Novembre/Décembre 2003

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Le seul mensuel multilingue d'intérêt général en Chine, publié en français, anglais, espagnol, allemand, arabe et chinois.

 

Le problème du stationnement et le développement de l’automobile

FENG JIANHUA

À l’heure actuelle, les habitants des grandes villes de Chine voient souvent leur rêve de voiture s’estomper au profit du cauchemar du stationnement. Est-ce une situation irrémédiable?

M. HAN ZHENDONG est un salarié ordinaire de Beijing. Il y a trois ans, il a acheté une voiture. Celle-ci lui apporte non seulement des commodités, mais aussi des difficultés. À l’heure actuelle, le nombre d'automobiles a dépassé les deux millions à Beijing, mais il n’y a que 600 000 places de stationnement. Pendant plusieurs mois, M. Han a garé sa voiture sans respecter les règles et a écopé de contraventions. S’il atteint douze points de démérite, son permis de conduire sera retiré.

Ce monsieur habite un petit quartier aménagé dans les années 1980. À cette époque, la voiture ne faisait pas partie de la vie du quartier et le gouvernement local n'a pas élaboré de plan de stationnement local. Ces deux dernières années, les places publiques de ce petit quartier sont bondées de voitures. Comme la place pour circuler est très limitée, les places de stationnement causent souvent des mésententes entre voisins. À l'heure de pointe, des voitures stationnées barrent souvent le passage, et on doit faire venir leur propriétaire pour laisser passer d’autres voitures. Ces différends ont non seulement gaspillé bien du temps, mais encore exercé une influence sur la coopération entre voisins », dit M. Han. Ce type de petit quartier constitue la majorité des lieux d’habitation à Beijing. « J'ai entendu dire que des habitants mécontents avaient même cassé des voitures qui encombraient leur quartier », continue M. Han avec inquiétude.

Il n’y a pas que M. Han ou les habitants de Beijing qui éprouvent ce type de problèmes. À Shanghai, à Guangzhou, à Chongqing et dans d’autres grandes villes chinoises se pose aussi la question du stationnement. Autrefois, Tokyo, Hongkong et d'autres grandes villes du monde ont connu ce type de problèmes. Aujourd'hui, à Beijing, il est difficile de garer sa voiture.
Actuellement, le nombre de places de stationnement ne représente que 2 % du total des voitures. Ce pourcentage est encore loin du standard international.  À Hangzhou, chef-lieu de la province du Zhejiang, il n'y a qu'une place de stationnement pour trois voitures. Ce problème est encore plus aigu à Chongqing, l'une des quatre villes relevant directement de l'autorité centrale; il n'y a qu'une place pour treize voitures.

Le journal Nanfang Dushi a récemment effectué une enquête auprès de 63 % des automobilistes. Cette enquête a révélé que les préoccupations des automobilistes portent avant tout sur la disponibilité du stationnement et son prix. D'après les statistiques, pour l'ensemble du pays, il n'y a qu'une place autorisée de stationnement pour chaque cinq voitures.

Le rêve de voiture


Avec le développement rapide de son économie, la Chine est entrée dans l'ère de la consommation des voitures privées. D'après les statistiques, le nombre de ces dernières dépasse maintenant les dix millions. Chaque année, ce chiffre augmente à un rythme de 20 à 30 %.

En tant que pays ayant le plus d'entreprises d’automobiles, la Chine est en train d'élaborer la stratégie de développement de ce secteur dans l’objectif de devenir un grand pays ayant une production automobile de grande envergure.

« La dure réalité de la difficulté de stationnement a fait subitement s’évanouir le rêve de voiture », ont estimé certains experts. Bien que des gens eussent prévu la possibilité que ces voitures puissent former un « volcan » sur le marché, la voiture de consommation est tout de même devenue un nouveau pôle de croissance. Pourtant, le problème de stationnement a une interaction avec la production et la consommation de voitures.

D'après certains reportages, pendant les six premiers mois de l’année, les affaires du marché de l’automobile de Guangzhou ont été relativement calmes. Le chiffre des ventes n'a atteint que 30 000 unités environ. Selon les dires d’une personne de ce marché, le nombre de places de stationnement est insuffisant à Guangzhou, et le prix du stationnement y est cher, ce qui constitue la raison principale influençant la consommation automobile.

À Shanghai, certaines grandes entreprises se préparent à encourager des habitants à participer à la consommation automobile. Mais comme les quartiers manquent de places de stationnement, où ces propriétaires de voitures stationneront-ils leur nouvelle voiture? Sans aucun doute, ils vivront la même situation embarrassante que les habitants de Beijing.

Pourquoi le stationnement est-il si difficile?

« Beaucoup de facteurs subjectifs et objectifs influencent la question du stationnement, dont l'estimation de la consommation de voitures du département gouvernemental  concerné; cette estimation a joué un rôle considérable dans ce cas », dit M. Liu Xiaoming, directeur adjoint de la Commission municipale du transport de Beijing.

Au début des années 1990, le département concerné de Beijing a en effet estimé que la consommation automobile était de 700 000 à 800 000 unités. En réalité, la consommation de voitures avait atteint 1,5 million d’unités en 2000. L’estimation inexacte a entraîné les ratés du plan de construction des parcs de stationnement.
Par ailleurs, le prix déraisonnable imposé par ces parcs à autos est aussi un facteur qui influence leur utilisation. Sur le plan théorique, leur nombre est insuffisant à Beijing, mais le prix élevé qu’ils exigent a aussi réduit leur taux d'utilisation.

Le parc-auto du Palais des expositions de Beijing a deux étages et un millier de places de stationnement, mais son prix exagéré fait en sorte que ses affaires sont peu animées. Les places vacantes y représentent 60 % du total. Pas très loin de là, le grand marché Tianyi a un parc de stationnement souterrain de 158 places. D'après les dires de M. Wu Zengyou, un des responsables de ce grand marché, chaque jour, après 10h, ce parc est comble. Cette situation dure jusqu'à 16h. Lors des jours de week-end, il est plein dès 9h. « Le prix du stationnement à Tianyi n'est que deux yuans l’heure. Avant 9h, le prix d’une journée de stationnement n'est que de dix yuans, et pour 24 heures, de vingt yuans. Au contraire, le prix du stationnement au Palais des expositions de Beijing atteint cinq yuans l’heure », déclare M. Wu. Cinq yuans l’heure est évidemment un prix élevé pour un salarié (20 % de son salaire). Dans ce contexte, certains automobilistes garent leur voiture au hasard, en bordure de la rue, faute d’avoir trouvé un parc de stationnement à prix raisonnable.

Bien que les agents de police fassent preuve de sympathie à l’égard des conducteurs qui n’ont pas eu d'autres choix, le respect des indications de défense de stationner, sous peine d'amende, est aussi une affaire sérieuse. Payer une amende de cent ou deux cents yuans est une lourde charge pour les automobilistes peu fortunés.


La construction des parcs-autos


« Il faut faire de la construction des parcs-autos une industrie pouvant y trouver son compte. Pour attirer l'entrée des capitaux sociaux, le problème clé consiste à faire jouer le rôle de levier économique aux prix et aux taxes dans l'optimisation de la structure du stationnement », dit M. Liu. Ce dernier estime que la résolution de la question du stationnement doit passer par les procédés industriels afin d’accélérer la construction de parcs-autos et d’élever le taux d'utilisation de ceux qui sont déjà existants.

À cet égard, l'investissement dans la construction de parcs-autos doit être polyvalent; on doit aussi utiliser des politiques préférentielles pour attirer divers types d’investissements par différents canaux, dans le but de changer le système traditionnel selon lequel on s’appuie principalement sur les investissements gouvernementaux. L'environnement économique de marché de la dernière décennie a permis au peuple chinois de commencer à s’habituer à s’en remettre aux lois du marché pour résoudre des questions économiques plutôt que de se fier aux mesures administratives.

À Beijing, une mesure importante se prépare à la Commission municipale des transports. Cette mesure consiste à augmenter, selon la coutume internationale, le standard du prix de stationnement dans les espaces de rue afin de réduire le temps de stationnement et de forcer les automobilistes à garer leur voiture dans les parcs-autos intérieurs. Parallèlement, il faut donner des droits et des espaces à ceux qui veulent investir dans les parcs de stationnement au cours du processus de réajustement des prix du stationnement.

« L’application de ces deux mesures permettra à la construction de parcs-autos d’être une industrie attirante à Beijing », déclare M. Liu.
Ce dernier a calculé grosso modo le chiffre d’affaires du stationnement : en 2008, le nombre des places de stationnement de Beijing pourra atteindre 2 millions. Si chaque place rapportait trois yuans, tous les parcs-autos de Beijing pourraient gagner 6 millions de yuans par jour et 20 milliards de yuans par an. Si on élargit ce chiffre à l'ensemble du pays, ce sera un revenu considérable.
Selon M. Liu, il n’y a aucun obstacle concernant les investissements dans la construction de parcs-autos; les capitaux sociaux et les investissements étrangers jouiront d'un même traitement de faveur.