« Le
travail de diplomate est un métier fascinant »
--Interview de M.
Wu Jianmin, ambassadeur de Chine en France
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M. l’ambassadeur Wu Jianmin,
à la première session de la CCPPC. |
D’après
son curriculum, Wu Jianmin, 64 ans, s’adonne aux activités diplomatiques
depuis 1961. Après 42 ans de travail, il déclare aimer encore beaucoup son travail. En mars, il faisait encore légèrement froid à Beijing, et c’est
à l’hôtel Beijing que notre journaliste a interviewé M. Wu Jianmin,
nouveau membre de la CCPPC...
« Je
suis encore un novice dans les discussions à la CCPPC
Journaliste :
Monsieur l’Ambassadeur, permettez-moi d’abord
de vous féliciter pour votre élection comme membre de la CCPPC.
Quels sont vos impressions ?
Wu Jianmin
: La CCPPC est un des systèmes politiques
de la Chine, et devenir un de ses nouveaux membres est un grand
honneur ; c’est pourquoi je dois accomplir ma tâche du mieux
que je peux. Je suis maintenant engagé dans une étape d’études et
je dois lire sur les fonctions de la CCPPC. En tant que nouveau
membre, je dois d’abord bien comprendre mon rôle et ma tâche et
les pouvoirs qui me sont impartis avant d’avancer des propositions.
J. :
À quoi vous intéressez-vous maintenant ?
Wu
: À la stabilité de la situation politique et à l’écart entre les riches
et les pauvres. L’afflux d’une grande quantité d’investissements
étrangers démontre la stabilité de la situation politique dans l’ensemble
du pays. En matière d’investissement étranger, la Chine a dépassé
les États-Unis et se classe maintenant au premier rang mondial.
« Rester vigilant en temps de paix » est une pensée claire
et simple. Elle permet à la couche dirigeante du gouvernement de
bien comprendre les problèmes existants. Avec le développement économique,
l’écart entre les riches et les pauvres est une des questions importantes.
Le gouvernement central doit prendre des mesures pour résoudre ce
problème.
« J’aime mon travail »
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Wu Jianmin, une personne
de caractère ouvert et compréhensif. |
J. : Le travail de diplomate est un métier fascinant, parce
que le diplomate représente l’image d’un pays. Voudriez-vous me
dire quelle est l’impression
la plus profonde que vous avez tirée de votre carrière diplomatique
de 42 ans ?
Wu : Le travail de diplomate a été trop souvent entouré
de mystère. Grâce au développement de ce travail, nous devons désormais
lever le voile sur ce mystère. Le diplomate doit d’abord toujours
servir le peuple. À Paris, l’ambassade de Chine doit protéger ses
ressortissants. La tâche la plus importante consiste à sauvegarder
les droits et les intérêts légaux des ressortissants chinois. Par
exemple, un jour, à l’aéroport Charles-de-Gaulle, des passagers
chinois avaient été maltraités par des policiers français. Ce fait
objectif avait diverses causes :
premièrement, parmi les passagers chinois, il existait vraiment
des immigrants illégaux, dont certains avaient détruit toutes leurs
pièces d’identité, ce qui constituait des problèmes épineux pour
des policiers français ; deuxièmement, la barrière linguistique
avait créé des obstacles à la communication mutuelle, et troisièmement,
certains policiers français font preuve de discrimination dans le
traitement des Asiatiques. Ce problème a finalement été résolu après
plusieurs rencontres entre l’ambassade de Chine et la partie française.
Il faut dire que bon nombre de Chinois ne connaissent pas bien le
droit international public. Au moment où des policiers français
les maltraitent, en tant que victimes, ils ont le droit de raconter
ce qui se passe au fonctionnaire de l’ambassade pour demander protection.
Dans ce cas, l’ambassade de Chine peut envoyer à tout moment un
fonctionnaire pour leur fournir de l’assistance, mais des citoyens
ont souvent arrangé les affaires à l’amiable.
Dans ma carrière diplomatique de 42 ans, j’ai vécu
beaucoup d’expériences et certaines choses ne peuvent pas s’oublier.
En voici deux :
Premièrement, en 1999 et
en 2000, j’ai contribué à la concrétisation des visites réciproques
du pays natal des présidents Jiang Zemin et Jacques Chirac (Yangzhou
et Corrèze). Deuxièmement,
le 3 décembre 2002, il y a eu le succès de la candidature de Shanghai à la tenue de
l’exposition universelle, un grand événement national qui a enthousiasmé
tous les Chinois. La tenue de l’exposition universelle en Chine, une
exposition qui existe depuis 1851, démontre les efforts déployés par
les différents départements du gouvernement, le Conseil chinois pour
le développement du commerce international, la municipalité de Shanghai
et l’ambassade de Chine en France.
J : On
dit que vous y avez beaucoup contribué.
Wu : Notre
ambassade en France a vraiment déployé beaucoup d’efforts, car le
siège du Bureau international des expositions est à Paris. Notre
tâche consistait à faire accepter notre concept au public et à communiquer
fréquemment avec les médias. Pour
la tenue de l’exposition universelle, les quatre
concurrents de Shanghai (les Pays-Bas,
le Mexique, la Corée du Sud et la Russie) avaient aussi leurs
avantages comparatifs. Le 3 décembre 2002, M. Gilles Noghès, président
du Bureau international des expositions, a annoncé que Shanghai
venait de remporter le droit de tenir l’exposition universelle de 2010. Cette nouvelle démontre que Shanghai a connu des changements
qui ont captivé l’attention mondiale.
Le même soir, j’ai accordé une interview
téléphonique à une radio française, et celle-ci m’a demandé pourquoi
notre pays avait eu la chance d’obtenir non seulement la tenue des jeux Olympiques à Beijing, mais aussi
celle de l’exposition universelle à Shanghai?
J. : Comment
avez-vous répondu à cette question ?
Wu : La
Chine est un pays de civilisation ancienne. Sa population représente
22 % de la population mondiale. Depuis 1851, la Chine a subi 151
années de vicissitudes. Les succès de la candidature aux Olympiques
et de la candidature à l’exposition universelle sont les corrections
de ces injustices, car notre pays a connu un grand développement
ces dernières années.
J. :
On dit que vos critiques suscitent même des applaudissements chez
vos adversaires.
Wu : (rire)
Je sens qu’il faut discuter avec ses adversaires. Dans l’exemple
que je viens de vous mentionner, une fois rentré à Paris, des amis
français m’ont dit qu’ils avaient écouté mon interview. Ils ont
estimé que ma réponse était raisonnable.
Dans le monde entier, les peuples
sont raisonnables. Nous devons bien expliquer la situation chinoise
aux populations étrangères pour les aider à comprendre. En France,
le verbe « propager » a un sens péjoratif. À mon avis,
le verbe « communiquer » est relativement juste.
J. :
Pourquoi aimez-vous le travail diplomatique ?
Wu : Ces
dernières années, j’ai effectué des représentations diplomatiques
officielles, populaires, multilatérales et bilatérales. Le travail
de diplomate est un métier fascinant. Ses activités concernent des
contacts avec des spécialistes, des personnages d’élite de différents
milieux et touchent de nouveaux sujets de discussion. Les activités
diplomatiques mondiales demandent aux diplomates d’étudier souvent
et de bien réfléchir.
« Attacher
de l’importance à la diplomatie culturelle »
J. : Quelle est la situation actuelle des relations sino-françaises ?
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M. l’ambassadeur Wu Jianmin
et son épouse rencontrent des amis étrangers. |
Wu
: On peut dire que la situation actuelle est relativement bonne. Les relations
bilatérales ressemblent à la construction d’un bâtiment. Elles doivent
être soutenues par trois piliers : la politique, l’économie
et la culture. Sur le plan politique, le monde est entré dans une
longue période de transition après la guerre froide ; sur le
plan économique, la France a investi 5,5 milliards de dollars US
dans 2 000 projets en Chine. Bien que cette somme ne soit qu’un
petit pourcentage du total des investissements étrangers, la France
a battu un record historique au plan de l’investissement. D’après
les statistiques de la France, le volume du commerce sino-français
a atteint 14,8 milliards d’euros. Presque toutes les sociétés françaises
de premier rang ont établi des contacts avec la Chine. Actuellement,
la Chine suscite un grand intérêt au sein des moyennes et petites
entreprises françaises. Les relations culturelles sino-françaises ont
aussi enregistré un grand progrès : en 1999,
il y a eu la « Semaine culturelle de Chine » en
France ; de l’automne 2000 au printemps 2001, le « Trimestre
culturel chinois » en France ; l’« Année culturelle
de Chine » en France se tiendra de l’automne 2003 à l’été 2004 ;
et de l’automne 2004 à l’été 2005, il y aura l’« Année culturelle
de France » en Chine.
D’après
l’«Accord sur l’installation mutuelle des centres culturels »,
signé par la Chine et la France en avril 2001, la cérémonie
de fondation du premier « centre culturel chinois » en
Occident a eu lieu à Paris le 29 novembre 2002.
J. : Vous accordez une attention particulière à la diplomatie culturelle,
pouvez-vous nous expliquer pourquoi ?
Wu : La France est un pays ayant une longue tradition culturelle. Sur ce plan,
la Chine et la France partagent les mêmes points de vue, et la culture
des deux pays est très riche. Bien que l’histoire de la civilisation
française soit moins longue que celle de la Chine, sa civilisation
est aussi très vaste. La France est le représentant de la civilisation
occidentale, et la Chine, celui de la civilisation orientale. Ainsi,
les échanges culturels réciproques entre ces deux pays encouragent
la compréhension et les possibilités de coopération mutuelles.
J. : Quel est le statut des Chinois aux yeux des Français ?
Wu : Les Français admirent beaucoup les Chinois. Ils estiment que les Chinois
appartiennent à une nation ancienne, riche sur le plan culturel.
Dans des familles françaises, j’ai aperçu des produits chinois,
voire une table chinoise utilisée dans une maison rurale. Ils estiment
aussi que les Chinois sont intelligents et laborieux. Un entrepreneur
français m’a dit que la sagesse chinoise est issue de la longue
culture du pays.
J. : Le mensuel chinois en langue française La Chine au présent publie
des reportages sur la société, l’économie et la vie des habitants
de Chine. Qu’est-ce qui pourrait satisfaire au mieux les lecteurs
français qui veulent mieux comprendre la Chine ?
Wu :
Dans l’information culturelle, il ne faut pas rechercher des succès
rapides et des avantages immédiats. Il faut faire connaître tout
ce que possède la Chine, puis approfondir la compréhension des Français
sur la Chine. La cuisine, l’édification du pays, l’histoire et la
géographie, les arts, la littérature, la médecine, etc. sont des
sujets abordés par la revue. En fait, je crois qu’il y a beaucoup
de choses que les lecteurs français apprécient.
J. :
Comment présenter le processus de modernisation de la Chine ?
Wu :
Pour présenter le processus de modernisation de la Chine, on doit
donner une appréciation en accord avec les faits et ne pas exagérer
à propos des progrès et des résultats. Pour convaincre les lecteurs,
l’information doit être juste à propos des difficultés.
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