Novembre/Décembre 2003

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Le seul mensuel multilingue d'intérêt général en Chine, publié en français, anglais, espagnol, allemand, arabe et chinois.

 

Loi et raison

Guo Li

Peng Ying la malheureuse

Yuan Lan et Peng Ying se connaissent depuis qu’ils étaient lycéens dans le sud de la Chine. Ils se séparaient après la fin des études secondaires. Yuan partait pour une ville du Nord où Il poursuivra ses études universitaires, et Peng restait dans une école professionnelle technique des son pays. les liaisons par correspondance n’ont jamais été interrompues pendant les années de séparation.

Quatre ans après, dans sa dernière lettre, Yuan lui dit qu’il travaillerait dans une ville lointaine de l’Ouest. Peng, dans sa réponse, promit de le rejoindre bientôt.

Deux semaines après son arrivée, elle trouva un travail temporaire et habitait dans un dortoir de son unité de travail. Cette ville en voie d’industrialisation a besoin de beaucoup de bras dans la construction.

Ils s’aimaient et s’apprêtaient à se marier, une fois trouvés un emploi stable et un logement convenable.

En attendant, ils se donnaient rendez-vous habituellement dans un parc ou un magasin. Ils sont à l’âge nubile, le mariage est une chose préoccupante pour eux et aussi pour leurs parents.

Ce soir-là, ils se promenaient dans une petite rue qui mène au dortoir de Peng Ying. Au moment de la séparation, ils s’embrassèrent et se dirent au revoir.

« Mon sac… Au voleur ! »

Un cri perçant, lancé derrière le dos de Yuan, le précipita vers Peng qui restait pétrifiée, pointant son doigt dans la direction du voleur en fuite.

Yuan tenta d’arracher le sac de la main du voleur. Il se jeta sur lui et le faisait reculer quand son adversaire lui renvoya un coup de pied sur la figure et le renversa. En rage, Yuan se lança de nouveau contre le voleur, au moment où son complice lui porta un coup de poignard dans le dos. Yuan s’effondra dans un bain de sang.

La rue était déserte. Peng, sidérée, ne savait pas que faire. Elle se précipita à son dortoir, téléphona à la police.

Yuan expira juste avant l’arrivée de l’ambulance. Les deux voleurs n’avaient pu échapper des mains de la police. Ils avouaient et furent condamnés à perpétuité et à payer aux parents de Yuan une indemnité de 250 000 yuans.

Les deux voleurs étaient incapables de remplir leurs obligations, les parents de Yuan intentèrent un procès à Peng Ying, l’accusant d’inaction face au danger, parce qu’elle n’avait pas prêté main forte à leur fils et qu’elle n’avait pu le secourir à temps. Comme leur fils est mort pour elle, n’est-il pas vrai qu’elle doit être tenue pour responsable de sa mort ?

« Elle doit indemniser à la place des voleurs ! » déclarèrent les parents, tout furieux.

Le procès se conclut par l’annonce de la sentence, selon laquelle Peng Ying devait payer une indemnité de 10 000 yuans aux parents de Yuan. Le visage baigné de larme, Peng sanglota bien haut devant le public.

À qui la faute ?

Un jeune homme, 22 ans, grande taille, tomba dans le canal Kun-Yu au cours de la pêche. Il pèse 70 kg. Son poids suffit à renverser la balustrade déjà craquelée, haute de 50 cm, alors qu’il se penchait sur l’eau. Comme il ne savait pas nager, il mourut de noyade.

Le canal Kun-Yu, ouvert dans les années 60 du siècle dernier à l’ouest de Beijing, sert à irriguer les champs et à lutter contre la sécheresse. La pollution croissante de son cours a imposé des mesures urgentes pour purifier les eaux, réparer les berges, mettre en place des balustrades en marbre blanc, tout en assurant la navigation entre le Palais d’été et le centre-ville.

Les poissons se multiplient entre les deux rives verdoyantes, et attirent bon nombre de pêcheurs à la ligne qui font fi de l’avertissement inscrit sur un panneau : »Défense de pêcher sous peine d’amende ».

Certaines gens viennent ici pour se divertir, certains autres dans un but lucratif. Ils récoltent souvent des fruits amers, comme ce garçon mort de noyade.

Un procès a été intenté contre l’Administration des fleuves et lacs, qui se défend : l’acte du jeune homme constitue déjà une infraction à la loi. Il n’est pas qustion de la solidité de la balustrade, car celle-ci est bâtie en 1999 et restaurée en avril dernier. Sa rupture a été causée par le poids du jeune homme, et rien d’autre.

Selon le juge, la balustrade est faite pou assurer la sécurité des promeneurs aussi bien que pour embellir le milieu. Sa rupture n’aurait pas lieu si elle était en bon état. Conclusion est tenue de payer une indemnité de 150 000 yuans à la famille de la victime.

L’Administration des fleuves et lacs réplique : l’acte du jeune homme est illégal. Selon les lois et règlements de Beijing concernant la gestion des fleuves et lacs, il est interdit de pêcher dans ces lieux. Par conséquent, l’Administration n’est en aucun cas responsable des risques qui en découleront. Par ailleurs, les balustrades servent de protection contre la chute des piétions dans l’eau. Elles ne sont nullement mises à l’usage de la pêche et à la capture des poissons. L’Administration refuse donc la sentence en question et recourra au droit de se pourvoir en appel contre le verdict rendu en première instance.