La
loi a ses raisons…
Guo Li
L’impasse
Une jeune dame nommée Feng Mei, l’air triste, errait
dans les rues d’une petite ville à quelques kilomètres d’une houillère
de la province du Shanxi.
Il n’y a pas longtemps, cette houillère s’était
écroulée à la suite d’une explosion provoquée par un coup de grisou,
faisant une centaine de morts et de blessés. Certains chefs du
bureau d’administration avaient alors été accusés d’avoir camouflé
la réalité et ils ont été condamnés à une peine de prison de 4
à 10 ans, en vertu de la Loi sur la sécurité publique des mines.
Cette petite ville, ou plutôt cette agglomération
de mineurs, avait pu être développée grâce à la houillère. Ce
secteur avait vraiment amélioré la situation de cette région reculée.
Les communications routières, les quartiers d’habitation, l’hôpital,
les écoles… avaient fait leur apparition sur cette terre autrefois
désertique. Malheureusement, la rénovation technique n’avait pas
suivi le rythme; alors que les puits étaient usés, la production
grimpait en flèche pour répondre à la demande croissante du charbon
sur le marché.
Ce jour-là, Feng Mei était allée chercher un travail
dont avait besoin la famille pour survivre. Depuis que son mari
était décédé dans un accident minier, elle se trouvait dans une
situation précaire, car son mari lui avait laissé un enfant de
8 ans, né de sa première épouse, morte trois ans auparavant, et
un père de 60 ans. Encore pire, leur union n’était pas légitime.
D’après ses dires, elle ne possédait pas d’acte de mariage ni
de livret d’état civil; trop occupés par la noce, ils n’avaient
pas pensé à se faire enregistrer à la mairie. Par ailleurs, ils
croyaient que la célébration et la reconnaissance des parents
et des amis suffisaient à légaliser leur union. Dès le premier
jour après la noce, le père l’avait considérée comme sa belle-fille,
et l’enfant, comme sa belle-mère.
Aujourd’hui, elle se trouvait dans une impasse
parce qu’elle n’avait pas le droit d’hériter quoi que ce soit
de la famille. Un jour, elle avait tenté de toucher les indemnités
de son mari, au nom de son enfant, mais elle n’a pas pu. Finalement,
c’était son beau-père qui les avait touchées.
La seule issue possible pour elle était de quitter
la famille et de se « remarier ».
De retour chez elle, accoudée sur la table et la
tête dans les mains, elle était plongée dans une profonde réflexion.
« Feng Mei, as-tu trouvé un travail? »,
lui demanda son beau-père, puis d’ajouter : « Tu
peux nous quitter sans problème. Je pense que je pourrai m’occuper
de mon petit-fils. »
« Non papa… Je ne vous quitterai pas, si vous
continuez à me considérer comme votre bru. » Après un petit
moment de silence, elle dit : « Je trouverai un
travail et je ferai tout mon possible pour que votre petit-fils
puisse poursuivre ses études.»
Le vieux père, rouge de honte, baissa la tête et
dit : « Pour que ta présence à la maison soit justifiée
et que tu puisses jouir du droit d'héritage, et vu que l'enfant
a besoin d'une mère admirable comme toi, je propose de t’épouser…
mes jours sont comptés. »
Feng Mei fit signe que non, et elle sortit…
Deux parricides
Zhan Dengke et Li Zijie, un couple âgé de plus
de 60 ans, furent tués par leur fils Zhan Hongjiang, 32 ans, employé
d’une usine et diplômé de l’Institut de l’industrie mécanique.
Pour son entourage, cet homme avait un caractère renfermé, mais
il était très poli avec ses collègues. Nul n’avait constaté sa
cruauté, alors comment aurait-il pu commettre un crime aussi atroce
qu’horrible ?
En fait, Zhan Hongjiang est un joueur depuis son
temps à l’école secondaire. Il est criblé de dettes qui s’élèvent
à 300 000 yuans. Le jour du crime, il avait demandé à son père
de lui prêter de l’argent pour régler ses dettes. Le père avait
refusé catégoriquement et Hongjiang s’était querellé avec lui.
Enragé, Hongjiang avait brandi une barre de fer et assommé son
père, ainsi que sa mère, qui était à ses côtés, dans l’intention
de les secouer.
Il avait alors commencé à fouiller les tiroirs
et les armoires. Il avait découvert enfin deux récépissés de dépôt
de banque ayant chacun un montant de 100 000 yuans, de même qu'un
contrat d’achat d’un immeuble au nom de son frère cadet. Le sang
lui était monté à la tête. Il avait alors repris la barre et asséné
des coups mortels à ses parents.
« Menteurs ! menteurs ! Je vous
déteste ! », avait-il crié frénétiquement en jetant
la barre.
Il se dénonça à la police et avoua tous les faits.
Dans ses aveux, on remarqua que la froideur de ses parents et
leur partialité à l’égard du cadet étaient la cause qui le conduisit
à l’assassinat.
Une jeune fille nommée Dujuan, 18 ans, a commis
un crime inqualifiable. Un jour, elle s’était querellée violemment
avec sa mère. Elle avait appelé son copain, 20 ans, pour venir
lui donner un coup de main pour la tuer. Les deux avaient mis
la victime dans une valise et l’avaient déposée dans une rue.
Cette scène atroce s’était produite rien que pour assouvir une
haine aveugle.
Les douloureux souvenirs qu’elle avait gravés dans
sa mémoire l’ont fourvoyée. L’idée de tuer sa mère était devenue
de jour en jour plus imminente.
« Ma mère rejette ses malheurs matrimoniaux
sur moi, en disant qu'elle aurait pu quitter mon père, si je n'étais
pas née. Chaque fois qu'elle était mécontente ou contrariée, elle
me battait. C'est de cette façon qu'elle m’a élevée… elle ne m'a
jamais considérée comme sa fille ; elle était froide envers
moi. » En sanglotant, elle dit au juge, lors de l’audience : « Ce
que j'avais besoin alors à mon âge, c'était de l’affection de
ma mère et elle ne me l’a pas donnée ; j'ai passé des jours
terrifiants dans ma petite chambre. »
« Je n'ai rien à regretter et à me repentir. »
dit-elle.
L’opinion des experts : Le parricide n’est
pas un cas à négliger
Selon des statistiques effectuées par le tribunal
populaire de l’échelon intermédiaire de Beijing, le tribunal a
jugé 14 cas de parricide en 2001, 26 en 2002 et 6 au premier trimestre
de 2003. La plupart d’entre eux sont des homicides volontaires,
suscités par des disputes familiales ou des conflits dus aux sentiments.
Selon une enquête, à l’heure actuelle, 20 % des élèves du
primaire et du secondaire et 16 % des étudiants universitaires
affrontent des problèmes psychologiques, des problèmes sentimentaux
et des problèmes de personnalité.
Le directeur Da Hua du Centre de recherches psychologiques
sur les crimes relevant de l’Université des sciences politique
et juridique estime que les cas de parricide tendent à augmenter
ces dernières années en Chine. Il précise qu’aujourd’hui, l’ancienne
notion de la famille se heurte à la notion de l’économie de marché
et que l’intérêt individuel joue un rôle principal dans les relations
humaines. Les conflits peuvent facilement entraîner n’importe
quel acte immoral et n’importe quelle infraction, d’où les possibilités
de tragédie.