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             Shanghai, la cosmopolite  
            Inesa Pleskacheuskaya 
            
               
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                | Dans les arrondissements Waitan et Pudong, les 
                  bâtiments modernes et anciens dessinent le nouveau paysage de 
                  Shanghai. | 
               
             
            De la Shanghai légendaire à la Shanghai d’aujourd’hui, cet article vous fait 
              découvrir des aspects originaux de cette métropole de l’Orient. 
            Vous souvenez-vous des premières scènes du film Indiana Jones 
              et le Temple maudit dans lesquelles des hommes en costume sirotent 
              du vin et fument le cigare, un portrait de Shanghai en 1935 ? 
              La Shanghai de cette époque était en effet légendaire et fait 
              surgir des images de filles à la taille svelte et aux longs cheveux 
              ondulés à l’asiatique, la bouche en forme de bouton de rose, de 
              fumeries d’opium et d’interminables banquets somptueux. 
            Il y a sept décennies, l’atmosphère de cette capitale de la mode était parfumée 
              de l’odeur du café et des vins français. C’était une ville de joueurs 
              qui gagnaient et perdaient des fortunes deux fois en une nuit, de 
              fumeurs d’opium, de gigolos, de millionnaires, de missionnaires 
              et de gangsters. Berceau des révolutions – la révolution culturelle 
              y a commencé –, la ville vivait au rythme de la poudre à canon. 
               
            Des impressions aux paradoxes 
            
               
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                  Les habitants admirent les pruniers au début du printemps. | 
               
             
            La première fois que je suis allée à Shanghai, tout me semblait familier, 
              comme si je l’avais connue dans une autre vie. Pour tout connaisseur 
              de l’histoire de Shanghai, ce sentiment de déjà-vu peut se comprendre, 
              car l’architecture de cette ville tire ses origines à Kiev, Paris 
              et Londres. Après tout, cette ville est une création occidentale! 
              Quand les Britanniques y ont établi leur première concession en 
              1842, après la seconde guerre de l’Opium, Shanghai n’était qu’un 
              petit bourg sans âme. Les Français y sont arrivés en 1847, et vingt 
              et un ans plus tard (1863), la première concession internationale 
              y a été fondée. En 1895, la ville était divisée en différentes zones, 
              chacune gouvernée suivant les lois des pays respectifs, au lieu 
              de la loi locale. 
            Au milieu du XIXe siècle, Shanghai dénombrait seulement 
              50 000 habitants, mais en 1900, sa population avait atteint plus 
              d’un million de personnes. Dans les années 1930,  une époque héroïque 
              s’il en est, il y avait plus de 60 000 ressortissants étrangers 
              dans ce qui était alors le plus grand port d’Asie. La ville s’est 
              enrichie par le commerce de l’opium, de la soie et du thé. Elle 
              abritait aussi les plus puissantes banques mondiales ainsi que de 
              célèbres bordels. 
            Saviez-vous que HSBC, le sigle de l’une des plus grandes institutions 
              financières actuellement, est celui de la Hong Kong & Shanghai Banking Corporation ? Son bâtiment originel, situé sur le Bund, 
              abrite maintenant le siège d’une banque de Chine et se classe parmi 
              les plus beaux de la ville. À l’apogée de la ville, rien que les 
              investissements britanniques dépassaient 400 000 livres, une somme 
              énorme à ce moment-là. 
            Et que pensez-vous de ce paradoxe historique? La Shanghai décadente 
              a vu naître sur son territoire le Parti communiste chinois qui allait 
              la libérer du mal et de la  colonisation en 1949? Depuis lors, Shanghai 
              affiche le baromètre social et économique de la nation. 
            Shanghai et ses liens avec le monde 
            
               
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                | Sur la base de l’ancien quartier Shikumen, s’est 
                  construit le « Xintiandi Shanghai », un nouveau site touristique 
                  et lieu de loisirs.  | 
               
             
            Shanghai possède également des racines et des liens forts avec la Russie. 
              Elle est la seule ville asiatique ornée d’un monument commémorant 
              Alexandre Pouchkine, le poète national des Russes. Alexander Vertinsky, 
              une sorte de culte du milieu artistique russe, y possédait un club 
              dans les années 1930 et 1940. Et le saviez-vous, c’est à Shanghai 
              que l’on a joué les premières musiques du jazz soviétique? Le célèbre 
              orchestre d’Oleg Lundstrem y a fait ses débuts. 
            Des milliers de Russes, fuyant la révolution de 1917, se sont exilés 
              à Shanghai, et dans les années 1930, plus de 20 000 d’entre 
              eux y vivaient. Ils publiaient des journaux tels Shanghaiskaya 
              Zarya, Rubezh, et Slovo, édifiaient des cathédrales 
              et des églises, et ils ont même ouvert une école de ballet et un 
              théâtre. En 1947, le quartier russe a disparu et ses habitants sont 
              retournés en Union Soviétique ou se sont déplacés vers les Philippines, 
              les États-Unis et d’autres pays.  
            Au contraire, le quartier français est toujours bien vivant. Maintenant, 
              ce sont surtout des professionnels chinois et un mélange cosmopolite 
              qui y sont installés. Des rues comme Huaihai, Ximing et Huashan 
              constituaient les concessions internationales du XIXe 
              siècle. Aujourd’hui, elles forment une zone connue pour ses magasins, 
              sa cuisine occidentale (à prix modéré ou cher) et ses villas miraculeusement 
              préservées et entretenues. Si, tout en étant en Chine, vous voulez 
              avoir un aperçu de Kiev ou de Paris, déambulez sur Huaihai et ses 
              alentours pour y goûter l’ambiance européenne. Vous pouvez tout 
              aussi bien vous asseoir simplement dans un café pour y flâner un 
              peu. 
            Shanghai, un concentré de Chine 
            
               
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                | Nanjing Lu est encore plus prospère qu’autrefois. | 
               
             
            Mais Shanghai est avant tout une ville chinoise où l’on peut observer 
              et vivre les traditions et les coutumes de ce grand pays. Dans le 
              labyrinthe des ruelles étroites de son quartier chinois s’alignent 
              des maisons à l’architecture raffinée, des temples anciens et des 
              boutiques vendant bibelots, éventails et vases en fine porcelaine, 
              ou tout ce que vous pouvez imaginer. Il ne faut pas oublier le beau 
              salon de thé Yu Yuan et son jardin, connu comme un jardin des plaisirs. 
              Le pont des Neuf Détours, étroit et sinueux et dont le plan a été 
              conçu pour chasser les mauvais esprits, enjambe un étang artificiel 
              et mène au salon de thé. Une cérémonie de thé s’y tient, mais soyez 
              bien préparés à y mettre le prix – aujourd’hui, les traditions sont 
              coûteuses.  
            Un voyage à Shanghai ne saurait être complet sans un peu d’emplettes. Pour l’heure, 
              cette ville est un super magasin. On peut tout y acheter : 
              des souvenirs au système de télévision dernier cri. Et ce qui est 
              merveilleux, c’est que vous y trouverez tout ce dont vous avez besoin 
              à un prix d’occasion. La Mecque des enthousiastes d’achats, c’est 
              Nanjing Lu, souvent surnommée l’avenue d’or; elle attire autant 
              les touristes des quatre coins de Chine que ceux du monde entier. 
              Je vous assure qu’en matière de courses, Shanghai surpasse 
              de loin Beijng, ville que je croyais  être depuis 
              toujours le paradis des acheteurs.  
            Que le quartier Pudong, dont les 330 m2 soulignent l’importance 
              dans la mégalopole, n’ait été, il y a seulement douze ans, qu’un 
              grand jardin maraîcher peut vous surprendre. Aujourd’hui, les gratte-ciel 
              y abondent. On pourrait coiffer cette zone économique spéciale du 
              qualificatif de Manhattan chinois. Vue du quai opposé de la Huangpu, 
              sa silhouette n’impressionne pas moins que celle de sa cousine des 
              États-Unis.  
            Le Grand Hyatt – l’hôtel le plus haut du monde – s’y trouve. Son 
              bar Nine Clouds, au 87e étage, offre une vue à vol d’oiseau 
              de la ville. L’autre site à ne pas manquer – la tour Perle de l’Orient, 
              est la plus haute du genre en Asie et la troisième plus haut du 
              monde avec ses 468 mètres.  En complément des studios de télédiffusion, 
              y figurent un salon de thé panoramique, des restaurants, des magasins, 
              un hôtel et l’excellent musée de l’histoire de Shanghai.  
            Au début du XXe siècle, Shanghai était la ville dont 
              le développement était le plus rapide au monde, une réputation qui 
              l’accompagne encore en ce nouveau millénaire. L’arrondissement Pudong 
              a attiré à lui seul quelque 37 milliards de dollars US d’investissements. 
              Depuis l’adhésion de la Chine à l’Organisation mondiale du commerce 
              (OMC), en décembre 2001, plus de 100 multinationales ont établi 
              leur siège à Shanghai, et leur nombre croît sans cesse. 
            Il y a mille et une raisons d’aimer Shanghai, mais pas une seule 
              excuse pour ne pas s’y rendre.  
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