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Du découplage à la reconnexion

2021-03-02 12:56:00 Source:La Chine au présent Auteur:David Gosset
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Alors que les tendances historiques les plus profondes se déploient en grande partie indépendamment de tout individu, qu’il soit le commandant en chef de la plus grande puissance du monde ou n’importe qui d’autre, les changements induits par l’élection de Joe Biden en tant que 46e président américain ne doivent pas être surestimés.

 

Cependant, par rapport à la politique de son prédécesseur immédiat, les réorientations que la nouvelle administration américaine opèrera seront importantes.

 

Faisant suite à un mandat structuré autour de l’obsession de « l’Amérique d’abord », le nouveau chapitre ouvert par le président élu Joe Biden portera, à la fois sur la forme et le fond, sur la prééminence de la diplomatie.

 

Dans ce contexte, l’Union européenne, la Chine et les États-Unis se trouvent alignés sur trois enjeux majeurs : le multilatéralisme, la gouvernance mondiale et la reconnaissance de la gravité de la crise climatique.

 

Les nouvelles relations sino-américaines auront une influence sur le monde entier.

 

Un virage positif

 

Contrairement à Donald J. Trump, l’ancien vice-président de Barack Obama considère le multilatéralisme comme la méthode juste pour affronter les problèmes transnationaux de notre siècle. En restant à l’écart de la logique de l’unilatéralisme, l’approche de Joe Biden en matière de politique étrangère sera similaire à celle que préconisent l’UE et la Chine.

 

Avec un partisan de l’internationalisme siégeant dans le Bureau ovale, le système des Nations Unies sera mieux placé pour répondre à l’appel en faveur d’une gouvernance mondiale plus efficace. La loi « Helms-Biden » rappelle que depuis son passage au Sénat américain, le sénateur du Delaware a toujours attaché une grande importance à l’organisation intergouvernementale. Dans le domaine de la gouvernance mondiale, les politiques des États-Unis, de l’UE et de la Chine se renforceront mutuellement au profit de la communauté des nations.

 

Le président américain de 78 ans a confirmé le 20 janvier, jour de son investiture, le retour de son pays au sein de l’Organisation mondiale de la santé, alors que l’humanité est confrontée à une pandémie mortelle. En tant que secrétaire d’État, Antony Blinken, dont les affinités avec la France sont bien connues, pourrait bien ramener son pays au sein de l’UNESCO basée à Paris. Dans le domaine de la sécurité, une administration Biden pourrait également bien rejoindre le Plan d’action global conjoint, le cadre de l’accord nucléaire iranien qui fut signé il y a 5 ans.

 

Sur le défi à long terme posé par le dérèglement climatique, le 46e président américain incarne un virage positif qui rappelle la configuration géopolitique propice à l’Accord de Paris de 2015. La nomination par Joe Biden de John Kerry comme son envoyé spécial pour le climat annonçait que les États-Unis rejoindraient l’Accord de Paris. Ceci a également été acté le 20 janvier.

 

Il est donc évident que dans les quatre années à venir, l’ambition de la Chine de construire une civilisation écologique, la volonté européenne d’un « green deal » et ce que la campagne de M. Biden a présenté comme un plan pour une révolution énergétique propre et la justice environnementale rentreront en synergie et seront des sources de progrès pour l’humanité.
 
La Chine est une destination importante des exportations de soja et d’autres produits agricoles américains.

 

Les différences politiques

 

Cependant, l’élection de Joe Biden ne peut être considérée comme garantissant des relations harmonieuses sur la longue durée entre les deux plus grandes économies du monde.

 

Outre les questions habituelles que la nouvelle représentante américaine au commerce, Katherine Tai, négociera avec son homologue chinois, la nouvelle administration américaine devrait mettre l’accent sur les différences politiques qui existent entre les deux côtés du Pacifique. Ce faisant, en particulier lorsqu’il convoquera le sommet mondial pour la démocratie dans les mois à venir, M. Biden s’entourera de l’UE, du Japon et de l’Inde, tout en laissant de facto la Chine à l’écart.

 

Dans les relations avec la Chine, la politique de Trump a été une tentative de découplage dur. Ce type de découplage que certains ont qualifié à tort de nouvelle forme de guerre froide a eu un impact sur la chaîne d’approvisionnement mondiale et dans le secteur technologique.

 

Cependant, le découplage brutal de M. Trump n’a pas modifié la tendance à l’interdépendance, caractéristique sous-jacente de notre époque. De plus, cela n’a certainement pas affaibli la Chine, dont l’économie a continué à croître alors que tous les autres membres du G20 sont entrés en récession en raison de la crise du COVID-19.

 

Pour les analystes, que ce soit à Washington DC ou dans les capitales européennes, la séquence chinoise de M. Trump devrait servir de leçon, car elle montre que les déterminants de la renaissance chinoise sont largement internes au monde chinois, et ne sont certainement pas décidés à la Maison Blanche ou ailleurs.

 

Pour le dire en d’autres termes, seule une série de mesures chinoises erronées pourrait contenir un cinquième de l’humanité, mais l’esprit de « réforme et d’ouverture » empêche un tel scénario d’advenir.

 

Dans le monde post-Trump, si l’insistance de Joe Biden sur les différences idéologiques évoluait vers un découplage doux, cela ne mettrait pas fin aux interactions mondiales entre les entreprises et les populations, et ne ferait certainement pas dérailler le retour de la Chine à une position centrale.

 

Une voie plus productive

 

C’est dans une année fort triste de sinophobie, alimentée par la tentative de M. Trump de calomnier et d’isoler la Chine, que cette dernière a néanmoins pu parvenir à un accord sur le Partenariat régional économique global (RCEP) et conclure le tout aussi important accord global sur l’investissement avec l’Union européenne.

 

Sous l’influence regrettable des échos sinophobes du mandat M. Trump, Joe Biden pourrait choisir de surjouer les différences politiques qui existent entre la Chine et l’Occident. S’il s’agissait d’une tentative plus subtile de saper le développement de la Chine, cela n’aurait toutefois pas pour effet de neutraliser la force centripète de la renaissance chinoise.

 

Pour la relation sino-américaine, il existe une voie plus productive que l’UE peut aider à concrétiser. Une telle voie ne serait pas une simple variation sur le thème du découplage, mais serait un effort courageux pour se reconnecter avec sagesse.

 

Une telle reconnexion présuppose que les diplomates chinois et américains œuvrent ensemble pour résoudre les problèmes de notre temps. Leur convergence autour du multilatéralisme, de l’importance de l’ONU et de l’urgence climatique offre une opportunité de s’engager sur une voie inclusive, pacifique et durable.

 

Le commerce peut également être un domaine pour se reconnecter judicieusement. Le Partenariat transpacifique (TPP) que Barack Obama a signé en 2016 a été, en tant que tel, un échec. Ayant évolué pour devenir l’Accord global et progressif de partenariat transpacifique (CPTPP), il pourrait être un point de convergence pour les négociateurs chinois et américains.

 

Le trumpisme a manipulé une fausse dichotomie entre nationalisme et mondialisme. Cette rhétorique fallacieuse a conduit au discours sur « l’Amérique d’abord » et au découplage. Il a également réduit le positionnement sur la Chine à deux caricatures simplistes : soit la posture irrationnelle anti-Chine, soit l’étreinte éhontée d’un diable imaginaire.

 

Dans la réalité plus complexe et nuancée de la communauté des nations, l’internationalisme est l’effort de combiner les intérêts nationaux légitimes avec la nécessité de garantir la paix et la prospérité partagée pour toute l’humanité.

 

Une sage reconnexion sino-américaine est la reconnaissance du fait que les progrès au XXIe siècle dépendent de la capacité de l’Occident à travailler avec la Chine et vice versa.

 

*David Gosset est le fondateur du Forum Europe-Chine. Auteur de Limited Views on the Chinese Renaissance (2018), il a publié en 2020 China and the World (Il Mulino, Bologne).

 

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