Novembre/Décembre 2003

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Le seul mensuel multilingue d'intérêt général en Chine, publié en français, anglais, espagnol, allemand, arabe et chinois.

 

Nanlong, un hameau ancien et mystérieux

Si vous désirez fuir le brouhaha de la ville et retrouver les joies d’une vie simple et tranquille, une visite à Nanlong s’impose. La nature est généreuse et les locaux sont accueillants.

Maison populaire tout près d’un grand banian. Vue panoramique de Nanlong. La maison des Liu, de style mi-chinois mi-occidental, construite au milieu du XIXe siècle.
Cette pierre Panjiang, connue pour sa forme particulière, a été sculptée par l'eau de la rivière depuis des milliers d’années. Vue pittoresque de la zone du lac Wanfeng. Chutes d'eau dans la vallée Maling.


En Chine du Sud-Ouest, en bordure de la route Nanchang-Kunming, se trouve une petite ville appelée Xingyi. Depuis cette ville, notre voiture roule 39 km vers le sud pour s'arrêter au bord de la rivière Nanpan, avant de commencer à grimper jusqu'au milieu d’une côte. Nous apercevons alors un groupe de maisons sur pilotis, à l’ombre de vieux banians; c'est le légendaire hameau Nanlong de l’ethnie bouyei.
Construit sous Hongwu de la dynastie des Ming (1368-1644), ce hameau de deux km2 abrite deux cents familles de cette ethnie. D'après les études d’architectes, ce hameau constitue un groupe d'anciennes architectures typiques des Bouyei, et celles-ci ont une grande valeur historique et archéologique.

L’omniprésence des banians
À cause de ses 360 vieux banians, les visiteurs considèrent le hameau Nanlong comme le musée des banians. Ces vieux arbres, dont 108 sont plus que centenaires, poussent toujours avec vigueur, et grâce à leurs branches vigoureuses et à la luxuriance de leur feuillage, ils protègent les descendants des Bouyei contre la fureur des éléments. Les légendes sur les banians y sont largement répandues.
À l'est du hameau, les racines d’un banian enjambnt un ruisseau, tel un pont, et cet arbre fait l’objet d’une légende. Un soir, il y a longtemps, il se mit soudain à pleuvoir à seaux et le torrent en crue dévalait le hameau. Les villageois prirent la fuite à toutes jambes vers l'entrée du village, mais la crue les arrêta. À ce moment critique, Along, fils du roi des Dragons, se jeta à l'eau. Il saisit à deux mains les rochers dressés et accrocha fortement sa queue à un grand banian pour laisser les autres passer sur son dos. Les villageois furent sauvés, mais exténué, Along tomba à l'eau. À la décrue, les gens retournèrent au village et trouvèrent un grand banian qui poussait à l’endroit où le fils du roi des Dragons s’était sacrifié. Les racines de cet arbre forment un pont particulier qu’on appelle le pont construit par le dragon jaune à la mémoire d'Along.
Il y a aussi un vieux banian de forme particulière : l'arbre des époux. Il ressemble à un arbre portant trois sortes différentes de feuillages. En l’observant minutieusement, on remarque un grand banian qui enserre un camphrier et un banian à feuilles losangées qui pousse à cinq ou six mètres de la terre sur le tronc du grand banian. Le récit légendaire sur l'arbre des époux est très touchant.
En empruntant un sentier en zigzag, sous l'ombrage des banians, nous entrons alors dans le village. Les 148 maisons populaires bien conservées sont placées en trigramme et constituent un vrai labyrinthe avec les ruelles. Les visiteurs peuvent s'y égarer facilement et éprouver de la difficulté à en sortir. On raconte qu’autrefois, on avait adopté cette forme de construction pour se défendre de l'agression des gens de l’extérieur.

Une façon de vivre simple et typique
Les villageois de Nanlong gardent toujours leurs us et coutumes traditionnels: les hommes vont aux champs et les femmes tissent l'étoffe et mènent une vie simple. On y travaille du lever au coucher du soleil. On peut facilement y trouver des anciens outils et objets d'usage courant, tels que métiers à tisser, moulins et meules de pierre. Aujourd'hui encore, les habitants ne portent que ce que les femmes tissent et teignent.
Lors des grandes occasions, comme la visite d’hôtes distingués, une fête ethnique, un déménagement, un mariage ou des funérailles, les locaux présentent des numéros musicaux (Baying) et de l'opéra bouyei. Les airs mélodieux et l'allure gracieuse des exécutants séduisent les visiteurs.
Le soir venu, les villageois entrent dans le pays des rêves et le calme règne de nouveau dans le village. Plus aucun bruit de tissage ni de chants d'oiseaux, ce qui évoque le passé et une tranquillité faite d’harmonie avec les autres.
Au matin, nous quittons ce hameau. Sur le sentier, quand nous nous retournons pour le regarder encore une fois, nous ne voyons que la fumée des cuisines qui se s’élève. Le hameau Nanlong garde sa couleur mystérieuse sous l'ombrage de ses banians.

 Profiter de ce voyage pour visiter d’autres sites :

1. À Xingyi
A. La vallée Malinghe
En tant que l’un des sites pittoresques du pays, la vallée Malinghe présente un aspect topographique singulier. En réalité, cette vallée est une fente de l'écorce terrestre, couramment appelée la blessure de la Terre. Longue de 100 km et profonde de 200 à 400 m, cette vallée abonde de chutes d'eau sur les deux côtés et présente une couleur mystérieuse.

B. La forêt de pics Wanfeng
À cause de l’aspect imposant de cette forêt, Xu Xiake (1586-1641), touriste et géographe célèbre de la dynastie des Ming (1368-1644), a composé des poèmes pour en faire l’éloge : « Dans le monde, les pics sont nombreux; pourtant, des pics qui forment une forêt ne se trouvent qu’ici » et «  La forêt et un paysage particulier s'étendent sur des milliers de km ». Selon les formes du regroupement des pics, on divise la forêt de pics Wanfeng (les dix mille pics) en cinq : la forêt Liezhen (la formation de combat), la forêt Baojian (l'épée), la forêt Qunlong (les dragons en groupe), la forêt Luohan (les arhats) et la forêt Diemao (les chapeaux superposés). Chacune possède sa particularité et compose avec les autres un site majestueux de reliefs karstiques qui s'étendent à perte de vue.

C. Le lac Wanfeng
Sis sur la faille Nanpanjiang qui forme le passage entre le haut plateau Yunnan-Guizhou et le Guangxi, le lac Wanfeng est formé par le barrage de la station hydraulique Tianshengqiao. Ce barrage a une hauteur de 178 m et une longueur de 1 137 m. Ce lac artificiel a 144 km de périmètre et 176 km2 de superficie, et il peut réserver 10, 2 milliards de m3 d’eau. Il est considéré comme l’un des cinq lacs d'eau douce de Chine. Des pics se dressent autour de ce lac, d’où son nom (lac aux dix mille pics).

2. Produits et spécialités de Xingyi
Les collations traditionnelles de Xingyi comprennent le Sabatou (gâteau en forme de grenade), la pâte Gangzi et les vermicelles à la viande de mouton. La liqueur Chunjiu du Guizhu, distillée par la distillerie du même nom, est bien connue pour son arôme particulier. Par ailleurs, la pierre Zibaoshi de Xingren, la cravate brodée d’Anlong chez les Miao et le poivre en grains sont des spécialités locales qui plaisent aux touristes. À Anlong et à Zhenfeng, on peut trouver des parures fabriquées soigneusement par les Bouyei et les Miao.

3. La fête Chabaige des Bouyei
C'est une fête traditionnelle de cette ethnie. La fête dure du 21e  au 23e jour du 6e mois lunaire. La célébration s'étend dans plus de dix districts de la région de Xingyi, et des dizaines de milliers de personnes d’origine ethnique provenant du Yunnan et du Guangxi y prennent part, ce qui forme un rassemblement gigantesque. La fête tire son origine d'une légende : durant l'Antiquité, un jeune homme du nom de Chalang et la jeune Baimei étaient très attachés l'un à l'autre. Un jour, alors que la jeune fille coupait du bois dans la montagne, elle fut attaquée par un tigre féroce. Au moment critique, Chalang tua le tigre avec son arc. Ces deux jeunes tombèrent alors amoureux. Cependant, un fonctionnaire local avide voulait épouser Baimei qui était réputée pour son beau visage. Il eut recours à la fois à l'intimidation et à la séduction, mais la jeune fille le repoussa catégoriquement. Finalement, le fonctionnaire tua le jeune homme et enleva la jeune fille. Cette dernière mit le feu à la résidence du fonctionnaire et se jeta dans les flammes pour se suicider. Pour commémorer ces deux jeunes, les locaux baptisèrent le village du nom de Chabai; le jour du suicide de la jeune fille devint un jour de fête et le lieu où Chalang tua le tigre, la place où se tient la fête Chabaige.
La veille de la fête, toutes les familles doivent bien laver les vêtements et les nattes et les suspendre partout dans le village pour les faire sécher, ce qui symbolise les nuages blancs autour du village et la propreté. Pendant la fête, jeunes et vieux affluent en groupe vers le village Chabai. Les jeunes endimanchés apportent des cadeaux en témoignage d'amour, afin d'obtenir un amour fidèle comme celui de Chalang et de Baimei. Les activités de fête comprennent le concours de chansons, organisé le jour sur la place, et le soir, dans la cour ou la maison. Le maître de la famille offre le repas de riz coloré et le vin de riz (les Bouyei ont l'habitude d’offrir du vin plutôt que du thé aux convives). Pour inviter les parents et les amis, on pend la marmite à soupe, dont l'histoire provient du tigre tué par Chalang. Auparavant, on mijotait de la viande de boeuf et des os de tigre pour faire la soupe; maintenant on n'utilise que de la viande de porc et de chien.