Des
témoins de la mutation sociale
LI
XIA
«
Il y a 30 ans, quand je suis venu à Beijing pour la première fois,
il n’y avait aucune voiture dans les rues. Aujourd’hui, de la
terrasse du Grand Palais du peuple, je peux constater les grands
changements qu’a connus la Chine depuis ce temps », a dit
le Dr Henry Kissinger, juste avant la convocation du XVIe Congrès du
PCC en novembre dernier.
Depuis
l’application de la politique de réforme et d’ouverture en 1978,
la Chine a vraiment connu des changements frappants. Ceux-ci se
manifestent non seulement par le fait que le pays a résolu le
problème de la subsistance et de l’habillement de 1,3 milliard
d’habitants, mais encore par les occasions de développement qu’ont
saisies les Chinois au cours de la transformation de la société.
Les témoins de cette mutation sociale sont des personnes qui travaillent
dans divers milieux. La possibilité offerte à chacun de déployer
sa valeur personnelle et son esprit d’entreprise constitue la
force motrice de la réforme économique en Chine. Trois délégués
du congrès sont de vibrants témoins de cette mutation sociale.
Qiu
Jibao
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M.
Qiu Jibao (au centre) a signé une promesse par laquelle
il s’engage à transformer son groupe Feiyue en une entreprise
d’élite d’échelon mondial. |
En
1976, c’était la fin de la révolution culturelle et M. Qiu n’avait
alors que quatorze ans. Faisant partie d’une famille pauvre, il
a été obligé de mettre un terme à ses études secondaires. Après
avoir acheté une bicyclette usagée, M. Qiu commença à travailler
comme messager pour aider ses parents à joindre les deux bouts.
Mais rapidement, en raison de cet essai de se poser en petit entrepreneur,
on le traita de capitaliste. On confisqua sa bicyclette. À cette
époque, en vertu du système de la commune populaire appliqué dans
les campagnes chinoises, toutes les exploitations individuelles
entraient dans une nouvelle catégorie de capitalisme, et tous
les moyens de production devaient être la propriété de la commune
populaire.
Tout
comme d’autres gens de la province du Zhejiang, M. Qiu alla aussi
gagner sa vie dans le Nord-Est et se fit cordonnier. En 1979,
il retourna avec ses compatriotes à Taizhou, son pays natal. Traditionnellement,
les paysans de la province du Zhejiang devaient apprendre un métier
artisanal pour gagner leur vie, et en Chine, sous le régime socialiste,
les ouvriers appartenaient à la classe dirigeante. Or, puisqu’il
admirait beaucoup la classe ouvrière, M. Qiu est devenu technicien.
Un an plus tard, il créa son usine de traitement de pièces de
machines à coudre.
Au
début des années 80, la Chine était encore une société qui subissait
une pénurie de marchandises. Au titre des « trois produits
essentiels », la machine à coudre, la montre-bracelet et
la bicyclette étaient alors considérées comme la dot incontournable
que l’on pouvait acheter par les tickets de rationnement. Dans
ce contexte, il est clair que l’usine de M. Qiu n’aurait pas pu
subsister.
Heureusement,
en moins de trois ans, l’industrie chinoise connut un formidable
essor grâce l’application de la politique de réforme. Cependant,
face à la concurrence du marché, les petites usines fermaient,
ce qui influença l’usine de M. Qiu.
« À
cette époque-là, j’avais déjà quelques dizaines d’ouvriers, la
ruine de notre usine aurait eu un impact immédiat sur leur vie »,
dit M. Qiu. En profitant de l’application de la politique de réforme,
il saisit donc l’occasion de fonder une usine de fabrication de
machines à coudre. En 1985, l’usine fabriquait ses propres machines.
Au
début des années 80, il n’y avait que les produits de l’industrie
légère des entreprises publiques de Shanghai qui avaient des marchés.
Pour vendre ses produits, cet homme déterminé décida donc de faire
une alliance avec les Shanghaïens.
Puis
de 1989 à 2002, l’économie de marché chinoise s’est améliorée
de jour en jour. Durant ces treize ans, les politiques avisées
du gouvernement ont permis au pays de connaître de grands changements.
Ces années d’édification économique ont amélioré les conditions
de vie et le niveau spirituel du peuple chinois et ont augmenté
les avantages réels qu’il en a tirés. Aujourd’hui, les avoirs
du groupe Feiyue ont atteint 1,3 milliard de yuans, alors qu’à
ses débuts, à l’époque de l’usine de fabrication de machines à
coudre, ils ne représentaient que 300 yuans. M. Qiu est l’un de
ceux qui ont contribué à la réforme et à l’ouverture, mais il
en est aussi un bénéficiaire. Sa lutte acharnée pour édifier une
entreprise est à l’image d’un grand nombre d’entrepreneurs privés de cette époque.
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Le
développement du groupe Feiyue s’appuie toujours sur les réalisations
scientifiques. |
Il
y a treize ans, la province du Zhejiang concentrait principalement
des ateliers d’artisans : fabrication de fromage de soja,
cordonnerie, etc. Aujourd’hui, la valeur globale de son économie
a atteint le quatrième rang du pays. La province a aussi donné
naissance à beaucoup d’entreprises renommées. Ses marques connues
dans tout le pays se classent à la première place parmi les marques
des provinces. Depuis que le Groupe Feiyue a établi dix-huit filiales
dans des pays étrangers, le volume de ses exportations atteint
actuellement 100 millions de yuans. La moitié de son marché se
situe en Europe, aux États-Unis et au Japon.
Selon
le rapport politique présenté par le président Jiang Zemin :
« Avec l’approfondissement de la réforme, l’élargissement
de l’ouverture et le développement économique et culturel, la
classe ouvrière chinoise voit sans cesse grossir ses rangs et
élever son niveau de qualification. La classe ouvrière, y compris
les intellectuels, a toujours constitué, avec les masses paysannes,
la force fondamentale qui impulse le développement des
forces productives avancées et le progrès général de notre société.
Les créateurs et le personnel technique des entreprises scientifiques
et technologiques privées, les gestionnaires, ingénieurs et techniciens
engagés par les entreprises à capitaux étrangers, les travailleurs
individuels, les propriétaires d’entreprises privées, les employés
des organismes intermédiaires, les membres des professions libérales,
etc., toutes ces couches sociales, qui sont apparues au cours
de la mutation sociale, sont des constructeurs de l’œuvre du socialisme
à la chinoise. »
Selon
ses dires, M. Qiu veut bien gérer son entreprise privée en déployant
tous ses efforts. En tant que paysan d’origine, il peut aussi
réaliser de grandes affaires. Encouragé par le gouvernement, il
est confiant de conduire ses ouvriers vers le succès.
Li
Suli
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Li
Suli (1re adr.) au XVIe Congrès
du Parti. |
Li
Suli est une receveuse serviable et prévenante, une travailleuse
modèle connue en Chine et qui a été déléguée des XVe
et XVIe Congrès du PCC. Elle sert le peuple de tout
son cœur depuis une dizaine d’années de travail assidu. En 1981,
cinq ans après la fin de la révolution culturelle, le service
attentionné de la receveuse Li Suli a servi de modèle dans le
secteur tertiaire. Son niveau supérieur de service est une force
qui suscite le perfectionnement des autres, et lui a permis de
se lier d’amitié profonde avec les masses.
Li
Suli respecte toujours les standards exigés, et son service est
profondément humain : aider les personnes âgées, les enfants,
les malades, les femmes enceintes et les handicapés ; s’assurer
que les employés de bureau arrivent à temps, même à l’heure de
pointe ; indiquer aux voyageurs qui ne sont pas familiers avec
l’endroit la station où ils doivent descendre, et rappeler à l’ordre
les enfants trop espiègles.
Li Suli est surnommée la « canne des vieux », les « yeux
des aveugles », le « guide des provinciaux », l’«
infirmière des malades » et l’ « amie intime des
masses ».
Bien
que Li Suli soit une receveuse et que son travail semble bien
ordinaire, elle possède toutes les qualités requises pour être
une jeune d’avant-garde de l’époque de la réforme. Ses succès
illustrent bien qu’une société avancée offre toujours des opportunités
aux jeunes qui font preuve d’initiative. Li Suli ne se satisfait
pas de la routine ; elle a commencé à apprendre l’anglais,
le langage des sourds-muets, la psychologie et des connaissances
concernant sa profession. Par ailleurs, elle s’efforce de connaître
les détails de la situation le long du parcours de l’autobus,
afin d’offrir des services de plus en plus adéquats. Les efforts
de Li aident à offrir l’image d’une métropole internationale.
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Li
Suli (1er rang, adr.) à son poste de travail. |
Le
10 décembre 1999, Li Suli a lancé une ligne téléphonique spéciale
à Beijing. Chaque jour, elle dirige une trentaine de travailleurs
qui répondent à plus de 7 000 questions. Celles-ci concernent
non seulement les lignes d’autobus, mais encore la vie courante.
Cette ligne spéciale correspond à la demande de l’époque et est
un des symboles du progrès réalisé au fil du temps.
Depuis
une dizaine d’années, la tendance de poursuivre des études pour
se cultiver a incité Li Suli à profiter de ses loisirs pour maîtriser
des connaissances sur l’économie. Elle a été admise à l’Institut
de l’industrie électronique de l’Université des communications
de Beijing.
Au
cours du XVIe Congrès du Parti, Li Suli s’est montrée
une déléguée remarquable grâce à sa compétence et à sa confiance
inébranlable. « En plus de mener à bien son propre travail,
dans notre époque des sciences et techniques de pointe, il faut
saisir l’occasion d’étudier. C’est la conclusion tirée de mes
propres expériences de vingt ans de travail », déclare Li Suli.
Yu
Zhengsheng
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M. Yu
Zhengsheng. |
Yu
Zhengsheng était délégué du XVIe Congrès du Parti et
est secrétaire du comité du Parti de la province du Hubei. En
1967, il a été diplômé de l’Institut de travaux militaires de
Harbin, département du contrôle automatique. Plus tard, il a travaillé
comme technicien, comme ingénieur, a été nommé vice-président
de l’Institut de recherche et a occupé ensuite des postes de fonctionnaire
aux différents échelons. En 2001, il a été transféré du poste
de chef du département de construction à celui de secrétaire du
comité du Parti de la province.
M.
Yu a reçu une bonne éducation. Tout comme beaucoup de fonctionnaires,
c’est un technicien, une caractéristique courante dans la sélection
des fonctionnaires spécialisés. Depuis l’application de la politique
de réforme et d’ouverture, la sélection du personnel spécialisé,
surtout du personnel scientifique, se fait de manière réaliste,
ce qui correspond aux aspirations du peuple.
« Lorsque
j’étais chef de département à Beijing, j’éprouvais bien des difficultés
à réussir une affaire, à unifier les points de vue et à coordonner
les efforts de différents départements. Cependant, à titre de
secrétaire du comité du Parti de la province du Hubei, je dois
résoudre les questions terre à terre que posent les masses. Chaque
endroit a ses problèmes. À mon avis, un fonctionnaire local doit
posséder le sens du résultat », dit M. Yu.
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Les
paysans de la région montagneuse de Xiangfan (Hubei) tirent
parti du tourisme. |
Autrefois,
on disait qu’être un bon fonctionnaire chinois consistait à ne
pas commettre d’erreurs. Aujourd’hui, un bon fonctionnaire, surtout
le fonctionnaire local, doit réaliser des miracles qu’approuvent
les masses. Sans aucun doute, cela peut être une force motrice
pour les fonctionnaires qui cherchent à être réalistes. Le Hubei
est une grande province peuplée, son nombre d’habitants occupe
la neuvième place du pays ; il est aussi une grande province
industrielle : le nombre d’ouvriers et la valeur de la production
des entreprises publiques représentent quelque 70 % du total des
entreprises. La valeur globale de la production de l’industrie
lourde représente quelque 70 % de la valeur industrielle totale.
Le Hubei est encore une grande province agricole et une région
productrice de céréales et de coton. Elle se classe au premier
rang pour sa pisciculture. En tant que grande province aux plans
des sciences et de l’éducation,
elle possède un grand nombre d’universités et d’étudiants.
Par ailleurs, sa localisation au centre de la Chine en fait un
nœud de communications fluviales, ferroviaires et routières, et
elle jouit d’une importante position stratégique en matière de
transports. Toutefois, le Hubei est aussi une province pauvre.
Ses revenus annuels n’atteignent que 38,5 milliards de yuans.
Victime d’inondations, cette province a connu des pertes de dizaines
de milliards de yuans en 1998.
Ses
trois avantages dans la région sont : l’industrie de transformation,
l’agriculture, l’exploitation des sciences et techniques. Ses
quatre insuffisances sont : peu de villes côtières et de
régions ouvertes, davantage d’entreprises publiques et de personnel
licencié, le prix faible des céréales, une situation difficile
pour une région productrice de céréales et de coton qui subit
une forte pression pour réajuster la structure agricole et qui
a une proportion élevée de production céréalière et cotonnière,
enfin le taux élevé de sa population paysanne et le fort pourcentage
que représente l’industrie lourde. Ce sont les défis qu’affronte
M. Yu.
Le
problème du chômage a aussi créé beaucoup de difficultés tant
dans les districts que dans des entreprises militaires. Pour résoudre
le problème de subsistance des personnes licenciées, le gouvernement
a pris une série de mesures, y compris une politique d’encouragement
de la production individuelle et de l’exploitation privée et une
politique d'exonération des impôts des particuliers. Les grandes
entreprises appliquent une politique de séparation de la production
principale d’avec la production subsidiaire. Citons l’exemple
du complexe sidérurgique de Wuhan : il occupe du personnel
licencié dans des activités subsidiaires pour résoudre une part
du problème du chômage et distingue bien ces activités de son
activité principale.
Selon
M. Yu, la réforme des entreprise doit observer de manière stricte
et sauvegarder les droits et intérêts des employés. Le versement
intégral et ponctuel du revenu minimum garanti avant réinsertion
a été pratiquement assuré aux ouvriers et employés licenciés des
entreprises publiques Bien sûr, la mesure principale consiste
à accélérer le développement industriel. De pair avec l’introduction
des investissements étrangers, il faut intensifier la transformation
du système d’entreprise, améliorer les conditions de travail et
créer de plus en plus de postes
pour des employés licenciés.
Nous
devrons prendre des mesures encore plus énergiques pour augmenter
par tous les moyens les revenus des paysans et alléger leurs charges.
Mais la mesure principale consiste à élever la production agricole
à développer l’économie.
L’application
de la politique de réforme et d’ouverture sur l’extérieur a renforcé
la conscience démocratique et celle de la participation. Le peuple
suit de près les affaires publiques et les sujets d’intérêt vital,
de sorte que M. Yu met l’accent
sur cette prise de conscience des masses. Aussi, un jour, il a
effectué des enquêtes dans un canton et un village pour connaître
la situation de la réforme fiscale. Le canton avait introduit
cette réforme, mais le village ne l’appliquait pas correctement.
La
pensée importante de la « triple représentativité »
est une conclusion scientifique tirée des expériences historiques.
Elle représente les intérêts fondamentaux de la grande masse des
travailleurs. En tant que fonctionnaire local, M. Yu sait qu’il
ne doit pas oublier l’intérêt du peuple.