Suifenhe,
le passage d’or du commerce sino-russe
Yu
Jie et Wang Nan
Les
« chercheurs d’or » ne sont plus une espèce disparue.
Dans cette ville, ils affluent pour conclure de bonnes affaires,
ce qui permet à la Chine et à la Russie de tirer mutuellement
parti de leurs avantages.
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La voie ferrée réservée
spécialement au chargement des marchandises à transporter
à Suifenhe. |
La ville de Suifenhe se trouve
dans le sud-est de la province du Heilongjiang. À l’est, elle
voisine la région littorale frontalière la plus riche de l’Extrême-Orient
russe, avec une frontière de 27 km. Cette ville chinoise
abrite 120 000 habitants, dont 50 % sont des immigrés. On
voit partout des Russes aux cheveux blonds et aux yeux bleus.
Les gens de Suifenhe ont la réputation
d’être bien occupés : occupés à gagner de l’argent, occupés
à compter leur argent et occupés à accueillir les hommes d’affaires.
Quand on arrive dans cette ville, on remarque immédiatement le
faible nombre de vélos. Une chanson populaire illustre bien ce
qui s’y passe : «Bien que son appellation provienne de la rivière Suifen, il n’y a aucun
cours d’eau dans la ville; pour y marcher, il faut monter ou descendre;
dans les rues, il n’y a que des voitures et pas de vélos.
Une localisation
et des services de premier choix
La ville est un port de commerce
international depuis une centaine d’années. À partir de Suifenhe,
on peut prendre le train ou la voiture et on est en Russie en
une dizaine de minutes seulement : Pogranichnoye, un port
de Russie, est à 26 km, et Vladivostok, à 230 km, est le
plus grand port de l’Extrême-Orient russe. C’est le passage d’or
du commerce sino-russe. Maintenant, c’est la saison des affaires
commerciales et les visiteurs affluent. Les enseignes commerciales
sont bilingues, en chinois et en russe, et partout sur le marché
on entend parler en russe, la langue utilisée pour les négociations
commerciales entre hommes d’affaires. C’est ainsi que la ville
de Suifenhe a un surnom : « capitale du commerce frontalier ».
L’amélioration des relations sino-russes
a insufflé un vif essor au commerce frontalier de cette ville.
Ici, le port douanier fonctionne 24 h sur 24, ce qui facilite
et accélère les formalités de passage. La loyauté et la fidélité
sont l’âme du marché. Le gouvernement local affirme donc que le
développement du commerce avec la Russie doit attacher de l’importance
à ces deux valeurs. Pour bien protéger l’intérêt des hommes d’affaires
russes, Suifenhe a établi spécialement le commissariat de police
du port douanier et elle fournit un interprète en cas de besoin
lors d’un procès.
Suifenhe est le plus grand port
commercial du Heilongjiang vers la Russie. En profitant pleinement
de la supériorité de la localisation de la ville, le gouvernement
local, à partir de l’exploitation du marché de l’Extrême-Orient,
étend cette exploitation vers l’intérieur de la Russie, pour entrer
en Biélorussie et dans les pays Baltes et finalement dans les
marchés de l’Asie centrale. À Suifenhe, on trouve sept secteurs, dont ceux des vêtements, des chaussures,
des chapeaux, des objets d’usage courant et autres. Le chiffre
d’affaires de l’import-export a dépassé un milliard de dollars
US en 2001, 1,5 milliard en 2002 et, en 2003, 200 millions se
sont ajoutés, ce qui permet à Suifenhe d’être un partenaire commercial
important pour la Russie.
Nous avons rencontré quelques Russes
qui nous ont confirmé s’y rendre deux ou trois fois par mois.
Les objets de consommation chinois sont moins chers qu’en Russie.
Les légumes, les fruits et la viande le sont trois fois moins,
les matériaux de construction, de trois à cinq fois, et les meubles,
de huit à dix fois. D’après ce qu’on dit, chaque jour, il y a
des milliers de Russes qui viennent à Suifenhe pour y faire des
achats. En sens inverse, le bois de bonne qualité attire les acheteurs
chinois, de sorte que, quotidiennement, une grande quantité de
bois de l’Extrême-Orient russe est transportée au port de Suifenhe.
On y voit très souvent une longue file de camions, chargés de
fruits, de légumes et d’objets d’usage courant chinois, et des
commerçants russes que les locaux appellent « Daobao »
en train de négocier.
Le plan de la ville publié en 2000
est déjà périmé en raison de la vitesse du développement urbain,
et on s’affaire à en élaborer un autre qui illustrera bien l’agrandissement
de cette ville. Les « chercheurs d’or » sont de plus
en plus nombreux à Suifenhe. « Aider l’investisseur à réussir
et encourager le développement de Suifenhe » est le principe
des habitants de la ville. Considérée comme une fenêtre importante
du commerce extérieur du Nord-Est, Suifenhe est en train de devenir
le plus grand centre de distribution des marchandises à la frontière
chinoise. Les flots de voyageurs, ainsi que les commerçants chargés
de marchandises qui repartent, donnent à la ville l’aspect d’une
capitale du commerce international. Une toute nouvelle Suifenhe
apparaît sur le vaste territoire de la Chine du Nord-Est, comme
un passage reliant la Chine et la Russie et faisant communiquer
le Sud et le Nord.