JUILLET 2004

 

 

 

 

 

 

 


Le seul mensuel multilingue d'intérêt général en Chine, publié en français, anglais, espagnol, allemand, arabe et chinois.

 

La reconstruction du « Trésor vert »

LONG ZEWEN

Après des années de surexploitation de ses réserves forestières, depuis 1998, la région de la chaîne montagneuse des Grands Hinggan (Xing’an) procède actuellement à un redéploiement de sa structure économique pour mieux assurer la survie de ses ressources et le bien-être de sa population.

EN Chine du Nord-Est, on trouve une grande étendue de forêts et de montagnes verdoyantes.  C’est la chaîne des Grands Hinggan, connue en Chine sous le nom de Trésor vert.  La réserve de ressources forestières y est abondante.  Dans cette région, d’après les statistiques, la couverture forestière atteint 7,13 millions d’ha, la réserve en bois, 665 millions de m3, et 40 % de la superficie de la forêt vierge est actuellement prête à être exploitée.

La région forestière des Grands Hinggan traverse la région autonome de la Mongolie intérieure et la province du Heilongjiang.  C’est la zone forestière la plus étendue et une des plus importantes bases de production de bois en Chine. Au cours des 40 dernières années, cette région a fourni 110 millions de m3 de bois commercial et a acquis des droits d’une valeur de 4,9 milliards de yuans.  Le bois d’œuvre qu’elle a produit pourrait faire deux fois et demie le tour de l’équateur, ce qui a généré une grande contribution économique.

Selon les dires de M.. Zhou Shengxian, haut fonctionnaire chargé des affaires forestières en Chine, la production forestière des Grands Hinggan a apporté une grande contribution à la croissance économique nationale et à l’accumulation primaire de la Chine nouvelle.

C’est justement pour cette contribution économique importante que la production forestière des Grands Hinggan a gagné le titre honorifique de « première en production forestière ». Pour évoquer l’histoire de l’exploitation forestière qui y a lieu, il faut remonter à 1964.  En août de cette année-là, 100 000 personnes se sont rendues dans cette région forestière déserte et au climat rigoureux pour commencer l’abattage des arbres. Cette exploitation forestière avait pour but de répondre aux besoins de l’édification du pays, dans la situation où des métiers tels que la construction, les pâtes et papiers, les chantiers navals et l’installation du chemin de fer reprenaient vie.  Les dix grands édifices les plus célèbres de Beijing, dont le palais de l’Assemblée nationale et le Musée de l’Histoire ont utilisé le bois des Grands Hinggan.  À cette époque, la sylviculture des Grands Hinggan était à l’honneur, justement en raison de leur contribution à l’édification nationale.  M. Tai Wanchun, ancien commissaire préfectoral adjoint de cette région et qui y a travaillé pendant plus de 30 ans, a exprimé : « Pendant ces années-là, les jeunes filles du Nord-Est cherchaient à épouser des ouvriers forestiers; c’est la raison pour laquelle les femmes de ces ouvriers sont très belles.  »

Étant donné les grandes quantités de bois requises par l’État, les ressources forestières ont été surexploitées, ce qui a réduit les réserves de ressources forestières exploitables. C’est ainsi que sont apparus les abus propres à la structure d’une économie monopolistique. Le salaire mensuel d’un employé est alors descendu aussi bas que 200 yuans.

La dégradation de l’environnement écologique a produit un effet indescriptible.  M. Tai est arrivé dans les Grands Hinggan dans les années 60.  En évoquant ces années-là, il dit : « Dans la région forestière, à ce moment-là, on voyait souvent des ours, des chevreuils et des sangliers; maintenant, on n’entend même plus le cri des animaux sauvages, pas même le chant des oiseaux.  Pires encore que la diminution du nombre et de la variété des animaux, des catastrophes écologiques se sont produites ces dernières années. Par exemple, les précipitations annuelles ont diminué à près de 100 mm, et les jours d’orage ont augmenté. En juin 1996, il a même neigé. En 2001, les rafales de sable sont apparues. En juillet 2002, la température a atteint 38 °C.  La capacité d'absorption d’eau de la forêt a diminué et des inondations fréquentes ont fait leur apparition.  La superficie ayant subi des pertes en eau et en sol dépasse les 20 000 km2.  En outre, la couche glacée s'épaissit d'année en année et la dégénérescence forestière s’aggrave.

L’économie et les ressources de la région forestière se trouvaient donc dans une situation lamentable.

Réaliser le progrès de l’économie sociale

En réalité, le système de la planification avait permis aux ouvriers forestiers du Nord-Est de classer l’exploitation forestière de la région aux premiers rangs du pays.  La réforme a révélé les défauts de la planification, le plus important facteur de la décadence de cette exploitation.  Pour cette raison, la réforme du système de la sylviculture s’est avérée la planche de salut des ouvriers forestiers des Grands Hinggan.

En 1998, après le lancement des travaux nationaux de protection des ressources forestières naturelles, les gouvernements locaux et l’Administration nationale de la forêt ont bien saisi cette occasion pour s’efforcer d’ajuster la structure de l’économie et de la production forestière.  À la fin de 2003, la valeur des produits biologiques était de 350 millions de yuans, et les aliments de ce type commençaient à être bien connus tant à l’extérieur qu'à l’intérieur du pays.  La superficie cultivée en produits biologiques atteignait 524 000 mu (un mu égale 1/15 ha.) et 15 produits ont obtenu la certification de marque de produit bio, ce qui a permis la création de la célèbre marque commerciale Beiqishen des Grands Hinggan.

L’élevage particulier pratiqué dans la région a permis de réaliser une valeur de 110 millions de yuans.  La fourrure recherchée d’animaux comme le renard, la martre et d'autres espèces est exploitée en Asie du Sud-Est, dans les régions de Hongkong et de Taiwan, de même que sur les marchés à l’intérieur du pays.  Ce commerce présente un grand potentiel économique.  On estime que la valeur des produits d’élevage de la région forestière atteindra deux milliards de yuans en 2010. 

L’exploitation des médicaments prend forme également.  Les grands Hinggan disposent d’abondantes ressources médicinales; l’industrie pharmacologique s’y développe rapidement.  Dans la région, on compte maintenant trois entreprises de produits pharmaceutiques et deux laboratoires, capables de produire 9 types de 4 séries d’articles de protection de la santé; parmi ceux-là, notons une capsule anticancéreuse et un vin de bois de cerf.  La superficie de la base de culture des plantes médicinales est de 2 190 mu; 966 familles s’occupent de l’élevage et de la culture des matériaux médicinaux; et 4 100 personnes s’adonnent à la production des médicaments.  En 2002, les entreprises associées à la production de médicaments ont généré une valeur de 41 millions de yuans et versé 3,28 millions en impôt et bénéfices.

Le secteur touristique thématique connaît une activité vigoureuse.  En 2003, les recettes ont atteint 52 millions de yuans.  Maintenant, des activités touristiques comme le tourisme en forêt, dans la neige, à la rivière Dajie, les excursions pour fuir la chaleur, le tourisme automobile et le tourisme de conférence, sont exploitées, ce qui attire beaucoup les touristes chinois et étrangers. 

Parallèlement, la région a enregistré un progrès économique et social net.  Le PIB est passé de 3,55 milliards de yuans en 1997 à 5,32 milliards de yuans à la fin de 2003, soit un PIB par personne de 10 061 yuans. Quant à l’ajustement de la structure de production, on peut dire que la région a réussi son pari.

Aujourd’hui, dans la région forestière, une industrie chimique forestière a déjà pris forme.  Meubles haut de gamme, parquets en bois, parquets à frise, panneaux agglomérés en copeaux de bois, panneaux en contreplaqué et plancher spécial pour fond de conteneur couvrent déjà les marchés chinois et étrangers.  Les Grands Hinggan sont connus comme l'une des bases principales d'approvisionnement en produits du bois en Chine.

L’économie privée est soutenue énergiquement.  La valeur annuelle de l’économie privée est actuellement de 1,43 milliard de yuans, ce qui représente une force considérable pour le développement économique de la région forestière.  Aujourd’hui, l’économie non publique occupe 31,7 % du PIB de la région.

Un grand changement de physionomie

Aux premières années de l’exploitation forestière, influencé par la politique d’édification « production d’abord et vie ensuite », l’environnement de vie des ouvriers forestiers était très dur.  Les difficultés étaient omniprésentes à tout moment.  L’habitat, l’eau potable, les difficultés d’accès et d’approvisionnement obsédaient la vie et la production de la population.

Pour changer cet état de chose, il a fallu attendre 1998, au moment où la région a réalisé un grand bond en avant historique.  Depuis cette année-là, grâce à l’appel de projets d’affaires, à l’introduction des investissements et à l’accumulation des fonds, la région a réuni des fonds d’édification des infrastructures d’une valeur de 4,29 milliards de yuans, ce qui représente davantage que l’accumulation globale de la décennie précédente.  La surface d’habitation personnelle a augmenté de 2,59 m2.  150 000 personnes peuvent enfin boire une eau traitée.  Dans une dizaine de districts et de préfectures, l’approvisionnement en eau courante est installé.  Le taux d’approvisionnement en eau courante dans les zones urbaines est passé de 44,4 % en 1998 à 62 % en 2003.  Cent six km de routes ont été réparés ou construits, de sorte qu’il y a maintenant 209 km de routes de haute qualité, soit 50 % du kilométrage dans les zones urbaines de la région, grâce à l’absorption d’un investissement de 220 millions de yuans.  Vu l’amélioration de l’environnement des communications, les habitants bénéficient d’une plus grande facilité de déplacements.

L’environnement d’habitation et le niveau de vie de la population locale s’améliorent visiblement.  D’après des statistiques compilées à la fin de 2003, le revenu personnel disponible dépassait 5 656 yuans, au sixième rang parmi les 13 villes et préfectures de la province du Heilongjiang, ce qui représente une augmentation de 1 818, 1516 et 508 yuans par rapport à celui de 1998, 2000 et 2002.  À la fin de 2003, le total des épargnes des habitants de la région avait atteint 6,87 milliards de yuans, passant de 8 468 yuans en 1998 à 12 968 yuans par personne en 2003.  La même année, la construction de HLM a atteint 1,048 million de m2 pour un investissement de 950 millions de yuans, ce qui a fait passer la surface d’habitation urbaine par personne de 10,1 m2 en 1998 à 14,8 m2 en 2003.

Pour les secteurs de l’éducation, des services sanitaires et de la culture, le développement est également rapide.  En 40 ans, la région y a investi plus de 2 milliards de yuans.  Aujourd’hui, la région dispose de 153 écoles secondaires et primaires, de 8 écoles professionnelles secondaires, d’un institut professionnel et de 150 institutions d’éducation privées.  Ces institutions jouent un rôle important pour fournir bon nombre de personnes qualifiées qui travailleront à l’édification économique et au développement de la région.  Le service sanitaire couvre toutes les fermes de la région.  Le traitement médical, qui était difficilement assuré autrefois, est maintenant plus accessible. La mise en service des installations de loisirs améliore sensiblement la qualité de vie de la population de la région forestière.

En 2002, M. Ma Shujie, alors vice gouverneur et gouverneur actuel de la province du Heilongjiang, a ainsi apprécié Jagdaqi et Mohe, deux villes de cette région forestière : « Ce sont des petites villes, mais belles comme une peinture ».

La réussite de l’édification écologique

Le développement économique doit se faire à partir de l’édification écologique. Le rôle et la situation écologique des Grands Hinggan sont remarquables. Ils sont la source de deux fleuves− le Heilongjiang et le Nenjiang− et sont considérés comme un écran naturel de protection pour la plaine Songnen, la steppe de la Mongolie intérieure et même la Chine du Nord et du Nord-Est.

Depuis la mise en application des travaux de protection des ressources forestières naturelles, la région accorde de l’attention à la formation et à la protection des ressources.  La quantité de bois abattu est passée de 3,504 m3 en 1997 à 2,144 m3 en 2003, soit une réduction de 38,81 %.  Pour sa part, le taux de couverture est passé de 75 % en 1997 à 78,42 % aujourd’hui, soit une augmentation de 3,4 %.  Pour parler de l’édification écologique prévue, le secrétaire de la préfecture, Wang Zhonglin, a affirmé : « Les Grands Hinggan forment la région forestière la plus étendue de Chine, et nous ne pouvons plus laisser la production être basée sur la pure consommation des ressources forestières.  Nous sommes prêts à assumer le fardeau économique que cela représente, car nous ne sommes pas des criminels voulant nuire à l’environnement écologique. »

Pour renforcer la protection de l’environnement, dès 2002, la région a supprimé toutes les activités portant atteinte à l’environnement écologique, telle l’exploitation d’une mine d’or, même si cette interdiction a représenté une diminution des revenus de près de 200 millions de yuans, une baisse de 2 % du PIB de la région.

Maintenant, sept réserves naturelles, dont Huzhong, Shuanghe, Nanhonghe et Zuohe, sont classées dans la liste des réserves naturelles du Heilongjiang et de l’État. Après 17 ans d’efforts, Mohe, Tuqiang et Amour, qui avaient été touchés par les grands incendies de forêt de 1987 (une étendue de 1,04 million d’ha) ont rétabli leur environnement écologique.  

L’amélioration des infrastructures urbaines

De 1964 à 1998, le système des transports et communications avait accumulé 35 années et tirait de l’arrière sur son temps.  La longueur totale des routes bétonnées représentait moins de 80 km, sans même parler de l’absence d’autoroute.  Cette situation gênait gravement le développement économique de la région forestière.  En 1998, les autorités locales et le bureau de sylviculture des Grands Hinggan ont commencé à appliquer activement la politique d’ouverture sur l’extérieur pour attirer de plus en plus d’hommes d’affaires et introduire des capitaux étrangers.  Pour transformer radicalement l’aspect arriéré de la région forestière, ils ont renforcé la construction des infrastructures.  De 1998 à 2003, les investissements ont atteint 1,69 milliard de yuans.   

En octobre 2004, la route de haut niveau reliant Jagdaqi et le village de Beiji (Mohe) sera mise en service.  La construction de cette route accélérera grandement le rythme de développement du tourisme de la région forestière.

En mai 2004, une liaison aérienne entre Jagdaqi et Harbin, effectuée par la CAAC, a été mise en service.

Grâce aux politiques préférentielles pour la mise en valeur de l’Ouest du pays, les travaux de l’aéroport de la ligne Harbin-village Beiji (Mohe) ont commencé cette année. La construction de cet aéroport réduira la durée de voyage entre ces deux villes de 24 h à 4 h. À la frontière entre la Chine et la Russie, le projet du grand pont enjambant la rivière Luogu, un des affluents du fleuve Heilongjiang, a été soumis à l’approbation. La construction de ce pont pourrait grandement promouvoir le commerce et le tourisme avec la Russie.  Son chemin de fer facilitera le transport des voyageurs.

Actuellement, Jagdaqi, chef-lieu de la région des Grands Hinggan, dispose de lignes ferroviaires en liaison directe avec Beijing, Harbin, Shenyang, Dalian et Mohe.  En renforçant les liaisons avec l’extérieur de la région, l’essor de l’économie forestière est en vue.