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Fujian et Ningxia : 20 ans de coopération face à la pauvreté

2018-09-03 11:23:00 Source:La Chine au présent Auteur:PEI JIANFEI
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Vignes à Minning, au pied est des monts Helan

 

 

PEI JIANFEI*

 

Un jour d’avril 1997, Xi Jinping, alors secrétaire adjoint du Comité du Parti pour la province du Fujian et chef du groupe dirigeant pour la lutte contre la pauvreté conjointe entre le Ningxia et le Fujian, a conduit une délégation en inspection au Ningxia. Les responsables des deux provinces ont convenu que, dans le cadre de la réduction de la pauvreté, il était nécessaire d’organiser et de mettre en œuvre une coopération Fujian-Ningxia, notamment en aménageant à Yuquanying (une localité située à l’ouest du district de Yongning, au Ningxia) une zone pilote pour l’accueil des migrants. C’est ainsi que ces deux provinces, à 2 000 km l’une de l’autre, ont noué une coopération qui dure depuis déjà 20 ans.

 

En juillet 1997, cet endroit a été baptisé le « bourg de Minning » (« min » signifiant ici le Fujian et « ning » signifiant le Ningxia), puis le « bourg de Minning » en décembre 2001. En l’espace de vingt ans, Minning a accueilli au total plus de 40 000 migrants issus de six districts défavorisés (selon le classement national) faisant partie de Xihaigu. Xihaigu est une région au Ningxia que l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) avait identifiée en 1972 parmi les endroits les plus impropres à la survie humaine.

 

En 2017, après 20 années d’inlassables efforts, le revenu annuel disponible par habitant perçu par les agriculteurs de Minning a atteint 11 976 yuans, soit 22,8 fois plus qu’en 1997, où ce montant n’était que de 500 yuans.

 

Difficile de nourrir tous les habitants de Minning…

 

Sha Jinlong, 29 ans cette année, est l’un des premiers migrants arrivés à Minning. Il n’avait qu’un an lorsqu’il a quitté son ancien lieu de résidence au district de Xiji, à Guyuan (Ningxia), aux côtés de ses parents. Avant de déménager, ceux-ci tentaient tant bien que mal de cultiver une petite parcelle de champs sur ces terres improductives afin de joindre les deux bouts.

 

En octobre 1990, un millier de ménages résidant dans les districts de Xiji et Haiyuan, au cœur de la région montagneuse au sud du Ningxia, sont partis s’installer dans la zone de développement économique de Yuquanying-Yuhai nouvellement construite dans le district de Yongning, dans la banlieue de Yinchuan (capitale du Ningxia). Ces migrants de première génération sont devenus les premiers habitants de Minning.

 

Dans les années 1980, Yuquanying était une portion du désert de Gobi, dans la plaine alluviale formée par les cônes de déjection du pied est des monts Helan. Bien que situé à une centaine de kilomètres seulement de la capitale Yinchuan, Yuquanying affichait un environnement naturel très différent. Du ciel, on pouvait voir le fleuve Jaune qui coule en ce lieu, apportant de l’eau en abondance pour l’irrigation des terres. Toutefois, le fleuve charriait autant de pierres et de sable… À cette époque, Minning était « un lieu caractérisé par les tempêtes de sable et les terres arides ».

 

À leur arrivée à Minning, les gens de la génération des parents de Sha Jinlong ont tenté de cultiver ce sol sablonneux. Mais celui-ci était composé d’une couche épaisse de graviers que même les bêches en acier ne pouvaient transpercer. Et je ne parle même pas de la récolte ! Pour préparer le terrain, il fallait tamiser le sol pour ne garder que la terre adaptée à la culture. Xie Xingchang, ancien secrétaire de la cellule du Parti du village de Funing, se rappelle avoir été troublé par cet environnement agricole hostile à son arrivée à Minning avec la première génération de migrants. « À l’époque, mon impression du désert de Gobi était la suivante : au printemps, les tempêtes de sable, si denses que vous n’arriviez plus à distinguer vos doigts quand vous tendiez la main, soufflaient toute la journée ; en été, la chaleur caniculaire est telle qu’elle laisse entrevoir le phénomène de la transpiration végétale ; et en hiver, le temps était sec et froid. »

 

En 1997, plusieurs années après l’installation des premiers migrants, comme nous l’avons indiqué précédemment, le revenu net par habitant ne s’élevait qu’à 500 yuans à Minning. La quantité de terres arables et d’eau disponibles n’était pas suffisante pour nourrir la quantité d’habitants : telle était la triste réalité à Minning en ces temps-là.

 

 

Bonne récolte des raisins à Minning

 

 

Le point de départ du développement industriel

 

1997, l’année de la création du village de Mingning, a marqué le point de départ de son développement industriel. L’année précédente, la première conférence conjointe Fujian-Ningxia, dans le cadre de leur collaboration dans la lutte contre la pauvreté, avait été organisée à Fuzhou, capitale du Fujian. Elle a abouti à la signature d’un accord de coopération, qui stipulait que le Fujian apporterait son aide au Ningxia à cet égard.

 

« En avril 1997, Xi Jinping, à l’époque alors secrétaire adjoint du Comité du Parti pour la province du Fujian, a dirigé la délégation du Parti et du gouvernement du Fujian, en visite au Ningxia. Ensemble, ils ont participé à la deuxième édition de cette conférence conjointe Fujian-Ningxia, où l’idée de bâtir le village de Minning a été avancée », raconte Wang Yongqiang, l’actuel chef du bourg de Minning.

 

Trois mois plus tard, le village de Minning a officiellement vu le jour. Les plans prévoyaient « la construction du village en deux ans ; la garantie des besoins essentiels (alimentaires et vestimentaires) en trois ans ; et l’enrichissement de la population et la formation d’une société de moyenne aisance en cinq ans ». Minning a commencé par entreprendre des grands travaux pour la conservation de l’eau, aménager les terres et mener un projet d’adduction des eaux du fleuve Jaune pour l’irrigation des cultures, puis a fini par développer des industries qui lui sont propres.

 

Le 7 décembre 2001, suite à l’approbation du gouvernement populaire de la région autonome hui du Ningxia, Minning a officiellement pris le statut de bourg, fruit de l’intégration entre le village de Minning et la zone de développement économique et technologique de Yuhai. Avec l’approfondissement continu des échanges entre le Ningxia et le Fujian, de plus en plus d’hommes d’affaires du Fujian sont venus à Minning, apportant avec eux fonds et technologies.

 

La culture des champignons est la première industrie distinctive qui a percé à Minning, grâce au soutien de la province du Fujian, puisque l’Université d’agriculture et de foresterie du Fujian a aidé Minning à installer une serre. En 2008, 148 foyers du bourg étaient impliqués dans le développement de cette filière, et les cultures de champignons s’y étendaient sur une superficie de 450 000 m2. Selon les statistiques, 500 tonnes de champignons frais étaient produits chaque année, représentant une valeur de plus de 2,5 millions de yuans.

 

Pourtant, cette industrie emblématique de Minning est soudainement entrée dans une dépression après 2008. Selon Wang Yongqiang, à ce moment-là, les migrants ont élargi aveuglément la production et sont moins intervenus pour prévenir les maladies, ce qui a conduit au déclin rapide de tout le secteur. La culture des champignons n’a commencé qu’à reprendre il y a deux ans, sous l’effet des nouvelles technologies introduites.

 

Bientôt, les habitants de Minning ont découvert que le désert de Gobi, en dépit de son sol ne convenant pas à la culture des céréales, présentaient des conditions uniques du climat et du sol adaptées à la culture du raisin, et même particulièrement propices à la culture des raisins de cuve. C’est l’autre industrie phare qui s’est développée à Minning.

 

Shao Qingsong, propriétaire du domaine Château Lilan, a vécu toute sa vie durant au Ningxia. En 2009, bien qu’il ne fût pas encore un fin connaisseur en vins, il a compris qu’il y avait une opportunité à saisir à Minning. « J’ai acheté auprès de l’Université d’agriculture et de foresterie du Nord-Ouest un manuel spécialisé sur le vin et je me suis formé en autodidacte à la production de vin, de la culture des vignes et à la fermentation du jus de raisins. »

 

Après plusieurs années de développement, l’industrie du vin a progressivement pris de l’ampleur à Minning. De nos jours, les Chinois surnomment ces vignobles au pied est des monts Helan, le « Bordeaux oriental ». 13 domaines ont déjà été construits à Minning, où la culture de raisins s’étend désormais sur une superficie de 62 000 mu (1 mu = 1/15 ha). 26 000 tonnes de vin sont produites chaque année, soit une valeur globale de 930 millions de yuans. Cette filière du vin a permis à un certain nombre d’agriculteurs de sortir de la pauvreté. En effet, les migrants qui se sont engagés dans ce secteur d’activité ont vu leurs revenus augmenter de plus de 3 000 yuans par an.

 

Outre la culture des raisins de cuve, l’élevage bovin de races à viande est également devenu une industrie majeure à Minning. Wang Ruigang, président de la société d’élevage bio Benwang, est l’un des premiers migrants arrivés à Minning en 1991, après avoir quitté son district natal de Xiji. Il était alors âgé de 20 ans. Comme il avait déjà enchaîné les petits boulots dans les grandes villes, il possédait pas mal de compétences et de contacts. Fort de son expérience, il a pris en charge l’organisation de l’exportation des services (transport, ingénierie et vente de matériaux de construction). Wang Ruigang s’est ainsi acquis la réputation, à Minning et dans les environs, de personnalité qui a habilement réussi à s’enrichir.

 

Il y a quelques années, Wang Ruigang, qui avait déjà engrangé un certain capital, s’est lancé dans l’élevage bovin destiné à la production de viande. Aujourd’hui, il détient un cheptel de plus de 2 000 têtes. Une réussite qui pourrait bien faire des émules, puisque de plus en plus de paysans, inspirés par Wang Ruigang, s’essaient à ce secteur d’activité.

 

De la pauvreté à l’enrichissement

 

En 2013, Minning s’est engagé dans la voie rapide du développement. En mai, la région autonome hui du Ningxia y a organisé une réunion soutenant ambition de faire de Minning un « bourg pilote en matière de coopération Fujian-Ningxia dans la réduction de la pauvreté chez les migrants ». Les objectifs suivants ont été fixés : « En un an, transformer le bourg dans une moindre mesure ; en trois ans, transformer le bourg dans une large mesure ; en cinq ans, faire du bourg une région de premier plan accédant à la société de moyenne aisance au même moment que Yinchuan. »

 

En août 2013, Liu Li, aux côtés d’une centaine d’autres habitants venus du village de Damaigou, dans le district de Longde enclavé dans les monts de Xihaigu, a déménagé dans le village de Yuanlong, sous la juridiction de Minning. C’est la troisième et dernière vague de migrants qui ont débarqué à Minning à ce jour.

 

Liu Li a vécu une dizaine d’années au village de Damaigou, dont elle déplore l’état : « Nous n’avions pas l’eau courante, ce qui était particulièrement gênant. Chaque jour à 3 h du matin, à tour de rôle, les villageois étaient contraints d’aller chercher de l’eau à un puits à plus d’un kilomètre. Pour un seau d’eau, il fallait patienter une demi-heure. »

 

Comparé à son village natal, les agriculteurs de Minning perçoivent des revenus supérieurs, provenant notamment du transfert des droits d’utilisation des terres et des dividendes associés. Au fur et à mesure que les divers projets ont été accomplis aux environs du bourg (notamment l’aménagement de cultures maraîchères, d’installations horticoles, de rizicultures bio, de vignobles), un grand nombre d’agriculteurs ont déposé leurs houes pour travailler en tant qu’employés industriels pour le compte d’une entreprise.

 

Liu Li, qui vient d’emménager à Minning, peut en témoigner : le gouvernement a octroyé à chaque foyer de migrants un deux-pièces construit en briques. Ces habitations sont reliées à la route goudronnée qui a été coulée dans le village, ainsi qu’à l’eau et à l’électricité. En outre, chaque logement est équipé d’articles ménagers de base (plaques à induction, par exemple), aucuns travaux de réparation à prévoir. En outre, le bourg abrite une école primaire. Liu Li est d’ailleurs bien contente que son fils de sept ans puisse aller en classe à deux pas de la maison.

 

Le lendemain de son déménagement, Liu Li a commencé un emploi à temps partiel, où sa mission était de planter des arbres. Elle gagnait 80 yuans par jour. Avec cette somme, elle avait assez pour nourrir sa famille, tout en économisant 60 yuans. « Il s’agit d’un travail à temps partiel, et pourtant, j’arrive à économiser de l’argent. Je me projette beaucoup plus ici que là où je vivais avant. »

 

Fin 2014, elle a travaillé pour un domaine, non loin de chez elle. Elle a commencé par arracher les mauvaises herbes parmi les vignes, puis a appris les techniques de production, passant opératrice, et enfin, chef de service. Liu Li a rapidement maîtrisé tout le processus, de la culture des vignes à la transformation du raisin en vin, et a fini par être promue responsable d’atelier.

 

Aujourd’hui, Liu Li reçoit un salaire annuel d’environ 100 000 yuans. En 2013, le revenu annuel disponible par habitant des agriculteurs de Minning a atteint 7 120 yuans, contre 4 685 yuans l’année précédente, soit une hausse de 34 % en seulement un an.

 

De l’aide à l’automonie

 

Aujourd’hui, les eaux du fleuve Jaune abreuvent le désert de Gobi et les terres nues d’autrefois se sont métamorphosées en oasis. Minning a déjà fait ses adieux au climat désertique de jadis. De nos jours, la valeur de l’ensemble des industries du bourg est de 3,2 milliards de yuans, soit 23,7 fois plus qu’il y a 20 ans.

 

Aujourd’hui, Minning est scindé en deux parties, l’ancien quartier et le nouveau quartier, par la route nationale 201. Le nouveau bourg de Minning s’étend à l’ouest de la route nationale 201. Des dizaines d’habitations imprégnées du style architectural du Fujian y sont en construction et à l’avenir, un centre de services d’affaires devrait y être établi pour concentrer les divers projets générateurs de revenus. En outre, la cité industrielle et le parc industriel pour la réduction de la pauvreté Fujian-Ningxia ont séduit un grand nombre d’entreprises qui s’y sont installées.

 

Cette année, Wang Ruigang a lancé un nouveau projet que nous allons détailler ci-dessous. Ils invitent les agriculteurs à acheter auprès de grandes entreprises d’élevage des vaches en gestation, puis à nourrir celles-ci jusqu’à ce que le veau naisse et grandissent six ou sept mois. En cas d’engraissement nécessaire, l’entreprise d’élevage, en vertu de l’accord signé entre les deux parties, rachète l’animal à un tarif de 5 % à 10 % supérieur au prix du marché et procède à l’engraissement jusqu’à ce que le bovin atteigne le poids fixé avant son abattage. Cette démarche a pour effet d’élargir la gamme d’activités d’élevage de l’entreprise, tout en augmentant les revenus des agriculteurs.

 

Sha Jinlong a pris une décision importante en mars dernier : il a démissionné de son poste et est reparti dans son village natal pour se lancer dans l’entrepreneuriat. Avec quelques amis du même âge que lui, il a fondé une entreprise de production de beurre de cuisson. L’essor de Minning a permis à de plus en plus de jeunes de partir étudier à l’étranger et de revenir chargés d’expériences nouvelles. Ils représentent aujourd’hui les forces endogènes favorisant le développement du bourg.

 

Pour Sha Jinlong, la construction et le développement de Minning ont résulté en réalité d’un projet à la fois de développement industriel et de réduction de la pauvreté industrielle. Par ailleurs, ils se sont caractérisés par la conversion du modèle de lutte contre la pauvreté, passant de « l’aide » à « l’autonomie ». Le nouveau modèle doit non seulement être accompagné de politiques et de financements, mais aussi être soutenu par les sciences et technologies, tout en étant tiré par le dynamisme de la jeunesse.

 

Fin 2017, 48 marques commercialisant divers produits agricoles étaient déjà déposées à Minning, dont cinq entreprises phares dans le domaine de l’industrialisation agricole dans la région autonome hui du Ningxia. Rien que sur l’année 2017, la valeur cumulée des projets industriels déployés à Minning s’élevait à 1,8 milliard de yuans. Ces bons chiffres démontrent que la lutte contre la pauvreté par le renforcement des forces endogènes offre un potentiel inépuisable.

 

« Comme Minning jouit d’un avantage géographique unique, la prochaine industrie à fort potentiel sera certainement le tourisme thématique. Minning prévoit dans un futur proche de faire jouer pleinement les avantages de la ceinture touristique à l’itinéraire ouest de Yinchuan et de la zone centrale du couloir touristique autour de la culture du raisin au pied est des monts Helan, afin de créer un paquet touristique intégrant “visites guidées, cueillette, divertissements et restauration” avec “respect de la nature, découverte de la production et loisirs” », conclut Wang Yongqiang.

 

 *PEI JIANFEI est journaliste pour The Beijing News.

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