AVRIL 2005

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Le seul mensuel multilingue d'intérêt général en Chine, publié en français, anglais, espagnol, allemand, arabe et chinois.

 

Le dénouement heureux d’une agression

LIU HUAIZHANG

Une journaliste a été prise à partie par un jeune malfaiteur.  Après avoir été assaillie, cette journaliste a eu une réaction peu commune qui donne à réfléchir. Punir par la loi est-il le seul moyen d’éduquer un jeune délinquant?   

Mme Wang Guoping.

Wang Guoping est issue d’une famille pauvre. Pour échapper à la pauvreté, elle a décidé très tôt de se hisser au-dessus de la moyenne. Elle a d’abord été très appliquée dans ses études, et grâce à sa volonté de fer, elle a surmonté les difficultés de la vie. Après avoir terminé ses études supérieures, elle a eu la  chance de travailler comme journaliste pour le Quotidien du Fujian. Empressée et consciencieuse dans son travail, Wang Guoping a peu à peu gagné le respect et l’estime de ses collègues.   

Agression à la tombée du jour

Le 7 décembre 2002, comme d’habitude, Mme Wang avait terminé sa journée de travail à 20 h et était en route vers sa demeure. À cette heure-là, les passants se font moins nombreux et il fait de plus en plus froid. Alors que tout était silencieux et qu’elle approchait de la porte de son bâtiment, elle sentit un couteau être pointé sur elle, du côté gauche. « Sortez tout votre argent », a lancé l’assaillant, tout en la menaçant avec son couteau. Tout cela arrivait si brusquement que Mme Wang ne savait plus où donner de la tête. Morte de peur, elle sentit son cœur battre à tout rompre. Debout contre le mur, elle devait faire un choix. « Ma vie est en danger, mais je dois parlementer avec lui malgré la menace », s’est alors dit Mme Wang.

Étant donné qu’elle n’avait qu’une dizaine de yuans dans son porte-monnaie, elle était inquiète : « Va-t-il se contenter de ces dix yuans ou se mettre en colère? » D’un ton modéré, Mme Wang a alors expliqué à son assaillant : « Aujourd’hui, j’ai fait des achats et il ne me reste qu’une dizaine de yuans. Si tu veux les prendre, je te les donne. » Et l’agresseur de répliquer : « Bah! Ce n’est pas si mal de passer un repas! » Sur ce, l’assaillant retira son couteau et s’apprêtait à fuir. Le couteau enlevé, Mme Wang s’est sentie plus en sécurité. À ce moment critique, elle devait prendre une décision. Alors qu’elle songeait à signaler l’incident à la police, elle s’est aperçue que son assaillant était un jeune tout émacié et en guenilles.   S’appuyant sur sa capacité de bien juger les gens, elle estima que ce jeune n’était pas un dur. C’était peut-être à cause de problèmes personnels particuliers qu’il avait besoin de se montrer si agressif

L’interaction décisive

Alors que l’assaillant allait partir, Mme Wang le retint par le bras et une conversation s’amorça :

« Pourquoi te comportes-tu comme un bandit de grand chemin?

― Ça fait trois jours que je n’ai pas pris un vrai repas.   

― Et pourquoi donc?

― Ma famille est criblée de dettes.  Je veux obtenir de l’argent hors de ma famille pour payer ces dettes et permettre à ma sœur de manger comme les autres élèves. Et puis, ma mère est cardiaque… » À cet instant, le jeune homme ne put retenir ses larmes.   

Cette scène émouvante venait de remémorer à Mme Wang son propre passé de misère et la mort de sa mère suite à un cancer du poumon. Les paroles de cet individu la touchaient beaucoup. Ne pouvant pas non plus retenir ses larmes, elle saisit le jeune à bras-le-corps. La situation allait connaître un véritable revirement. Mme Wang venait de décider d’aider ce jeune à se sortir de sa situation lamentable. D’abord, elle lui acheta un bol de nouilles au bœuf dans un petit restaurant voisin. Puis, elle  téléphona à son bureau au journal. Elle avait l’intention de demander au dirigeant du bureau d’aider ce jeune en faisant un reportage. Mme Zhang Hong est une responsable compatissante. Cette nouvelle la fit venir tout de suite sur les lieux.

Conjuguer la sagesse et les efforts de tous

Mme Wang et Mme Zhang décidèrent d’emmener le jeune à leur bureau. M. Liu Xiaojun, un des collègues de Mme Wang, estimait que la question de l’aide n’était pas la préoccupation immédiate. Maintenant que le voleur avait enfreint la loi, il fallait avertir d’abord la police.     

Vingt minutes plus tard, M. Lu Feng, chef du commissariat de police, arrivait dans le bureau du journal pour procéder à une enquête sur l’incident. Après avoir fait l’éloge du courage et de la sagesse de Mme Wang, il voulut emmener le délinquant au commissariat.

Tous les membres du bureau du journal conseillèrent plutôt à M. Lu de laisser ce jeune au bureau. Dans ce cas, M. Lu devait demander des instructions à l’échelon supérieur. Comme M. Lu est un agent de police chevronné, son expérience lui commandait toutefois de confirmer le nom des personnes qui allaient servir de témoins lors de l’enquête.   

Ce voleur de 18 ans s’appelait Xiao Gan. Pour bien connaître la situation de ce dernier, le journal entreprit de se mettre en contact avec la famille par l’entremise du commissariat.    Mme Wang et ses collègues purent donc rendre visite à la famille de Xiao Gan. Les conditions de vie de sa famille étaient pires qu’ils ne l’avaient imaginé. Dans une maison délabrée presque vide, ils ne virent qu’un kang (lit de briques chauffé par-dessous) et une couverture déchirée. Deux grandes jarres ont attiré aussi leur attention (une jarre à eau et une jarre contenant un peu de céréales). Il n’y avait pas une seule armoire, que des balluchons accrochés au mur.    

Après que les membres du journal eurent exposé le motif de leur visite, la mère de Xiao Gan s’agenouilla devant Mme Wang et dit avec émotion : « C’est grâce à vous, si mon fils délinquant est sauvé. » Mme Wang était bouleversée par cette scène. Elle se hâta de relever la mère de Xiao Gan. Cette scène émouvante la fit réfléchir: il y a encore des gens qui se débattent sur le seuil de la pauvreté. Après être revenue au bureau, Mme Wang et ses collègues éprouvaient une si vive émotion qu’ils mirent bien du temps avant de reprendre leur calme. Aider Xiao Gan à résoudre ses difficultés matérielles était plus facile que l’aider à quitter la mauvaise voie qu’il avait prise. Cependant, sauver les jeunes délinquants est la responsabilité commune de toute la société et personne ne peut s’y soustraire. C’est ce qui décida finalement Mme Wang de tenter d’éduquer Xiao Gan et de ne pas intenter de procès contre lui.

Aujourd’hui, avec l’aide du journal, Xiao Gan a trouvé un travail dans le sud de la province du Fujian, et avec l’aide de la société, sa sœur a terminé ses études à l’école secondaire.