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La reprise post-COVID-19 insistera sur l’écologie et le bas carbone

2020-07-23 16:46:00 Source:La Chine au présent Auteur:MANISH BAPNA
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MANISH BAPNA

    Selon l’Agence internationale de l’énergie qui a examiné l’impact du COVID-19 sur le changement climatique, les émissions mondiales de gaz à effet de serre devraient baisser d’environ 8 % en 2020, sous l’effet de la contraction de la production industrielle, de la diminution de la consommation d’énergies ainsi que des changements intervenus au niveau des transports. Cette réduction des émissions due au ralentissement économique ne pourrait être que temporaire et les rejets de polluants pourraient repartir à la hausse et dépasser les niveaux observés avant l’épidémie. Par exemple, après la crise financière mondiale de 2008, les émissions mondiales de gaz à effet de serre avaient diminué de 1,4 % en 2009 ; mais en 2010, la consommation d’énergies fossiles et la production de ciment avaient fait grimper ces émissions de 5,9 %, une hausse bien supérieure à la baisse précédente. Les pays doivent effectuer des changements structurels majeurs et à long terme que le monde puisse véritablement progresser sur la voie d’un développement plus durable.

    À l’ère post-COVID-19, les gouvernements désireux de créer des emplois et de stimuler la croissance formulent des plans de relance économique et ont alors le choix entre soit poursuivre les méthodes de développement non durables, qui s’avèrent hautement polluantes et peu efficaces, soit accélérer l’indispensable transition, développer des ressources bas carbone et abordables ainsi que des villes et des systèmes de transport durables. Cette dernière option est bien entendu la voie à suivre.

    Pour se remettre du COVID-19, les gouvernements et les institutions financières internationales ont mobilisé plus de 10 000 milliards de dollars de fonds. Du jamais vu ! La situation internationale l’an prochain déterminera la capacité à apporter des réponses à l’épineuse et urgente question du développement durable.


Quatre enseignements à tirer

    À l’heure actuelle, nous ne connaissons pas encore toute l’ampleur des répercussions qu’aura le COVID-19. Néanmoins, il convient pour la communauté internationale de tirer quatre enseignements de cette pandémie.

    Premièrement, le COVID-19 a clairement montré les faiblesses socioéconomiques  face aux risques ainsi que les corrélations qui existent souvent entre ces risques. La crise sanitaire affectera tout le monde, mais les groupes les plus vulnérables seront les plus durement touchés, qui seront moins capables vulnérables d’affronter d’autres risques, y compris ceux liés au dérèglement climatique (sécheresses, inondations, etc.). Cette épidémie est un « multiplicateur de menaces » : elle souligne l’urgence qu’il y a d’accroître notre résilience face aux pandémies ainsi qu’aux risques découlant du réchauffement climatique et de la dégradation des écosystèmes.

    Deuxièmement, la crise épidémique a révélé qu’il est impératif de prendre des mesures sans tarder et à large échelle dès l’émergence d’une crise. Dans cette optique, de nombreux pays ont pris des dispositions inédites. Pour empêcher la propagation du COVID-19, des appels au confinement, plus ou moins stricts, ont été lancés. Au début du mois de mai, plus de la moitié de la population mondiale était confinée. Les économies du G20 ont annoncé leur volonté d’accorder un soutien financier d’environ 6 000 milliards de dollars, et davantage sera encore débloqué. Il s’agit d’efforts colossaux que l’on aurait crus impossibles quelques mois auparavant. En outre, comme en témoigne l’expérience de certains pays, il est possible de lutter efficacement à la fois contre l’épidémie et contre le changement climatique. Ainsi, la République de Corée a allié la mise en place progressive de tests de dépistage avec un isolement et une prise en charge précoces des patients, ce qui a permis d’abaisser le taux journalier de contamination ; entre-temps, le parti au pouvoir s’est donné pour mission d’arriver au « zéro émission nette »  d’ici 2050 et de cesser d’allouer des subventions aux centrales à charbon nouvellement construites. Au Chili, un « plan climat  » national plus ambitieux a été voté mettant l’accent sur le développement durable. Pour stimuler la reprise économique, les parlementaires européens ont affirmé récemment soutenir en bloc le Pacte vert pour l’Europe, visant « zéro émission nette » de gaz à effet de serre d’ici 2050.

    Troisièmement, l’environnement et la santé sont directement liés. Par exemple, la déforestation a abattu les barrières naturelles qui séparaient les animaux et les hommes. Ces quarante dernières années, un certain nombre d’épidémies dont la maladie à virus Ebola, le syndrome respiratoire du Moyen-Orient, le syndrome respiratoire aigu sévère ou encore le sida se sont propagés, faisant peser une lourde menace sur la santé publique mondiale. Parmi ces infections, presque toutes étaient d’origine animale, avant d’être transmises par l’homme. Avec l’urbanisation croissante, la population en hausse et les voyages qui se généralisent, ces maladies peuvent se diffuser très rapidement. Les infrastructures sanitaires se retrouvent rapidement dépassées par les événements et une pandémie s’ensuit. Les changements climatiques et leurs répercussions sur la pollution de l’air, de l’eau et des sols mettent l’humanité en péril. On estime à 4,2 millions le nombre de personnes qui meurent prématurément de la pollution atmosphérique chaque année. Elle provoque également des maladies respiratoires graves, comme l’asthme et des maladies pulmonaires, qui augmentent le risque de contracter le COVID-19.

    Quatrièmement, il existe un autre lien fort entre la crise du COVID-19 et le développement durable, dont peu de gens parlent aujourd’hui : certains changements de comportement que nous avons observés dernièrement vont persister. Citons à titre d’illustration l’essor des réunions virtuelles et du télétravail, faisant baisser les voyages longue distance et les trajets en transports publics. Certains changements d’habitude (comme la réduction des déplacements en avion) sont appelés à durer et  pourraient remodeler le monde post-COVID-19.

     À court terme, les gouvernements s’activent en priorité à répondre aux crises de santé publique soudaines et aident les entreprises et les personnes frappées par l’épidémie. Il ne faut pas pour autant relâcher les efforts de surveillance environnementale et sanitaire ou s’entêter à investir dans des industries rejetant une grande quantité de gaz à effet de serre. Il est prouvé que sur tous les marchés importants, il est bien moins cher à présent de recourir aux énergies renouvelables (l’éolien et le solaire, par exemple) que de produire de l’électricité dans des centrales thermiques. Les pays devraient également réorienter les investissements dans l’exploitation pétrolière et gazière à hauts risques vers d’autres domaines, afin de garantir à long terme les revenus des salariés et de bâtir une économie plus diversifiée. Les gouvernements ont tout intérêt à explorer les possibilités d’intensifier la mise en place d’infrastructures durables et de systèmes valorisant les ressources naturelles, de réseaux intelligents, de mesures garantissant l’efficacité énergétique des bâtiments, de transports publics et de bornes de recharge pour véhicules électriques (VE), par exemple.


Un développement post-COVID-19 bas carbone et résilient

    La Chine est le premier pays au monde à avoir été frappé de plein fouet par le COVID-19. Depuis le confinement en janvier, la croissance a considérablement ralenti. Au premier trimestre de 2020, le PIB chinois a connu une chute de 6,8 % en glissement annuel. C’est la première fois qu’il enregistrait une baisse depuis 1992, année où le pays a commencé à le comptabiliser.

    En Chine, le gouvernement central et les autorités locales appliquent actuellement des plans visant à relancer l’économie. Ils dirigent les investissements vers des filières stratégiques, notamment les installations de recharge pour VE, les énergies renouvelables et les éco-cités, en vue d’aider le pays à se remettre sur pied après la crise du COVID-19 et à marcher vers un avenir meilleur.

    D’abord, pour les VE, la Chine était déjà le premier marché mondial en 2019, avec 3,8 millions mis en circulation, soit 5 % du volume total des ventes annuelles d’automobiles dans le pays. La Chine veut porter cette part à 25 % d’ici 2025. Cependant, même si la Chine possède le plus vaste réseau de points de recharge publics du globe (la moitié du total mondial), leur nombre demeure insuffisant pour couvrir l’intégralité du territoire. Il est capital de multiplier les installations de recharge afin de répondre à la demande des VE déjà en circulation, d’encourager les consommateurs à acheter ce type de voitures propres et d’augmenter la proportion de VE sur nos routes.

    Ensuite, les énergies renouvelables affichent une compétitivité prix en hausse, mais la combustion du charbon reste problématique. La Chine doit aujourd’hui saisir l’opportunité d’adopter des énergies plus propres. L’investissement dans les énergies renouvelables sera propice au développement d’une économie bas carbone et contribuera à la création de postes.

    Enfin, la pandémie a souligné l’importance de construire une « Chine saine », notamment des éco-cités. En 2016, le gouvernement chinois a élaboré le plan La Chine en bonne santé 2030 pour faire de la santé une priorité. Dans le cadre de ce plan ambitieux, l’État chinois s’engage à réduire la pollution de l’air, de l’eau et des sols, à appliquer des normes strictes pour limiter les émissions industrielles, à améliorer les installations bénéfiques pour la santé publique, et à promouvoir la sécurité routière. Ce plan marque un tournant majeur dans la vision chinoise de la santé, suivant désormais la célèbre maxime : « Mieux vaut prévenir que guérir ». En effet, il ne s’agit plus seulement de construire plus d’hôpitaux, mais de maintenir la bonne condition physique et mentale des habitants. Investir dans des infrastructures vertes peut améliorer la santé, tout en procurant des gains économiques. Dans les villes, il est utile de planter des arbres et d’aménager des espaces naturels pour améliorer la qualité de l’air, abaisser la température, réduire la consommation d’énergies, contribuer au bien-être de la population et accroître la capacité des villes à répondre au changement climatique. Par exemple, les arbres qui poussent dans les parcs à New York peuvent générer des avantages économiques avoisinant les 120 millions de dollars par an, soit cinq fois le frais annuels déboursés pour l’entretien de ces parcs. Parmi les autres possibilités, citons l’élargissement des pistes cyclables, des trottoirs et des espaces publics pour encourager le public à se dépenser davantage, la multiplication des d’options de transport partagé et de micro-mobilité, l’amélioration des systèmes de traitement des eaux usées et des déchets, la purification de notre environnement et la réduction du volume de déchets.


Un 14ème Plan quinquennal ambitieux

    Au cours de ces cinq dernières années, la Chine a réalisé des progrès significatifs dans ses objectifs écologiques. Elle a réduit la pollution atmosphérique dans les villes, investi massivement dans les énergies renouvelables, élargi son parc de véhicules électriques, et surtout fixé des objectifs d’émissions et joué un rôle central dans l’Accord de Paris sur les changements climatiques. La Chine élabore actuellement son 14e Plan quinquennal, et l’oriente vers un développement de haute qualité et vert. Elle doit donc accorder une attention particulière aux changements climatiques, à l’initiative de « la Ceinture et la Route » et aux chaînes d’approvisionnement mondiales.

    Premièrement, la Chine s’efforce de réaliser un développement bas carbone et résilient. Il s’agit d’un modèle adéquat pour stimuler la croissance économique et répondre au changement climatique mondial. Dans son 14e Plan quinquennal, la Chine devrait définir des objectifs fermes pour les émissions de gaz à effet de serre. De nombreuses provinces et villes chinoises de premier plan ont cette capacité d’atteindre à l’avance leur pic des émissions de gaz à effet de serre. De plus, étant donné que l’énergie éolienne et l’énergie solaire atteindront prochainement la parité réseau, la Chine peut accélérer sa sortie du charbon. Le gouvernement chinois pourra également soutenir l’investissement pour le développement de villes compactes et des transports en commun, de même que pour l’accroissement de l’efficacité énergétique du béton et de l’acier ainsi que des appareils électriques et de l’éclairage public.

    Deuxièmement, l’initiative chinoise de « la Ceinture et la Route » est l’un des projets de développement les plus vastes et les plus importants au monde, et aura de profondes implications pour l’environnement. Les investissements de la Chine dans les pays qui y participent seront d’autant plus importants que ces pays veulent créer des emplois et redynamiser leur économie. Actuellement, une forte proportion de ces investissements est consacrée à des projets énergétiques et de transport conventionnels ayant un impact négatif sur l’environnement. L’écologisation de ces investissements sera essentielle pour lutter contre les changements climatiques et la perte de biodiversité, et promouvoir une croissance de haute qualité dans ces pays. Le gouvernement chinois devrait proposer des mesures incitatives pour encourager les énergies renouvelables et les transports publics, et décourager les projets à base de combustibles fossiles qui sont souvent plus coûteux. La Chine peut également soutenir le renforcement des capacités « vertes » des agents de la fonction publique dans ces pays afin qu’ils soient en mesure de mieux concevoir et de mettre en œuvre un développement vert.

    Troisièmement, la pandémie actuelle du COVID-19 a fondamentalement perturbé l’économie mondiale en quelques mois et exposé les faiblesses des chaînes de valeur mondiales aux changements rapides et inattendus des facteurs provenant de l’environnement naturel. Une attention particulière doit être accordée aux chaînes de valeur des produits de base, comme le soja, le bœuf, le bois et l’huile de palme, ces derniers étant souvent produits d’une manière qui conduit à la déforestation en milieu tropical, à la perte de biodiversité et aux changements climatiques. La Chine, en tant que plus grand importateur de ces produits, peut contribuer à résoudre ce problème en veillant à ce qu’ils soient produits de manière durable. Le gouvernement devrait envisager de faire une annonce importante sur ce sujet lors de la prochaine Conférence internationale sur la biodiversité à Kunming.


Unis dans les difficultés

    En quelques mois seulement, le COVID-19 a chamboulé l’économie mondiale, exposant la vulnérabilité des chaînes de valeur mondiales face aux brusques changements causés par des facteurs environnementaux ou naturels. En réponse à des crises telles que la pandémie et le ralentissement économique, le monde doit défendre l’idée de « rester unis dans les difficultés » et de « fonder une communauté de destin pour l’humanité ». Nous ne pourrons surmonter ces défis mondiaux que si les nations travaillent main dans la main. Malheureusement, de nombreux pays courent dans des directions opposées ou ont tendance à faire cavalier seul, ce qui n’est pas l’attitude appropriée. De plus en plus de pays mettent en œuvre le principe de « distanciation sociale » ; toutefois, en ce moment même, nous devons accroître la coopération internationale, et non la diminuer. L’humanité a besoin de s’élancer vers un avenir plus inclusif, prospère et durable.

     Le World Resources Institute est un organisme de recherche mondial non gouvernemental et indépendant, avec des bureaux de représentation implantés notamment en Chine, en Inde, au Brésil, en Indonésie, aux Pays-Bas, aux États-Unis et en Afrique. Il étudie les relations entre environnement, économie et développement humain, en s’intéressant tout particulièrement à des questions comme l’énergie, l’aménagement urbain, les ressources en eau, les forêts, l’alimentation, le changement climatique, afin de promouvoir une croissance économique plus respectueuse de l’environnement, plus résiliente et plus inclusive. Depuis janvier de cette année, avec l’émergence de cette crise de santé publique, nous avons vite compris que l’épidémie aurait de vastes répercussions à long terme. Néanmoins, nous sommes d’avis qu’une « reprise plus résiliente » sera source d’opportunités.

 

*MANISH BAPNA est vice-président exécutif et directeur général du World Resources Institute.

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