est devenu le centre national du taoïsme et s’est vu conférer le titre de « montagne noble dirigeant le monde ». Au cours des siècles, bon nombre de personnalités s’y sont réfugiées en ermites, et d’innombrables visiteurs et pèlerins y sont venus chaque année.

Le complexe architectural de grande envergure qu’on trouve au mont Wudang a été planifié par l’empereur lui-même, et sa construction a été supervisée par des fonctionnaires impériaux qu’on avait assignés spécialement à cette tâche. L’emplacement des bâtiments a été fixé selon les principes de la géomancie. Le complexe est grandiose et majestueux, avec ses huit palais principaux entourant le sommet Doré. Étant donné que le taoïsme professe l’unité du Ciel et de l’Homme et le tao, le complexe de bâtiments respecte au mieux la topographie originale du mont Wudang. On trouve une variété de types de bâtiments, et les matériaux utilisés ont été pris sur place pour l’essentiel. La structure, les décorations et le mobilier sont très raffinés et reflètent non seulement l’avancement de la technologie et de l’art architectural, mais également la conception élaborée : des bâtiments exceptionnels dans un mont féerique.

Il y a des bâtiments des dynasties des Yuan, des Ming et des Qing, mais les mieux préservés sont ceux des Ming et on en compte plus de 200 couvrant une aire d’environ 1 km2. Les vestiges religieux dans les temples et les palais jouissent d’une réputation qui dépasse les frontières du pays. Il y a 1 486 statues en bronze, en fer, en bois ou en pierre, dont près de 1 000 remontent aux périodes d’avant les Ming. On trouve 409 gravures rupestres sur les falaises escarpées et 682 objets sacrificiels, peintures et classiques taoïstes. Tous ces artefacts forment autant de scènes culturelles.

De plus, le mont Wudang est également le berceau du kung-fu Wudang, un art martial dérivé du taoïsme de Wudang et l’une des principales écoles d’arts martiaux de Chine.

 
  La salle Dorée sur le pic Tianzhu, construite au XVe siècle, est un bâtiment recouvert de bronze qui imite les édifices en bois.

Un mont sacré

Le mont Wudang est considéré comme le berceau du noble dieu Xuanwu. Dans la mythologie chinoise, les quatre directions (nord, sud, est, ouest) sont toutes gardées par des dieux, notamment le dragon vert, le tigre blanc, le phénix rose et Xuanwu, le serpent-tortue. Xuanwu est responsable du nord, et les anciens l’ont illustré en un serpent et une tortue entrelacés. Selon les Écritures merveilleuses de l’illustration suprême du noble Xuanwu, compilées par Fang Tianzi des Song (960-1279), le noble patriarche suprême du taoïsme, incarné en serpent-tortue, se serait un jour incarné dans le monde des humains en tant que bébé de l’impératrice Shansheng du royaume de Jingle. Une fois grand, ce prince n’aurait manifesté aucun intérêt pour la couronne, mais se serait plutôt consacré au tao. À 15 ans, il aurait dit adieu à ses parents pour se consacrer, pendant 42 ans, à la méditation au mont Taihe avant de devenir dieu. Pour commémorer ce prince, le mont Taihe a été rebaptisé Wudang. Au fil des ans, le statut de Xuanwu s’est élevé et les empereurs de l’époque lui ont conféré des titres sacrés. C’est ainsi que le mont Wudang a finalement formé une école taoïste qui se caractérise par la vénération du dieu Xuanwu. C’est durant le règne de Zhu Di, empereur Chengzu des Ming que le taoïsme de Wudang a connu son apogée.

 
  Un moine taoiste fait ses exercices devant la salle Zixiao.

Le taoïsme de Wudang prône une discipline stricte et l’alchimie de l’élixir interne. Cela signifie que quelqu’un doit utiliser son corps comme brûleur pour raffiner son énergie vitale, son qi (force vitale) comme médicament brut et son shen (esprit) comme combustible. Une fois que les trois sont bien combinés, ils forment la pilule dorée du médicament sacré, en d’autres mots, ils ont obtenu la révélation parfaite permettant l’immortalité. Mais pour atteindre cet objectif, le dévot taoïste doit être bienveillant, loyal, fidèle, filial et persister dans la vertu. Il doit suivre le tao.

Le kung-fu de Wudang est également appelé kung-fu interne; il a été mis au point comme méthode d’autodéfense et de protection de la santé. Ce kung-fu prône la pratique, mais pas la démonstration, ce qui élève l’art martial dans la sphère idéologique. On dit que Zhang Sanfeng, maître fondateur du kung-fu de Wudang durant la dynastie des Song, aurait été inspiré par une lutte entre une grue et un serpent qu’il aurait adapté pour établir les treize postures du tai-chi-chuan.


Les sites d’intérêt

Au mont Wudang, les touristes peuvent découvrir six zones de sites. Effectuer le trajet total de ces sites équivaut à parcourir quelque 100 km.

1. Zone du portique du Mont noble. Cette zone se situe au pied nord-est du mont Wudang. L’itinéraire compte quelque 6 km et l’altitude est de 200 m. Les sites principaux sont le couvent Chongxu, le portique du Mont noble, le palais des Sages Rencontres, le temple Yuanhe, le temple du mont Tai et le palais Céleste de jade. La salle principale du palais des Sages Rencontres, qui a été rasé par le feu en janvier 2003, était la plus typique des salles bien conservées des Ming. C’était un site sacré où se rassemblaient les adeptes du kung-fu de Wudang. Le temple Yuanhe revêt une signification bien particulière. Sous les Ming, c’était la seule « prison » de Chine pour les moines taoïstes qui défiaient l’autorité.

2. Zone du versant du Prince. Cette zone va du sommet de l’Empereur de jade au pic Céleste de jade. L’itinéraire couvre environ 15 km et son altitude varie de 400 à 500 m. Ses sites principaux sont le temple Huilong, le couvent du Retour de la vérité, le puits de la Meule de l’aiguille, le temple de Guan Yu, le pic du Patriarche suprême, le temple de la Révélation, le pont de la rivière de l’Épée, les 18 coudes et le pic Céleste de jade. La caractéristique de cet itinéraire, c’est qu’il est agencé selon l’ordre de l’expérience du prince, avant qu’il devienne dieu. Mais la plupart de ces endroits sont périlleux et demandent beaucoup d’efforts. Le groupe de bâtiments qui abrite le temple de la Révélation forme le complexe architectural taoïste le plus exceptionnel du mont Wudang. Ce complexe a été construit en 1412, et 20 bâtiments se dressent encore aujourd’hui. Devant, on trouve la tour des Cinq Nuages où une colonne unique supporte 12 poutres du toit. Le pic du Patriarche suprême abrite la seule grotte gravée du mont Wudang. On y trouve des écrits rares et précieux pour l’étude de la religion de Wudang. La route vers le pic Céleste de jade serpente dans une gorge le long de la rivière de l’Épée. C’est le plus beau paysage naturel du mont Wudang. Certains l’ont décrit comme un « abysse de 10 000 m ».

3. Zone du pic du Sud. Cette zone est sise de 700 à 1 000 m et offre des paysages naturels étonnants. On peut y voir le palais de l’Empyrée pourpre. Construit de 1119 à 1125, ce palais est le plus grand des huit palais taoïstes intacts du mont Wudang. Le complexe regroupe 29 bâtiments. Le bâtiment principal est la salle du Ciel pourpre, la structure en bois la plus représentative du mont. C’est là que les taoïstes priaient pour obtenir des bénédictions en faveur de la famille impériale. Il est donc particulièrement élégant. Il y a aussi le palais du Pic du Sud. C’est là que les constructions et le paysage naturel sont les mieux intégrés. Le palais est situé en bordure de la plus grande faille du mont Wudang, et ses bâtiments semblent être suspendus au bord de cet abysse. Dans le palais du Pic du Sud, on peut voir le célèbre brûle-encens « tête de dragon », une sculpture dans la roche, suspendue au-dessus de l’abîme. La tête a 3 m de long et 0,55 m de large. Selon les légendes, le dieu Xuanwu aurait chevauché ces animaux célestes. C’est pourquoi, autrefois, les dévots taoïstes voulaient brûler de l’encens « tête de dragon » pour montrer leur piété. Pour ce faire, ils devaient ramper jusqu’à la tête du dragon, suspendue au-dessus de l’abîme, pour allumer une tige d’encens, puis revenir à leur point de départ sans avoir l’espace nécessaire pour se retourner. Une petite inattention risquait de leur coûter la vie! En 1673, l’empereur Kangxi a interdit cette pratique. Le palais Taiyi Zhenqing constitue le plus grand groupe de constructions en pierre du mont Wudang.

4. Zone du sommet Doré. Les bâtiments de cette zone sont situés à une altitude qui va de 1 300 à 1 600 m. Ce sont les joyaux du mont Wudang, le meilleur endroit pour apprécier la magnificence et les mystères de cette terre céleste, l’héroïque ambition de dominer toute la nation de cet endroit et le panorama des 72 cimes. Sur le sentier vers le sommet Doré, on trouve la grotte du Dragon jaune. Celle-ci est étroitement liée à la médecine de Wudang. Selon un dicton : « Neuf taoïstes sur dix sont adeptes de la médecine ». En effet, la montagne abonde en herbes médicinales, dont plus de 800 ont été enregistrées dans le Compendium Materia Medica comme célèbres et rares. Le palais Taihe, construit en 1412, regroupe 20 bâtiments bien conservés. Lorsqu’il a été construit, l’empereur Chengxu a immédiatement conféré au mont Wudang le titre de « Grande montagne de l’harmonie suprême », ce qui a rangé le mont au premier rang des monts taoïstes du pays. Le palais est un bel exemple d’une construction qui a su tirer parti de la topographie. L’emplacement particulièrement périlleux ajoute à la solennité et à la grandeur du temple. Le Palais doré est bâti au sommet du pic du Pilier céleste. Il est le symbole du mont Wudang. Toutes les parties de ce palais ont été moulées à Beijing et expédiées par voie fluviale vers la préfecture de Junzhou, avant d’être transportées à force d’hommes vers le pic du Pilier céleste, et assemblées. C’est un bâtiment ancien digne d’une conception impériale. La salle principale est moulée en bronze et recouverte de 60 kg d’or. Sa structure imite le bois, et toutes les parties sont assemblées selon le principe des tenons et mortaises. Après plus de 600 ans, ce palais brille encore de tout son éclat. Devant, sur la falaise, on peut voir 300 marches en pierre, et au bas, une muraille d’enceinte de 1,5 km. Le pic Doré est la scène de quelques merveilles naturelles. Ainsi, on dit que le palais n’a jamais été touché par la foudre, bien que les flammes des éclairs pointent ici et là lors des gros orages, et l’intérieur n’a jamais subi de dommages par la pluie ou le vent; au printemps, d’énormes volées d’insectes volent vers le pic Doré, tombent et y meurent formant une accumulation de plus de 30 cm.

5. Zone du palais des Cinq Dragons. C’est un autre itinéraire pour se rendre au sommet Doré. On y trouve de magnifiques forêts et des chutes d’eau. Le palais des Cinq Dragons, construit au VIIe siècle, est le plus ancien bâtiment du mont Wudang et est surnommé le berceau du taoïsme.

6. Zone du temple de la terrasse Qiong. Ce temple est situé à 8 km au sud-est du pic du Pilier céleste. C’est le temple le plus vaste des 36 temples taoïstes du mont Wudang. Il est composé de trois bâtiments, mais un seul est bien préservé encore aujourd’hui.


Conseils pour la visite

Transport : Règle générale, les visiteurs se rendent au mont Wudang par train, habituellement à partir de Wuhan, ou par autocar. Les gares les plus proches sont celles de Wudangshan, Liuliping et Shiyan. Une route panoramique de quelque 25 km part de l’entrée principale de la montagne, près de la route Han-Shi. Comme il y a beaucoup de sites et qu’ils sont disséminés, on recommande aux visiteurs de monter à bord d’un minibus nolisé partant de la commune de Wudangshan. Il y a aussi un téléphérique assurant le transport du pic du Sud au sommet Doré, car la route est difficile et abrupte.

Hôtels : Il y a quelque 100 hôtels, restaurants et auberges près de Wudangshan. C’est la zone du pic du Sud qui en regroupe le plus.

Tabous : Au mont Wudang, les bâtiments taoïstes servent au culte des dieux. Les visiteurs ne doivent pas pointer les statues du doigt, et il vaut mieux ne pas leur tourner le dos. Il faut enjamber le seuil lorsque vous entrez dans une salle, rester calmes et éviter les commentaires disgracieux. Aux yeux du commun des mortels, les moines taoïstes semblent mystérieux. Selon un dicton : « Un moine bouddhiste ne parle pas de son nom, alors qu’un moine taoïste évite le sujet de son âge ». Étant donné que les moines taoïstes s’adonnent à des pratiques pour assurer la longévité, il vaut mieux ne pas demander leur âge. Ne pas les photographier sans en avoir obtenu la permission. Ne pas apporter de grenades, de prunes, de fleurs rouges brillantes, de poulet ou de viande de chien en offrandes, car ils sont considérés comme inconvenants. Éviter de manger de l’oie sauvage, de l’anguille, de la tortue, du bœuf, du chien, du porc, du poireau, de l’ail et du gingembre. Ne pas boire de vin ou d’alcool. Ce sont tous des tabous du dieu Xuanwu du mont Wudang.

Itinéraires recommandés. Itinéraire d’un jour (sans le sommet Doré) : zone du versant du Prince et zone du pic du Sud. Itinéraire de deux jours : zone du versant du Prince et zone du pic du Sud, le premier jour; et le sommet Doré, le deuxième. Itinéraire de trois à cinq jours, pour ceux qui sont en bonne forme physique : de Haokou, commune de Wudangshan, vers le palais des Cinq Dragons, puis la zone du pic du Sud et le sommet Doré; descente par le téléphérique vers la zone de la terrasse Qiong, pour finir par la zone du versant du Prince.