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À l’écoute du peuple : la clé du succès de la Chine

2020-02-21 14:20:00 Source:La Chine au présent Auteur:KISHORE MAHBUBANI
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Le 18 mars 2019, dans une réunion sur la construction d’un barrage dans le village de Tangwan (Sichuan), des responsables locaux du PCC et du gouvernement recueillent les avis et répondent aux questions devant des centaines de villageois, et prennent des engagements relatifs à diverses questions sur les conditions de vie soulevées par les représentants du village.

 

Ma première visite en Chine remonte à 1980. À l’époque, la Chine était totalement différente. Quand je suis arrivé à Beijing, il n’y avait pas de voitures sur la route, mais seulement des vélos ; pas de gratte-ciel, mais seulement des petits immeubles ; pas d’hôtels modernes, mais seulement des maisons d’hôtes ordinaires.

 

A cette époque, Beijing était beaucoup plus simple et plus sobre qu’aujourd’hui, ce qui reflétait le stade de développement de la Chine. Si vous m’aviez dit en 1980 qu’à mon retour en 2019, la Chine serait prospère, avec les gratte-ciel les plus éblouissants au monde, un nombre incroyable de voitures et un niveau de vie bien meilleur et plus élevé, je vous aurais dit qu’il s’agissait d’un rêve impossible. Mais le point le plus important, c’est que la Chine a réalisé des rêves impossibles. Ces réalisations de la Chine méritent d’être célébrées.

 

À l’écoute du peuple

 

Pour certains chercheurs occidentaux, le système chinois n’est pas bon, mais les réalisations de la Chine en matière de développement apparaissent excellentes, faisant naître chez les gens un sentiment de contradiction, d’opposition. Où se situe donc la vérité?

 

Si la Chine a réussi aujourd’hui, c’est parce que le gouvernement chinois a appris à écouter la voix du peuple chinois. Si le gouvernement chinois n’avait absolument pas écouté les opinions du peuple, il n’aurait jamais réussi. En fait, la Chine a établi et développé divers mécanismes pour communiquer avec le peuple. La confiance du peuple chinois dans le gouvernement chinois dépasse 70 %, alors que celle du peuple américain dans le gouvernement américain n’est que de 30 %.

 

La civilisation écologique

 

La Chine a entrepris des réformes majeures dans de nombreux domaines et de nombreuses mesures sont très encourageantes. Ce qui m’a le plus impressionné, c’est le domaine de la civilisation écologique. Certains secteurs, comme le charbon et les mines, peuvent engranger de gros profits quotidiennement, mais nuisent gravement à l’environnement, et les générations futures devront rembourser les dégâts à long terme qui en découlent. Les pays industrialisés occidentaux ont ignoré la protection de l’environnement dans leur processus de développement, et la Chine a tiré les leçons de leurs erreurs.

 

Bien que le revenu par habitant de la Chine soit encore au niveau des pays en développement, la Chine a décidé d’investir massivement dans l’amélioration de l’environnement, encore plus que dans de nombreux pays développés. En intégrant des facteurs environnementaux au développement économique, la Chine injecte force et espoir dans le monde. J’espère que d’autres pays pourront suivre l’exemple de la Chine pour soutenir le concept de civilisation écologique.

 

La communauté de destin pour l’humanité n’est pas une idée, mais un fait, car une contraction mondiale est déjà en cours. La plupart des défis majeurs auxquels nous sommes confrontés sont mondiaux, tels que le réchauffement climatique, la crise financière, les épidémies et le terrorisme. Ces enjeux mondiaux mettent en évidence le fait que nous sommes dans un monde petit et interconnecté où nos destins sont liés.
 
Le 14 août 2019, un employé plante des végétaux aquatiques dans la rivière Zhagang, dans la vieille ville de Tangzha, au Jiangsu. Ces dernières années, les autorités locales encouragent la construction d’une civilisation écologique aquatique dans le but de protéger l’environnement et de contrôler la pollution de l’eau.

 

Une plus grande ouverture

 

À mon avis, la Chine est un pays qui peut maximiser les opportunités de la mondialisation. Je suis allé en Afrique et en Amérique du Sud. Bien qu’elles soient éloignées de la Chine, j’y vois encore une variété de produits fabriqués en Chine, ce qui montre que l’influence de la Chine s’est répandue dans le monde.

 

À l’heure actuelle, l’économie chinoise et l’économie mondiale ne sont pas encore complètement intégrées. Si la Chine peut encourager les pays à rester ouverts au commerce mondial, elle peut en bénéficier et également aider d’autres pays en développement à bien profiter de son immense marché de consommateurs. Si la Chine peut créer des opportunités pour les pays pauvres d’Afrique et d’Amérique latine, et même les pays en développement d’Asie, pour les aider à s’intégrer au marché chinois, ces pays apporteront leur soutien à la mondialisation. Je pense que tous les pays du monde devraient apprendre des relations positives entre la Chine et les dix pays de l’ASEAN. Depuis que la Chine et l’ASEAN ont signé un accord de libre-échange, le commerce bilatéral s’est développé très rapidement.

 

La capacité d’innover

 

L’innovation joue un rôle très important dans le processus de mondialisation. Le pays qui affichera une puissance d’innovation sera également le pays qui réussira. Franchement, les États-Unis sont en première place mondiale en termes d’innovation. L’écologie intelligente des États-Unis, qui est une combinaison d’universités, d’entreprises, de banques et d’institutions financières, est de loin l’écosystème le plus innovant au monde. Si la Chine veut rattraper son retard, elle devra faire face à d’énormes défis.

 

Il est vrai que dans certains domaines, la Chine est en effet très en avance, comme par exemple dans les paiements mobiles. Mais la capacité d’innover est plus importante dans son ensemble, pas seulement dans certains domaines. La Chine devrait encore améliorer sa capacité à innover. La meilleure façon est d’apprendre de l’expérience américaine : elle ne se limite pas à sélectionner des talents parmi les 330 millions d’Américains, mais auprès de 7,5 milliards de personnes dans le monde. C’est une question de talent, et c’est la raison pour laquelle les États-Unis sont l’économie la plus innovante au monde. Si vous allez dans la Silicon Valley, vous constaterez que les fondateurs de la plupart des startups sont des immigrants de Chine, d’Inde et d’Europe. Je pense que si les universités chinoises peuvent ouvrir leurs portes aux plus talentueux dans le monde et construire le même écosystème d’innovation, la Chine pourra être aussi compétitive que les États-Unis.

 

Des efforts pour une bonne  gouvernance

 

En ce qui concerne le concept de modernisation du système et de la capacité de gouvernance de l’État, proposé par la Chine, je pense que le gouvernement chinois travaille activement pour appréhender l’ajustement et le changement requis par son système politique, afin de s’adapter aux nouvelles réalités politiques et économiques. La décision de la Chine de s’efforcer de modifier son prochain plan quinquennal est une décision très sage. Bien sûr, il faut garder ce qui est utile dans le changement. La clé est que nous devons avoir ce type de processus continu d’apprentissage et de réflexion.

 

Tous les pays du monde s’efforcent de parvenir à une bonne gouvernance, mais aucun ne peut maintenir une bonne gouvernance à tout moment, et aucun pays ne peut dire précisément à quoi ressemble un bon gouvernement. Tous les pays doivent constamment se réinventer. Le plus grand danger auquel tout pays est confronté est la complaisance, et c’est aussi vrai pour la Chine. Au cours des trois à quatre dernières décennies, la Chine est devenue à bien des égards l’économie la plus prospère au monde. Mais si nous pensons que les méthodes de développement des 40 dernières années sont également applicables aux 40 prochaines années, nous commettrons des erreurs stratégiques.

 

Il y a quarante ans, le nombre de personnes à revenu intermédiaire en Chine n’était pas le plus important au monde. Aujourd’hui et au cours des 40 prochaines années, la Chine deviendra le pays comptant le plus grand nombre de personnes à revenu intermédiaire au monde. La gestion des populations à revenu intermédiaire est très différente de la gestion des pays en développement. Les défis auxquels la Chine est confrontée sont très pratiques, c’est pourquoi le prochain plan propose de promouvoir la modernisation du système et de la capacité de gouvernance de l’État. Je viens de Singapour, et même si la gestion gouvernementale de Singapour a connu beaucoup de succès, elle se transforme constamment pour s’adapter au nouveau monde à venir. Par conséquent, je pense que la meilleure chose que tous les pays puissent faire est de partager leurs expériences et de les comparer pour voir comment nous pouvons encore améliorer notre gouvernance.

 

KISHORE MAHBUBANI est professeur à l’Université nationale de Singapour.  

(Article basé sur son interview à China Report)

 

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