Les Tadjiks
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Jeune fille tadjik. |
À
la frontière ouest de la Chine et dans la section orientale du
Pamir se trouve le district autonome tadjik de Taxkorgan, région
autonome ouïgoure du Xinjiang. C’est l’habitat de l’ethnie tadjik
depuis des générations. La plupart des plus de 33 000 Tadjiks
y vivent en communautés compactes, et les autres habitent dans
le sud du Xinjiang, surtout à Shache, Zepu, Yecheng et Pishan.
À Taxkorgan, les Tadjiks cohabitent avec les Ouïgours, les Kirghiz,
les Xibe et les Han.
Taxkorgan
est une ville perchée dans la partie la plus élevée du Pamir.
Le deuxième sommet du monde, le mont Qogir, se dresse au sud,
et au nord, on trouve le mont Muztagata, le « père des sommets
de glace ». En outre, des dizaines de montagnes aux neiges
éternelles, qui s’élèvent à plus de 5 000 mètres d’altitude,
parsèment les 25 000 km2 du district. Depuis
des siècles, les Tadjiks y font de l’élevage et de la culture
en mettant en valeur des pâturages luxuriants et l’abondance des
réserves d’eau. Chaque printemps, ils sèment l’orge de montagne,
le pois, le blé et d’autres cultures résistantes au froid. Au
début de l’été, ils mènent leurs troupeaux dans les pâturages
des hauts plateaux, reviennent récolter à l’automne et passent
ensuite l’hiver à la maison; en quelque sorte, ils mènent une
vie de semi-nomadisme.
En
raison des échanges fréquents qu’ils ont avec les Ouïgours et
les Kirghiz, beaucoup de Tadjiks parlent la langue de ces deux
ethnies et utilisent généralement l’écriture ouïgoure.
Histoire
L’origine
de l’ethnie tadjik remonte aux tribus de l’Iran de l’Est qui s’étaient
établies dans la partie orientale du Pamir, plusieurs siècles
avant Jésus-Christ. Au XIe siècle, les tribus turques
nomades ont nommé « Tadjiks » les gens qui vivaient
en Asie centrale, parlaient le persan et pratiquaient l’islam.
Ainsi, les Tadjiks qui ont vécu dans différentes régions du Xinjiang
et ceux qui se sont déplacés de la région occidentale du Pamir
pour se fixer à Taxkorgan sont les ancêtres des Tadjiks qui vivent
aujourd’hui en Chine.
Le
tombeau de Xiang Bao Bao, découvert grâce à des fouilles archéologiques
menées ces dernières années à Taxkorgan, est le vestige culturel
situé le plus à l’ouest du pays. De nombreux objets trouvés dans
ce tombeau trois fois millénaire et les rites funéraires qu’ils
révèlent montrent que les Tadjiks ont fait partie de la grande
famille chinoise depuis les temps anciens.
À
la fin du XVIIIe siècle, la Russie tsariste a profité
des troubles dans le sud du Xinjiang pour occuper Ili et saisir
la région du Pamir. En 1895, l’Angleterre et la Russie ont conclu
un pacte visant à démembrer le Pamir pour tenter de capturer Puli.
Ils durent cependant affronter la résistance des Tadjiks.
Jusqu’au
milieu du XXe siècle, le système de production en vigueur
chez les Tadjiks était celui du riche pasteur qui embauchait des
travailleurs, système qui ressemblait au servage. L’islam a été
introduit à la fin du Xe siècle dans le sud du Xinjiang,
et les Tadjiks furent les premiers à embrasser cette religion.
Cependant, même cette dernière servait à exploiter les Tadjiks
qui étaient lourdement taxés.
En
1954, le district autonome tadjik de Taxkorgan a été fondé sur
la base du district de Puli où habitaient les Tadjiks. Depuis
1959, le district est autosuffisant en céréales et compte une
grande quantité d’animaux qui produisent laine et fourrure. En
plus de l’élevage, le district possède maintenant des petites
usines et des ateliers. Une espèce de moutons développée par les
Tadjiks est parmi les meilleures du Xinjiang.
Coutumes
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Cortège nuptial. |
Au
fil des siècles, les Tadjiks ont adapté leur habillement, leur
alimentation et leur mode de vie aux conditions du haut plateau.
Habillement.
Les hommes portent une veste longue avec ceinture et sans col;
par-dessus cette veste, il ajoute un manteau de peau de mouton
durant l’hiver. Ils se coiffent d’un chapeau de peau d’agneau,
doublé de velours noir et décoré de broderies. Ce chapeau possède
aussi des cache-oreilles qui peuvent être rabattus durant les
grands froids et les tempêtes de neige. Les femmes aiment porter
la robe. Les femmes mariées portent un tablier noir et leur chapeau
brodé doublé de coton a aussi des cache-oreilles noirs. Les femmes
ont aussi l’habitude de porter un tissu blanc carré par-dessus
leur chapeau lorsqu’elles sortent, les femmes mariées, un rouge.
Les hommes et les femmes portent des chaussettes en feutre, des
bottes longues en peau d’agneau avec semelles en peau de yack;
la durabilité et la légèreté de ces bottes conviennent bien à
la marche en montagne.
Alimentation.
Les pasteurs aiment le beurre, le lait caillé et les autres produits
laitiers, et ils considèrent la viande comme un délice. Manger
du porc ou la chair d’un animal mort de causes naturelles est
tabou.
Habitation.
La plupart des maisons des Tadjiks sont carrées avec toit plat,
et elles sont construites en bois et en pierre. Les murs en pierre
et en terre sont solides et épais. Les plafonds, avec puits de
lumière au centre pour assurer l’éclairage et la ventilation,
sont construits avec des branches que l’on recouvre d’un mélange
d’argile et de paille. Les portes, habituellement dans les coins,
donnent vers l’est. Comme le haut plateau est souvent assailli
par les tempêtes de neige, les pièces sont spacieuses, mais basses.
Des lits en adobe sont construits le long des murs et peuvent
être chauffés; ils sont couverts de feutre. Les membres plus âgés
de la famille, les invités et les jeunes dorment dans différents
endroits de la même pièce. Lorsque les pasteurs font pâturer leur
troupeau dans les montagnes, ils vivent habituellement sous des
tentes en feutre ou des huttes en terre. Dans la plupart des cas,
les trois générations d’une famille tadjik vivent sous un même
toit. Le parent mâle est le chef de la famille. Les femmes n’ont
pas le droit d’hériter d’une propriété et relèvent strictement
du contrôle du mari et du beau-père.
Mariage.
Dans le passé, les Tadjiks épousaient rarement des membres d’autres
nationalités. S’ils le faisaient, c’était surtout avec des Ouïgours
ou des Kirghiz. Les mariages étaient entièrement arrangés par
les parents. Sauf les frères ou sœurs, les gens pouvaient épouser
la personne de leur choix, sans regard de l’âge ou du lien de
parenté. Ainsi, les mariages entre cousins étaient chose courante.
Après
les fiançailles du jeune couple, la famille du jeune homme doit
présenter à la famille de la fille une dot : or, argent,
animaux et vêtements. Tous les parents et amis sont invités à
la cérémonie de mariage. Accompagné de ses amis, le fiancé se
rend à la maison de sa fiancée où un prêtre officie la cérémonie
nuptiale. Il saupoudre d’abord de la farine sur le fiancé et la
fiancée et leur demande ensuite d’échanger des anneaux attachés
avec des rubans rouge et blanc, de manger de la viande et des
crêpes dans un même bol et de boire de l’eau d’une même tasse,
symbole de leur vie commune à partir de ce jour. Le jour suivant,
escortés par une fanfare, les nouveaux mariés se rendent à la
maison du nouveau marié où se tiennent d’autres célébrations.
Les festivités durent trois jours, jusqu’à ce que la mariée enlève
son voile.
Naissance.
La naissance est un événement important pour les Tadjiks. À la
naissance d’un garçon, on tire trois coups de fusil ou on crie
trois fois pour souhaiter à l’enfant une bonne santé et un avenir
prometteur; dans le cas d’une fille, on place un balai sous son
oreiller dans l’espoir qu’elle devienne une bonne ménagère. Les
parents et amis viennent féliciter les parents et saupoudrer de
la farine sur le nouveau-né pour exprimer leurs vœux de bon augure.
Étiquette.
Les Tadjiks portent une attention spéciale à l’étiquette. Les
plus jeunes doivent saluer les plus âgés, et lorsque des parents
et des amis se rencontrent, ils se serrent la main; les hommes
se tapotent mutuellement la barbe. Même lorsque des étrangers
se rencontrent sur une route, ils se saluent en plaçant leurs
deux pouces ensemble et en disant : « Puis-je vous aider? ».
Pour saluer, les hommes s’inclinent en posant la main droite sur
leur poitrine et les femmes s’inclinent en y posant les deux mains.
Lorsqu’ils se rendent en visite dans une famille tadjik, les invités
ne doivent pas piétiner du sel ou de la nourriture, ni passer
à cheval au travers du troupeau de l’hôte, ni s’approcher des
enclos de moutons, ni donner un coup de pied aux moutons, tous
des gestes qui seraient considérés comme très impolis. Lorsqu’ils
sont invités à manger, les invités ne doivent pas laisser tomber
des restes sur le plancher, et ils doivent demeurer assis jusqu’à
ce que la table soit desservie. C’est un manquement à l’étiquette
que d’enlever son chapeau en parlant à d’autres personnes, à moins
que ce soit un problème extrêmement grave qui est discuté.
Funérailles.
Le service funèbre est mené selon les rites islamiques. La dépouille
est d’abord « nettoyée », enveloppée d’un linceul blanc
et recouverte des vêtements de la personne décédée. Toutefois,
les pieds et la tête doivent être exposés pour indiquer que tout
est correct. Lors de la veillée funèbre et le jour de l’inhumation,
les parents, les amis et les villageois viendront offrir leurs
condoléances ou escorter le corbillard au cimetière; les femmes
n’y sont pas admises. Selon la tradition, si un Tadjik meurt au
loin, sa dépouille devra être envoyée chez lui pour être inhumée.
Fêtes. La fête
du Printemps des Tadjiks tombe en mars et marque le début d’une
nouvelle année. C’est la fête la plus importante. Chaque famille
va nettoyer la maison de fond en comble et peindre des motifs
de bon augure sur les murs. Tôt le matin de la fête, les membres
de la famille conduisent un yack dans la pièce principale de la
maison, le font tourner en rond, le saupoudrent de farine, lui
servent une crêpe et le ramènent ensuite à l’extérieur. Par la
suite, le chef du village fait une tournée pour offrir ses vœux
à chaque ménage et lui souhaiter une récolte abondante. Les familles
se visitent et échangent des souhaits. À la porte de la maison,
les femmes vêtues de leurs plus beaux atours saupoudrent de la
farine sur l’épaule gauche des visiteurs pour leur souhaiter du
bonheur. Le début du mois du jeune marque la fin de l’année. Ce
jour-là, chaque famille fabrique des flambeaux recouverts de beurre.
À la nuit tombée, les membres de la famille se rassemblent et
chacun allume un flambeau. Toute la famille s’assoit alors autour
des flambeaux et profite d’un bon repas après avoir récité des
prières. La nuit venue, chaque ménage allume un gros flambeau
attaché à un long poteau et le fixe sur le toit. Tous chantent
et dansent toute la nuit à la lumière des flambeaux. La fête du
Corban est également une autre fête importante.