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Les relations sino-françaises : en attente d’une progression stable et durable

2018-02-01 10:19:00 Source:La Chine au présent Auteur:ZHANG JINLING*
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Sur l’invitation du président chinois Xi Jinping, le président français M. Emmanuel Macron a effectué une visite d’État en Chine d’une durée de trois jours, du 8 au 10 janvier 2018, à la veille des célébrations du 54e anniversaire de l’établissement des relations diplomatiques entre la Chine et la France. L’occasion pour ces deux pays qui ont une influence mondiale d’accueillir de nouvelles opportunités de développement. La Chine, qui vient d’entrer dans une nouvelle ère du socialisme à la chinoise, préconise aujourd’hui de construire une communauté de destin pour l’humanité ; la France, de son côté, accélère la mise en place de réformes profondes dans les sphères politique, économique et sociale, sortant progressivement de la situation délicate dans laquelle elle était empêtrée depuis des années. Dans ce contexte, cette rencontre entre les deux chefs d’État était très attendue. Le président chinois Xi Jinping avait même déclaré : « Les relations sino-françaises dans la nouvelle ère s’annoncent prometteuses. »

 

Xi Jinping et Emmanuel Macron rencontrent les entrepreneurs

participant à la première réunion du Conseil d’entreprises

franco-chinois, le 9 janvier.

 

Deux pays qui ont à cœur de coopérer

 

M. Macron est le premier chef d’État étranger à avoir effectué une visite en Chine en ce début d’année 2018 et le premier chef d’État européen à être venu dans le pays suite au XIXe Congrès du Parti communiste chinois qui s’est tenu en octobre 2017. La Chine est ainsi le tout premier pays dans lequel M. Macron s’est rendu en 2018, et même le premier pays asiatique dans lequel il a effectué une visite depuis son investiture. D’ordinaire, le début d’année est un temps que le président consacre à adresser ses vœux aux différentes institutions publiques, mais M. Macron a rompu avec la tradition afin d’organiser ce déplacement en Chine, considérant qu’il revêtait une « importance prioritaire ». D’ailleurs, le planning bien ficelé de cette visite est révélateur de l’importance que les deux pays accordent à leurs relations bilatérales.

 

Et ce n’est pas tout. Au-delà de ce planning chargé, la partie française a déployé des efforts importants pour que cet événement diplomatique du début d’année puisse avoir lieu. Dès octobre 2017, les préparatifs pour la visite de M. Macron ont méticuleusement commencé à tous égards. Tout d’abord, plusieurs ministres ont été envoyés en « éclaireurs », puis le 5e Dialogue économique et financier sino-français de haut niveau a été organisé dans l’objectif de revitaliser le partenariat stratégique économique et financier entre les deux pays. Fin 2017, son épouse, Mme Brigitte Macron, s’est rendue au zoo de Beauval pour baptiser le bébé procréé par les pandas Yuanzi et Huanhuan, prêtés à la France par la Chine. Elle l’a nommé « Yuan Meng » (« le rêve qui se réalise »), allégorie du croisement entre le « rêve français », le « rêve européen » et le « rêve chinois ».

 

Le président français et sa femme visitent la Grande Pagode

 de l’Oie sauvage à Xi’an, le 8 janvier.

 

Xi’an a été la première étape de la visite de M. Macron, ce qui est loin d’être anodin, puisque cette ville marquait le point de départ de l’ancienne Route de la Soie. Il a fait honneur au président chinois Xi Jinping qui, en 2014, avait choisi d’entreprendre sa première visite d’État en France en commençant par Lyon, ville européenne à l’autre extrémité de l’ancienne Route de la Soie. Ces visites officielles des deux chefs d’État se sont donc fait écho. Par ce biais, la France souhaitait émettre un signal fort, attestant de sa volonté de renforcer la coopération avec la Chine dans le cadre de l’initiative des nouvelles Routes de la Soie.

 

Dans le même temps, en réponse à la « diplomatie du panda » pratiquée par la Chine, M. Macron a offert à son homologue chinois Xi Jinping un cheval de la garde républicaine française, espérant que cette visite « portera rapidement ses fruits, comme un cheval au galop », en clin d’œil à une expression chinoise.

 

À travers ces subtiles métaphores, la France a fait savoir l’importance toute particulière qu’elle attache à cette visite et a exprimé son amitié envers la Chine. Pourtant, peu de temps après son accession à la présidence, à l’occasion d’un sommet européen en juin 2017, M. Macron avait demandé qu’un contrôle plus rigoureux soit exécuté sur les investissements et les fusions-acquisitions réalisés par les firmes chinoises, afin de protéger les entreprises européennes contre une prétendue « concurrence déloyale ». Naturellement, il convient alors de se demander si toutes les préparations décrites plus haut ne s’inscrivaient pas en fait dans une mise en scène diplomatique habilement orchestrée.

 

En outre, juste avant le déplacement de M. Macron en Chine, certains médias français ont vivement débattu de la question suivante : « La Chine, partenaire ou ennemi ? » De nombreux soi-disant experts ont déclaré que la Chine, au terme de son développement, ne ferait qu’une bouchée de la France. Les gens se sont donc méfiés de l’attitude amicale de M. Macron, craignant qu’elle ne représente pas véritablement l’opinion publique française à l’égard de la Chine. En comparaison, jamais les médias et journaux chinois ne collent à la France une telle étiquette d’ennemi. La France a toujours été vue comme une bonne amie malgré le fait qu’elle manque parfois de loyauté. D’ailleurs, en Chine, les dirigeants politiques comme la société civile ont toujours plaidé en faveur du partenariat global stratégique sino-français.

 

 

Les nouvelles Routes de la Soie, nouvelle plate-forme de coopération sino-française

 

Afin d’exprimer sa volonté de renforcer la coopération avec la Chine dans le cadre de l’initiative des nouvelles Routes de la Soie, M. Macron avait affirmé, dans une interview accordée aux médias chinois avant sa venue en Chine : « L’initiative des nouvelles Routes de la Soie […] représente une réelle opportunité pour créer des ponts, par l’échange, entre les pays et les civilisations comme autrefois les anciennes Routes de la Soie. […] Je crois qu’il est très important que l’Europe et la Chine renforcent leur concertation sur cette initiative. La France est prête pour cela à jouer un rôle moteur. » Lors de son entrevue avec le président chinois Xi Jinping, il a encore souligné l’importance stratégique que revêt le renforcement de la coopération bilatérale dans le cadre des nouvelles Routes de la Soie. Une position dont pourraient s’inspirer les pays européens, en particulier ceux d’Europe occidentale, compte tenu de l’engagement pris par le président français de « réinventer l’Europe ».

 

Mais n’oublions pas qu’au départ, la France n’était pas aussi partisane de l’initiative des nouvelles Routes de la Soie. D’une part, certaines voix populaires en Europe, y compris en France, ont qualifié cette initiative de signal d’alerte annonçant une présumée « conquête de la Chine ». D’autre part, même si tous les milieux français sont bien conscients qu’il faudrait saisir cette opportunité d’explorer conjointement les marchés tiers avec la Chine en contribuant à la construction des nouvelles Routes de la Soie, ils peinent à voir clairement les retombées potentielles et à trouver des projets spécifiques appropriés. La participation française reste donc limitée.

 

À mesure que les divers cercles (politiques, académiques, économiques, etc.) comprennent davantage l’initiative des nouvelles Routes de la Soie, ils se rendent compte rapidement des grands avantages qu’ils pourraient tirer de leur participation. C’est pourquoi ils appellent désormais la Chine et la France à approfondir leur coopération dans les domaines traditionnels comme l’aviation et l’énergie nucléaire, ainsi qu’à rechercher de nouveaux secteurs clés dans lesquels collaborer.

 

La France s’intéresse particulièrement à la proposition d’explorer communément avec la Chine les marchés tiers, notamment en Afrique, en vertu de l’initiative des nouvelles Routes de la Soie. Comme l’a affirmé M. Macron, la Chine et la France devraient, dans le cadre de cette initiative, identifier ensemble des projets spécifiques à mettre en œuvre conjointement dans des pays tiers en Afrique, en Europe ou en Asie. Ces pays tiers représentent non seulement des marchés grâce auxquels la Chine et la France peuvent réaliser une coopération gagnant-gagnant aux niveaux économique et commercial, mais font aussi office de nouveau théâtre de la diplomatie multilatérale.

 

Les domaines possibles de coopération sur les marchés tiers sont très nombreux, notamment l’aménagement d’infrastructures et l’énergie, l’aviation civile et le transport, l’agriculture et la sécurité alimentaire, la santé et les soins, et les énergies renouvelables. En plus, via cette démarche, la Chine et la France ouvriront de vastes perspectives de construction pour les pays concernés. Cependant, ce type de coopération suppose l’examen minutieux des besoins des marchés tiers et la coordination efficace des complémentarités entre la Chine et la France en matière de technologies et de fonds. Il est également nécessaire de tenir pleinement compte des intérêts économiques respectifs visés par les entreprises des deux pays. Il s’agit donc d’un processus exigeant une longue phase de tâtonnements. Les deux parties doivent encore mener des échanges approfondis pour définir clairement les domaines dans lesquels une profonde coopération est réalisable et les mécanismes spécifiques à mettre en œuvre.

Nouvelles tendances de la coopération économique et commerciale sino-française

L’influence des relations sino-françaises dépasse le cadre bilatéral et se diffuse à travers le globe. À l’échelle européenne, la Chine a toujours maintenu sa position politique à l’égard de l’Europe et soutenu l’intégration européenne ; à l’échelle mondiale, la Chine et la France, deux pays membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU, se sont engagées à défendre conjointement le multilatéralisme, à promouvoir la multi-polarisation du monde, à parfaire le système de gouvernance mondiale et à travailler main dans la main en vue d’établir un nouveau type de relations internationales et de construire une communauté de destin pour l’humanité. Que ce soit sur le plan bilatéral ou multilatéral, les chefs d’État des deux pays portent un regard positif sur l’avenir des relations sino-françaises et s’accordent à rendre le partenariat global stratégique sino-français toujours plus étroit et durable.

 

Bien que la question de consolider le partenariat global stratégique sino-français au niveau politique fût à l’ordre du jour de la visite de M. Macron en Chine, à en croire le planning, l’objectif premier consistait à promouvoir globalement la coopération économique et commerciale entre la Chine et la France. La délégation conduite par M. Macron rassemblait d’ailleurs un grand nombre de chefs d’entreprise. Sous le regard attentif des chefs d’État ou des ministres des deux pays, 25 accords de coopération intergouvernementale ou interentreprises sino-française d’une importance non négligeable ont été signés. Ils portaient sur de nombreux domaines dont le nucléaire civil, les technologies spatiales, l’intelligence artificielle, la prise en charge du vieillissement, l’aviation civile, l’écologie, la protection de l’environnement et les énergies nouvelles.

 

M. Macron voulait faire gonfler les ventes de l’Hexagone à destination de la Chine afin d’équilibrer la balance commerciale sino-française. Actuellement, c’est avec la Chine que la France réalise son plus important déficit commercial, estimé à plus de 30 milliards d’euros chaque année. Par conséquent, la France souhaite vivement inverser la tendance. Depuis longtemps, en réponse aux plaintes françaises dénonçant cette situation, la Chine a envisagé sérieusement et à maintes reprises, au travers de ses échanges économiques et commerciaux avec la France, de prendre des orientations stratégiques et politiques pour tenir compte des intérêts de la France. Cependant, en raison des limites de la structure industrielle française, le degré d’adéquation offre-demande entre l’exportation de marchandises françaises et l’importation de marchandises chinoises n’est pas élevé. Actuellement, les exportations de la France vers la Chine concernent principalement le matériel de transport ainsi que les produits mécaniques, électriques et chimiques, qui représentent près de 70 % du total exporté vers la Chine. Les exportations de la Chine vers la France, quant à elles, sont plus diversifiées et comprennent majoritairement des produits mécaniques et électriques, des textiles, des matières premières, du mobilier, des jouets et d’autres produits.

 

La France a déployé beaucoup d’efforts pour renforcer sa présence sur le marché chinois. D’un côté, elle a approfondi sa coopération avec la Chine dans ses secteurs d’excellence traditionnels. La Chine et la France coopèrent par exemple dans l’énergie nucléaire civile depuis plus de 30 ans, avec de bons résultats à la clef. Mais d’un autre côté, il est urgent d’étendre activement la coopération à d’autres domaines. À l’avenir, la Chine et la France devraient intensifier leur coopération dans des secteurs porteurs tels que l’agroalimentaire, la santé et les soins, le développement durable en milieu urbain, la fabrication écologique et la finance. Elles devraient renforcer leur collaboration dans l’innovation et mieux faire valoir leurs atouts complémentaires dans l’économie numérique, l’intelligence artificielle, la fabrication de pointe et autres, afin de réaliser un développement commun. Dans l’optique d’essayer de réduire le déficit commercial de la France avec la Chine dans de brefs délais, les deux pays prévoient d’approfondir leur coopération notamment dans l’agriculture écologique et la transformation des aliments, domaines en passe de devenir un nouveau moteur de croissance de la coopération économique et commerciale sino-française.

En outre, deux événements méritent d’être mentionnés. Premièrement, Business France et JD.com ont signé un mémorandum d’entente et de coopération. En vertu de ce document, JD.com s’engage, d’ici les deux prochaines années, à établir un centre logistique en France et à développer la vente de produits français via sa plateforme pour atteindre un total de 2 milliards d’euros. La Chine possède une riche expérience en matière d’e-commerce et a su élaborer un modèle d’affaires efficace dont aimerait bénéficier la France. Deuxièmement, la Chine et la France envisagent d’explorer conjointement le marché des seniors. Les deux pays proposent de mettre en place un comité de pilotage de la coopération dans ce secteur ; ils s’engagent à concevoir, développer et fabriquer des biens destinés aux seniors ainsi qu’à fournir à ceux-ci une variété de services professionnels. Ils prévoient d’élargir leur coopération en vue d’introduire sur le marché chinois le modèle français de retraite et de maisons de retraite. L’expertise française dans la prise en charge des personnes âgées vaut la peine d’être étudiée en Chine.

 

L’approfondissement de la coopération économique et commerciale avec la Chine et l’exploration conjointe des marchés tiers permettront de soutenir avec force les grandes réformes socio-économiques lancées en France. Par conséquent, la France formule le vœu de promouvoir et d’accélérer la jonction entre son grand projet, à savoir l’« Industrie du Futur », et le grand projet de la Chine, à savoir « Made in China 2025 », en mettant l’accent sur la coopération pragmatique dans l’investissement, l’automobile, l’aérospatial, le nucléaire, la fabrication de pointe, la finance verte, la construction des nouvelles Routes de la Soie et l’exploration commune des marchés tiers.

 

Afin d’approfondir et de consolider la coopération entre leur milieu économique, la Chine et la France ont également encouragé vigoureusement la mise en place de divers types de mécanismes. Citons, par exemple, le Conseil d’entreprises franco-chinois qui a été fondé en présence des deux chefs d’État et qui réunit parmi ses membres les meilleures entreprises des deux pays ; le fonds d’investissement sino-français d’un montant de 1 milliard d’euros, créé pour favoriser le développement des entreprises de taille moyenne ; ou encore les comités mixtes de coopération mis en place dans certains secteurs spécifiques.

 

Globalement, grâce aux efforts conjoints de la Chine et de la France, la coopération économique et commerciale entre les deux pays s’est orientée vers une nouvelle tendance structurelle, dont les perspectives sont très attendues. Cependant, connaissant la diplomatie française, nous avons de bonnes raisons d’émettre des réserves sur la volonté et l’engagement sincères de la France de coopérer avec la Chine. D’une part, les politiques économiques et commerciales adoptées par M. Macron à l’égard de la Chine affichent des penchants protectionnistes. D’autre part, même si Macron a reconnu dans ses discours à Xi’an et à Beijing que la Chine avait subi, sans broncher, de nombreux traitements injustes de la part de l’Europe, peut-il vraiment amener la France et chacun des pays européens à renoncer à leurs idées préconçues pour essayer de comprendre réellement la Chine, objectivement et justement ? Nous devrions plutôt placer nos espoirs dans l’approfondissement des échanges culturels entre nos deux peuples, en particulier chez la jeune génération qui trouve des consensus à l’égard des relations bilatérales futures.

 

Pour conclure, nous espérons sincèrement que la Chine et la France sauront inscrire leur coopération dans la durée, qu’elles resserreront leurs liens stratégiques et uniront leurs forces au profit de leur peuple comme du monde entier.

 

 

*ZHANG JINLING est chercheur associé à l’Institut d’études européennes de l’Académie des sciences sociales de Chine.

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